Routine ancrée dans les codes du football, les étirements ne sont pas toujours bien effectués par les joueurs, souvent mal informés de leur utilité et leur mode d'emploi. Nous allons donc vous expliquer comment bien vous étirer pour en obtenir tous les bénéfices.

Les étirements font partie intégrante de la pratique sportive et donc du football depuis de très nombreuses années, aussi bien chez les amateurs que chez les professionnels. Dès le plus jeune âge, vos entraîneurs vous ont probablement bassiné avec les étirements, vous expliquant leur importance au quotidien. C’est une partie de l’entraînement que les footballeurs et surtout les jeunes trouvent souvent lassante, pourtant, elle est importante et ne doit pas être négligée. Seulement, la méconnaissance des étirements est répandue dans le monde du football et mal exercés, ils peuvent devenir néfastes. Les bienfaits des étirements dépendent de plusieurs facteurs dont nous allons vous parler.
Des bienfaits qui divisent
« Il faut savoir que pour beaucoup de joueurs, ça joue au niveau psychologique. Ils ont besoin de leurs petits étirements classiques pour se mettre en température. Si on enlève les étirements à un joueur qui a l’habitude d’en effectuer, il va sentir un manque et sera perturbé sur le terrain alors qu’au final, il n’y a pas grand chose qui a changé. Il y a beaucoup de psychologie dans cet exercice », préparateur physique de plusieurs joueurs professionnels, Maxime Delahaye a un avis qui s’éloigne de nombreuses croyances établies au sujet des étirements.
L’étirement est bien ancré dans les codes du football depuis plusieurs décennies, si bien que tout le monde s’étire aveuglément sans réellement connaître les apports de ces exercices. Seulement, de nombreuses études émergent depuis quelques années à ce sujet, et il se trouve que les étirements ne seraient pas si efficaces que ça, ou du moins, loin d’être indispensables. « Il y a différentes croyances et théories au sujet des étirements, certains disent que ça apporte énormément, d’autres disent que c’est légèrement bénéfique et certains disent même que ça n’a aucun intérêt », explique le préparateur physique de Loïc Rémy.

Les étirements ne sont pas complètement inefficaces ou même délétères dans la prévention des blessures, mais il ne s’agit pas du meilleur outil selon les études de Behm et al. en 2016 ou encore celles de Lauersen et al. en 2014. « Des protocoles tels que le FIFA 11+ ont montré une efficacité significative dans la prévention des blessures chez le footballeur. Or, ce protocole ne contient pas d’étirement, ce qui appuie encore un peu l’inefficacité des étirements pour la prévention », rapporte Lucas Michaud, masseur-kinésithérapeute diplômé d’Etat ayant réalisé un mémoire sur les étirements dans la pratique sportive.
Si les avis divergent en fonction des études scientifiques qui varient d’une année à l’autre, une chose est sûre: la méconnaissance des apports des différents étirements fait qu'ils sont souvent mal effectués, ce qui peut être problématique. Les étirements sont souvent réalisés à l’échauffement, lors de l’apparition de crampes et après l’entraînement ou le match en guise de récupération. Seulement, vous vous doutez bien que les effets recherchés lors de l' échauffement et de la récupération sont totalement opposés et ne peuvent être atteints en faisant les mêmes exercices. Pourtant, il est possible que depuis petit, on vous parle d’étirements sans jamais faire la distinction entre les différents exercices, ce qui est pourtant extrêmement important.

Déjà, il faut savoir que les étirements peuvent avoir deux objectifs: 1) assouplir le tissu conjonctif, qui comprend les tendons, les ligaments, les capsules articulaires, pour obtenir un gain d'amplitude articulaire supérieur à l'amplitude normale des articulations,
2) allonger directement les muscles afin de les préparer aux micro-traumatismes qu'ils rencontreront pendant l'effort à force d'être étirés. En somme, les étirements visent à préparer le corps à la pratique sportive ou à favoriser la récupération suite à l’effort. Pour cela, on distingue deux grands groupes d’étirements, d’un côté les étirements passifs, et de l’autre les étirements actifs. Il est importantissime de bien distinguer ces deux types d’exercices puisqu’ils ont des bienfaits quasi opposés.
L’étirement passif
Les étirements passifs sont ceux que de nombreux pratiquants connaissent depuis le plus jeune âge par manque de connaissance de leur entourage ou de leurs entraîneurs qui ne voient qu'une façon de s'étirer. « L’étirement passif correspond à l’élongation, d’un muscle ou d’un groupe musculaire, provoquée par une tierce personne (entraîneur, thérapeute …) ou par l’athlète lui-même, sans contraction musculaire », indique Lucas Michaud. Que ce soit à l’échauffement ou en récupération d’après match, les étirements passifs sont très souvent utilisés, à tort.
En réalité, les étirements passifs ne doivent être utilisés qu'en guise de récupération. « Les étirements statiques doivent être effectués au minimum 6 heures après une activité physique, il est donc conseillé de les effectuer le lendemain de celle-ci », estime le masseur-kinésithérapeute. « Tout ce qui est statique et passif est à effectuer après le match, c’est bénéfique au niveau de la souplesse et de la récupération », rappelle Maxime Delahaye qui rejoint Lucas Michaud et qui préconise plutôt un décrassage juste après un match. Il ajoute: « il ne faut jamais aller jusqu’à l’extrême parce que c’est là qu’on peut se blesser, il faut juste sentir une petite tension. Dès qu’on a la sensation d’avoir une tension légère, on peut s’arrêter pour récupérer. »

En plus de ne pas diminuer les risques de blessures, vous pourriez même les augmenter en effectuant des étirements statiques à l’échauffement ou à la mi-temps par exemple. « Il faut éviter les étirements statiques avant les matchs parce qu’en étirant plus de 5 secondes un muscle sans le redynamiser derrière, le muscle va mettre une demi-heure à se remettre à sa taille initiale. C’est donc évidemment mauvais au niveau des capacités », prévient le préparateur physique. En vous étirant de manière passive, vous refroidissez les muscles, ce qui ne fait aucun sens quand on peut entendre: « étirez-vous pour rester chaud » dans certains vestiaires à la mi-temps. Avec la mise en tension de vos muscles avant de repasser à l’effort, vous risquez d’importantes blessures musculaires.
« Les étirements statiques sont efficaces pour augmenter l’amplitude de mouvement et la souplesse par le biais d’adaptation morphologique et neurosensorielle », décrypte Lucas Michaud. Ces étirements que vous pratiquez depuis vos premières gammes entre deux exercices ou avant un match sont donc utiles pour faciliter la récupération et augmenter l’amplitude ainsi que la souplesse. « Quelqu’un qui n’est pas souple aura tendance à plus se blesser donc c’est pour ça qu’il faut s’étirer pour gagner en amplitude et en souplesse. L'intégration de séances de yoga et de Pilates que l’on voit de plus en plus chez les clubs professionnels va dans ce sens », analyse Maxime Delahaye.
Les étirements passifs sont donc préconisés après l’effort, mais également dans le cadre d’une rééducation post blessure. « Les footballeurs ne sont pas réputés pour être des sportifs souples donc c’est vraiment important d’insister sur ce point », indique le préparateur physique. Avec plus de souplesse, les muscles subissent moins de contractions et sont plus résistants lors des chocs, ce qui permet de prévenir des blessures. Il poursuit : « je mettrai les étirements au même niveau que le sommeil, l’alimentation, l’hydratation… Ce ne sont pas les étirements qui vont tout régler, c’est le suivi post compétition qui va permettre une bonne récupération. » En somme, les étirements passifs après l’effort vous permettront de mieux récupérer, de gagner en souplesse et d’améliorer la qualité élastique du corps, ce qui permettra de prévenir des blessures. À contrario, des mauvais étirements avant une rencontre pourraient mettre votre corps en danger...
L’étirement actif
« Ce type d’étirement est l’inverse de la technique précédente. En effet, pour ce type d’étirement, la contraction musculaire est nécessaire. Afin de réaliser l’étirement actif, il faut amener le muscle ou le groupe musculaire en position d’étirement. Une fois que la position adéquate est atteinte, il faut contracter le muscle étiré de façon isométrique (sans mouvement des articulations) », met en évidence le masseur-kinésithérapeute. Contrairement aux étirements passifs, les étirements actifs sont très efficaces avant la pratique sportive. Lucas Michaud ajoute même qu’ils « permettent une amélioration significative de la performance. »
L’étirement actif permet de maintenir les muscles en tension quand l’étirement passif vise à relâcher totalement les muscles. On peut dire que leurs propriétés sont contraires.« Je pense que les étirements d’avant-match ne doivent pas excéder 5 secondes et nécessitent une activation dynamique derrière », estime le préparateur physique. Ce que préconise Maxime Delahaye, ce sont les étirements activo-dynamiques. « À la technique d’étirements actifs vient s’ajouter un autre type de contraction musculaire. En effet, une fois en position d’étirement avec la contraction isométrique effectuée, il faut ajouter un travail dynamique du muscle ou groupe musculaire concerné », rapporte le masseur-kinésithérapeute.

Lors de l’échauffement, il est donc tout à fait possible d’incorporer des étirements, à condition d’y ajouter un côté dynamique. Vous devez contracter le muscle 5 à 6 secondes, pas plus, et dans la foulée, réaliser un exercice en actif. Si vous étirez le quadriceps ou les ischio-jambiers par exemple, vous devez enchaîner avec des montées de genoux ou des talons-fesses. Vous devez travailler le groupe musculaire étiré de façon dynamique pour le maintenir en tension, de façon à ce qu’il soit prêt pour répondre à l’intensité d’un match. C’est également ce type d’étirements qu’il faut pratiquer à la mi-temps d’un match pour se tenir prêt pour la reprise.
« Personnellement, je ne fais pas forcément d’étirements dynamiques, je fais tout simplement du dynamique à l’échauffement à part quand j’individualise pour certains cas psychologiques », confie Maxime Delahaye. En effet, les étirements d’avant-match ne sont pas essentiels pour les joueurs mais certains ressentent le besoin de les effectuer pour être bien dans leur peau et donc performant sur le terrain, ce qui reste essentiel. « C’est une sorte de mythe mais maintenant, il faut en tirer le meilleur. Il faut faire un mix entre le côté psychologique et le travail dynamique », ajoute le préparateur physique.
« Je ne pense pas qu’il soit nécessaire de changer drastiquement les habitudes de certains sportifs persuadés que les étirements leurs apportent un bien être… Il est prouvé scientifiquement que si quelqu’un est convaincu que quelque chose fonctionnera, alors il y a beaucoup de chance que cela fonctionne vraiment : il s’agit de l’effet placebo », soutient Lucas Michaud qui rejoint Maxime Delahaye. Malgré de plus en plus d’études qui démontrent que les étirements ne sont pas aussi importants qu’on puisse le penser, la pratique de ces derniers est entrée dans les mœurs des footballeurs et leur enlever pourrait les chambouler.
Vous l’aurez compris, les étirements qui existent depuis des décennies dans le football relèvent en quelque sorte du mythe. Cependant, les diverses études sur le sujet apportent différents résultats d'une année à l'autre, l'idée n'est donc pas d'arrêter de s'étirer mais plutôt de comprendre comment bien le faire, car jusqu'à preuve du contraire, ces exercices ne peuvent pas pas faire de mal s'ils sont bien effectués. Il est important de comprendre qu’à l’échauffement, entre deux exercices ou à la mi-temps, il faut effectuer des étirements courts et dynamiques pour maintenir les muscles en tension alors qu’au moins 6 heures après la pratique, les étirements passifs plus longs sont suggérés pour faciliter la récupération et prévenir d’éventuelles blessures grâce à l’amélioration de la souplesse. Bien que le monde du football se soit fait une fausse bonne idée des étirements, vous pouvez garder votre routine d’étirements. Veillez juste à bien les effectuer pour le bien de votre corps !
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