Monaco, Lamine Camara : «la course à la Ligue des champions ? On a jamais douté»
Pour sa première saison à l’AS Monaco, l’international sénégalais Lamine Camara a été l’un des meilleurs éléments de l’effectif d’Adi Hütter. Du haut de ses 21 ans, il a montré toutes ses qualités sur les terrains. Pour Foot Mercato, il revient sur son parcours, sa saison et sur ses ambitions à la prochaine CAN avec le Sénégal.

Foot Mercato : l’AS Monaco est assurée de disputer la Ligue des Champions, l’objectif est atteint selon vous ?
Lamine Camara : oui, on va dire ça. Depuis le début, c’était l’objectif du club même si c’est vrai qu’on a connu des hauts et des bas cette saison. À la fin, on a eu ce qu’on voulait.
FM : comment avez-vous vécu cette fin de saison un peu sous pression ?
LC : ce n’était pas tranquille car il y avait des bonnes équipes dans la course. Comme par exemple Marseille qui est devant nous et Strasbourg qui mettait la pression. Et Nice aussi. Après, on s’est concentré sur nous-même, sur nos qualités, car on savait qu’on pouvait le faire. On s’est concentré là-dessus, on a fait le boulot.
FM : vous avez douté ?
LC : des doutes ? Non, jamais parce qu’on connaît notre effectif et les qualités qu’il y a dans ce club. On avait confiance en nous, on savait que si on était serein et qu’on se concentrait sur notre football, on allait le faire. C’est ce qu’on a fait.
FM : le PSG a terminé largement en tête de la Ligue 1. Est-ce que c’était un adversaire trop difficile à battre selon vous ?
LC : le PSG tout le monde l’a vu cette saison. C’est une bonne équipe et ils le montrent même en Ligue des Champions. Ils sont en finale. Il y a des joueurs de grande qualité là-bas. On a joué trois fois contre eux cette saison avec le match à Doha (Trophée des Champions). Ils ont gagné trois fois. C’était des matches difficiles, un adversaire qui nous a posé des problèmes. Mais, on savait qu’il y avait de la place pour les battre aussi. On a même mené 2-0 la dernière fois, mais ils ont fini par remonter. Ils utilisent des joueurs pour nous déstabiliser et ça marche.
FM : quel joueur t’a le plus impressionné là-bas cette saison ?
LC : il y a beaucoup de joueurs. Mais voilà, dans mon poste, avec les joueurs que j’ai affrontés, je dirais Fabian Ruiz qui est un joueur intelligent. Voilà, il est vraiment intelligent dans son jeu, il sait quoi faire avec et sans le ballon. C’est lui qui m’a marqué.
FM : à titre personnel, tu as connu ta première année à Monaco, comment tu juges ta saison ?
LC : je dirais que c’est plutôt une saison réussie. L’année passée, si je ne me trompe pas, j’avais mis 2 buts et délivré 5 passes décisives. Cette année, même si je pouvais marquer plus que les deux buts, j’ai fait 7 passes décisives. C’est pas mal. Je sais que je peux faire plus pour l’équipe, je connais mes qualités, je sais de quoi je suis capable. Cette saison, j’ai réussi à faire ça, et la saison prochaine je ferai encore mieux.
FM : vous avez délivré 7 passes décisives, dont 5 sur coups de pied arrêtés, c’est quelque chose que tu travailles ?
LC : oui, on peut même dire que je travaille beaucoup sur ça. C’est l’une de mes qualités. Après le coach avait aussi remarqué ça chez moi. Donc il m’a aidé à l’exploiter en travaillant précisément les coups de pieds arrêtés. Je suis content que ça aide l’équipe pendant les matches. Je vais essayer d’améliorer ça encore plus.
FM : comment on gère l’intégration quand on passe du FC Metz à l’AS Monaco justement où les ambitions sont complètement différentes ?
LC : au début, c’était difficile car je ne savais pas à quoi m’attendre ici. À Monaco, il y a beaucoup de qualité, il y a tout le temps de la concurrence. À Metz, c’était différent aussi car je jouais le maintien. Les matches étaient plus difficiles qu’ici car à Monaco, tu as la possession, tu as le ballon. C’est une autre dimension. Mes coéquipiers m’ont aidé, l’ensemble du club même. Je me suis bien intégré. Je côtoie des joueurs qui ont beaucoup d’expérience comme Thilo Kehrer, Denis Zakaria ou Breel Embolo. Ils sont expérimentés, aident à se concentrer sur le football et à bien faire les choses.
FM : vous avez quand même eu une trajectoire folle où tu es passé de Génération Foot à l’ASM en seulement 3 ans, il faut avoir la tête solide…
LC : c’est vrai que ça va très vite. C’est le travail, je pense. Je suis toujours concentré sur le terrain, ne pas me laisser distraire par autre chose. Le foot, c’est ma passion et c’est ça que je fais toujours. Ce qui m’aide aussi en dehors du foot, c’est de jouer à la Play chez moi. Et c’est toujours du foot. C’est ça qui m’aide. Et après, c’est du travail derrière pour essayer de faire les choses bien.
FM : à seulement 20 ans, vous avez été deux fois meilleur jeune joueur africain de l’année, vainqueur du CHAN, meilleur jeune du CHAN, vainqueur de la CAN U20, meilleur joueur de la CAN U20, meilleur jeune en phase de poules de la CAN 2023, pépite de la saison en Ligue 1, ce n’est pas facile de garder les pieds sur terre…
LC : ouais, c’est ça que j’ai fait. Je garde toujours les pieds sur terre parce que je sais que le football, ça va vite. Tu peux être dans un moment où tout le monde parle de toi. Mais après, si tu n’es pas concentré, si tu n’as pas les pieds sur terre, tu peux redescendre vite. Heureusement, j’ai un bon entourage et j’ai des gens aussi qui me conseillent tout le temps, qui me donnent des conseils, qui m’aident à garder les pieds sur terre comme je vous l’ai dit. Et je vais continuer sur cette lancée et j’espère que d’autres trophées viendront.
FM : vous avez été formé à Génération Foot, une académie réputée au Sénégal. Quels enseignements tu as tiré de cette formation ?
LC : j’ai beaucoup appris là-bas. À la base, je ne viens pas d’un centre de formation. Génération Foot m’a repéré dans un club. C’est là que j’ai commencé à vraiment connaître les différents aspects du football, les détails. Car moi, je jouais au foot comme ça. Ils m’ont aidé à évoluer. Il y avait des coaches, Olivier Perrin et coach Djiby Fall, qui m’ont appris à mieux me construire. J’ai tout appris là-bas.
FM : passer du Sénégal à la France aussi jeune, ce n’était pas trop dur ?
LC : c’est vrai que c’était dur. Ce n’est pas le même football, c’est autre chose. Je dis toujours que quand tu t’adaptes au football sénégalais, tu peux jouer partout, car là-bas il y a la tactique et l’intensité. C’est ce que je dis à mes potes. Ici, il y a tout. Si tu arrives à t’adapter au Sénégal, pourquoi pas venir en France pour t’améliorer. C’est ce que j’ai fait moi. J’ai trouvé autre chose ici, mais heureusement que j’ai pu me baser sur l’expérience acquise au pays. J’ai plein de choses à améliorer mais je vais continuer sur ma lancée. Ce qui est différent, c’est qu’en France la qualité des joueurs est différente. On le voit bien. Poser le ballon, jouer ce n’est pas trop ça au Sénégal où c’est plutôt une bataille physique.
FM : l’année dernière, vous fêtiez même vitre première apparition avec le Sénégal, vous vous rappelez de ce premier match ?
LC : bien sûr que oui, c’était face à la Gambie (ndlr : il fait référence à son premier match de CAN, sa première sélection étant en réalité face au Soudan du Sud quelques semaines avant).
FM : à la CAN, vous sortez en 8es contre la Côte d’Ivoire. Avec du recul, qu’est-ce que tu retiens de cette élimination ?
LC : ce que je retiens, c’est surtout toute la compétition. Il y avait des joueurs incroyables là-bas, des joueurs expérimentés qui jouent dans des tops clubs comme Sadio Mané ou Kalidou Koulibaly. Ils nous ont appris beaucoup de choses. Sur beaucoup d’aspects. Mon premier match contre la Gambie, je ne pensais pas débuter le match, car il y avait des joueurs comme Gana Gueye. Je m’attendais à ce qu’il débute. Puis le coach Aliou Cissé m’a dit que j’allais être titulaire. Les anciens m’ont aidé car j’étais un peu stressé aussi ce qui est normal. Ils m’ont dit de garder mon sang-froid et de jouer comme je sais le faire.
FM : tu marques deux buts sur ce match…
LC : c’est un moment agréable. Tu joues ton premier match et tu marques un doublé dont un joli but. J’espère que je vais revivre ce genre de moment lors de la prochaine CAN.
FM : je crois savoir que tu as été beaucoup chambré par ton coéquipier Singo qui jouait avec la Côte d’Ivoire…
LC : lui c’est le gars qui me fatigue le plus dans ce club. Je dirais que c’est depuis la CAN. C’est eux qui nous ont éliminé. Après finalement, ils ont gagné et ils méritaient pour ce qu’ils ont fait. Voilà, c’est ça, tant que je n’ai pas gagné une CAN il ne va pas me lâcher c’est sûr, j’ai une mission à faire pour me débarrasser de Singo. C’est un bon gars et un grand frère aussi. Il m’aide sur beaucoup de choses, il m’a aidé à m’intégrer. Donc ça fait plaisir de l’avoir à côté de moi. J’espère qu’il restera longtemps ici.
FM : tu as débuté sous Aliou Cissé qui n’est donc plus le sélectionneur du Sénégal, il te découvre même à Casa Sport à l’époque…
LC : je l’ai croisé il y a très longtemps. J’avais 12 ans. Il était venu dans mon village pour rendre visite. Il y avait mon grand frère qui nous avait ramené pour nous le présenter en disant qu’il fallait aider ces enfants talentueux, mais sans moyens. Et Aliou Cissé, qui avait un club aussi à Ziguinchor, nous avait dit qu’il allait nous aider. Mais on n’avait pas les moyens d’aller à Dakar ni à Ziguinchor nous. Puis je ne l’ai plus vu pendant longtemps, jusqu’à la convocation en A. J’ai pensé à ça directement. Je suis reconnaissant envers lui, j’espère que je vais continuer à le rendre heureux.
FM : le Sénégal dispose d’un très gros vivier au milieu de terrain avec Pape Gueye, Pape Matar Sarr, Habib Diarra, Dion Lopy, Pathé Ciss…
LC : il y a beaucoup de qualité, surtout au milieu. Il y a de la concurrence mais ça nous pousse à faire plus, à nous améliorer et repousser nos limites. Il y a notre grand frère Gana Gueye, malgré la concurrence, il nous aide, donne des conseils. On est dans l’apprentissage et on va suivre les traces de Gueye. J’espère qu’il va rester longtemps pour nous aider.
FM : vous êtes deuxième des qualifications au Mondial derrière la RDC. Vous avez conscience qu’une non-qualification au Mondial serait un gros échec ?
LC : bien sûr. On sait qu’entre le Sénégal d’avant et maintenant, ce n’est plus la même. Les supporters ont besoin qu’on aille à la Coupe du monde. Ce ne sera pas facile, car il y a de très bonnes équipes. Mais l’objectif est d’y aller et rien n’est fait. On va jouer la RDC qui est devant nous et si on gagne ça va changer des choses. On a les joueurs qu’il faut, tout ce qu’il faut. On va se concentrer sur ce match et prendre au sérieux ce match. Aller gagner là-bas pour être tranquille.
FM : dans quelques mois la CAN 2025 aura lieu, quand on a une sélection comme le Sénégal forcément l’objectif, c’est de la gagner ?
LC : l’objectif, c’est d’aller au Maroc et faire des bons résultats. Mais on sait qu’il n’y a pas de petites équipes en Afrique. Il y a d’excellents joueurs partout. Il faudra prendre les matches un par un pour espérer aller au bout.
FM : le Maroc sera à domicile avec un gros vivier, cela ne vous fait pas peur ?
LC : forcément il y a le Maroc, on a tous vu les joueurs qu’ils ont, le coach aussi qui fait du bon boulot. Qui fait du bon travail au Maroc. Il n’y a pas que le Maroc, il y a toutes les équipes qui sont qualifiées. Il faut se méfier de toutes les équipes là-bas. On va d’abord se concentrer des équipes dans notre poule et il faut d’abord gagner ces matchs-là. Le Maroc, j’espère qu’on se croisera en finale et pourquoi pas battre Ben Seghir en finale. On en parle tout le temps. Il dit que le Maroc contre le Sénégal, ils vont nous battre je lui dis : "OK on verra".
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