Antonio Di Natale, la trentaine rugissante

« Je n’ai jamais pensé à quitter mon club. Pour moi, il n’y a qu’une seule tunique, et c’est la bianconera de l’Udinese. Quand tu marques autant de buts en tant d’années, il n’y a pas de Juve qui tienne. » Antonio Di Natale ne se fait jamais prier pour répondre à la fameuse question. Celle de savoir pourquoi il n’a jamais songé à quitter l’Udinese, où il évolue depuis 2004, alors que son niveau pouvait lui laisser envisager carrière plus ambitieuse dans un prestigieux club de la plaine du Pô. Le Milan a tenté, la Juve aussi. Surtout la Juve. Mais à chaque fois, le même refus. Pourquoi ? Parce que Totò a préféré être roi en province plutôt qu’une simple valeur ajoutée dans un grand club. Certains y verront un manque d’ambition, une difficulté à affronter la pression inhérente au quotidien dans une grosse écurie. Il y a peut-être de ça. Mais il y a aussi l’amour du maillot.

Di Natale, avec ces neuf ans de Frioul derrière lui, apprécie la situation qui est la sienne. Il n’a pas eu la gloire ? Il a le soutien inconditionnel d’un stade, le Friuli, à chaque fois qu’il joue chez lui. Il ne gagne pas de titre ? Chaque saison passée dans l’élite est une victoire. Voilà son quotidien de bandiera, concept italien du « un homme-un club » incarné par des hommes comme Totti, et qui malheureusement s’essouffle dans un football moderne noyé par les millions d’euros. Les années glissent, ces vieilles gloires résistent. Et Di Natale de continuer à marquer, à marquer encore, pour repousser toujours plus loin le record qu’il détient déjà de meilleur buteur de l’histoire du club frioulan. Lui qui en est actuellement à 181 unités en 349 apparitions sous le maillot bianconero est d’ailleurs le buteur italien le plus prolifique des dernières saisons, en ayant passé quatre saisons de rang la barre des 20 buts en Serie A (29 en 2009/2010, puis 28 et par deux fois, 23).

Peut-être Totò ne parviendra-t-il pas à prolonger cette folle série, alors qu’il a démarré sa saison petit trot – 3 buts en 7 matchs jusqu’à présent. Tout du moins, une nouvelle performance semblable lui ouvrirait peut-être les portes d’une compétition qui lui est chère. « Moi aussi, je rêve du Mondial au Brésil. Mais je n’y pense pas. Je pense seulement à bien faire avec l’Udinese. Prandelli sait très bien ce que je peux lui apporter et me connaît. Si je marque encore 20 buts, peut-être qu’il y pensera. » Toujours est-il qu’à 36 ans, il n’envisage pas d’arrêter de sitôt. Début juillet, l’idole d’Udine a prolongé son bail, repoussant l’échéance à 2015. D’ici là, il entend, comme nombre de ses compères attaquants trentenaires, faire de la résistance. « Toni a toujours marqué, Gila continue à le faire, Totti est unique, le numéro un. Vous savez quel est mon grand regret ? Qu’on n’ait jamais pu jouer ensemble. » Mais Di Natale ne le sait probablement que trop bien : c’est bien son destin de bandiera, qui a rendu la chose impossible.