Le nouveau Parc des Princes, tournant dans l'évolution du supporterisme français ?

Par Rodolphe Koller
4 min.
PSG @Maxppp

Le Parc des Princes n'est plus le même depuis qu'il ne résonne plus des chants des tribunes Auteuil et Boulogne. Un nouveau public fait peu à peu son apparition en France. Aux antipodes des traditionnels comportements des travées françaises.

Après une période d'angélisme et de mutisme concernant l'ambiance qui règne au Parc des Princes depuis 2010 et le fameux plan Leproux, du nom du président du PSG de 2009 à 2011, la vérité d'une bouilloire devenue une coquille vide commence à se rependre aux yeux du grand public. Depuis que les associations de supporters anciennement constituées à Auteuil et Bologne ont été mises à la porte de l'enceinte de la Porte de Saint-Cloud, suite aux violences ayant conduit à la mort d'un supporter un soir de match contre l'OM, le stade du XVIe arrondissement n'est plus que l'ombre de lui-même. Ou plutôt le semblant d'ambiance qui y règne désormais.

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Si les images de David Luiz mimant un public endormi il y quelques semaines contre Caen ont fini d'égratigner l'image du «nouveau Parc», un événement des moins reluisants s'est encore produit mercredi soir lors de la rencontre de Coupe de France contre Monaco. Pour avoir critiqué les tarifs des abonnements au PSG pour la saison prochaine, en nette augmentation cette année encore, dans un chant repris par une centaine de personnes autour de lui, il s'est fait reconduire à la porte de sa tribune par un stadier, résilier son abonnement et interdire de Parc des Princes pour 3 ans. Un coup de canif porté à une certaine idée des tribunes, libres et frondeuses. Mais aussi un avant goût de ce qui pourrait attendre bien d'autres stades à l'avenir.

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Ils arrivent...

Quel président de club ne rêverait pas d'une masse docile, prête à dégainer son portefeuille, mais aussi bruyante et colorée au moment d'encourager son équipe ? Sauf que c'est là que le bat blesse. Difficile de réunir plus de 40 000 personnes réunissant toutes ses caractéristiques. En résulte un drôle de mélange de quidams fortunés, notables désintéressés du rectangle vert et familles BCBG : idéal pour consommer, aux antipodes des ingrédients nécessaires pour encourager et plus largement animer les tribunes. Ce nouveau public qui déferle avec plus ou moins d'assiduité dans les travées du Parc des Princes un week-end sur deux rassemble plusieurs traits caractéristiques d'un nouveau type de supporterisme, sur le point de conquérir la France.

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  • Plus chambreur que la moyenne, il n'est pas rare qu'il se laisse aller à des "Olé" et autres "Mais ils sont où" quand bien même le score ou le contexte du match ne s'y prêterait pas. Ce qui reste plutôt rare aussi étonnant que cela puisse paraître.

  • Un manque de culture footballistique qui se traduit par un comportement différent des bastions du ballon rond en France. Seront moins valorisés par des salves d'applaudissements les retours défensifs, une jolie transversale ou un choix de jeu intelligent, alors que la qualité de jeu est, en l’occurrence, au rendez-vous.

  • En l'absence d'une autorité régulatrice, ou autrement dit d'un capo, l'homme au micro ou au porte-voix chargé de lancer des chants, ce sont les chants insultants, les plus connus des personnes ne fréquentant pas assidûment les travées, qui se font parfois le plus entendre, au détriment de ceux étant destinés à son club ou à sa ville.

  • Un public très exigent, souhaitant rentabiliser le prix de sa place pour un spectacle qu'il juge à la hauteur. Il n'est pas rare d'entendre des sifflets descendre des tribunes du nouveau Parc des Princes, le fait le plus marquant restant ceux ayant émaillé les festivités du deuxième titre consécutif du PSG. Les Parisiens s'inclinent 2 buts à 1 face à Rennes et rejoignent les vestiaires à la mi-temps sous les quolibets de leur public.

  • Peu migrateur, il ne remplit pas autant les parcages visiteurs que ne le ferait le public que l'on peut encore trouver ailleurs en France. Pourtant, une équipe a bien autant besoin de soutien hors de ses bases, si ce n'est plus, qu'à la maison.

  • Plutôt volatile, sa présence au stade est extrêmement liée aux résultats de son équipe. Ainsi, les longues soirées d'hiver sans résultat probant peuvent s'avérer encore plus destructrices qu'ailleurs, où les rangs se clairsèment déjà traditionnellement.

  • Sa capacité d'organisation, il est vrai restreinte par les règles en vigueur en ce qui concerne les supporters du PSG, est là encore plutôt limitée. C'est le club qui s'occupe des animations de type tifos, pour un résultat laissant à désirer. Sans groupe structuré, Ultra ou pas, difficile de mettre en place une organisation telles que celles nécessaires à la réalisation de voiles demandant des centaines d'heures de travail.

Sans être bon ou mauvais, ce nouveau type de public, spectateur davantage que supporter, coupe radicalement avec une tradition de tribunes colorées et chaleureuses mais aussi frondeuses et revêches lorsque la situation l'impose. Pourtant, des mesures prises un peu partout en France depuis plusieurs mois tendent à généraliser ce modèle que l'on pourrait traduire par un «Tais-toi et consomme». Les arrêtés préfectoraux interdisant les déplacements de supporters se multiplient, la liberté d'expression des tribunes est de plus en plus entravée lorsque des banderoles sans message insultant sont empêchées d'être déployées. D'un autre côté, la situation du Parc des Princes a permis au club, et ce jusqu'à son sommet, de réaliser qu'aucune formation ne peut se construire sans grands supporters. Une bien mince lueur d'espoir, mais n'est-ce pas la seule chose qui reste aux supporters des quatre coins de la France ?

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