Le témoignage déchirant de l'ancien Parisien Bruno Rodriguez

Par Mathieu Rault
5 min.
Bruno Rodriguez a terminé sa carrière à Clermont @Maxppp

Ancien attaquant de Metz, Bastia, Guingamp et du Paris Saint-Germain, Bruno Rodriguez est resté dans la mémoire des supporters parisiens après avoir inscrit le but victorieux face à l'OM, lors de la saison 1998-1999. Loin des projecteurs, après une carrière conclue à Clermont en 2005, l'ex-buteur de 49 ans s'est livré sur le cauchemar qu'il a traversé ces derniers mois, après avoir subi une amputation de la jambe droite.

29 décembre 1998. Le PSG conclut son mercato hivernal en s'attachant les services, pour une somme évaluée entre 45 et 50 millions de francs (environ 10 millions d'euros), de l'attaquant du FC Metz Bruno Rodriguez. Le buteur de 26 ans, formé à Monaco, puis passé par Bastia et Strasbourg, s'est révélé chez les Grenats, en inscrivant une trentaine de buts en deux saisons et demi. Arrivé dans la capitale au même moment qu'Helder, Xavier Gravelaine et Mickael Madar, il marque la première vague de recrutement de l'ère Laurent Perpère.

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Le passage à Paris du natif de Bastia est éphémère. Auteur de 5 buts en 19 apparitions pour sa première demi-saison, il fait ses valises dès le mois de septembre, direction Bradford et la Premier League. Il est ensuite transféré à Lens, qui le prête successivement à Guingamp, au Rayo, à Ajaccio et Metz... jusqu'à la fin de son contrat, en 2004. Bruno Rodriguez, c'est 274 matches en carrière, 78 buts et aussi et surtout beaucoup de blessures. Des pépins physiques impossibles à guérir rapidement, et donc atténués par des infiltrations de cortisone.

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Treize opérations puis l'amputation

Opéré à plusieurs reprises de la cheville depuis sa retraite sportive, l'ancien attaquant souffrait également d'une tumeur. En mars dernier, à force de souffrances permanentes, il s'est résolu à l'amputation. Invité à évoquer ce qui ressemble à un parcours du combattant, dans l'émission «Rothen s'enflamme», sur RMC, Bruno Rodriguez est apparu optimiste. «Le moral est bon, tout va bien. Je me remets plutôt bien, ça suit son cours. J’ai ma prothèse qui est en train d’être définitive. J’en ai encore pour un petit mois de rééducation à Chatillon,» a-t-il expliqué, avant de développer les raisons qui l'ont poussé à prendre cette décision.

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«Il y a des entorses mais aussi des infiltrations sur cette même cheville. A l’arrivée, ça a donné une amputation. Il y a eu entre 10 et 15 infiltrations sur cette cheville. Pendant 15 ans, j’ai essayé de me faire opérer. J’ai eu 12 ou 13 opérations dessus. Ça ne marchait pas. Un cartilage ne repousse pas comme ça. Je ne supportais plus la douleur», a-t-il ensuite raconté, décrivant un calvaire quotidien. «Cela faisait quatre ans que j’avais des béquilles. Je passais du lit au canapé. J’avais pris du poids. Entre temps j’ai perdu ma maman. Comme je ne voulais pas qu’elle me voit dans cet état, j’ai attendu qu’elle meure pour me faire amputer».

Des pensées suicidaires

Compétiteur, qu'il soit blessé ou en bonne santé, Bruno Rodriguez n'aurait manqué un match pour rien au monde. Avec du recul, l'ancien joueur regrette le manque de prévention et de protection dans le milieu du football. «Il faut se reposer, prendre soin de son corps. À l’arrivée, si le médecin vous dit qu’il faut jouer, on joue (...) Bien sûr qu’il y a la pression de la concurrence. Il y a des matchs que tu ne veux pas rater. Contre Marseille, je ne devais pas jouer. J’étais sur le banc parce que j’étais infiltré», a-t-il révélé.

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Face à l'OM, il signe justement son heure de gloire sous le maillot du PSG. Sorti de banc, il profite d'une ouverture de Mickaël Madar pour s'offrir un duel gagnant avec Stéphane Porato dans les ultimes instants de la rencontre. Un but décisif et une célébration maillot sur la tête qui resteront gravés dans les mémoires des supporters parisiens de la première heure. De la joie des terrains à la douleur et l'appréhension. Bruno Rodriguez a décidé, de concert avec sa compagne, d'abréger ses souffrances en ayant recours à une amputation. Un choix courageux, qui lui a évité le pire.

«J’ai beaucoup parlé de ça avec mon épouse. On a pris la décision à deux. La douleur permanente entre dans la tête. C’est atroce. Dix-sept ans de douleur, on s’en souvient. Pour vous dire la vérité, j’ai même pensé à me suicider, tellement j’avais mal. Je souffrais beaucoup. Finalement j’ai pris la décision de couper la jambe pour que ça aille mieux. Je n’ai que 49 ans. Les médecins ne me donnaient plus de choix. J’ai dit : "Qu’est-ce qu’on fait?" Le médecin ne veut pas couper la jambe. Moi j’ai dit: "allez on coupe parce que je n’en peux plus. C’est soit on coupe, soit je me jette par la fenêtre."»

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Aucun soutien des instances du football français

S'il dit ne pas en vouloir aux médecins de l'époque, mais plutôt aux clubs, qui cautionnent, et à leur fonctionnement, Bruno Rodriguez regrette aujourd'hui le manque de soutien des instances du football français, après la terrible épreuve qu'il a subie.«On pense toujours que les gens du foot sont des gens bien. On est solidaire dans le foot, vous le savez bien… La FFF ne m’a même pas appelé. Ni les instances du football. Je ne m’attendais à rien mais c’est rare qu’un footeux français se fasse amputé. Je ne comprends pas».

De ses anciens clubs, les ex-Présidents Gervais Martel (RC Lens) et Carlo Molinari (FC Metz), lui ont témoigné de leur soutien. Le Paris Saint-Germain s'est également fendu d'un tweet, alors que les supporters ont témoigné de leur soutien indéfectible. Club de sa ville natale, le Sporting Club de Bastia a également été présent dans les moments difficiles. «C’est la maison, la famille». Aujourd'hui apaisé, Bruno Rodriguez est tourné vers l'avenir. «On peut faire beaucoup de choses, retravailler, reprendre une vie normale, comme tout le monde. On veut créer une fondation ou une association pour véhiculer tout ce qui m’est arrivé et pour aider dans les centres de formation, dans les clubs amateurs, dans le sport en général… Prévenir qu’une infiltration, c’est déjà de trop».

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