Ces futurs cracks qui ont raté leur carrière

Par Aurélien Léger-Moëc
5 min.
Mastour, Adu et Kerlon n'ont pas eu la carrière qu'on leur prédisait @Maxppp

Au Borussia Dortmund, Youssoufa Moukoko bat tous les records de précocité et se fait un nom sur la planète football. Mais attention, d'autres avant lui ont nourri la catégorie des cracks annoncés, pour finalement tomber dans l'anonymat. Retour sur ces jeunes prodiges dont la carrière s'est peu à peu évaporée dans les profondeurs du football professionnel.

Tellement en avance que la Bundesliga a dû accorder une dérogation pour qu'il puisse jouer plus tôt que prévu. Depuis le 20 novembre dernier, Youssoufa Moukoko est âgé de 16 ans et peut évoluer avec l'équipe professionnelle du Borussia Dortmund. À 16 ans et 1 jour, il apparaissait pour la première fois en Bundesliga. Trois semaines plus tard, il entrait en Ligue des Champions, face au Zenit. À 16 ans et 28 jours, il devenait le plus jeune buteur de l'histoire du championnat allemand. « Tu ne me parles pas d'âge », disait Kylian Mbappé. Moukoko l'a écouté et enchaîne les records de précocité à la pelle.

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Des records potentiellement difficiles à battre mais qui ne préfigurent pas pour autant de la suite de la carrière du jeune attaquant né au Cameroun, mais de nationalité allemande. Combien de jeunes joueurs ont hérité du terme pompeux de « crack » ou de « prodige » avant de disparaître de la circulation ? Combien ont été suivis depuis leur plus jeune âge avant de disparaître dans les méandres du football professionnel ? Pour un Cristiano Ronaldo, un Lionel Messi, un Erling Haaland ou un Kylian Mbappé, combien de Freddy Adu ou Hachim Mastour ? Première bonne nouvelle pour Moukoko, que nous vous avions présenté il y a 4 ans à son arrivée à Dortmund, il a déjà franchi un premier palier que beaucoup d'ex-prodiges du football n'avaient même pas atteint : des apparitions avec l'équipe professionnelle.

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Pike, l'un des premiers prodiges annoncés

Qui se rappelle de Sonny Pike, présenté comme l'héritier de George Best ? Cet Anglais né en 1983 recruté à 12 ans par l'Ajax Amsterdam avait fait l'objet d'un reportage de la BBC. Il arrêtera sa carrière à l'âge de 18 ans sans n’avoir jamais évolué avec la moindre équipe première des clubs où il sera passé. Franchir ce premier cap n'est donc pas aisé, même pour les joueurs au talent précoce. Et quand ils y arrivent, le désenchantement n'est jamais loin. Les États-Unis pensaient détenir le crack du futur dans ce sport mineur pour eux en la personne de Freddy Adu. Professionnel dès l'âge de 14 ans, international à 17 ans, considéré comme l'héritier du Brésilien Pelé, l'Américain deviendra un concept marketing plus qu'un joueur, échouant à Benfica et Monaco avant de devenir un globe-trotter du football mondial (il est aujourd'hui sous contrat avec un club suédois, Österlen), bien loin du joueur révolutionnaire annoncé.

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Autre cas classique, Hachim Mastour. Talent brut repéré par l'AC Milan, le Marocain est considéré en 2014 comme un futur crack du football. Les vidéos mettant en avant ses arabesques techniques et ses jongles inondent le web. C'est sûr, l'AC Milan a flairé le bon coup. Mais le monde professionnel ne s'offre pas si facilement. Envoyé en Espagne du côté de Malaga pour faire ses armes à seulement 17 ans, il ne fait qu'une apparition et est prêté la saison suivante au PEC Zwolle aux Pays-Bas pour une pige à peine plus concluante. Résultat, il ne jouera pas avec l'équipe première de l'AC Milan. Il évolue aujourd'hui en Serie C à la Reggina, son 5e club à seulement 22 ans.

Qui se souvient de Fabio Paim ? Sûrement Cristiano Ronaldo, qui avait déclaré : « si vous trouvez que je joue bien au foot, attendez de voir Fabio Paim. » Comme CR7, Fabio Paim démarre au Sporting Portugal en 2006 (il a 18 ans) où, grâce à son agent Jorge Mendes, il touche 50 000 euros par mois sans avoir encore évolué avec l'équipe première. L'équipe première, il ne la verra d'ailleurs jamais. Prêté à des équipes portugaises de moins grande envergure puis à Chelsea (où il ne jouera pas), Fabio Paim est l'exemple typique du prodige annoncé qui perd les pédales face à tant d'argent sans avoir même eu le besoin d'exploiter son potentiel.

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La malédiction des surnoms

Et puis, il y a les surnoms qui font mal. Le nouveau Pelé pour Adu, le nouveau Cristiano pour Fabio Paim, ou encore le nouveau Ronaldinho pour Kerlon. Kerlon, c'est l'inventeur de la foquinha (l'otarie), geste ô combien énervant pour les défenseurs adverses puisque le principe consistait à avancer sur le terrain tout en jonglant de la tête, rendant les interventions licites quasiment impossibles. Il signe professionnel à l'âge de 17 ans avec Cruzeiro, et sera élu meilleur joueur (et meilleur buteur) de la Copa América U17 avec le Brésil en 2005. Manchester United et le PSG sont sur les rangs, mais c'est l'Inter qui rafle la mise. Une mise perdue puisque Kerlon ne jouera jamais avec les Nerazzurri. Prêté au Chievo Vérone, à l'Ajax Amsterdam puis au club brésilien de Parana, sa carrière ne décollera jamais. Et il y mettra fin en 2017.

Pas de nouveau Ronaldinho avec Kerlon donc, tout comme il n'y a pas eu de Messi écossais avec Ryan Gauld. Petit et gaucher, les premiers éléments de la ressemblance étaient là. Pas mauvais au foot aussi, mais loin du niveau exceptionnel démontré par la Pulga dès ses débuts avec le FC Barcelone. Repéré dans le club écossais de Dundee, le Sporting Portugal, encore lui, pensait avoir flairé la bonne affaire. Mais c'est surtout avec l'équipe réserve du club que Ryan Gauld se manifestera. Aujourd'hui, il a trouvé son bonheur à Farense, club portugais qu'il a contribué à faire monter en première division. Un messie d'une autre envergure au final.

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Beaucoup d'autres cracks annoncés n'ont pas eu la carrière que leur talent précoce laissait entrevoir. Il n'y a rien de déshonorant non plus à réaliser un parcours moins grandiose que prévu, à l'instar de Bojan Krkic. Certains n'atteignent pas les sommets les plus hauts, mais ont investi le paysage européen dans la durée, comme Youri Tielemans (révélé par Anderlecht à 17 ans) ou Allan Saint-Maximin (lancé par Saint-Etienne à 17 ans également). Quel chemin le jeune Moukoko empruntera-t-il ? Personne ne le sait aujourd'hui mais, comme l'ont montré certains précédents exemples, il a déjà évité quelques pièges.

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