Entretien avec Geoffrey Jourdren : «je suis comme je suis, je n’ai pas de filtre»

Par Quentin Dagbert
7 min.
Geoffrey Jourdren @Maxppp

Sans club depuis sa résiliation de contrat avec l'AS Nancy-Lorraine en novembre dernier, l'ancien portier emblématique de Montpellier Geoffrey Jourdren (33 ans) fait le point sur sa situation. À la recherche d'un dernier challenge, le portier français revient également sur quelques épisodes de sa longue carrière à Montpellier, avec plus de recul.

Foot Mercato : vous êtes sans club depuis novembre, qu'est-ce que vous faites depuis ?

La suite après cette publicité

Geoffrey Jourdren : je me prépare pour commencer un nouveau projet d'ici juin-juillet. C'est-à-dire que je garde la forme, comme une semaine classique d'un joueur de football professionnel. Je me suis inscrit dans une salle de sport quand je ne peux pas courir dehors.

À lire LdC : le PSG a envoyé une lettre à l’UEFA

F.M : le football vous manque ?

G.J : oui, bien sûr. Quand je regarde les matchs à la télé, quand je vois les joueurs rentrer sur le terrain... Avec mon fils, je vais souvent au stade voir les matchs de Montpellier. Ce qui est bien, c'est que j'ai maintenant un regard extérieur des choses. Je n'ai plus la tête dans le guidon.

«J'ai toujours snobé les plus grands agents»

F.M : avez-vous eu des contacts avec des clubs pour la saison prochaine ?

G.J : il y a des clubs intéressés, mais entre intéressé et faire une offre, il y a une autoroute... J'ai dit que j'étais prêt à faire des essais, ça ne me dérange pas du tout. Au contraire, je suis même demandeur. Pour rencontrer les gens, pour discuter ensemble, je préfère ça. Les clubs ne savent pas encore où ils seront l'année prochaine, alors il faut attendre.

F.M : avez-vous un agent qui s'occupe de tout ça ?

G.J : je n'ai pas d'agent, je n'en ai jamais réellement eu d'ailleurs. À Montpellier, je me sentais comme un poisson dans l'eau, donc je ne me suis jamais entouré pour pouvoir partir dans un autre club. Je n'ai jamais ressenti le besoin de partir. J'ai toujours snobé les plus grands agents, parce que s'ils voulaient être avec moi, ce n'est pas pour jouer aux cartes (rires).

«J'ai encore les dents longues»

F.M : quel genre de club recherchez-vous ?

G.J : je recherche un dernier challenge, un projet sportif, quelqu'un qui croit en moi. J'ai 33 ans, je n'ai pas joué pendant presque une saison, mais j'ai encore les dents longues. J'ai encore des choses à donner, à faire partager. Retrouver un effectif de Ligue 1 ce serait le summum, mais je ne suis pas du tout fermé à la Ligue 2.

F.M : vous n'avez jamais envisagé de partir à l'étranger ?

G.J : si, l'étranger, ça me botte bien. J'étais même en discussion avec un club très lointain qui me voulait. On s'était dit pourquoi pas avec ma famille. Au final, ça n'a pas pu se faire, mais oui, l'étranger pourrait me plaire.

«Si le monde du football ne veut plus de moi, il faudra s'y plier»

F.M : la retraite, c'est dans un coin de votre tête ?

G.J : oui, forcément. J'ai envie de retrouver un club, mais si le monde du football ne veut plus de moi, il faudra s'y plier, c'est comme ça. En aucun cas je serais dégoûté. Mais franchement, j'ai encore envie de suer à l'entraînement.

F.M : avez-vous préparé votre avenir ?

G.J : j'ai fait quelques investissements, qui me permettent effectivement de préparer l'avenir. Je n'ai pas envie de reprendre le foot pour des questions d'argent. Si j'ai résilié mon contrat à Nancy, c'est que financièrement je pouvais me le permettre.

«Mon rêve, c'est être entraîneur des gardiens»

F.M : avez-vous déjà pensé à une reconversion ?

G.J : j'ai envie de passer mes diplômes d'entraîneur. Mon rêve, c'est être entraîneur des gardiens. Ce serait vraiment le Graal pour moi. Parce que j'aime partager, j'aime beaucoup les relations humaines.

F.M : vous avez toujours eu un rapport difficile avec les médias. Est-ce que cela a changé aujourd'hui ?

La suite après cette publicité

G.J : je ne suis pas en guerre avec les journalistes, mais j'en ai marre de passer pour quelqu'un que je ne suis pas. Je suis comme je suis, je n'ai pas de filtre comme on dit.

«Je pense que durant toute ma carrière, j'ai été un incompris. Je résume ça à de l'incompréhension»

F.M : à l'heure où la communication des joueurs est de plus en plus verrouillée justement...

La suite après cette publicité

G.J : elle est au même niveau que le niveau du sportif. Je pense que si tu as une bonne communication, même en étant un joueur moyen, tu peux faire carrière. Avec un bon entourage aussi. Par exemple, si tu connais quelqu'un qui a un bon réseau pour faire parler de toi dans les médias, ça peut aider. La communication est très importante, aujourd'hui encore plus qu'avant. Et inversement, ça peut te desservir aussi. Comme pour moi. Alors que normalement, un sportif de haut niveau ne doit être jugé que sur le terrain. Ce que tu fais sur un terrain doit primer avant tout. Ce n'est pas normal ce qu'il se passe. Le foot, ce n'est pas une pièce de théâtre.

F.M : votre communication, c'est votre plus gros problème ?

G.J : ça a été ça toute ma carrière, c'est une incompréhension. Une vision du foot qui est différente des autres. Aussi, je n'ai pas employé les mots qu'il fallait. Je dis ce qui me passe par la tête. Je le sais ça, je me suis mal exprimé. Je suis convaincu que j'ai toujours eu la bonne analyse des choses, j'ai toujours dit vrai, mais je n'ai jamais employé les mots qu'il fallait. C'était ça mon plus gros problème. Je pense que durant toute ma carrière, j'ai été un incompris. Je résume ça à de l'incompréhension.

«Seuls les champions peuvent juger Neymar, pas le bourricot du coin»

F.M : vous avez plus de recul sur les choses aujourd'hui ?

G.J : oui, je vais vous donner un exemple. Sur le but de Manchester que prend Paris, sur la main. Certains contestent la main. Mais est-ce que tu penses qu'à ce niveau là, en 1/8e de finale de la Ligue des Champions, pour défendre sur un but, il faut se retourner comme fait Presnel Kimpembe ? Tu ne dois jamais te tourner sur une frappe. En plus à 2 minutes de la fin... Le débat est sur la main et c'est dommage. Les gens ne sont pas dans l'analyse profonde. Quelqu'un qui n'a rien gagné ne peut pas avoir une analyse profonde sur les choses.

Un autre exemple : Neymar, ça fait partie des génies dans le monde du football, et je le comprends. Des fois, il doit se dire "qu'est-ce que je fais là ?". Il doit voir des choses au quotidien qui lui sortent par les yeux. Est-ce que tu trouves ça normal qu'en montant les marches (ndlr : en finale de la Coupe de France), il n'y ai pas un peu plus de sécurité ? Ça, Neymar, il le voit et il le ressent. C'est pour ça qu'il pète un plomb. Ce sont des graines de champion qu'il faut comprendre avant de juger. Qui peut juger Neymar ? Seuls les champions peuvent juger Neymar, pas le bourricot du coin.

La suite après cette publicité

«J'aimerais bien que les gens se posent cinq minutes et se demandent ce que Geoffrey Jourdren a fait sur le terrain, et non pas à la télévision»

F.M : quelle est la plus grande fierté de votre carrière ?

G.J : sur le plan sportif, ce que j'ai fait sur le terrain, j'en suis très fier. J'ai fait des choses extraordinaires à Montpellier. Et ça, personne ne me l’enlèvera. Je parle de Montpellier. Montpellier, ce n'est pas le Real Madrid. C'était le quinzième budget de Ligue 1, à l'époque.

F.M : est-ce qu'il y a un épisode qui vous marque particulièrement ?

G.J : le titre de Champion de France en 2012 bien sûr, mais il y a quelque chose d'autre. Lors de ma première saison titulaire à Montpellier (2009/2010), on venait d'être promu en Ligue 1 et on a terminé 5e avec 69 points. Cette année, avec 69 points, t'es en Ligue des Champions. Ce qui est important, pour un joueur de football, c'est ce que tu fais sur le terrain. Ce genre de choses, les gens oublient vite. Par contre, les gens n'oublient pas qu'au niveau télévisuel, je suis passé pour un clown. À la télé, il n'y a pas de souci, je sais le reconnaître, j'ai un niveau National, DH même, très amateur (rires). J'aimerais bien que les gens se posent cinq minutes et se demandent ce que Geoffrey Jourdren a fait sur le terrain, et non pas à la télévision.

Plus d'infos sur...

La suite après cette publicité

Fil info

La suite après cette publicité