Comment la Finlande a obtenu une qualification historique pour l'Euro 2020

Par Aurélien Macedo
7 min.
Finlande @Maxppp

Pour sa 33e campagne de qualification pour une Coupe du monde ou un Championnat d'Europe, la Finlande a étonné. Profitant d'un tirage au sort plutôt clément et en tirant le maximum de ses individualités, les Huuhkajat ont réussi à se qualifier pour l'Euro 2020 suite à un ultime succès contre le Liechtenstein (3-0). Retour sur une qualification historique pour le football finlandais.

Quand on pense à la place de la Finlande dans le sport, on pense tout d'abord au hockey sur glace avec une sélection qui est actuellement championne du monde en titre. On pense aussi aux sports automobiles avec des pilotes remarquables tels que Keke Rosberg, Mika Häkkinen, Kimi Räikkönen, ou plus récemment Valtteri Bottas. Le football arrive logiquement au second plan. Certes, la Finlande est le berceau de nombreux champions tels que Jari Litmanen (Ajax Amsterdam, FC Barcelone, Liverpool ...), Sami Hyypiä (Liverpool, Bayer Leverkusen ...) ou encore Mikael Forssell (Chelsea, Crystal Palace, Birmingham City ...), mais elle paie en grande partie le niveau de son championnat qui est 43e sur 55 au niveau européen. L'inexpérience de sa sélection joue également un rôle prépondérant. C'est simple, depuis les éliminatoires de la Coupe du monde 1938, la Finlande n'a jamais pu se qualifier pour une compétition majeure. Pourtant, elle a eu plusieurs opportunités comme en 2008 où elle a échoué à 3 points du Portugal. Finalement, il a fallu attendre sa 33e campagne pour voir les Hiboux Grands-Ducs (Huuhkajat) se qualifier pour un tournoi, l'Euro 2020.

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Pourtant, rien n'était gagné puisque la sélection restait sur de nombreuses déceptions. La fin de la génération dorée guidée par Sami Hyypiä et Jari Litmanen a permis à Roman Eremenko de prendre les clefs du jeu finlandais. Néanmoins, la transition a été compliquée et la Finlande n'a jamais vraiment semblé dans le coup malgré des éliminations pour 4 points lors des qualifications pour la Coupe du monde 2010 et pour l'Euro 2016. Pire, lors de la campagne en vue de la Coupe du monde 2018, les Finlandais ont terminé à une triste cinquième place d'un groupe où figurait néanmoins l'Islande, la Croatie, l'Ukraine et la Turquie. Des résultats qui pousseront rapidement au départ Hans Backe. Le technicien suédois laissera place en décembre 2016 à celui qui était alors son adjoint, Markku Kanerva. Un choix loin d'être surprenant puisqu'il avait déjà assuré deux intérims en 2011 puis en 2015 à la tête de la sélection finlandaise. Dans l'urgence, il décide de construire sur un 4-4-2 à plat et permet de sauver l'honneur après un début de campagne très décevant. Après 4 journées, la Finlande comptait qu'un point. Les premiers pas seront dans cette lignée avec des défaites contre la Turquie (2-0) et l'Ukraine (2-1). Néanmoins des progrès se ressentent dans le jeu et cela se confirmera.

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Une lente montée en puissance

La fin de campagne sera bien plus maîtrisée, car la Finlande ne perdra plus. Bien plus solides et mieux organisés, les Huujkajat vont enfin trouver la bonne formule comme nous l'explique Ari Virtanen, journaliste pour Helsingin Sanomat : «le développement actuel a débuté à l'automne 2017. La Finlande a battu l'Islande et le Kosovo et a fait match nul en Croatie. À ce moment-là, il était évident que quelque chose de bien était en train de se construire.» Cela se confirmera en Ligue des Nations. Héritant d'un groupe abordable, mais où elle n'était pas favorite, la Finlande a réussi à terminer devant la Hongrie, la Grèce et l'Estonie avec pas moins de 4 victoires pour 2 défaites. La raison de ces progrès et avant tout collective souligne Ari Virtanen : «C’est la partie amusante de ce succès actuel. La Finlande avait effectivement de meilleurs joueurs et une meilleure équipe sur le papier entre 2008 et 2017 par rapport celle actuelle. Il est difficile de dire ce qui manquait alors. C’est plus facile de dire ce qui est bon maintenant. L’équipe fonctionne comme une unité bien regroupée actuellement, chacun accomplit bien ses propres tâches.»

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«La Finlande défend mieux et a développé sa possession du ballon tout en éliminant les avantages de son adversaire. Il (Markku Kanerva, ndlr) a été en mesure de développer avec ses adjoints une bonne stratégie solide pour cette équipe et ils ont également réussi avec leurs tactiques de jeu. Comme je l'ai dit plus tôt, ils ont été en mesure de désarmer leurs adversaires» poursuit-il. La Finlande a donc misé sur un groupe bien organisé tout en utilisant les qualités de ses principales individualités. Dans les buts, Lukas Hradecky (Bayer Leverkusen) est un dernier rempart de niveau européen et sa doublure Jesse Joronen (Brescia) est capable d'assurer l'intérim en cas d'absence. Au milieu de terrain, la sentinelle Glen Kamara (Glasgow Rangers) aborde de la solidité dans les phases défensives. Pour autant, il apporte beaucoup en phase de transition. Dans les couloirs, Robin Lod (Minnesota United), Pyry Soiri (Esbjerg) et Lassi Lappalainen (Impact Montréal) apportent la virtuosité et la percussion qui manquait lors des précédentes campagnes. Enfin, l'attaque dépend surtout de Teemu Pukki. L'attaquant de Norwich City qui a réalisé un très bon début de saison en Premier League a tout simplement inscrit 9 buts lors des qualifications pour l'Euro 2020. Si la Finlande se base avant tout sur un bloc solide, cette équipe n'est pas forcément que défensive comme nous l'explique Ari Virtanen.

Un collectif bien huilé

«Oui, les bonnes performances de cette équipe reposent sur la défense. Mais je devrais également souligner qu’ils ne se contentent de rester avec un bloc bas. La Finlande a pu développer un pressing intense. Et cette équipe défend dès le départ avec ses attaquants, Teemu Pukki et tous ses partenaires. Ils ont été en mesure de réduire au cours des deux dernières années le temps passé par l'adversaire dans le dernier tiers ou la surface de réparation.» Un style de jeu qui a donc permis au Huuhkajat de faire sensation dans son groupe de qualification. Malgré une défaite initiale contre l'Italie (2-0), la sélection a su rapidement réagir en s'offrant l'Arménie (2-0), la Bosnie-Herzégovine (2-0), le Liechtenstein (2-0) et la Grèce (1-0). Quatre succès qui permettront à la Finlande de prendre de l'avance sur la concurrence en sécurisant rapidement sa deuxième place. Certes, deux revers contre l'Italie (2-1) et surtout la Bosnie-Herzégovine (4-1) suivront, mais la Finlande a réussi à rapidement inverser la tendance en dominant facilement l'Arménie (3-0) et le Liechtenstein (3-0).

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La défense finlandaise a fait des miracles avec 8 buts encaissés en 9 matches. Surtout que toutes les réalisations adverses ont eu lieu lors des trois défaites des Huuhkajat. Ces derniers s'offrant au passage 6 clean-sheets. Une qualification qui ne souffre donc d'aucune contestation tant la Finlande a été la formation la plus régulière de son groupe derrière une Italie qui a fait carton plein (27 points sur 27 possibles). «Les défaites contre l'Italie étaient évidemment probables, mais lors du match à domicile (2-1), le résultat était un peu amer. L'Italie a obtenu un penalty qui n'aurait pas dû être donné. Le match à l'extérieur en Bosnie a été difficile, mais ce fut également l'une des meilleures performances de la Bosnie ces dernières années. La Finlande était bien préparée pour cette qualification, nettement plus que ses principaux adversaires, la Bosnie et la Grèce. Donc, dans ce sens, la qualification est bien méritée. Il reste à voir si la Finlande peut être une surprise lors de l'Euro» se remémore Ari Virtanen.

Difficile quand on voit l'évolution de la sélection depuis trois ans de ne pas penser au parcours de l'Islande. Depuis les qualifications de la Coupe du monde 2014, les Strákarnir okkar ont progressé à une vitesse folle. Quart de finalistes de l'Euro 2016, ils ont également participé à la Coupe du monde en 2018. Le style également se rapproche avec dans les deux cas un 4-4-2 à plat basé sur une défense solide et un pressing assez intense. Pour autant, quelques différences existent entre les deux équipes. «Il y a des similitudes si vous regardez l'historique de carrière des joueurs. Mais la Finlande joue d'une manière légèrement différente. Le jeu n'est pas aussi direct que celui de l'Islande» nous explique Ari Virtanen. Lundi, la Finlande terminera sa phase de qualification par un match anecdotique contre la Grèce. Un premier pas pour préparer un événement qui fera déjà date dans l'histoire du football finlandais.

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