OL - Jeff Reine-Adelaïde, autopsie d’un malaise

Par Dahbia Hattabi
7 min.
@Maxppp

Un cri du coeur. En début de semaine, Jeff Reine-Adelaïde a donné plusieurs interviews dans lesquelles il laissait paraître un malaise et des envies de départ un an seulement après son arrivée à l'OL. Comment en est-on arrivé là ? Voici quelques éléments de réponse.

Un sourire qui en disait long. Le 14 août 2019, Jeff Reine-Adelaïde devenait officiellement un joueur de l'Olympique Lyonnais. Courtisé par plusieurs écuries, dont l'AS Monaco, le joueur né en 1998 optait pour le projet proposé par les Gones. «L’Olympique Lyonnais est très heureux d’annoncer le transfert du milieu de terrain international Espoir Jeff Reine-Adélaïde en provenance d’Angers SCO pour un montant de 25 M€ auquel pourra s’ajouter un maximum de 2,5 M€ d’incentives et un pourcentage de 15% à la revente en cas de plus-value». Un investissement important de la part du club présidé par Jean-Michel Aulas. Un président qui avait suivi Florian Maurice, grand fan de JRA, sur ce coup. On le sait, Juninho et Sylvinho préféraient, à l'époque, le profil de Suso. Quoi qu'il en soit, l'ancien joueur d'Arsenal débarquait à Lyon avec des ambitions et des rêves plein la tête, lui qui était décidé à passer un nouveau cap dans sa carrière.

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Avec Sylvinho puis Rudi Garcia, il n'a pas enchaîné les titularisations

«Aujourd'hui, je suis très heureux de signer à l’OL. C’est un privilège pour moi car c'est un club historique. Il y a beaucoup de joueurs qui ont fait une très belle carrière ici. L’aspect sportif aussi est important, c’est un beau projet pour moi (...) Il y a des installations incroyables. Il y a la Ligue des Champions aussi qui est une compétition importante», avait-il confié. Ambitieux et motivé, il devait patienter avant de faire ses grands débuts à l'OL. Lors de la deuxième journée, le 16 août, il assistait à la victoire de son équipe face à Angers (6-0) depuis les tribunes, lui qui avait été présenté quelques heures plus tôt. Puis, il n'était pas entré en jeu face à Montpellier (3e journée, 27 août). Il faisait ainsi ses premiers pas sous le maillot lyonnais le 31 août à l'occasion du match face à Bordeaux (4ème journée, 64 minutes jouées). Après avoir passé la trêve avec les Espoirs, où Sylvain Ripoll compte sur lui, JRA enchaînait le 13 septembre face à Amiens (5ème journée, 78 minutes jouées) puis face au Zenit en Champions League (17 septembre).

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Une compétition qu'il découvrait et où il a brillé lors de ce match (85 minutes jouées). Cinq jours plus tard, il était de nouveau titulaire face à Paris en L1 (71 minutes jouées). Suite à cela, il a alterné entre passages sur le banc (entrée en jeu contre Brest, remplaçant face à Leipzig et l'ASSE) et une titularisation (Nantes). Sa non-entrée en jeu lors du derby en octobre avait d'ailleurs été un premier tournant. Sylvinho parti, les cartes allaient être redistribuées avec l'arrivée de Rudi Garcia. Un coach qui avait expliqué apprécié le profil de JRA en conférence de presse. «Il est pétri de talent c'est un joueur que l'OL a bien fait de recruter. Il faut travailler encore avec Jeff, notamment sur son agressivité avec et sans ballon. Il doit faire plus de passes décisives, marquer plus de buts. Il doit être plus agressif dans ces gestes. Contre Dijon, il fait une bonne entrée mais il n’a pas conclu. Il doit aussi avoir plus de qualité de récupération pour postuler au milieu. Je compte autant sur lui que sur tous les autres».

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Une grave blessure au genou en décembre

Pourtant, les paroles n'ont pas été vraiment en concordance avec les actes. A l'arrivée de Garcia, JRA, qui a été la recrue estivale la plus à son avantage mais qui devait être encore plus décisif, a encore enchaîné entre titularisations (Metz, Toulouse, Benfica, OM) et passages sur le banc (Dijon, Benfica). Surtout, le natif de Champigny-sur-Meine n'avait terminé aucune rencontre. Il était même systématiquement le premier joueur sorti par Rudi Garcia. Cela avait été notamment le cas à l'Orange Vélodrome lors du choc face à l'OM (10 novembre), puisqu'il avait sorti à la mi-temps. Une terrible désillusion pour le jeune homme. De son côté, Rudi Garcia avait expliqué sa sortie par le fait qu'il voulait renforcer son milieu. Un choix que même André Villas-Boas, entraîneur de l'OM, n'avait pas compris. Quelques jours plus tard, le 23 novembre, JRA était de nouveau sacrifié par son coach face à Nice après le carton rouge de Marçal. Le Français, qui avait été remplacé à la 36ème minute, avait indiqué avoir eu des explications avec Garcia après ce nouvel affront.

Derrière, il enchaînait avec 3 titularisations (Zenit, Strasbourg, Lille) puis deux passages sur le banc (entrée face à Nîmes et Leipzig). Il retrouvait le onze de départ le 15 décembre à l'occasion de la réception de Rennes. Mais il était de nouveau maudit puisqu'il se blessait très gravement tout comme Memphis. JRA, qui n'a donc jamais enchaîné plus de 4 ou 5 matches de suite en tant que titulaire, était victime d'une rupture du ligament croisé antérieur du genou droit. Touché mais pas coulé, l'ancien du SCO promettait de se battre et de revenir plus fort. Après avoir travaillé d'arrache-pied, il a retrouvé le groupe lyonnais en juin. Il a même pu rejouer en amical avant d'entrer en jeu face à la Juventus (24 minutes), Manchester City (4 minutes) et le Bayern Munich (24 minutes). Même si le onze de l'OL tournait bien, JRA attendait patiemment d'avoir sa chance. Il pensait l'avoir face à Dijon (28 août) puisque Garcia devait faire sans Houssem Aouar, forfait (covid-19). Mais l'entraîneur de l'OL préférait aligner un trio Memphis-Dembélé-Toko Ekambi. Un trio qui se marchait d'ailleurs dessus et qui n'était pas vraiment au point, malgré le triplé de Depay.

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Dijon, la goutte d'eau

Ce choix a été très mal vécu et a été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase d'un JRA, qui est entré en jeu comme Cherki et Bard. Et en début de semaine, il a fini par lâcher ce qu'il avait sur le coeur dans un entretien à L'Equipe. «Il y a un discours la semaine et un autre le week-end. C'est un peu bizarre. J'ai de la frustration par rapport à ce que je dégage aux entraînements, ce que je rends sur le terrain (...) Il doit y avoir des échanges avec le club. Le discours de l'Olympique Lyonnais et le mien ne sont plus en adéquation, donc il doit y avoir des discussions pour parler d'un éventuel départ. Je ne vois pas forcément mon avenir proche à Lyon. Ma progression est arrêtée depuis un moment et il faut qu'on trouve une solution. J'ai besoin d'avancer. Oui, j'ai déjà parlé à ce sujet avec le coach et même avec le directeur sportif (Juninho ndlr). Ils sont au courant de ma frustration. Pour eux, je suis devenu un joueur "d'avenir"...» Une sortie médiatique qui traduit un certain malaise et qui interpelle puisqu'elle vient d'un élément discret et qui, comme on a pu le constater, n'a pas vécu une première saison facile à Lyon.

Du côté de l'OL, justement, on ne s'attendait d'ailleurs pas du tout à cette sortie coup de poing nous assure une source proche de l'écurie rhodanienne. Plus que les choix sportifs, c'est surtout la gestion humaine et le management avec un double discours qui semblent peser sur le joueur dont le contrat prend fin en 2024. Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que cet aspect de la gestion de Rudi Garcia est pointé du doigt. A l'OM, Dimitri Payet en avait parlé. Quoi qu'il en soit, malgré sa sortie médiatique et le fait qu'il ait entrouvert la porte à un départ, du côté de l'OL, on nous assure qu'on compte sur JRA cette saison. Pourtant, si le départ d'Aouar est possible mais encore loin d'être assuré, l'OL a exploré des pistes dans l'entrejeu. Wylan Cyprien et Tiémoué Bakayoko ont bien été approchés. Ce qui est un mauvais signal envoyé puisque Lyon compte déjà beaucoup de joueurs dans ce secteur de jeu. Souriant et discret, Jeff Reine-Adelaïde a manifesté un certain ras-le-bol, voire écœurement, dans la gestion humaine et sportive. Des explications devraient avoir lieu une fois de retour à l'OL, lui qui est en sélection. Ensuite, quand Garcia fera appel à lui, il devra saisir sa chance et parler sur le terrain avec le ballon. Un langage qu'il maîtrise.

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