Entretien avec... Louis Saha : « L'EdF n'aura plus jamais les leaders passés »

Par Khaled Karouri
6 min.
Louis Saha dévoile son onze de rêve @Maxppp

Retraité depuis peu, après avoir tout connu, notamment à Manchester United ou en équipe de France, Louis Saha démarre peu à peu sa nouvelle vie. Pour Foot Mercato, l'ancien attaquant évoque sa reconversion, les Bleus, et jette un regard lucide sur sa carrière.

**Foot Mercato : Vous avez pris votre retraite cet été. Que devenez-vous ?

Louis Saha :** Je bosse beaucoup en tant qu'agent de joueurs. J'apprends un nouveau métier (rires), je me diversifie un peu, je regarde les matches, je suis les nouveaux talents qui arrivent.

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**FM : Endosser ce costume d'agent, est-ce quelque chose que vous aviez en tête depuis longtemps ?

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LS :** En fait, c'est plus une opportunité qu'on m'a donné. Le fait de travailler en France, de continuer dans le foot, de voir ce métier sous un angle différent, c'est enrichissant. J'apprends, je m'informe, même si ce n'est pas tout à fait ce que je croyais. Quand on est joueur, on pense que le métier d'agent est simple, qu'il suffit de donner des coups de fil, mais c'est plus complexe que ça.

**FM : Qu'avez-vous donc appris depuis vos débuts dans ce métier ?

LS :** C'est beaucoup de déplacements, beaucoup d'appels, d'administration, de droit, d'affaires qui finissent avec les avocats... Tous ces éléments ne sont pas toujours plaisants, on préfère accompagner les joueurs sur le terrain au jour le jour. C'est beaucoup de boulot, mais j'apprends plein de choses donc c'est cool.

**FM : Qu'est-ce qui vous a mis définitivement sur cette voie ?

LS :** Ce qui m'a mis sur la voie, c'est le fait que je pensais qu'il était temps pour moi d'arrêter ma carrière de football professionnel. Je devais trouver une activité adéquate, et j'ai envie de suivre les joueurs quotidiennement, de leur apporter quelques chose de différent par rapport à un agent traditionnel. Comme toute fonction, il y a des choses plaisantes à faire, d'autres un peu moins.

**FM : Quel bilan faîtes-vous de votre carrière en tant que footballeur professionnel ?

LS :** Je suis satisfait. J'ai loupé pas mal de choses, j'ai vécu des moments difficiles avec les blessures, mais j'ai connu de grandes émotions. Je suis content d'avoir planté des buts (rires), d'avoir gagné des trophées, ce qui est le but d'une carrière. J'ai pu vivre des phases finales de Ligue des Champions ou de Coupe du monde, je suis satisfait.

**FM : Quels sont vos meilleurs souvenirs ?

LS :** J'en ai trop, c'est compliqué d'en dégager. Mais c'est peut-être plus de voir l'émotion dans les yeux des personnes que j'aime, c'est là qu'on comprend qu'on réalise quelque chose de sympa. C'est ça, les grands souvenirs.

**FM : Vous avez pu évoluer à Manchester United. Quel regard portez-vous sur votre parcours chez les Red Devils ?

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LS :** C'est à l'image de tout ce que j'ai pu vivre dans ma carrière de footballeur, avec des moments intenses et d'autres plus difficiles, que ce soit dans la douleur d'une blessure, ou des moments sans matches. Mais arriver à ce niveau-là est extraordinaire, j'ai pu côtoyer de grands joueurs, affronter de grandes équipes. Il n'y a rien de plus jouissif que de faire ça malgré les blessures qui m'ont contraint de ne pas jouer. Mon bilan mancunien est donc plus que positif.

**FM : Votre carrière a malheureusement été marquée par les blessures. Cela vous laisse-t-il de la frustration ?

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LS :** Oui, ça me laisse de la frustration. Je n'ai pas eu la chance d'avoir la carrière de Cristiano ou Messi, qui eux finissent tout le temps tout en haut, à survoler tout le monde. Mais je suis assez content du fait que, malgré les blessures, j'ai pu faire pas mal de matches.

**FM : Durant la fin de votre carrière, un retour en France a été évoqué, à Nice plus précisément. Qu'en était-il ?

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LS :** C'est vrai que j'étais dans une période de réflexion, je me maintenais physiquement, en voulant voir où j'en étais mentalement. J’attendais, il y a eu des rumeurs avec Nice, mais pas de contacts concrets.

**FM : Metz aura une place à part dans votre carrière. Le club revient bien en Ligue 2, avez-vous envie de vous impliquer là-bas d'une manière ou d'une autre ?

LS :** Oui, indirectement. C'est un club qui m'a propulsé, qui m'a amené à voir les choses différemment, car avant j'étais peut-être un peu naïf et nonchalant. C'est une région du travail et du travail bien fait. Si projet il y a et que je peux aider, je regarderai. Et même en tant qu'agent, je peux essayer de placer des joueurs (rires).

**FM : Vous avez eu la chance de connaitre l'équipe de France. Les Bleus se sont qualifiés pour le Mondial en battant l'Ukraine en barrages. Qu'avez-vous pensé de leur parcours ?

LS :** On est tombé contre l'Espagne, donc dans un groupe forcément difficile, car on savait qu'on risquait de finir deuxième. On est en reconstruction, il faut reconstruire l'image du groupe en ayant des performances, c'est difficile. On demande aux joueurs d'être authentiques, de ne pas être arrogants. Mais on le voit, quand ils se sentent bien, ils sont capable de faire de grandes choses. Après, quand ils sont sous pression, avec un manque de confiance, c'est une équipe qui se cherche. Contre l'Ukraine, j'ai trouvé une équipe libérée car ils n'avaient plus rien à perdre. Ce qui me désole, c'est qu'on les a aidés parce qu'ils étaient à terre. En France, on attend de les voir à terre pour se dire qu'on doit être solidaire. On s'est mobilisés pour nos joueurs, mais seulement car ils étaient dos au mur. C'est dommage, on devrait être derrière eux tout le temps.

**FM : Comprenez-vous malgré tout les critiques autour des Bleus ?

LS :** Oui, il est possible de critiquer. Mais quand on n'est pas dans le cocon du footballeur, on critique facilement. Moi, je connais ce milieu, et je peux comprendre leurs erreurs. L'erreur est humaine, ça reste des hommes qui ont une fragilité causée par le métier. Aucun groupe ne sera parfait, hormis dans la victoire. La preuve, on oublie déjà un peu les histoires de comportement, de couleur, tout le monde est content pour Sakho. On a une équipe de France qui n'aura plus jamais les leaders passés. On a des jeunes, à qui on demande d'être matures comme l'ancienne génération, alors que c'est impossible.

**FM : Sentez-vous qu'un groupe est malgré tout né avec cette victoire peut-être fondatrice ?

LS :** Oui, je le pense. Au fur et à mesure, les matches donnaient des signes positifs, même si on a un groupe avec 80% de joueurs d'instinct, alors qu'avant on avait peut-être des joueurs moins talentueux, mais plus forts mentalement, tactiquement, avec un esprit d'équipe, alors qu'aujourd'hui on a surtout des individualités.

**FM : Pensez-vous les Bleus capables de faire un coup au Mondial ?

LS :** Ce sera compliqué. Même si un tel match est révélateur d'une force mentale, il ne faut avoir aucune lacune tactique et physique dans un tel tournoi. Or, avec un problème de confiance, c'est compliqué. Mais ça peut être fondateur pour l'Euro.

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