Que vaut le Shakhtar Donetsk de Roberto De Zerbi ?

Par Aurélien Macedo
7 min.
Roberto De Zerbi lors de la présentation du Shakhtar Donetsk @Maxppp

Désigné comme le futur du coaching italien du haut de ses 42 ans, Roberto De Zerbi a quitté Sassuolo cet été pour le Shakhtar Donetsk. Arrivé au club ukrainien il est train d'imposer tout doucement sa patte et Monaco va devoir se méfier de la formation du Donbass.

Habitué à la Ligue des Champions, le Shakhtar Donetsk a disputé 10 des 11 dernières phases de poules de la compétition. Une régularité dans la performance que l'AS Monaco tentera de mettre à mal demain et la semaine suivante pour le compte des barrages de l'édition 2021/2022. Ce duel s'annonce savoureux et on le doit autant aux joueurs sur le terrain qu'aux coachs sur le banc. Avec les Asémistes, Niko Kovac sort d'une saison solide où il a terminé troisième de Ligue 1 en développant un jeu léché. De son côté, Roberto De Zerbi a réalisé un excellent travail depuis trois ans à Sassuolo et a permis aux Neroverdi de se maintenir en première partie de Serie A. Annoncé dans les petits papiers de l'Olympique Lyonnais et de la Fiorentina, le coach de 42 ans a finalement rallié l'Ukraine. Un choix surprenant de prime abord, mais pas tellement quand on connaît le travail effectué par le club du Donbass.

La suite après cette publicité

Installé dans de bonnes conditions

Malgré le climat de guerre civile dans la région qui l'a poussé à délocaliser au NSK Olimpisky de Kiev, le Shakhtar Donetsk est dans une belle dynamique depuis quelques saisons avec le travail de Paulo Fonseca et Luis Castro. L'an dernier pourtant, le club a lâché son titre au profit d'un Dynamo Kiev très régulier et avait besoin d'initier un nouveau cycle. Adepte d'un jeu offensif et attrayant, Roberto De Zerbi a vite fait l'unanimité et ce dernier s'est reconnu dans ce projet comme il l'a récemment expliqué dans un entretien pour RMC Sport : «les dirigeants ont une vision du football semblable à la mienne. Avant que je signe, j’avais compris qu’ils me suivraient sur le recrutement et il y avait déjà des joueurs qui me plaisaient beaucoup. Je ne demande pas du temps particulièrement, j’insiste plus sur les joueurs et les choses dont j’ai besoin pour travailler.» Dans un environnement sain où il a une vraie influence sur les choix sportifs de son club, il a pu investir. En effet, 47 millions d'euros ont été dépensés sur quatre éléments.

À lire Ligue des Champions : à quoi doit s’attendre le PSG pour ses retrouvailles avec Dortmund ?

Outre le jeune espoir brésilien Vinícius Tobías (18 ans) qui débarque contre 6M€, il a pu ramener Marlon (25 ans, 12M€) dans ses valises, avec qui il a travaillé à Sassuolo. En attaque pour compenser la blessure de Junior Moraes et ajouter une vraie concurrence, il a misé sur Lassina Traoré (20 ans, 10M€) qui sort d'une saison solide avec l'Ajax Amsterdam où il a marqué 8 buts et délivré 8 passes décisives en 18 matches. Enfin, le plus gros transfert est celui de Pedrinho (23 ans, 18M€) qui sort d'une saison compliquée à Benfica. Mis à part cela, Roberto De Zerbi peut s'appuyer sur un effectif stable avec la colonie brésilienne (Junior Moraes, Fernando, Marlos, Tetê, Dentinho, Maycon, Alan Patrick, Marcos Antonio, Dodô, Ismaily et Vitão), des pépites ukrainiennes (Viktor Kornienko, Mykola Matviyenko, Valeriy Bondar, Mykhaylo Mudryk, Georgiy Sudakov, Danylo Sikan et Anatoliy Trubin) ainsi que l'ailier israélien Manor Solomon. Un effectif avec un fort potentiel mélangeant jeunes pousses et vétérans à l'image des quatre Ukrainiens Sergiy Kryvtsov (30 ans), Yevgen Konoplyanka (31 ans), Taras Stepanenko (32 ans) et Andriy Pyatov (37 ans).

La suite après cette publicité

Un style de jeu affirmé

Avec un effectif large et stable ainsi que les renforts qu'il souhaitait, Roberto De Zerbi a pu doucement commencer à développer sa patte. Souhaitant jouer sur la continuité, Roberto De Zerbi a imposé un système, le 4-2-3-1, et a surtout valorisé les jeunes éléments de son effectif pour le moment. La moyenne d'âge de l'équipe dépasse légèrement 24 ans et témoigne une volonté de tourner doucement la page avec la génération de Taison (parti au SC Internacional), Junior Moraes, Ismaily et Marlos. Adoptant un jeu avec une forte possession où la relance par l'arrière se fait avec minutie, le Shakhtar a déjà bien adopté la philosophie de son coach. Si cela demande une continuité et surtout un perfectionnement, on voit une évolution positive. Sans pour autant être en rupture avec ce qui se faisait avant, Roberto De Zerbi demande beaucoup d'effort à son double pivot et à son milieu défensif afin d'aider la relance par l'arrière. Celle-ci faite de passes courtes et rapides permet une remontée propre du ballon même sous pression.

Contre Genk lors du 3e tour préliminaire de la Ligue des Champions, le Shakhtar Donetsk a souvent réussi à se défaire ainsi du pressing belge même si ce dernier était bien exécuté. Cette structure compacte derrière est néanmoins suivie d'un trio offensif assez étalé sur le terrain qui permet d'ouvrir des brèches dans la profondeur. D'ailleurs pour ne pas sombrer dans l'immobilisme offensivement, le Shakhtar dédouble beaucoup sur les ailes entre les ailiers et les latéraux puisque Dodô et Viktor Kornienko (mais aussi Ismaily et Yukhym Konoplya) sont portés vers l'avant. Dans ce genre de situation, les ailiers repiquent souvent dans l'axe afin d'offrir une situation de supériorité dans le cœur du jeu. Capable de proposer différentes animations différentes avec des ailiers qui raffolent des half-space (demi-espaces), ce Shakhtar Donetsk est encore moins prévisible qu'auparavant et dicte davantage son tempo. Positionné en pivot devant, Lassina Traoré travaille beaucoup pour ses ailiers afin de leur offrir des espaces dans la surface adverse.

La suite après cette publicité

Comment cela se traduit dans le dispositif ?

Dans une évolution positive, ce Shakhtar Donetsk à la sauce Roberto De Zerbi s'articule donc en 4-2-3-1 même si la structure peut varier entre le 4-1-4-1 et même le 3-1-3-3 ou le 2-3-2-3 lors des séquences offensives où les latéraux se portent très haut. Dans les cages, le jeune Anatoliy Trubin (19 ans) est indiscutable et s'appuie sur sa belle saison passée. Devant lui, les couloirs sont occupés en général par Dodô (22 ans) et Viktor Kornienko (22 ans). D'ailleurs, ce dernier peut aussi être suppléé par Ismaily (31 ans) ou Mykola Matviyenko. Installant Marlon dans l'axe qu'il a justement fait venir de Sassuolo pour mieux appliquer son jeu, Roberto De Zerbi compte aussi sur Mykola Matviyenko (25 ans) et Vitão (21 ans) dans ce secteur. Le jeune Valeriy Bondar (22 ans) pourrait réintégrer l'équipe en cours de saison, lui qui est toujours convalescent après une rupture des ligaments croisés.

Dans l'entrejeu, il a relancé la sentinelle Taras Stepanenko (32 ans) et installé une concurrence entre Maycon (24 ans) et Marcos Antonio (21 ans). Plus haut, il y a aussi une lutte à deux pour le poste de milieu offensif entre Alan Patrick (30 ans) et Pedrinho (23 ans). Ce dernier qui a l'habitude de jouer ailier doit s'adapter à ce rôle de meneur de jeu hybride tandis que son compatriote et désormais coéquipier a un peu plus d'expérience dans ce registre). Devant, Manor Solomon (22 ans) et Tetê (21 ans) ont été définitivement installés tandis que Lassina Traoré (20 ans) est titulaire indiscutable. Dans des rôles de remplaçants, Georgiy Sudakov (18 ans), Danylo Sikan (20 ans), Marlos (33 ans) et Mykhaylo Mudryk (20 ans) ont été les plus utilisés pour le moment. Ayant déjà identifié ses joueurs clefs et élaboré une hiérarchie dans son groupe, Roberto De Zerbi a bien avancé.

La suite après cette publicité

Qu'est ce que ça donne sur le plan comptable ?

Si le style de jeu, la philosophie et la gestion humaine sont importants, Roberto De Zerbi sera surtout jugé sur ses résultats et pour le moment ça se déroule très bien. Avec deux victoires, un nul et une défaite en préparation, il a enchaîné avec 4 matches de championnats et 2 rencontres de Ligue des Champions. Opposé à Genk pour le compte du 3e tour préliminaire, le Shakhtar Donetsk s'est montré sérieux et appliqué avec deux succès sur le score de 2-1 face à une belle équipe belge. En championnat, le bilan est aussi positif avec 3 victoires contre Ingulets Petrove (2-1), Lviv (3-0) et le Metalist 1925 Kharkiv - qui n'est pas le Metalist Kharkiv où évolue Farès Balhouli - (2-0). Seule ombre au tableau, une courte défaite 2-1 contre le FK Oleksandriya. Si le Shakhtar Donetsk peut encore faire mieux, c'est pour le moment très cohérent.

Un homme sort particulièrement du lot sur ces premiers matches puisque Lassina Traoré compte déjà 4 buts en 6 matches toutes compétitions confondues. Pourtant jeune, le Burkinabé se distingue surtout comme le seul joueur doté d'une grosse efficacité face aux buts. En effet, ses coéquipiers sur le front de l'attaque n'ont pas des statistiques aussi impressionnantes puisque le meilleur buteur du Shakhtar Donetsk l'an dernier était Manor Solomon avec 11 buts toutes compétitions confondues. Son arrivée ne sera donc pas forcément de trop même si l'effectif des Mineurs a l'habitude de partager les réalisations. Disposant d'un premier bilan encourageant, Roberto De Zerbi passe son premier gros test contre Monaco. Une élimination ne serait pas dramatique puisque le Shakhtar Donetsk ne manquera pas d'ambition en Ligue Europa. Cependant, cela serait la première tâche du passage de l'Italien en Ukraine, surtout contre une équipe d'un niveau censé être similaire. L'AS Monaco est prévenue.

La suite après cette publicité

Fil info

La suite après cette publicité