Les 4 solutions radicales de Vincent Labrune pour que la Ligue 1 ne devienne pas le championnat de Slovénie

Vincent Labrune s'est présenté ce matin devant la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat. L'occasion pour lui de tirer une fois encore le signal d'alarme et d'annoncer le pire à venir pour le football français. À moins que son plan en 4 étapes ne soit approuvé...

Par Sebastien Denis
6 min.
Vincent Labrune, président de la LFP. @Maxppp

La commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat auditionnait ce matin Vincent Labrune, le président de la LFP. L’occasion pour l’ancien président de l’OM d’exposer ses solutions pour sauver le football français, toujours autant englué dans les problèmes financiers (on évoque un montant de 600 à 800 M€ de perte malgré un apport important des actionnaires des clubs). Malgré l’heure matinale de cette audition, Vincent Labrune, visiblement très inquiet pour l’avenir de la Ligue 1, a exposé son plan en 4 étapes pour sauver le football français.

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Première solution envisagée, la réduction du nombre de clubs en Ligue 1 pour la passer à 18. Un projet qui ne fait pas l’unanimité parmi les 20 présidents de clubs de L1 mais essentiel selon Labrune pour la pérennité du Championnat de France de première division. « Sur le projet de société commerciale, on ne peut pas le déconnecter des projets globaux de réformes que l'on met en place. Tout est lié. Le monde change, la société change, le sport change, le football change et le football professionnel français doit changer radicalement notre approche si on veut être en phase avec la société avec l'évolution notamment des droits sportifs. Quand on décide de réduire le nombre de clubs, déjà c'est pour essayer à terme d'augmenter nos performances sur la scène européenne avec moins de matches en semaine de championnat », explique-t-il d’abord, avant d’aller plus loin dans la réflexion. « Ensuite, c'est pour essayer d'avoir plus de matches premium, de concentrer les talents dans un plus petit nombre d'équipes puisque le marché audiovisuel a radicalement changé ces derniers temps. Et là où on était en situation de commercialiser assez facilement les 10 rencontres de L1, on voit bien aujourd'hui il y a aujourd'hui 2-3 matches qui font l'essentiel de la valeur et on a des études qui montrent qu'on a un ratio de 1 à 30 entre la valeur d'un match top 10 et un match d'un choix 6 à 10. »

Des sociétés anglo-saxonnes pour relancer le football français ?

Une réduction du nombre de clubs, la création d’une société commerciale, autant d’atouts qui permettraient aux clubs français de retrouver des couleurs. « On estime entre 600 à 800 M€ de pertes pour les clubs et on ne va pas les demander à l’État. Les actionnaires ont fait beaucoup d'effort. On n’a pas trop d'autres moyens de créer une société commerciale. Mais il faut qu'on soit tous d'accord aussi bien à la Ligue, qu’à la fédération, au ministère, mais aussi dans les clubs. On a lancé un process avec un certain nombre de conseils il y a plusieurs mois. On aura les premières offres indicatives la semaine prochaine. L'objectif n'est pas de brader nos actifs. Si on n’a rien de satisfaisant, on ne le fera pas. Par contre, si on a une valorisation juste et qui nous permettra de sauver notre système et de faire bénéficier les fonds au monde amateur et qui nous permettra de repartir sur de bonnes bases, oui on se posera sérieusement la question d'avancer », détaille l’ancien boss de l’OM avant d’en dire plus sur le profil des investisseurs. « Le profil des investisseurs, c'est majoritairement des sociétés anglo-saxonnes. On a plus de 60 appels entrants de sociétés intéressés, on a sélectionné une moitié qui étaient capable financièrement de participer au projet. Sur les 30 projets, on a 80 % de sociétés anglo-saxonnes. On a un process très sérieux très encadré et il est hors de question de réitérer les erreurs qu'il nous a été de faire dans le choix du partenaire audiovisuel en 2018. » Que le petit monde du football se rassure, la LFP ne pourra pas prendre seule la décision. Pour créer cette filiale et donc changer les statuts de la Ligue, il lui faudra l’aval de la fédération et du ministère du Sport.

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Enfin, deux autres solutions ont été proposées par Vincent Labrune pour remettre le football français à une place plus conforme à celui qu’il devrait être. « La troisième réforme qu'on met en place pour changer le modèle, c'est la sacralisation de la formation à la française. On souhaite passer le premier contrat pro des joueurs de 3 à 5 ans. On veut bénéficier des talents de cette jeunesse pour qu'elle reste dans ce championnat pour qu'elle reste avec nous plutôt que partir dans les pays étrangers. » Il s’agirait d’une véritable avancée et d’un gain quasi immédiat pour les clubs français qui ne cessent de se faire piller par les clubs étrangers et qui sont parfois obligés de revaloriser trop rapidement les jeunes talents pour qu’ils ne quittent pas le club rapidement. Enfin dernière proposition, qui pourrait s’avérer très fructueuse, la négociation significative des droits domestiques à l’international. « On a fait l'erreur tous autant qu'on est de centrer prioritairement depuis un certain nombre d'années nos revenus domestiques. On a mis des œillères et on s'est concentré sur ces revenus qui ont augmenté de manière exponentielle sans se préoccuper d'aller capter les recettes internationales. Ça nous met un handicap fort par rapport à nos concurrents. On a une vraie volonté de performer sur la scène européenne. À la fois pour capter les recettes de l'UEFA et qui sont très importantes, mais aussi pour permettre à la France de rayonner à l'international. De cette performance sur la scène européenne, on va gagner en notoriété sur la scène internationale et mécaniquement on sera en mesure d'augmenter nos droits internationaux et ainsi créer un cercle vertueux qui serait l'augmentation des recettes sur la scène européenne, des droits internationaux qui nous permettraient de conserver nos meilleurs talents, d'avoir de meilleures audiences et donc de relancer positivement le cercle des droits. »

«Sans argent frais, le Championnat de France deviendra le championnat de Slovénie»

Pour étayer son discours, Vincent Labrune s’est montré particulièrement alarmiste et surtout s’est dit pressé par le temps. « On a, à cause de Mediapro, une perte de 50 % des droits TV domestiques des concurrents européens. Le problème qu’on a, c’est qu’on n’a pas le temps. À très court terme, à l’échéance un an et demi- deux ans, on a l’impérieuse nécessité de recréer une compétition nationale ultra performante, attrayante, spectaculaire pour maximiser notre appel d’offres domestique qui va arriver en 2023. Tout en ayant, dans le même temps, l’impérieuse nécessité d’être surperformant sur la scène européenne sur la même période puisqu’une réforme de l’UEFA se mettra en place en 2024. On est cinquième au classement européen (indice UEFA) et les cinq premiers auront quatre places qualificatives en Ligue des champions qui génèrent des recettes importantes pour les clubs et pour la compétition nationale », relate-t-il avant de tirer clairement et simplement le signal d’alarme.

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« Si on sort du Top 5 européen, le Championnat de France sera définitivement en deuxième division européenne. Si à court terme on n'est pas capable de rentrer de l'argent frais dans les caisses pour nous sauver, rebondir, le Championnat de France deviendra le championnat de Slovénie, avec tout le respect que j'ai pour nos camarades de Ljubljana et ce n’est pas l'objet de notre mission à la LFP. » Reste donc à savoir si le président de la LFP arrivera à mettre son projet sur les rails. Sur le papier, c’est prometteur, reste à savoir ce qu’en penseront tous les acteurs du football français. Et quand on a vu le peu de soutien et de cohérence de ces derniers lorsqu’il s’agit de prendre des décisions fortes, le doute est permis…

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