Elliot Grandin : « quand vous avez 20 ans et que l’OM vous appelle…»

Par Augustin Delaporte
6 min.
Grimsby Town Elliot Grandin @Maxppp

On l’avait quitté fin janvier en 16es de finale de Coupe de France avec le maillot de la Jeunesse Saint-Pierroise sur le dos, le voilà joueur de Grimsby Town. Une occasion toute trouvée pour discuter avec lui de football anglais et de l’Olympique de Marseille, son club de cœur.

Foot Mercato : vous avez rejoint le club de Grimsby Twon, pensionnaire de quatrième division anglaise, durant le mercato d’hiver. Après une pige d’un an à la Réunion, c’est un sacré changement de vie.

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Elliot Grandin : avec ma famille, on connaît déjà bien l’Angleterre puisque j’y ai passé cinq ans (à Blackpool puis Crystal Palace, entre 2010 et 2014, et ensuite à Shrewsbury Town en 2016, ndlr). Après, c’est clair que c’est l’opposé, tant au niveau du temps que de la mentalité. La Réunion, c’est le soleil avec trente degrés toute l’année, c’est relax, alors que l’Angleterre, il pleut. Même au niveau du football, c’est différent. Ça va beaucoup plus vite ici.

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**FM : la présence de votre ancien entraîneur à Blackpool et Palace, Ian Holloway, a pesé dans votre décision ?**

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EG : on a une superbe relation. Tant sur le plan footballistique que sur le plan humain. Donc bien sûr que ça a pesé. Je dirais même que c’est parce qu’il est là que je suis là. C’est le facteur qui a fait pencher la balance pour que je revienne en Angleterre.

**FM : la quatrième division, qui est professionnelle en Angleterre, cela correspond à l’idée que l’on peut s’en faire ?

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EG :** c’est très physique. Plus athlétique que technique. C’est du jeu direct, ça presse dans tous les sens, c’est non-stop pendant quatre-vingt-dix minutes. Il n’y a pas de temps faible.

**FM : les joueurs français qui arrivent en Angleterre s’étonnent souvent de l’intensité à l’entraînement. Comment sont les séances à Grimsby ?

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EG :** ce sont des entraînements très physiques. Tout le monde est à deux cents pour cent. C’est très différent de ce que j’ai pu connaître en France. Ça bosse dur à l’entraînement. Même quand on fait des petits jeux, des 5 contre 5, ici c’est à fond, ça envoie des tacles et tout ! (rires)

FM : au regard de votre carrière, vous semblez particulièrement séduit par le football britannique…

EG : la mentalité, l’atmosphère dans les stades, les supporteurs… Ce sont vraiment des gens habités par le foot. C’est parfois étonnant la ferveur qu’il peut y avoir. J’étais surpris, pour mon premier match à Bradford, il y avait 17 000 supporteurs (17 668 pour être exact, ndlr) ! Il y a une atmosphère dans les stades qu’il n'y a nulle part ailleurs. L’Angleterre, ça fait partie de ma carrière, de ma vie.

**FM : le public vous a, lui aussi, déjà adopté…

EG :** c’est comme ça en Angleterre. Il ne regarde pas ce que vous avez fait ailleurs, c’est ce que vous faites pour le club qui les intéresse. Et s’ils sont contents, ils sont toujours derrière vous.

**FM : en France, le souvenir que vous avez laissé, c’est celui d’un joueur de l’OM (entre janvier 2008 et août 2009). Une signature qui avait d’ailleurs étonné les observateurs. Comment l’aviez-vous vécu ?

EG :** j’étais jeune et insouciant. Pour moi, c’était un rêve d’enfant qui se réalisait, de signer dans mon club préféré en France. En plus, à l’époque, il y avait de très bons joueurs. Cela restera un très bon souvenir. Je suis encore proche de pas mal de joueurs de l’époque. Ce n’est que du positif quand on me parle de Marseille.

**FM : vraiment ?

EG :** oui, j’en garde que de bons souvenirs. J’ai découvert mon club de cœur, j’ai découvert le Vélodrome, les supporteurs ont toujours été derrière moi, j’étais jeune, on s’est qualifiés pour la Ligue des Champions. Pour moi, Marseille, ça restera inoubliable. Surtout à cette époque-là, avec Éric Gerets, de très bons joueurs, c’était génial quoi !

**FM : avec le recul, vous pensez que vous étiez trop jeune pour laisser une empreinte durable dans un club comme l’Olympique de Marseille ?

EG :** peut-être aurait-il fallu que je fasse une année ou deux en Ligue 1 pour m’aguerrir avant de signer. Mais quand vous avez vingt ans et que l’OM vous appelle, ce n’est pas évident de refuser. Donc d’un côté, j’aurais dû m’aguerrir avant, mais de l’autre, je suis vraiment content d’avoir vécu ce moment de ma vie.

**FM : vous vous souvenez de ce qu’il s'est passé dans votre tête la première fois que vous avez enfilé le maillot de l’OM ?

EG :** la sensation, elle est extraordinaire. Ensuite, il faut vite essayer de revenir à la réalité et au terrain. J’ai eu de la chance, ma première s’est très très bien passée (un but et une passe décisive face à l’AS Monaco en…16es de finale de Coupe de France, ndlr). Ça m'a permis de m'adapter rapidement.

**FM : vous suivez encore le club ?

EG :** bien sûr. Je suis en Angleterre mais il y a la télé française ! (rires)

**FM : peu avant votre départ de Caen pour Marseille, votre entraîneur de l’époque, Frank Dumas, avait déclaré : «cela fait deux ans qu'il m'emmerde, je suis désolé de dire ça, mais à chaque fois qu'il doit jouer, il est en boîte la veille. Peut-être qu'en l'éloignant de ce qui le retient à Caen, dans un grand club, il comprendra ce qu'est le haut niveau.»

EG :** ce n’était pas justifié. Mais à l’époque, Caen veut me faire prolonger depuis deux ans et moi, je refuse. Les négociations traînent. Si c’était le cas (les propos de Frank Dumas, ndlr), ils auraient voulu me vendre deux ans auparavant. Mais bon, c’est derrière maintenant.

**FM : c’est un moment que vous avez eu du mal à digérer ?

EG :** non, pas du tout. Moi, ma famille, tout le monde est au courant de comment je suis. On n’a pas trop fait attention. Cela a pris de l’ampleur dans les médias mais nous, on le vivait avec beaucoup de recul. Après, ce n’est pas fair-play de sa part d’avoir dit ça à l’époque. C’était mon club formateur, j’y ai vécu des moments superbes, donc c’était dommage d’entacher mon image comme ça. Mais je n’ai aucun remord, rien du tout. Cela reste mon club formateur.

**FM : vous êtes quelqu’un qui, globalement, n’a pas de regrets.

EG :** ça ne sert à rien de vivre avec des regrets. Il faut profiter de la vie, il faut réaliser ses rêves, enfin les possibles, ou au moins s’en donner les moyens. Aujourd’hui, j’ai 32 ans, je suis épanoui, je suis bien dans ma vie que cela soit avec ma famille ou sur le plan footballistique, donc je n’ai aucun regret. J’ai réalisé mes rêves de gosse, je continue de faire ce que j’aime…

**FM : c’était quoi vos «rêves de gosse» ?

EG :** devenir footballeur professionnel, tout simplement (sourire). On peut toujours dire que ma carrière aurait pu être mieux, mais il y a aussi des gens qui n’ont pas la chance de faire carrière donc il faut savoir apprécier ce que l’on a.

**FM : vous commencez à penser à votre reconversion ?

EG :** un petit peu. Je peux encore jouer quelques années mais c’est important de penser à l’après. J’aimerais rester dans le milieu du football puisque c’est toute ma vie. C’est compliqué de totalement quitter ce monde-là. On verra. Pourquoi pas intégrer une cellule de recrutement ou passer des diplômes d’entraîneur.

**FM : vous dites que le football c’est toute votre vie. Qu’auriez-vous fait s’il n’existait pas ?

EG :** (silence)… Bonne question. C’est très difficile de s’imaginer sans le football. Je pense que j’aurais continué les études et que je serais resté dans une filière sportive… J’aurais sûrement été prof’ de sport ou quelque chose comme ça.

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