Info FM, Youssouf Mulumbu : «c’est vrai qu’un challenge en France serait vraiment tentant»

Par Matthieu Margueritte
12 min.
Youssouf Mulumbu avant un match de championnat avec le Celtic @Maxppp

Milieu de terrain formé au Paris Saint-Germain, Youssouf Mulumbu a fait l'essentiel de sa carrière en Angleterre et en Ecosse. Aujourd'hui libre de tout contrat, il s'est confié à FM sur sa carrière et a avoué qu'il ne dirait pas non à un retour en Hexagone.

Foot Mercato : comment allez-vous durant cette période compliquée ?

Youssouf Mulumbu : je m’entraînais avec l’équipe de Birmingham. Tout se passait bien et le virus a tout arrêté. Ils me donnent un programme avec des objectifs à atteindre et on doit les renvoyer tous les jours au préparateur physique. C’est compliqué mais ça va. Je suis en ce moment confiné à Birmingham. On essaie de rester en forme, on court, on essaie de positiver. C’est difficile, mais on doit s’adapter rapidement à cette situation.

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FM : votre dernier match officiel date de juillet 2019 avec le Congo. C’est déjà difficile pour un joueur sans club de se maintenir en forme après plusieurs mois sans match officiel. Là avec le confinement, c’est pire ?

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YM : ce n’est pas la première année où je me retrouve à chercher un club et à m’entraîner avec un préparateur physique. Le foot est arrêté pour tout le monde. Donc tout le monde est à l’arrêt. Le plus étrange, c’est qu’on ne sait pas ce qu’il va se passer. On est patient, on essaie de garder la forme du mieux qu’on peut. On ne contrôle pas si le championnat va reprendre ou non, s’il y aura un mercato, si les clubs pourront recruter des joueurs.

FM : dans cette période floue, notamment où les clubs ne savent pas s’ils auront les moyens financiers pour réaliser leur campagne de recrutement souhaitée, être un joueur libre présente un certain avantage ?

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YM : exactement. Je pense que, plus qu’avant, les joueurs libres auront un très bon profil par rapport à la manne financière des clubs. Il y aura de la place pour les clubs qui auront moins d’argent qu’avant.

Ouvert à tout projet

FM : vous êtes libre depuis l’été dernier. Que s’est-il passé ?

YM : j’étais en prêté par le Celtic (à Kilmarnock jusqu’à la fin de la saison). Je suis allé à la CAN. Ça s’est bien passé. A mon retour, il y avait des sollicitations en Turquie, mais je voulais rester dans un championnat compétitif et viser la Championship, la Ligue 1. J’ai attendu et le marché du foot est un marché particulier. Lorsque les offres sont arrivées la première fois, j’ai voulu attendre. Après c’était plus compliqué. J’avais un objectif de jouer dans des championnats spécifiques. J’ai été exigeant. C’est un choix. On savait qu’il pouvait être risqué, mais si j'avais su, j’aurais sans doute réfléchi un peu plus par rapport à certaines approches.

FM : quels championnats visez-vous aujourd’hui ?

YM : je suis ouvert à la France. On me connaît mieux au Royaume-Uni parce que j’ai fait presque toute ma carrière ici, mais c’est vrai qu’un challenge en France serait vraiment tentant.

FM : n’importe où ?

YM : tout type de projet. La seule chose, c’est que je veux parler avant avec le coach parce que c’est important d’aller dans un projet où tu es utile et où on compte sur toi. Après, il n’y a pas de soucis, même si c'est pour rejoindre une équipe qui joue sa survie. J’ai passé des saisons à jouer le maintien avec WBA. Et je sais ce que cela veut dire de jouer le maintien ou sa survie pour une équipe et un groupe.

FM : dernière question mercato. Vous l’ancien Parisien, vous avez été annoncé à l’OM il y a quelques années. Info ou intox ?

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YM : oui, c’était en 2015 avant que j'aille à Norwich. On avait discuté avec les dirigeants marseillais. Il y avait eu des sollicitations mais ça n’avait pas abouti.

FM : avant la crise du coronavirus, votre téléphone avait-il déjà commencé à sonner en vue de la prochaine saison ?

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YM : oui. En Angleterre, il y avait un club de Championship avec de nombreux blessés. Ils pouvaient recruter avant le 25 mars. Donc j’étais dans les temps. Tout avait bien commencé et puis le virus est arrivé.

FM : revenons un peu sur votre carrière. Vous êtes lancé dans le grand bain avec le PSG en 2006 et tout s’enchaîne. On a parlé d’un intérêt de MU et vous êtes convoqué chez les U20 avec lesquels vous avez remporté le tournoi de Toulon. Enfin, vous êtes allé avec les Espoirs français. Racontez-nous un peu ça.

YM : j’avais 19 ans. Je ne m’attendais pas à mes premiers matches en pro. J’avais fait toute la présaison avec l’équipe réserve. Et puis Guy Lacombe avait besoin d’un joueur au milieu de terrain. Il avait regardé quelques matches de la présaison. Je suis donc arrivé avec les pros. Très rapidement, il m’a inclus dans l’équipe. Le premier match pro à Auxerre (22 octobre 2006) se passe super bien. On enchaîne avec le match de coupe contre Lyon (25 octobre 2006). Petite à petit, je m’installe dans le groupe, je commence à jouer. Ensuite, il y a la sollicitation de l’équipe de France (U20). C’est une aventure magnifique avec les meilleurs jeunes de France. A l’époque, il avait Kevin Gameiro, Loïc Rémy, Benoît Costil. C’était super. Gagner ce trophée à Toulon, c’était extraordinaire.

FM : à cette époque, certains de ces joueurs vous impressionnaient-ils ?

YM : Oui, Kevin Gameiro et Loïc Rémy. On sentait vraiment de la maturité et de la détermination dans leur jeu. C’est plus facile quand on est attaquant. C’est un poste où il faut être tranchant, et ils l’étaient à cet âge-là.

FM : tout est donc allé très vite lors de vos débuts. Comment un jeune joueur le vit-il ?

YM : j’ai toujours été terre à terre. Je savais que j’arrivais sur le tard par rapport à ce groupe (France) qui avait grandi ensemble. J’avais la chance d’avoir Ricardo Faty avec qui j’ai grandi à Epinay-Sous-Sénart. Il m'a beaucoup aidé. On jouait au même poste. On a fait tout le tournoi ensemble. C’était comme un mentor. Il me parlait et me guidait beaucoup.

Marqué par Chantôme et Pauleta

FM : vous avez signé pro au PSG en 2006 à 19 ans mais vous êtes ensuite prêté à Amiens puis parti de France dès 2009. Pourquoi ce choix ?

YM : malheureusement, avec Guy Lacombe, les résultats ne suffisent pas et le PSG décide de se séparer de lui. Arrive Paul Le Guen. C’est compliqué parce que, quand le nouveau coach arrive, il vient avec certains joueurs dont deux qui jouent à mon poste : Jérémy Clément et Grégory Bourillon. Il y a moins de temps de jeu et moins de place pour s’exprimer. Je redescends en arrière droit. C’est un poste où Le Guen a insisté pour que j’y joue. C’était quelque chose dont je n’avais pas l’habitude. C’était un poste que je trouvais trop défensif pour moi. Je vais ensuite en prêt à Amiens pour pouvoir jouer milieu défensif et avoir plus d’expérience. Puis je reviens au PSG et là je vois que le groupe s’est étoffé. Claude Makelele est arrivé. C’était encore plus compliqué pour jouer. Voilà pourquoi j’ai décidé de partir. Une opportunité est arrivée d’Angleterre, mais je ne connaissais pas West Bromwich Albion à l’époque.

FM : pourquoi avez-vous choisi d’y aller alors ?

YM : le coach du club parle avec Le Guen pour lui expliquer pourquoi il veut me faire venir. Ensuite, il parle avec mon père. Je vois que j’aurai une opportunité de pouvoir m’exprimer là-bas donc j’ai accepté.

FM : regrettez-vous cette fin de parcours prématurée au PSG ?

YM : oui un peu. Quand on sort de la formation et quand on voit le parcours de Clément Chantôme, je me dis que c’est dommage parce que c’est quelque chose qui est important pour un jeune joueur de jouer dans le club de sa ville et de le représenter.

FM : aujourd’hui, avec le PSG starisé, on dit que c’est très difficile pour un jeune issu du centre de formation de percer en équipe première. Si on devait comparer à votre époque, vous diriez que c’était pareil ?

YM : le PSG a toujours été un club particulier en terme de formation. Il y a un vivier énorme. Les meilleurs joueurs sont réunis dans le centre. Même si à l’époque ce n’était pas le PSG actuel avec le même genre de joueurs, la difficulté est la même parce qu’il faut être très très fort mentalement et techniquement pour atteindre le haut niveau au PSG. C'était tout aussi difficile que maintenant, surtout que maintenant un jeune qui est bon, rapidement on le sécurise contractuellement vus les enjeux financiers.

FM : quel jeune joueur formé au PSG vous a le plus impressionné ?

YM : Clément Chantôme. Il était impressionnant parce qu’à l’âge de 16 ans, il avait déjà la maturité et on sentait déjà un joueur qui avait où il voulait aller. Techniquement, c’était tellement fort qu’il jouait presque en marchant à l’entraînement. C’est quelque chose qui m’a marqué. Non seulement il disait qu’il voulait devenir pro, mais il le démontrait à l’entraînement. C’était vraiment fort à l’époque.

FM : à l’inverse, quel est le talent pour lequel vous estimez qu’il aurait pu avoir une meilleure carrière ?

YM : malheureusement, je dirais David N’Gog. C’est un joueur qui était précoce, il a fait toutes les classes de l’équipe de France. Il a réussi à jouer avec le groupe pro du PSG avant de partir à Liverpool. Peut-être un peu trop tôt. Je pense qu’il aurait pu avoir une meilleure carrière.

FM : plus globalement, quel joueur vous a le plus impressionné au PSG ?

YM : sans aucun doute Pedro Miguel Pauleta. C’était chirurgical, un attaquant comme on en voit rarement maintenant. Il était finisseur, malin, c’était un roublard. Il disait qu’il avait fait mal à toutes les défenses du championnat de France. C’était quelqu’un qui connaissait tous les défauts des défenseurs. Il savait utiliser toutes leurs faiblesses. Vous aviez beau être physique ou rapide, il trouvait toujours le moyen de marquer à un moment du match. C’était impressionnant de voir ses appels de balle et le timing de ses courses. C’est pour ça que ça m’a marqué. A l’entraînement, c’était quelque chose qu’il faisait souvent.

FM : passons à votre carrière internationale. Avant toute chose. Rappelez-nous pourquoi vous avez opté pour le Congo alors que vous étiez sélectionné chez les U20, les Espoirs et que vous aviez gagné le tournoi de Toulon ?

YM : c’est vrai que c’était un choix difficile. On en a discuté avec mes parents. On en est arrivé à une décision qui était en faveur de la RD Congo. C’était pour moi un choix du cœur et surtout parce que j’ai pu rapidement jouer avec l’équipe A.

Toujours disponible pour les Léopards

FM : vous n’avez plus rejoué avec la sélection depuis l’été 2019. Etes-vous êtes toujours prêt à rejouer pour les Léopards ?

YM : le plus important pour moi était de retrouver un club et de voir ce qui allait se passer. Savoir si j’allais faire une année pleine et si j’allais être en jambe pour continuer (la sélection). Malheureusement, ça ne s’est pas passé comme tel. On verra après cette pandémie mais naturellement quand on a le parcours que j’ai eu avec la sélection et qu’on est jugé compétitif, la sélection reste un choix naturel.

FM : vous avez eu un parcours plutôt mouvementé avec votre sélection. Vous êtes revenu sur votre retraite internationale et il y a eu plusieurs va-et-vient. Pourquoi ?

YM : ç’a été mouvementé parce qu’à l’époque on n’était pas dans les meilleures conditions. On a essayé de changer les choses, de mettre plus d’exigences envers les dirigeants. Ça a beaucoup évolué. On a vu les derniers résultats lors de la dernière CAN. On a réussi à ramener des joueurs comme Bakambu, Kakuta, Tisserand, Masuaku. C’était quelque chose qui était compliqué avant vu l’organisation. C’était des petits détails mais ô combien important pour rester concentré sur le terrain comme les billets d’avion, les escales, par exemple. J’ai milité pour que ça change et quand on voit l’évolution, je pense que c’est positif et je suis fier d’y avoir, à mon niveau, contribué.

FM : quel est ton meilleur souvenir avec le Congo ?

YM : mon premier match au stade des Martyrs au Congo contre l’Égypte (septembre 2008). C’est quelque chose que je n’oublierai jamais. La première fois au Congo à l’âge de 20 ans. L’atmosphère, l’ambiance, 100 000 personnes qui se retrouvent dans un stade, c’est énorme. C’est une image qui m’a marqué et que je n’oublierai jamais.

FM : enfin, en plus d’être joueur, vous avez créé votre fondation en 2013. Parlez-nous en.

YM : à l’époque avec mes anciens agents, on a créé la fondation Youssouf Mulumbu avec plusieurs personnes qui vivent au Congo. Les années qui ont suivi étaient très bonnes avec beaucoup d’actions. On a même réussi à faire un match de charité avec El-Hadji Diouf, André et Jordan Ayew, Alex Song et d’autres. Les fonds étaient reversés à certains hôpitaux de Kinshasa qu’on avait répertoriés. L’année d’après, on avait fait un concert avec des artistes du pays. Plusieurs actions ont été mises en place. Le but ultime est de faire une école multisports. Ces derniers temps, on y a mis moins d’énergie parce que je ne suis pas rentré au Congo ces trois dernières années. Là, on a décidé de la relancer, avec des actions et projets que nous prévoyons dont une en particulier dans une ville qui s’appelle Beni, une ville qui est à l’Est du Congo et qui est submergée par les attentats et les guerres. On essaye de mettre ça sur place. Ça devait avoir lieu cet été mais avec le coronavirus, on verra…. On est en train de chercher, on discute avec des potentiels sponsors, on démarche plusieurs partenaires qui pourront nous accompagner et associer leur marque ou leur institution avec ma Fondation pour faire une action qui sera bénéfique aux personnes et populations locales de Beni, mais aussi d’ailleurs en RD Congo à travers la Fondation Youssouf Mulumbu.

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