Wahbi Khazri, un Aigle en plein essor

Par Dahbia Hattabi
8 min.
Tunisie Wahbi Khazri @Maxppp

La Coupe d'Afrique des Nations démarre le 18 janvier prochain pour la Tunisie. Des Aigles de Carthage aux griffes acérées et prêts à en découdre à l'image de Wahbi Khazri. Le natif d'Ajaccio sera l'un des éléments à suivre dans la sélection de Georges Leekens. Foot Mercato vous propose de revenir sur le parcours de ce surdoué du ballon rond. Portrait.

Une vision de jeu perçante, un talent supérieur, pas de doutes Wahbi Khazri possède tous les atouts d'un aigle. Un Aigle de Carthage dont les «qualités premières sont la technique, la frappe de balle, la puissance et son pied droit». Un avis qui compte forcément plus que les autres puisqu'il s'agit de celui de son grand frère Foued, lui-même footballeur à l'US Colomiers en National. En effet, chez les Khazri, le football est surtout et avant tout une histoire de famille. Et Wahbi ne pouvait pas y échapper : «Ca s'est fait tout seul par rapport au fait que notre père soit un grand passionné de football. Mon grand frère (Nabil, Ndlr) et moi-même avons commencé très tôt. C'est venu automatiquement pour Wahbi. Il est né dedans». Précoce, ce fan de Zinedine Zidane a très vite enchaîné gestes techniques et buts sur l'Ile de Beauté. «Il n'a fait que trois club dans sa vie. Il a commencé à 3 ans et demi - 4 ans à la JS Ajaccio. C'est un club de quartier. Il s'est toujours démarqué des autres. On a décelé très tôt qu'il avait le potentiel pour pouvoir percer dans le foot».

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D'ailleurs, il a très vite tapé dans l’œil des recruteurs. «Lorsqu'il était benjamin, il y avait les centres de formation de Bastia et de l'AC Ajaccio qui le voulaient, explique son frère. Comme on se disait que le centre de formation de Bastia était plus réputé et avait sorti beaucoup de joueurs, on l'a mis là-bas». Au Sporting, Wahbi Khazri a très vite convaincu. À commencer par Didier Santini, son premier coach en 14 ans Fédéraux. «Le club l'avait vu jouer pas mal de fois. À la JSA, il faisait tout sur le terrain. Même s'il y avait un pénalty, il pouvait limite jouer gardien (rires). Quand il est arrivé, il était un "enfant roi" de son club. Au départ, il a fallu lui faire comprendre qu'il était en centre de formation, que c'était un football différent, qu'il n'y avait pas que lui, qu'il y avait beaucoup de monde autour (...) C'est un gars adorable. Un joueur altruiste et intelligent. Moi, je n'ai jamais eu aucun problème avec lui. Le seul problème, c'était de lui faire comprendre que ce n'était plus la star de l'équipe et qu'il fallait bosser. On attendait tellement de lui. On a vu ses qualités. Mais il ne fallait pas lui faire de cadeaux».

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Du nid bastiais à l'envol à Bordeaux

Des efforts qui ont payé. «Il a bien travaillé physiquement, tactiquement. Comme Foued, il a un pied droit extraordinaire. Wahbi très jeune avait déjà des facultés de contrôle et d'accélération sur une dizaine de mètres. Il mettait les coups de pieds arrêtés où on voulait. Il a eu une marge de progression chaque année très impressionnante. Il a toujours bien bossé. Il n'a fait qu'évoluer. Il a aussi fait évoluer sa façon de jouer. Il a pris beaucoup au niveau physique et athlétique». Une belle progression que le joueur doit à son travail et son talent selon son frère : «Il a toujours été surclassé. Il était 14 ans Fédéraux, il jouait déjà avec les 16 ans Nationaux, etc... Il a bien évolué. C'est un club familial et comme il marche pas mal à l'affectif, il s'y sentait bien». Un vrai nid où petit à petit il a gravi les échelons. «Il a tout connu à Bastia, précise Foued Khazri. Ses premiers matches en pros, c'était en L2. Il a fait les 13 derniers matches en L2. Ensuite, la saison d'après ils étaient encore en L2. Il a fait la saison complète. Et là, ils sont descendus en National. Ils ont été rétrogradé par la DNCG en CFA du coup ils ont fini champions en National. Ils sont montés en L2 puis en L1. Il a fait deux années en L1 avec Bastia». À l'été 2014, l'Aigle a pris son envol. Il a quitté sa Corse natale. Direction le continent et Bordeaux. Un choix qui est apparu comme une évidence pour son frère : «Bordeaux est un club qui lui convenait. C'est un club qui ne joue pas le même rôle que Bastia. À Bastia, il était souvent habitué à jouer le maintien. Bordeaux est un club qui vise plus haut et joue souvent la première partie de tableau voire l'Europe. C'est un challenge pour lui. Au départ, quand le coach a essayé de le faire venir, il lui a de suite parlé de football. Comme Wahbi est quelqu'un qui aime le beau jeu, ça lui a plu de suite».

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Auteur de 5 buts et de 2 passes décisives en dix-huit matches de Ligue 1 cette saison, le Tunisien est de plus en plus influent sur le jeu bordelais. Une recrue qui apporte énormément comme nous l'explique Frédéric Laharie, journaliste à Sud-Ouest et spécialiste des Girondins : «La première chose que l'on peut noter, c'est qu'il apporte de l'adresse devant le but. C'est quelqu'un qui sent bien les coups. Il est adroit notamment sur les coups de pieds arrêtés. Ce sont vraiment deux secteurs importants qui manquaient à Bordeaux. Il est souvent bien placé dans la surface ce qui lui a permis de marquer pas mal de buts. Il est vrai qu'en début de saison il avait un peu de mal à participer au jeu. On le voyait peu dans le circuit du ballon. C'était le cas dans les deux-trois premiers mois. Là, depuis deux mois il y a eu une nette amélioration. Il est mieux dans le collectif, il a fait des passes décisives. On sent qu'il s'est vraiment bien intégré». Parti à la CAN, Khazri, qui avait commencé à prendre ses marques, va manquer à l'équipe chapeautée par Willy Sagnol : «Son absence est préjudiciable. Il est vrai que Wahbi manque beaucoup dans la percussion offensive et dans la présence dans la surface aussi. Si il y a un ballon qui traîne il est souvent bien placé pour le reprendre. Il manque aussi sur les coups de pieds arrêtés. Même s'il n'a pas encore marqué sur coup franc avec Bordeaux, c'est un très bon tireur de coups francs. Je sais qu'il a très envie de marquer son premier coup franc avec Bordeaux. C'est un manque évident. Ces deux derniers mois, il était vraiment devenu décisif», poursuite Laharie.

100% Aigle de Carthage

Après une cape avec les U20 Tunisiens et l’Équipe de France U21, Wahbi Khazri a très vite pris la décision de choisir la sélection tunisienne en 2012. Un choix du cœur pour son frère : «Wahbi est amoureux de son pays. C'est une très grande fierté pour lui d'y être. Que ce soit cette année ou celles à venir, il a hâte de participer à la CAN». Une Coupe d'Afrique des Nations où il sera forcément très attendu. Ses coéquipiers comptent sur lui à l'image de Syam Ben Youssef. «Ça fait du bien d'avoir des joueurs tunisiens qui évoluent au haut niveau et qui nous aident. Ça remonte la valeur du groupe. On attend de lui qu'il nous mette des coup francs à chaque match. C'est un joueur offensif donc on attend des passes et des buts de sa part. Après leader je ne sais pas. Autour de lui il y a d'autres joueurs très talentueux». On peut évidemment citer des éléments comme Yassine Chikhaoui. Mais le natif d'Ajaccio aura lui aussi son mot à dire. «Il apporte de la fraîcheur, explique Foued Khazri. Les années précédentes, il est vrai que la Tunisie avait un groupe plutôt vieillissant. La moyenne d'âge là est il me semble de 24 ans. Il apporte cette fraîcheur et surtout sur les coups de pied arrêtés, sachant qu'il a un super pied droit, on sait que le football maintenant se joue souvent sur les phases arrêtées. Il y contribue énormément».

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D'ailleurs, Wahbi Khazri s'est illustré dans ce domaine il y a quelques jours en amical face à l'Algérie (1-1, Ndlr). Outre ses qualités sportives, le Bordelais apporte aussi ses qualités humaines au groupe comme nous l'explique Syam Ben Youssef : «C'est un ami. J'ai été formé avec lui à Bastia. J'ai joué 4 ans avec lui. On s'est retrouvé en sélection. Je l'apprécie beaucoup. Il a de bons délires. Il est simple. Très simple. Il est bien encadré et stable». Une maturité qui est d'autant plus présente aujourd'hui chez ce jeune papa : «Je le trouve très mûr pour son âge contrairement à d'autres joueurs, précise son frère. Un peu trop d'ailleurs pour moi (rires). C'est quelqu'un de discret, avenant, facile à vivre et toujours souriant. Après il est vrai qu'il n'aime pas se faire remarquer. Il préfère se faire remarquer sur le terrain et non dans des cas extra sportifs». Un homme et un footballeur accompli. De quoi rendre fiers ses proches :«J'ai de la fierté. Ça fait toujours plaisir sachant que je l'ai aidé à taper ses premiers ballons, je l'ai toujours suivi et fait en sorte qu'il soit le mieux possible même s'il a la tête sur les épaules. Je le conseille et je suis admiratif à la fois. Je vais toujours être franc avec lui. Demain il est mauvais, je lui dirais tu as été mauvais. S'il est bon, je lui dirais aussi. J'agis comme un grand frère». Bien entouré, Wahbi Khazri a tous les atouts de son côtés pour réussir en club et avec la Tunisie. Des Aigles avec lesquels il espère voler sans encombre vers la CAN 2015...

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