Jeremie Boga, Sassuolo : « si je continue de faire ce que je fais, à travailler dur, peut-être qu’un jour, je retournerais à Chelsea »

Par Antoine Grasland - Sébastien DENIS
7 min.
Sassuolo Jeremie Boga @Maxppp

Arrivé sur la pointe des pieds à Sassuolo il y a 18 mois, Jeremie Boga explose depuis quelques semaines en Serie A (3 buts et une passe décisive en 8 titularisations). Autant apprécié par son coach que redouté par ses adversaires pour sa capacité à éliminer ses adversaires par ses dribbles, le milieu offensif international ivoirien formé à Chelsea est aujourd'hui le meilleur dribbleur d'Italie et dans le top 3 des dribbleurs en Europe. Son avenir, ses dribbles, le racisme en Italie, Cristiano Ronaldo, Chelsea, la Côte d'Ivoire ou encore l'OM, le milieu offensif de 22 ans n'élude aucun sujet à quelques heures d'affronter la Juventus de Cristiano Ronaldo. Entretien.

FM : Jeremie, on s’était longuement parlé durant l’été 2018 et tu te posais de sacrées questions sur ton avenir toi qui appartenait encore à Chelsea. 18 mois plus tard, quel bilan fais-tu de ton expérience en Serie A ?

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Jeremie Boga : le bilan est plutôt positif. La première année, malgré ma blessure où j’ai raté deux, trois mois, je suis bien revenu. Cette année, je monte de plus en plus en puissance, surtout au niveau statistique. Pour l’instant, le bilan est positif.

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FM : tu as joué en Ligue 1 (à Rennes), en Liga (à Grenade), en Premier League (Chelsea) et maintenant en Serie A, si tu devais comparer les quatre championnats ?

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JB : les quatre sont différents. Pour comparer à l’Angleterre, c’est moins intense. Il y a beaucoup plus d’arrêt de jeu, de tactique. Il y a plus de possession alors qu’en Angleterre, c’est vraiment « on va tous vers l’avant ». En France, c’est un peu similaire, c’est un championnat technique où on aime jouer au ballon avec beaucoup de bons jeunes joueurs. Au niveau de l’intensité, l’Angleterre est vraiment le meilleur championnat.

« Le Racisme ? Il faut être fort mentalement et passer au-dessus »

FM : qui dit Serie A dit aussi racisme. Comment vis-tu le racisme en Serie A ? Tu as déjà été confronté à ça ?

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JB : un peu des deux. Pour l’instant, merci, je n’ai pas eu ce genre de problème. Il y a eu beaucoup de joueurs noirs qui ont eu ce problème-là. De loin ça me touche aussi, mais je n’ai jamais eu affaire à ça. Vu ce qu’il s’est passé avec Mario Balotelli à Brescia, quand ça vient de ton propre club… C’est des choses qui arrivent souvent en Italie, il faut juste être fort mentalement et passer au-dessus.

FM : le Boga qui est arrivé il y a 18 mois, et celui qui sévit actuellement sur toutes les pelouses d’Italie n’a plus grand-chose à voir. Qu’est-ce que la Serie A t’as apprise et en quoi tu t’es amélioré ?

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JB : il y a plusieurs points. Déjà défensivement et surtout tactiquement. Le coach (Roberto) De Zerbi m’a beaucoup fait progresser. Mentalement, aussi, j’ai beaucoup progressé, j’ai beaucoup mûri. Avant, je dribblais beaucoup sans avoir la finition et ça polluait mon jeu. Maintenant, j‘ai plus d’efficacité, j’espère que ça va continuer comme ça. Je dois faire encore mieux avec plus de passes décisives, marquer plus de buts. Je dois chercher à être encore plus efficace.

« J’ai toujours voulu dribbler, éliminer mon adversaire »

FM : ce qui impressionne en te voyant jouer, c’est la faculté que tu as pour éliminer les adversaires. Sais-tu que tu es le meilleur dribbleur de Serie A ?

JB : oui, j’ai vu. Le club me l’a dit (sourire).

FM : d’où te vient cette capacité à éliminer ? Penses-tu que le regard de tes adversaires a changé depuis qu’ils savent que tu es capable de les éliminer rapidement ?

JB : oui, je pense. C’est un truc que j’ai depuis tout petit. Déjà dans mon quartier à Marseille, je faisais ça. Cela a toujours été ma qualité première. J’ai toujours voulu dribbler, prendre du plaisir dans les uns-contre-un, éliminer mon adversaire. Je pense que ça fait ma force. J’essaye d’en profiter au maximum. Dans les trois derniers matches, c'est clair que j’ai vu une différence. Les adversaires avaient un marquage plus fort. Ils venaient à deux ou trois. C’est bien, ça va m’aider à m’améliorer, à trouver d’autres solutions, à améliorer mon jeu.

FM : ce dimanche, tu vas retrouver la Juventus de Cristiano Ronaldo qui vous avait mis 0-3 à domicile en février dernier. Tu avais joué 30 minutes de cette rencontre. Qu’as-tu pensé de cette équipe ?

JB : on savait que c’était une équipe très forte. Ils nous ont dominé tout le match, on avait perdu 3-0 et c’était mérité. Il ne va pas falloir trop faire les mêmes erreurs que l’année passée. On sait déjà qu’ils ont de très bons attaquants, il va falloir sortir un très gros match et espérer prendre des points.

FM : est-ce la meilleure équipe que tu as rencontrée depuis le début de ta carrière ?

JB : Oui, je pense que c’est l’une des meilleures. Quand j’étais en Espagne aussi, j’ai joué contre le Real Madrid, le Barça, les trois c’est du top niveau.

« Quand on me parle de CR7, c'est forcément un souvenir douloureux qui me vient à l'esprit»

FM : jouer contre CR7, c’est forcément quelque chose de particulier ?

JB : j'ai déjà joué contre lui, à Santiago Bernabéu, on avait pris 5-0 avec le Rayo. 8 buts en 2 matches c'est lourd. Quand on me parle de Cristiano Ronaldo, c'est forcément un souvenir douloureux qui me vient à l'esprit. Des joueurs comme lui, comme Messi, depuis gamin je les regarde jouer. J'essaye d'apprendre à travers leur jeu à eux, leur efficacité, leur dribble. Je suis chanceux de les voir jouer, beaucoup de joueurs aimeraient être à ma place. Lionel Messi, Eden Hazard et Hatem Ben Arfa sont les trois joueurs que je préfère, ils sont différents.

FM : tu réalises un début de saison plus que prometteur (3 buts et une passe décisive en 11 apparitions) dans une équipe qui peine à briller, que te manque-t-il pour franchir un nouveau palier ?

JB : le coach n'arrête pas de me le répéter, il faut que je sois plus décisif. Quand je marque un but dans un match, essayer d'en mettre un deuxième ou un troisième. Essayer de faire encore plus mal à l'équipe adverse. Jouer plus dans l'axe, chercher le une-deux plutôt que l'option individuelle. Ce sont ces quelques consignes que j'essaye de mettre en place.

FM : est-ce que cela peut passer par un départ ?

JB : pour l'instant, c'est trop tôt pour parler d'un départ. Pour franchir un palier, je dois d'abord faire une bonne saison avec Sassuolo. Marquer beaucoup de buts, faire des passes décisives pour espérer partir dans un club plus fort.

FM : Tammy Abraham, que tu as côtoyé à Chelsea chez les jeunes, ne tarit pas d’éloges sur toi. Que penses-tu de son éclosion chez les Blues ?

JB : pour ceux qui ne le connaissent pas, c'est impressionnant ce qu'il fait. Je le connais depuis tout petit, on est de la même génération 97 à Chelsea. Je connais son potentiel. Il a toujours été un buteur, il marquait 20/25 buts par saison dans toutes les catégories de jeunes. Donc ce qu'il fait aujourd'hui, ça ne me surprend pas. Je suis très heureux pour lui.

FM : cela ne te donne pas quelques regrets de ne pas pouvoir évoluer dans une équipe de Chelsea désormais résolument tournée vers ses jeunes, ce qui n’était pas le cas lorsque tu y évoluais ?

JB : c'est vrai que c'est dommage. Après je n'ai aucun regret. Chaque chose en son temps. Ce n'était sûrement pas le temps pour moi de jouer à Chelsea. Je garde toujours ça dans un coin de ma tête. Si je continue de faire ce que je fais, à travailler dur, peut-être que j'y retournerais un jour.

FM : autre sujet important : la Côte d’Ivoire. Tu n’as qu’une seule sélection avec les Éléphants (face à la Guinée en juin 2017), as-tu des nouvelles du sélectionneur et peut-on espérer te revoir sous les couleurs ivoiriennes dans un futur proche ?

JB : c'est mon objectif premier d'être en sélection. Après, honnêtement je n'ai pas eu beaucoup de nouvelles, pas beaucoup d'explications. L'année passée, il y a eu des périodes où je ne jouais pas donc je peux comprendre de ne pas être appelé, mais cette année je n'ai pas encore eu de nouvelles.

FM : pour finir, un petit mot sur ton club de cœur. Continues-tu de suivre les performances de l’OM ?

JB : oui, toujours, toujours (il insiste). Marseille, ça reste mon club de cœur depuis tout petit. Chaque année, je suis leurs parcours, leurs matches, ce qu'ils font. Je serai toujours le premier supporter de l'OM. En début de saison, j'étais comme les supporters, j'étais un petit peu inquiet, mais je pense que l'équipe s'est mise en route et depuis ça va mieux. Je pense qu'ils peuvent faire un très bon championnat.

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