Entretien avec… Jérôme Alonzo : « J’aurais choisi Douchez mais Sirigu fait le boulot »

Par Aurélien Léger-Moëc
7 min.
Le franc-parler d'Alonzo fait toujours merveille @Maxppp

Nice, Marseille, Saint-Étienne, Paris et Nantes. Joueur, Jérôme Alonzo a traversé plusieurs places fortes du football hexagonal. Aujourd’hui consultant pour plusieurs chaînes de télévision et fondateur du magazine Surface, il est un observateur privilégié de la Ligue 1. Pour Foot Mercato, il s’est exprimé sur la concurrence entre Douchez et Sirigu, mais aussi sur sa reconversion réussie.

FM : Tout d’abord, comment allez-vous ?

Jérôme Alonzo : Super bien, en pleine forme !

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FM : Forcément, vous êtes bien placé pour évoquer la concurrence entre Salvatore Sirigu et Nicolas Douchez au Paris Saint-Germain. Quel est votre avis ?

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JA : Il y a deux solutions quand tu es coach. Tu as celle où tu as deux numéros 1 ce qui est le cas au PSG. Ou tu as l’autre solution, de l’OM ou de l’OL, avec un numéro 1 historique et une super doublure. Moi ce que je préconise, ce que je préfère si je deviens entraîneur, je ne mettrais pas mes deux gardiens en concurrence. J’aurais un Vercoutre ou un Bracigliano, un mec qui est là pour faire le job en cas de coup dur et qui est un super mec de vestiaire. Ça c’est ma philosophie. Maintenant, le cas du PSG est à part, puisque Douchez devait être numéro 1 et le jeune Aréola numéro 2. Et puis les Qataris ont rajouté Sirigu dans le package. Je ne cache pas qu’au départ, j’étais très sceptique, en tant que supporter du PSG. Bon, à voir. Au début, je ne suis pas fan.

FM : Pour quelles raisons ?

JA : Surtout, il ne sortait pas. Il reste scotché sur sa ligne. Et puis un jour j’ai parlé avec Youri Djorkaeff et il m’a dit : "tu sais en Italie, les gardiens ne sortent pas de toute façon, c’est leur culture". Sauf qu’en France, on va le leur reprocher. Mais pour le moment, Sirigu me bluffe. Car c’est vrai que sur sa ligne, il est largement au-dessus de la moyenne. J’aurais personnellement choisi Nico Douchez. C’est mon avis personnel. Mais Sirigu fait le boulot.

FM : Est-ce que les conditions posées par Sirigu pour venir au PSG vous paraissent normales ou déplacées ?

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JA : Jusque-là , il n’y a rien d’irrespectueux. À partir du moment où Antoine a eu du mal à fixer la hiérarchie et que Nico est blessé et Salvatore est bon, il n’a aucune raison de changer. Et Dieu sait que je suis pote avec Nico ! Pour le moment, l’attitude de Sirigu est parfaite. Il ferme sa gueule et marque des points. C’est parfait.

FM : Est-ce que la bonne entente entre deux gardiens en dehors du terrain est primordiale pour que la concurrence se passe sans heurts ?

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JA : La bonne entente est primordiale. Si un jour, je ne le souhaite pas, ce n’est pas le cas au PSG, ce sera un incendie qui pourra se propager à tout le vestiaire.

FM : Lorsque vous étiez au PSG, on a souvent loué votre entente cordiale avec Letizi.

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JA : (il coupe) Moi avec Letizi ? C’était à part. On se connaissait depuis 20 ans. J’ai ma première photo avec Lionel en 1984, à Nice ! Il y avait un degré de connaissance de l’autre… Moi j’ai joué parce que Lionel s’était blessé, c’était normal. J’en ai profité, j’ai été bon, il n’y avait pas à discuter. La saison d’après, j’ai commencé moyennement, au bout de trois matches, j’ai sauté. Et la seule personne au monde à qui je n’en voulais pas, c’était Lionel ! Quand les deux sont proches, les décisions s’acceptent plus facilement.

FM : Là, ils ne se connaissent pas depuis longtemps.

JA : Ils ne sont pas intimes, je crois. Bon, moi je reste convaincu que Nico Douchez est un meilleur gardien. Mais pour l’instant, Sirigu mérite de garder sa place.

FM : Douchez va jouer les Coupes et l’Europa League. Comment Antoine Kombouaré va pouvoir gérer la situation si Douchez est convaincant lorsqu’il est titulaire et si Sirigu a un coup de moins bien ?

JA : Quand tu rentres dans ce type de concurrence, il se peut que tu sois confronté à un problème du genre : l’un est bon en Coupe, l’autre un peu moins bien en ce moment en championnat. Nico est dans une situation très délicate. Je l’ai vécu. Àun moment donné, on peut se la raconter comme on veut. Pour jouer, il faut que l’équipe soit moins performante. C’est affreux, c’est la seule solution. À moins que l’équipe gagne 4-3 et que le gardien concurrent fasse trois boulettes. C’est très pervers et c’est ça qui me gêne. Un peu implicitement, tu as un peu envie que l’autre se déchire. Sauf que personne n’ose l’avouer. Maintenant que je ne suis plus dans le circuit, je peux te le dire ! Mais cela n’arrive pas dans le cas où tu as un numéro 1 clair, comme à Marseille. Mandanda peut faire 14 boulettes d’affilée, Gennaro ne jouera jamais. Parce que c’est comme ça. Mais ce genre de doublure, c’est une denrée rare.

FM : Quel est le meilleur gardien actuel de Ligue 1 ?

JA : C’est pas que de Ligue 1, c’est sur le globe, c’est Hugo Lloris.

FM : Quel est votre podium de Ligue 1 en fin de saison ?

JA : Paris, Lyon et Lille.

Une reconversion réussie

FM : Venons-en à votre reconversion dans les médias. C’est une chose à laquelle vous pensiez depuis longtemps ?

JA : Bon, c’est l’interview honnêteté : tu sais, quand on est footballeur, on a quand même une vie de rêve, on branle pas grand-chose. Et comme pas mal de joueurs, je me disais, les médias c’est bien parce qu’apparemment, on branle pas grand-chose non plus. Donc je me jette à corps perdu là-dedans. J’y trouve ma place, car il n’y a pas beaucoup de mecs qui ont un franc-parler. Et puis en fin de compte, c’est un boulot d’enc… quoi ! Je suis ravi, mais c’est très dur. J’ai trois contrats, Orange Sport, la Française des Jeux et l’Equipe TV, plus le magazine Surface. Cela fait de bonnes journées de fou !

FM : Vous vous amusez quand même là-dedans ?

JA : Oui, je m’éclate complètement. Le terrain va vite me manquer. Mais bon, je gagne correctement ma vie, je suis heureux, je bosse beaucoup. Une vie quasiment normale, sauf qu’effectivement, je passe à la télé.

FM : Le magazine Surface est un joli succès. Est-ce vous vous attendiez à ce que ça fonctionne ?

JA : Non, parce que Surface au départ, tout le monde était très pessimiste. On me disait : vous allez faire 3-4 mois. Et là on va fêter nos 3 ans en novembre. La première victoire, c’est ça. Il faut qu’on soit régulier dans la performance, comme un footballeur en fait. La deuxième récompense, les joueurs et les artistes de tous bords nous appellent pour y participer. On continue dans l’humilité en se disant que rien n’est gagné. Pour les 3 ans, on va ajouter des rubriques, en enlever. Voilà, c’est très long. Je suis absolument convaincu que je ne le ferai pas 10 ans ! Je veux que Surface s’installe encore plus dans le paysage de la presse française. Mais voilà, je ne ferai pas ça 10 ans. La presse écrite, c’est un métier de fou. Je n’y laisserai pas ma santé.

FM : La plupart des joueurs contactés pour être pris en photo sont-ils toujours emballés ou bien certains rechignent ?

JA : Ça fait très longtemps que ce n’est pas arrivé. Le gros problème, c’est le planning. Mais sur l’envie des joueurs, ca fait très longtemps qu’un mec nous a dit : ouais bof. Après, c’est arrivé en trois ans que les mecs aiment plus ou moins le résultat. Par exemple, Marco Simone n’avait pas aimé du tout. Il s’est fait allumé par les mecs de Canal, qui l’ont bien chambré. Alors qu’honnêtement, c’est un des plus beaux shooting qu’on ait faits ! Mais il n’a pas kiffé, on s’est fait engueuler. Je lui ai dit : on s’en refera un autre ! Donc parfois, c’est spécial. Mais cela reste une proportion ultra-minime.

FM : Et quand vous voyez Fabrice Abriel se lancer dans le même type d’aventure ?

JA : Abriel ? Tout le monde a le droit d’exister. Il n’y a pas de souci. Fabrice et son épouse sont partis sur un truc un peu plus luxueux. Chacun a sa place. Je respecte totalement son travail, cela ne me dérange pas. C’est comme au football, c’est la concurrence. C’est même plus une fierté. Car je pense que Fabrice a vu ce que l’on faisait, il m’avait dit qu’il aimait bien ça. C’est très couillu ce qu’il fait et je luis souhaite beaucoup de réussite.

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