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Laurent Lairy, président du Stade lavallois : «je vais mettre une petite étoile dans le logo»

Par Maxime Barbaud
10 min.
Laurent Lairy, le président du Stade lavallois, au milieu de ses joueurs lors de remise du trophée de National @Maxppp

Sacré champion de National pour la première fois de son histoire, le Stade lavallois remonte en Ligue 2, niveau qu'il avait quitté il y a 5 ans. Une période marquée par une instabilité chronique à laquelle a mis fin Laurent Lairy, président du club depuis mars 2021. Sa recette ? Remobiliser les ressources humaines déjà présentes et se permettre de rêver en grand. Tout simplement.

Laurent Lairy est un homme heureux. Président du Stade lavallois depuis un an et demi, il est celui qui a relancé le club jusqu'à le faire monter en Ligue 2. Une réussite majeure et surtout rapide après tant d'années marquées par la perte de son statut professionnel et le sceau des mauvais résultats. Cette institution du football français, qui fête ses 120 ans, retrouve son lustre d'antan qui lui avait permis de briller en Coupe UEFA dans les années 80. On en est encore loin, mais Laurent Lairy entreprend toujours en grand, en misant sur l'humain avant tout. Avec lui, fini la valse des joueurs et des entraîneurs, et place à un projet aussi stable qu'ambitieux, mais toujours avec bienveillance.

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Foot Mercato : deux semaines après le titre de National, vous devez être un président heureux, vous qui avez intégré l'actionnariat du club depuis longtemps...

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Laurent Lairy : ça fait 17 ans que je suis au club. J'étais un peu malheureux de vivre pour un club qui manquait de couleurs. J'ai décidé avec les mêmes actionnaires, dont je fais partie depuis 17 ans, de prendre la main quelque temps pour remettre un peu de savoir-être dans le club. J'en faisais moi-même partie. Je pense qu'on ne s'en occupait pas assez, on n'avait pas le temps. J'ai décidé d'en consacrer en montant un projet que j'appelle les trois R : Remonter, Rester et Rêver. L'idée, c'est de remonter en Ligue 2, de rester en y mettant des moyens et un état d'esprit que j'ai mis en place depuis un an, c'est-à-dire du savoir-être et du savoir-faire. Associer les deux pour moi, c'est essentiel, même à la vie de manière générale.

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FM : vous avez pris la présidence du Stade lavallois il y a un peu plus d'un an et pour votre première saison pleine, l'aventure est couronnée de succès. Aviez-vous imaginé de pareils débuts ?

LL : les planètes se sont alignées. Merci la vie ! Quand on se fixe un projet, on sait que ça ne va jamais tout droit. Il y a toujours des moments plus difficiles, forcément. Et je m'y prépare. Mais cette année, tout s'est aligné parfaitement. L'année des 120 ans, on remonte en Ligue 2, on est champions, ça n'est jamais arrivé au Stade lavallois. Je vais mettre une petite étoile dans le logo. Ça, j'y tiens pour marquer le coup (sourire). Tant mieux, on en profite, le soleil brille. On prend des vitamines D pour quand la tempête arrivera.

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FM : vous avez également réveillé le public du stade Francis-Le-Basser, absent pendant le Covid, mais en colère contre le chemin que prenait le club au moment de votre arrivée...

LL : la Mayenne, c'est une terre de football. On a, en proportionnel au nombre d'habitants, le nombre de licenciés le plus important en France. Tout le monde est derrière. Et dès que ça frémit, tout le monde revient. C'est quelque part ma plus belle satisfaction : avoir rassemblé autour du football, et d'avoir remis les Mayennais et les Mayennaises dans une passion, un totem. Le football fait partie de l'ADN mayennais. Il manquait un projet, du temps à passer. J'ai mis du temps, de l'énergie et de la passion. Ce sont les ingrédients de la réussite.

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«On n'avait pas toujours le temps de consacrer des heures à structurer le club»

FM : que voulez-vous dire par «il manquait du temps» ?

LL : en fait, on est un club un peu particulier. On a 80 actionnaires, tous des chefs d'entreprise et vous savez bien que, dans tout ce qu'on fait, on n'avait pas toujours le temps de consacrer des heures à structurer le club. Et donc, on le confiait à des collaborateurs et, forcément, quand on ne leur donne pas l'énergie et la vision, ils sont un peu perdus. J'ai décidé d'y consacrer du temps, avec les mêmes personnes d'ailleurs. On n'a rien changé ! Et forcément, ça transmet de l'énergie, ça donne envie, de la solidarité, de la bienveillance... tous les mots clés qu'on connaît et qui sont la recette de la vie. Je ne me donne pas la réussite de cette performance. C'est tout le boulot ensemble. J'en suis l'animateur simplement.

FM : les actionnaires se désintéressaient du club ?

LL : non, mais on prenait une décision et on ne vérifiait pas si c'était mis en œuvre. Des petites choses comme ça. La réussite, c'est une succession de détails. Quand on vérifie tout ça, que l'on consacre du temps aux gens, qu'on s'intéresse à ce qu'ils font, à leur vision, qu'on leur fixe des objectifs, à un moment donné, ça se met en marche. On avait perdu un peu ça. J'en faisais partie puisque je suis au club depuis 17 ans. J'étais malheureux parce qu'on a en Mayenne des entreprises qui sont excellentes et à un moment donné, j'ai dit aux actionnaires : "on est tous excellents dans nos boîtes alors pourquoi le Stade lavallois n'obtiendrait pas cette excellence ?". Tout le monde s'est mis en marche à pied.

FM : vous avez fait des choix risqués en maintenant des hommes, comme Olivier Frapolli, qui étaient déjà en place alors que ça ne semblait pas vraiment fonctionner...

LL : je n'ai pas pris de risque. La stabilité, c'est la vie, même dans le football. J'ai embauché des joueurs déjà en National, à deux ans plus un pour 18 d'entre eux, donc ils se sont installés avec leur famille. Olivier Frapolli, c'est un entraîneur que j'avais repéré déjà. Il était au club depuis deux ans. Je le trouvais triste. Il fallait juste lui redonner un peu d'énergie. Mais en réalité, c'est un bon entraîneur, un type qui a des valeurs. Je pensais que si on lui donnait les moyens de s'exprimer, il trouverait sa place. C'est ce qu'il a fait. Évidemment, si ça n'avait pas été ma tasse de thé en termes d'entente, je ne l'aurais pas gardé. En fait, on s'entendait bien, mais comme je n'avais pas la main, je le laissais faire. J'ai observé les choses. On s'est parlé en mars 2021 et on s'est tout de suite compris. J'ai renouvelé son staff, car ils étaient déjà là. C'était plus facile de construire avec quelqu'un qui connaissait déjà les codes. Je les remercie d'avoir accepté de rester, car les conditions dans lesquelles ils travaillaient, ça n'était pas facile. Je lui ai redonné ce qu'il espérait avoir quand il est arrivé ici. Il l'a obtenu par son travail, notre complicité aussi.

Plus de 100 joueurs et 5 entraîneurs en 5 ans !

FM : vous avez appliqué la méthode de faire du neuf avec du vieux mais chez vous ça marche...

LL : vous savez, le management, c'est mettre les gens au bon endroit avec ce qu'ils savent faire. Moi, mon métier, c'est d'observer ce que les gens savent faire et de leur donner les conditions pour qu'ils s'expriment pleinement. Olivier était bridé par un tas de choses, donc, moi, je lui ai mis les conditions pour que chacun dans le club puisse travailler avec ses moyens et ses qualités.

FM : pourquoi proposez-vous de longs contrats, choses plutôt rares en National, à la plupart de vos joueurs ?

LL : à Laval, il est passé 105 joueurs en 5 ans et 5 entraîneurs. Avec ça, vous ne pouvez rien construire. J'ai dit stop, on arrête ça. Il faut absolument retrouver de la stabilité. Là, j'ai 18 joueurs sous contrat pour l'année à venir et je vais recruter 8 joueurs à peu près, qui seront évidemment plus capés Ligue 2 pour upgrader (augmenter le niveau, ndlr) le groupe. Ces joueurs seront embauchés à 2 ans, 3 ans. L'objectif, c'est de garder chaque année une ossature de 15/18 joueurs et de renouveler un tiers.

FM : depuis le début de votre présidence d'ailleurs, vous aimez recruter des joueurs d'expérience et du cru puisque vous avez fait revenir des anciens de la maison. Des rumeurs évoquent même un retour d'Anthony Gonçalves (en fin de contrat à Caen, ndlr)...

LL : ah ça, c'est vous qui le dîtes, mais c'est malin (rires). Mon objectif, c'était d'amener des joueurs qui connaissent l'environnement mayennais, capables de jouer au niveau où nous sommes. Effectivement, des joueurs comme Kevin Perrot, Maxime Hautbois, des joueurs auxquels je tenais, Jordan Adéoti, qui n'est pas Mayennais, mais qui avait joué au club, c'est que ce j'appelle la base, des joueurs qui connaissent les codes. Vous pouvez avoir les meilleurs joueurs, si à un moment donné vous n'êtes pas dans un environnement que vous connaissez, vous passez du temps à vous adapter. Et des fois, vous ne vous adaptez jamais. Je ne vais pas prendre l'exemple du Paris Saint-Germain, où ils ont forcément des joueurs de grandes qualités mais on ne leur a peut-être pas donné les codes. Ils ne se sentent peut-être pas bien dans leur environnement. Le sujet, c'est toujours d'allier le savoir-être et le savoir-faire. Pour connaître le savoir-être de Kevin, de Max et de Jordan, ces joueurs-là, je les voulais parce que je savais qu'on allait se comprendre. Et avec ça, vous construisez autour. Je souffre dans le football du trop d'argent parfois et du trop de savoir-faire, mais on oublie l'humain. Et moi je ne sais pas gérer les choses sans l'humain.

Objectif maintien en L2, et pourquoi pas plus...

FM : l'objectif de la saison prochaine sera le maintien avant tout ?

LL : je construis un budget financier pour rester (en Ligue 2, ndlr), autour des 10 M€ (il était entre 3 et 3,5 M€ cette saison, ndlr) et, à côté de ça, recruter des joueurs qui rentrent dans l'ADN que nous voulons, avec, bien sûr, de la qualité technique et le savoir-faire. L'objectif, c'est de se maintenir bien sûr. Il y aura 4 descentes donc il ne faut pas se tromper. À côté, il faut structurer le club, il y a des points d'amélioration au centre d'entraînement à trouver, des réglages à faire et, puis, ensuite, rêver si vous voyez ce que je veux dire (rires).

FM : vous pensez à la Ligue 1 ?

LL : on ne sait jamais ! Ça se construit ça. Laval a déjà joué en Ligue 1 avec une belle histoire. En 120 ans, le club a toujours existé malgré les guerres. On a de la Ligue 1, on de la coupe d'Europe, on de la Ligue 2 et, si on fait le palmarès de tout ça, on est le 10e club français le plus capé. Ça veut dire qu'on a quelque chose et ça, il faut l'exploiter.

FM : quand vous évoquiez le fait de structurer le club, vous pensez à quoi ?

LL : je suis en train de discuter avec la Communauté de commune de Laval pour rénover Le Basser. On est quasiment tombé d'accord pour avoir un plan de rénovation sur 3, 4 ans. On rénoverait entièrement le stade avec un 12 000 places, et peut-être pouvoir le monter à 18 000 si on avait le bonheur de remonter en Ligue 1, un jour. En même temps, il faut structurer le centre d'entraînement au masculin et au féminin et, à terme, construire une équipe de haut niveau féminin. C'est en cours avec notre association. Être le plus rapidement en National, on est en R1 pour l'instant. Le foot ne se conjugue pas uniquement au masculin donc j'ai envie de monter ça.

FM : quid du centre de formation dont l'homologation a été perdue un an après la descente en National ?

LL : je vais réouvrir le centre de formation, mais la fédération française n'homologue qu'à partir d'une saison (en Ligue 2). C'est l'un des objectifs pour 2023/2024. On va le réouvrir, le restructurer, mais il existe donc il n'y a pas grand-chose à faire. Il faut remettre en place ce qui était en place il y a 4 ans. On va investir dedans.

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