Benzema, Nasri, Ben Arfa : les confidences d’Ahmed Yahiaoui sur la Génération 87

Par Dahbia Hattabi
7 min.
Ahmed Yahiaoui passe en revue la Génération 87 @Maxppp

Lors du dernier rassemblement de l’Equipe de France en mars dernier, Karim Benzema et Benoît Costil étaient les seuls rescapés de la fameuse Génération 87. Une génération dorée et talentueuse qui devait être l’avenir du football français. Parmi les grands espoirs qui n’ont pas percé au plus haut niveau, on retrouve Ahmed Yahiaoui. Pour Foot Mercato, le joueur formé à l’OM passe en revue la promotion 87 et les attentes dont elle a été l’objet.

Il y a dix ans, Ahmed Yahiaoui représentait l'avenir du football tricolore. Champion d'Europe U17 avec l'Equipe de France en 2004 et grand espoir de l'Olympique de Marseille, le milieu de terrain avait toutes les qualités pour percer au plus haut niveau. Un avenir doré, voici donc ce qui s'offrait à l'un des piliers de la Génération 87. «Il y a dix ans en arrière, je me voyais aller très loin. Peut-être pas au niveau de Karim (Benzema) ou Samir (Nasri). Mais sans prétention, si j’avais suivi la même ligne de conduite que mes amis, j’aurais pu faire quelque chose. J’avais été invité par Chelsea mais j’étais sous contrat avec l’OM. Je suis conscient d’être passé à côté de quelque chose de grand». Si Ahmed Yahiaoui n’a malheureusement pas eu la carrière qu’il méritait, le joueur qui évolue désormais à Martigues en CFA suit de loin le parcours de ses camarades de la promotion 87. Une génération talentueuse où seuls Karim Benzema et Benoît Costil figuraient lors du dernier rassemblement des Bleus.« Je pense que c’est trop peu, confie Ahmed Yahiaoui. Sans clasher les joueurs, c’est tout à leur mérite d’être à la place où ils sont ; mais c’est triste quand tu vois la qualité de certains joueurs qui prennent leur place et qui n’ont pas du tout le même niveau. Je ne dis pas ça parce que ce sont des potes. On peut dire ce qu’on veut, que c’est dans la tête, qu’il faut un groupe sain, etc...Les joueurs qui ne sont pas sélectionnés, on s’aperçoit qu’ils jouent dans de très grands clubs européens et sont souvent décisifs. Bizarrement, pour x raisons, ils ne sont pas sélectionnés. Je trouve que c’est illogique. Mais c’est le football en France. Je précise bien en France ».

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Benzema, l'exemple

Malgré tout, certains tirent leur épingle du jeu. Le meilleur exemple est Karim Benzema qui réalise un parcours quasi sans faute. « C’est celui qui a le mieux réussi parce qu’il a tout gagné en club. Il est au Real Madrid, l’un des plus grands clubs. Pour moi, il fait partie des meilleurs attaquants au monde ». Une trajectoire qui ne surprend par Ahmed Yahiaoui : « Quand j’ai commencé à jouer avec Karim, c’était clair et net qu’il allait être un joueur de qualité, de haut niveau. Pour moi, il n’y avait pas de doutes là-dessus. Après je ne vais pas mentir, je ne savais pas qu’il irait au Real Madrid. Je voyais plus Hatem voire Samir avoir l’image que Karim a maintenant ». Capitaine des Bleus face au Brésil, il est l’attaquant français n°1 à l’heure actuelle. Un statut que le joueur aux 78 capes doit à ses efforts. Interrogé par Le Parisien, KB9 avait déclaré que ses camarades de la promo 87 n’avaient peut-être pas assez fait de sacrifices en sélection. Un avis que partage partiellement Ahmed Yahiaoui. « Oui et non. Je mets la faute sur la mentalité française. Je dirai qu’en quelque sorte, c’est Karim qui avait plus ou moins la tête sur les épaules pour gérer la mentalité qu’il y a ici. C’est dû je pense à toutes ses années au Real Madrid ».

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Outre Benzema, on pouvait s’attendre aussi à voir Jérémy Ménez chez les Bleus. Sa dernière sélection remonte au 26 mars 2013, soit il y a un peu plus de deux ans. Mais un retour reste possible.« C’est celui qui n’a pas grillé totalement toutes ses cartes. Je pense qu’il lui en reste une et qu’il en est conscient. Il le mérite parce qu’il montre de très belles choses au Milan AC. Souvent quand on voit un but du Milan, c’est lui qui a marqué ou fait marquer. C’est un bosseur. Je ne vois pas pourquoi il ne serait pas rappelé ». En revanche, cela paraît plus compliqué pour Hatem Ben Arfa, celui qui devait être le Messi de la Génération 87 d’après Benzema. Le joueur sans club depuis l’épisode de son transfert annulé à Nice n’a pas eu le destin qu’on lui prédisait malgré des qualités évidentes. « Ce n’est pas une question de caractère. Il en avait déjà plus jeune à Clairefontaine puis à Lyon. Il a eu des écarts de conduite comme beaucoup d’adolescents. En pros, je n’ai pas le souvenir de gros écarts hormis quand il voulait partir. Connaissant bien Hatem, je pense qu’il a été mal géré par certaines personnes. On se répète quand on dit ça mais c’est une réalité. L’homme n’est pas mauvais. Il est poli et intelligent. Mais il a fait confiance à de mauvaises personnes qui l’ont malheureusement mal conseillé ».

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Nasri, une fierté

Parmi tous ses camarades de la promo 87, Ahmed Yahiaoui est forcément plus loquace lorsqu’il s’agit de parler de Samir Nasri. Un ami avec lequel il a fait ses classes minots du côté de Marseille. Il lui avait d’ailleurs dès cette époque-là prédit un bel avenir. « Je ne suis pas du tout étonné par sa carrière. C’est comme si on pouvait dire que j’avais vu son futur. Depuis qu’on avait 9-10 ans, je lui disais déjà. C’était une évidence. Je savais que c’était la suite des évènements pour Samir parce qu’il avait des qualités de fou furieux. C’est celui avec lequel j’ai joué le plus d’années possible. Il montrait des choses irréelles. C’était clair qu’il allait jouer dans les meilleures équipes européennes. Pour moi, Samir a bien réussi sa carrière. Une carrière de footballeur ça ne rime pas forcément qu’avec les sélections nationales. Il évolue dans l’un des cinq meilleurs clubs du monde ». Le Frenchy s’est effectivement imposé à Manchester City. Mais il a connu des passages beaucoup plus compliqués sous un autre maillot bleu, celui de l’Équipe de France.

Un passage qui reste un échec dans l’ensemble vu le talent et le niveau de Nasri. « Un échec, ce n’est pas le mot approprié. Pour moi, ça n’est pas un échec. C’est une petite déception. Mais pas énorme », précise Yahiaoui avant d’évoquer les problèmes de comportements qui ont coûté à Nasri une place pour le Mondial 2014. « Je connais Samir par coeur. Il a été super bien élevé. Il n’a jamais eu de problèmes avec les clubs ou les entraîneurs auxquels il a eu à faire. J’insiste là-dessus, mais c’est une mentalité que l’on a en France. On lui a collé une image. Je sais ce qu’il s’est passé en interne et ce qu’on lui a mis sur le dos. La raison pour laquelle on n’a pas pris Samir, est une raison extrasportive. Ce qu’on a entendu sur le côté mauvais garçon, je le dis on ne peut pas faire une grande carrière dans de grands clubs et avoir des problèmes. Ce n’est pas possible. Donc on le sait que la sélection est une vitrine et qu’un mauvais comportement n’est pas admis. Ça on ne l’apprend pas à Samir. Même s’il a son caractère, croyez-moi sur parole il le sait ».

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Une Génération 87 trop attendue ?

À 27 ans et après 41 capes, Nasri a finalement décidé de prendre sa retraite internationale. Un choix qu’approuve totalement Ahmed Yahiaoui : « La sélection ne veut plus de lui et il se concentre pleinement sur son club. Connaissant Samir, je sais que c’est quelqu’un qui ne se rabaisse pas. La retraite internationale c’était la suite logique des évènements. J’étais même fier quand il a dit qu’il arrêtait la sélection. Ca va peut-être choquer des gens mais j’étais fier ». Une décision ferme et définitive pour le moment pour l’un des joueurs phares de la fameuse Génération 87. Une génération dont on attendait beaucoup plus vu les nombreux talents qui y figurait. Mais le problème est peut-être là. A-t-on beaucoup trop attendu de cette promotion dorée ? « Oui peut-être qu’on en a trop attendu. On avait trop les yeux braqués dessus. Après c’était logique. C’étaient des joueurs de haut niveau et on attendait beaucoup d’eux. Je me dis que c’est une chose normale. On ne peut pas avoir que le bon côté de la chose. On attendait beaucoup d’eux, ils ne l’ont pas bien rendu. Après il ne faut pas oublier le fait que l’on est en France et qu’on a une mentalité assez bizarre. On peut se braquer sur les joueurs de haut niveau et on a pour habitude de très vite les descendre. Il ne faut pas oublier qu’un joueur de l’Equipe de France est un joueur de notre nation. On est là pour essayer de le mettre au mieux plutôt que de le couler. On est tous des hommes avant d’être des joueurs. Il y en a à qui ça a peut-être fait plus de mal pendant les périodes de moins bien. Mais pour moi, aujourd’hui c’est illogique que certains ne soient pas sélectionnés sous différents prétextes. En sélection, on te sélectionne pour jouer au foot », conclut Ahmed Yahiaoui, l’un des talents gâchés de la très célèbre Génération 87.

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