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Pourquoi Lionel Messi est repassé devant Cristiano Ronaldo

Par Alexis Pereira - Dahbia Hattabi
7 min.
Real Madrid CF @Maxppp

À quelques heures du tant attendu Clasico entre le FC Barcelone et le Real Madrid (28e journée de Liga), Cristiano Ronaldo et Lionel Messi ont vu leurs courbes de forme respectives s'inverser. Décryptage.

Le Clasico arrive à grands pas et, forcément, les deux stars Cristiano Ronaldo et Lionel Messi sont attendues. Pour le n° 10 du FC Barcelone, ce rendez-vous au sommet semble tomber au meilleur moment. La Pulga tient en effet une forme exceptionnelle, sa dernière démonstration, mercredi, contre Manchester City (1-0, 8e de finale retour de Ligue des Champions), a encore mis tout le monde d'accord. En 2015, ses statistiques sont en effet stratosphériques. En 18 matches toutes compétitions confondues, il a inscrit 20 buts et délivré 11 passes décisives. À titre de comparaison, sur la première partie de la saison, il comptait 23 réalisations et 9 offrandes. Son rythme est donc très élevé, son coup d'éclat à Eibar (0-2, 27e journée de Liga) - une course de quarante mètres avec quatre adversaires laissés sur la route en une feinte, un double contact, une accélération et un petit pont - en est le symbole. «Il y a beaucoup de journalistes espagnols qui pensent que ce Messi est le meilleur Messi que l'on n'ait jamais vu. Il dribble, participe au jeu, donne des passes décisives, marque», nous a confié Pepe Gil-vernet, journaliste au Periódico de Catalunya avant de poursuivre.

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«C'est le Messi le plus complet jamais vu. Messi est, par-dessus tout, un compétiteur. L'année dernière, il n'a rien gagné et on voit qu'il l'a en travers de la gorge. Il a rarement été décisif avec le Barça et l'Argentine l'année dernière et il veut se racheter. C'est pour ça qu'on le voit jouer chaque match à 100%, ce qu'on ne voyait pas toujours la saison dernière», a-t-il ajouté. Une thèse validée par Javier Gomez, journaliste pour La Sexta et spécialiste du football espagnol. «En ce moment, il a ajouté de l'électricité à son jeu. Il est un poil plus vif, un poil plus impliqué, un poil plus collectif. Il affiche un niveau d'implication que l'on n'avait pas vu depuis l'époque Pep Guardiola. Il est capable d'atteindre un niveau stellaire lorsqu'il met tous ces ingrédients de son côté», a-t-il souligné. Mais qu'est-ce qui a donc changé depuis le début de l'année ? D'abord, il a eu le temps de digérer physiquement et psychologiquement la cruelle désillusion de la finale du Mondial perdue au Brésil avec l'Albiceleste devant l'Allemagne (1-0). De régler, aussi, ses problèmes avec le fisc espagnol qui l'avaient un temps perturbé. Luis Enrique, avec qui il n'a pas spécialement d'affinités, est toujours bien présent sur le banc de touche du Barça. Le style de l'équipe n'a pas franchement été révolutionné, même si l'adaptation progressive de Luis Suarez et la confirmation de Neymar peuvent expliquer une plus grande liberté pour le natif de Rosario dans les défenses adverses.

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«Le Barça de Luis Enrique n'a rien à voir avec celui de Tata Martino. Messi est accompagné de deux cracks qui jouent également à leur meilleur niveau et il en profite. Messi sent désormais qu'il a une équipe forte autour de lui et que certains de ses partenaires peuvent même se hisser à son niveau», confirme Gil-vernet. Aussi, l'Argentin, s'il est mesuré dans ses efforts défensifs, paraît, il est vrai, plus léger en attaque, comme s'il s'était libéré d'un poids. Son repositionnement y est pour beaucoup. «Depuis quatre saisons, Messi jouait en faux n° 9. Beaucoup de rivaux avaient appris à le neutraliser et Messi avait du mal à faire les différences. Mais Luis Enrique a remis Messi à droite, avec beaucoup de champ devant lui et la possibilité de donner des passes de buts en profitant des appels de Suarez et Neymar. Ce simple repositionnement fait que Messi est redevenu difficile à lire pour les adversaires du Barça. Messi peut, dans cette position, dribbler, offrir des passes, se faire oublier et il est donc beaucoup plus dur à prendre pour les défenses», a lâché Gil-vernet. Mais ce n'est pas tout. On se rappelle qu'au cœur de l'automne, pour mettre un terme aux rumeurs au sujet de son avenir et de son influence sur le club, il avait dû pousser un coup de gueule au micro de Barça TV.

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Messi a su se remotiver, l'esprit de CR7 est pollué

«Je profite de ma présence ici pour réagir et dire ce qui est la vérité. Parce que j'ai entendu beaucoup de choses (…). J'en ai marre d'écouter toutes ces choses sur moi. On me décrit comme quelqu'un qui manœuvre le club. Je n'ai pas demandé à virer notre entraîneur. Je ne prends pas de décisions et je ne demande pas qu'on en prenne. Je n'ai rien exigé pour rester non plus. Tout simplement parce que je n'ai pas l'intention de m'en aller. J'ai aussi entendu que mon père avait discuté avec Chelsea ou Manchester City, mais ce ne sont que des mensonges. On doit être plus unis que jamais», avait-il alors lâché. Un discours franc, direct et fédérateur. Depuis, tout le club - du président Josep Maria Bartomeu aux joueurs, tels qu'Ivan Rakitic récemment, en passant par son coach - a multiplié les déclarations pour encenser le jeune homme et dire à quel point il était important. « Leo Messi est ravi d’être à Barcelone. C’est un Catalan de plus. Nous avons Messi pour plusieurs années et nous espérons qu’il raccrochera les crampons ici », expliquait il y a encore quelques jours Bartomeu au micro de la radio espagnole RNE. De telles déclarations, Cristiano Ronaldo aimerait bien en entendre de la part du Real, à en croire Mundo Deportivo. Le Portugais, qui marque en effet le pas depuis l'obtention de son FIFA Ballon d'Or 2014 en janvier, se verrait bien être rassuré publiquement par sa direction.

Ses performances, si elles restent bien évidemment correctes, ne sont plus aussi impressionnantes. CR7 n'a ainsi marqué "que" huit buts en quatorze apparitions toutes compétitions confondues cette année. «Si on réfléchit bien, c'est depuis son cri lors du gala de remise du Ballon d'Or que Cristiano Ronaldo a baissé le pied», nous a confié Javier Gomez. Un coup de moins bien qui coïncide avec les difficultés collectives merengues. Mais plus que sa réussite face aux buts adverses, c'est son comportement qui interpelle. Il se prend de plus en plus souvent le bec avec ses partenaires et a l'air irritable. «La communication avec Bale n'est plus des meilleures. Et les gens à Madrid commencent à être un peu las des signes d'agacement de Cristiano envers ses partenaires. Baisser les bras, engueuler tout le monde : des choses qu'il ne faisait plus dernièrement...», a indiqué Javier Gomez. Tout le monde se souvient par exemple de son coup de sang et de son expulsion sur la pelouse de Cordoba (1-2, 20e journée de Liga) pour deux mauvais gestes sur Edimar et Crespo. S'il connaît traditionnellement un petit creux après chacun de ses Ballons d'Or, le natif de Funchal a aussi vu resurgir récemment ses problèmes au genou, qui l'avaient déjà handicapé en fin de saison dernière et durant le Mondial. Autant de raisons qui expliquent que le Lusitanien affiche ces derniers temps une mine désabusée.

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Les remous de sa vie personnelle seraient également en question. «Il est très tendu à cause de sa rupture avec Irina Shayk. Cela a une influence sur sa vie, comme chez n'importe qui. Il en a pas mal souffert d'après ce qu'on m'a dit», a assuré Gomez. Son regard noir, à l'issue du 8e de finale retour de Ligue des Champions perdu contre Schalke 04 (3-4), est encore dans toutes les mémoires. Il ne supporterait plus les critiques du public du Santiago Bernabeu qu'il jugerait excessives. Les socios, aussi prompts à faire qu'à défaire leurs idoles, lui tiennent sans doute encore rigueur de sa fête organisée pour son 30e anniversaire quelques heures seulement après la lourde défaite concédée par le Real sur la pelouse du rival local, l'Atlético Madrid (4-0, 22e journée de Liga). «Il ne comprend pas pourquoi tout le monde s'intéresse à son anniversaire. Il réagit très mal à cette situation», ajoute Gomez. Malgré tout, il avait présenté ses excuses, en interne, au président Florentino Pérez notamment. « Nous n’allons pas vous faire échouer. Nous allons nous battre pour les deux titres encore en jeu. Vous pouvez compter sur nous », avait-il lâché, au centre d'entraînement de Valdebebas. À un point du Barça en Liga et toujours en course en Ligue des Champions, il peut encore tenir sa promesse. Il faudra sans doute pour cela que sa courbe de forme repasse au-dessus de celle de Lionel Messi, ou du moins s'en rapproche. Quelle meilleure occasion que le Clasico pour initier le rebond ? Rendez-vous dimanche, sur la pelouse du Camp Nou.

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