Avec Distel Zola, dans la « Loco » d’El Paso !

Par Mathieu Rault
9 min.
El Paso Locomotive Distel Zola @Maxppp

Ancien espoir des équipes de France jeunes, passé par Monaco, Laval, Nancy, Le Havre, Châteauroux et le Tours FC, Distel Zola, à 31 ans, a décidé de traverser l’Atlantique pour tenter l’aventure du côté d’El Paso, au Texas. Pour Foot Mercato, l’international congolais fait les présentations, avant le coup d’envoi de la saison d’USL Championship.

El Paso glisse le long du Río Grande, frontière naturelle entre les États-Unis et le Mexique. De l’autre côté du mur qui longe les eaux boueuses du fleuve, Ciudad Juarez. Son club de foot, le FC Juarez, club de Liga MX, est depuis peu tombé aux mains du groupe Franklin Mountain Capital, qui domine le paysage économique de la région et est également à la tête du El Paso Locomotive FC. La cité texane, qui fut la capitale du jean dans les années 80, s’est mise au football l’an dernier. Et c’est là que le milieu de terrain international congolais Distel Zola a posé ses valises fin janvier, à la fin d’une aventure à Tours.

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«J’étais à Tours, en Ligue 2. Malgré notre descente en National 1, je suis parvenu à tirer mon épingle du jeu. J’ai publié des highlights de mes matches sur les réseaux, grâce à une équipe qui gère ça pour moi. À partir de là, un agent américain m’a contacté, fin août. Jusque-là, je m’étais entraîné avec le Red Star (L2). Et début septembre, on m’a fait part d’un intérêt d’El Paso.» Si le joueur ignore tout de ce club d’USL Championship, équivalent de la D2 américaine, c’est une vieille connaissance de l'OGC Nice qui le contacte pour lui exposer le projet et qui ne tarde pas à le convaincre.

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«Je ne connaissais pas, mais j’ai été contacté par Alexy Bosetti, qui avait rejoint le club en cours de saison dernière depuis Oklahoma, dans le cadre d’un échange. On s’était croisés par le passé et il est venu me parler d’El Paso sur Twitter. On a bien échangé.» De même avec Chiró N'Toko, le capitaine du Locomotive. Par leurs mots, les deux joueurs rendent ce projet, au départ un peu flou, beaucoup plus réel. «À partir de ce moment-là, j’ai senti que c’était sérieux. Deux jours après, le manager, Mark Lowry, m’a appelé. Il avait vu mes vidéos et savait comment il voulait m’utiliser dans son équipe. J’ai trouvé ça flatteur.»

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El Paso Locomotive

Distel Zola en pleine séance d'étirements avec Alexy Bosetti (©El Paso Locomotive FC)

« On m’avait dit, c’est le Texas, les gens sont un peu racistes »

Distel Zola n'a pas trop hésité, les récents résultats du club ont achevé de le convaincre. Pour sa toute première participation à l'USL Championship l’an passé, El Paso a atteint les demi-finales, après avoir terminé la saison régulière à la sixième place de la conférence ouest. Les Texans ont chuté dans le dernier carré face au futur vainqueur, le Real Monarch. Pour cette deuxième saison, le club se sait attendu. «L’an passé, l’équipe a terminé la saison avec le plus gros pourcentage de possession. Le coach a une vraie philosophie de jeu, il a instauré un style à l'équipe. Je ne suis pas arrivé dans une équipe dernière au classement, sans ambition», souligne Distel.

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Quitter la France pour les Etats-Unis, avec femme et enfants, n'est pas chose facile. C’est grâce aux conseils de vieilles connaissances que le joueur s'est préparé à faire le grand saut. «Je me suis renseigné sur la ville, sur les États-Unis, via des amis qui évoluent aux US. Djimi Traoré, qui est coach adjoint aux Seattle Sounders, en MLS, était mon coéquipier à Monaco. Il y a aussi Larrys Mabiala qui joue à Portland, ou Chris Mavinga, qui est à Toronto. À travers eux, j’ai pu en savoir plus sur le pays et le football là-bas.» De longues heures passées au téléphone. Visa, assurances, impôts, contrat de travail, aucun sujet n’est laissé de côté et Distel est rassuré.

Mais à Champigny-sur-Marne, ses proches, eux, s’inquiètent un peu du choix de la destination. «Quand j’ai parlé d’El Paso au début, mon entourage était très réticent, on m’avait dit "c’est le Texas, les gens sont un peu racistes". Le coach m'avait lui peint une ville vraiment paisible, parfaite pour la vie de famille. Et je n'ai pas été déçu. Je suis arrivé et j’ai trouvé les gens vraiment accueillants. Il y a plusieurs cultures, beaucoup d’Hispaniques, il y a bien sûr des Américains, c’est vraiment un cadre idéal.» Entre les cactus du désert aride texan et les montagnes Franklin qui divisent la ville en deux, Distel trouve un équilibre. Le foot est ici une nouveauté, accueilli presque comme une libération.

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La Coupe du Monde 2026 en vue, les championnats se renforcent

«Avant, à El Paso, il n’y avait que le base-ball, à la limite un peu de basket, et puis les sports à l’université. Mais aujourd’hui, les gens sont contents. Il y a une grande communauté mexicaine dans la ville et les Mexicains aiment le football. Quand je croise les supporters, ils me disent souvent qu’ils sont contents de la création du club, qu’ils peuvent maintenant aller au stade.» Le Southwest University Park peut accueillir jusqu’à 9000 personnes les soirs de matches. On est encore loin des affluences de la MLS, mais Distel Zola croit que les deux championnats ne sont pas si éloignés. «L’USL est beaucoup regardée et si tu performes, tu as des chances d’aller dans un nouveau club et pourquoi pas en MLS.»

Aux États-Unis, comme dans la plupart des sports, les ligues de football sont fermées. Pas de montées, pas de descentes. Si Distel Zola espère un jour fréquenter le plus haut niveau nord-américain, il devra postuler ailleurs. Pas impossible. Douze fois buteur avec El Paso l’an dernier, Jerome Kiesewetter vient de rejoindre l’Inter Miami, franchise de MLS fraîchement créée par David Beckham. Mais le Mondial 2026 à l'horizon, le niveau ne cesse de grimper. «Maintenant, pour jouer en MLS, c’est devenu très compliqué. Et même l’USL, cela devient compliqué. Avec l’organisation de la Coupe du Monde aux États-Unis (les USA sont co-organisateurs avec le Mexique et le Canada en 2026, ndlr), il y a un vrai engouement et les ligues doivent élever au maximum le niveau.»

Aujourd’hui, Distel Zola est en USL et se dit enfin heureux. «J’ai vraiment été surpris par les installations, qui n’ont rien à envier à celles de clubs de Ligue 1. Pour mettre un pied aux États-Unis, c’est un bon choix.» Un projet qui fait des émules. Le joueur ne cache pas que bon nombre de ses anciens coéquipiers le sondent. « Aujourd’hui, c’est tellement difficile en France de trouver un bon projet. J’ai beaucoup d’amis qui m’appellent pour me demander comment j’ai fait pour venir, qui veulent des conseils. » Si Distel Zola vit au jour le jour, une reconversion aux Etats-Unis à l'issue de sa carrière ne serait pas pour lui déplaire. Le milieu de terrain reste toutefois prudent. «On pense tous au rêve américain, mais il faut faire attention. Si on n’est pas préparé, ça peut tourner au cauchemar.»

«Ici, il faut être une machine»

Au Texas, Distel Zola a signé un contrat longue durée en octobre, mais a dû patienter pour rejoindre son nouveau club. «En attendant d’obtenir mon visa, d’organiser le déménagement, il fallait que je reste en forme. J’ai travaillé avec un préparateur physique, Karim Lecannelier, et je me suis entraîné avec St-Cyr-sur-Loire. Le coach d’El Paso m’avait demandé si j’étais capable de me maintenir en forme jusqu’à la reprise, en janvier. J’ai beaucoup bossé en amont, parce qu’on m’avait prévenu. Ici, ça court beaucoup. Physiquement, il faut être une machine. C’est la mentalité américaine. Le joueur de football doit être un athlète, pas un simple joueur. Et il faut être prêt à tous les niveaux.»

Distel, et sa famille, ont posé leurs valises dans une résidence pavillonnaire occupée par une grande partie de sa nouvelle équipe. Salle de gym, piscine, tout est mis en place pour que les joueurs gardent la forme, à n’importe quelle heure du jour et de la nuit. Quelque chose que le joueur apprécie. «C’est un peu la mentalité américaine. Les mecs, même des chefs d’entreprise, ils se lèvent à 4h du matin, ils font des exercices pendant une heure. Ils veulent toujours travailler. Ça me fait penser à Kobe Bryant, qui même à la retraite se levait chaque matin et faisait son sport. Ça m’a impressionné en arrivant et maintenant j’ai pris ce rythme. Avant de dormir, il m’arrive de faire une petite session.»

Au club, c’est la même chose. Les installations d’El Paso n’ont rien à envier aux clubs pros et les entraînements sont variés explique le joueur, sous le charme. «Ici, les exercices sont détaillés, on n’est pas seulement là à soulever du poids. Les Américains sont portés sur le " full body ". Ils sont beaucoup dans les statistiques. On regarde tout, tes courses, tes passes vers l’avant, tes retours défensifs, l’intensité, ils ne sont que dans les stats. C’est la grande différence avec la France. Moi, ça me plait. Tu veux toujours tirer le meilleur de toi. Ici, tout est en grand. On te montre dès le départ qu’il faut t’élever, que le but est de devenir grand. C’est une autre mentalité.»

«En France, tu as toujours des coéquipiers qui sont individualistes»

Passé par Monaco, Laval, Nancy, Le Havre, Châteauroux et le Tours FC, Distel Zola semble aujourd'hui ravi d'avoir quitté la monotonie des championnats français. À El Paso, ce ne sont pas moins de 15 nationalités différentes qui partagent le vestiaire. «Le coach était en quête d’un effectif riche d’expériences. Il voulait des gars qui ont un bon état d’esprit, investis dans le projet. En France, dans l’effectif, tu as toujours des coéquipiers qui sont individualistes. Ici, je me sens comme dans une famille. Il y a aussi des activités prévues pour les femmes des joueurs, elles forment un groupe, elles sont ensemble. Humainement, je trouve que ça n’a rien à voir avec la France.»

Et depuis son arrivée aux Etats-Unis, l'international congolais semble être un autre homme. «J’ai 31 ans mais je me sens comme neuf. C’est un nouveau challenge, avec un nouveau coach, de nouveaux coéquipiers, une autre mentalité, dans un autre pays. Quand tu joues en Ligue 2, puis en National, tu es habitué à vivre les mêmes choses, il y a une routine un peu ennuyante qui s’installe. Là, je suis requinqué. Le coach m’utilise un peu plus haut, il croit en mes qualités et cela me donne de la confiance. Je me sens vraiment heureux.» Distel a inscrit deux buts et délivré une passe décisive en six matches de préparation avec El Paso. Sa dernière réalisation remontait à son passage au Havre, sous les ordres de Cédric Daury, en 2012.

Après un dernier stage de préparation à Tucson, El Paso Locomotive FC débutera sa saison le 7 mars, avec un déplacement sur la pelouse d’Orange County. Le début d’une nouvelle aventure pour Distel Zola, qui s’est fixé un objectif : «devenir champion des États-Unis. Je suis venu pour ça.» Champion d'USL, un premier pas avant, peut-être, de voir plus haut, et pourquoi pas de goûter à la Major League Soccer. «C’est dans un coin de ma tête, mais je dois travailler et il y a aussi le facteur chance. Si je bosse comme un fou, il y a moyen d’y arriver. Je crois que j’ai mes chances.» Good luck Distel Zola !

El Paso Locomotive
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