Valérien Ismaël, LASK : «cette saison est déjà historique»

Par Maxime Barbaud
8 min.
Linzer ASK Valérien Ismaël @Maxppp

Leader du championnat autrichien avant l'arrivée des play-offs, LASK s'apprête à disputer une double confrontation historique en 8e de finale de Ligue Europa contre Manchester United. L’occasion de revenir avec l'entraîneur Valérien Ismaël sur cet événement que tout le club attend, même si les supporters ne pourront se rendre au stade pour cause de coronavirus.

Foot Mercato : vous êtes leader du championnat et qualifié en 8e de finale en Ligue Europa contre Manchester United pour votre première saison avec le LASK, vous vous attendiez à un tel début ?

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Valérien Ismaël : non bien sûr qu’on ne s'attendait pas à ce que tout se passe parfaitement. Même si maintenant on a quelques problèmes de graves blessures pour des joueurs importants mais dans l’ensemble, c’est une saison qui va au-delà de nos objectifs qu’on s’était fixés en début de saison. Il faut savoir que c’est la première fois que le club se retrouve dans une compétition européenne, la première fois qu’il joue une qualification en Ligue des Champions, une qualification en Ligue Europa, et qu'il termine premier de son groupe. On gagne face à Alkmaar et maintenant on se retrouve face Manchester United. Quand on met en parallèle notre budget, la valeur de notre effectif avec Manchester United, on peut dire que c’est David contre Goliath. Pour mes joueurs, la ville, le club, les employés du club, la région, c’est quelque chose de phénoménal qui s’est développé ces derniers mois.

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FM : vous ressentez une atmosphère particulière depuis le tirage au sort ?

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VI : on sent l’engouement. 5 minutes après le tirage, on avait déjà des commandes de billets, des messages. On sent la fierté des gens, leur manière d’être heureux. Bon, on va jouer à huis clos. C’est triste pour nos joueurs et les supporters car on ne sait pas quand reviendra Manchester United à Linz. On a une responsabilité sociale et on doit respecter la décision. On va se concentrer sur le match, qui au moins aura lieu.

«Contre Manchester United, on peut dire que c’est David contre Goliath»

FM : pour ce match très particulier, comment vous préparez-vous ?

VI : on se prépare normalement avec le staff. On est très concentré. On joue tous les trois jours depuis plusieurs mois, on a une certaine routine maintenant, des automatismes, des habitudes. On se prépare sans exagération même si c’est Manchester United. C’est important de donner le même ressenti aux joueurs.

FM : ça doit représenter quelque chose de grand cette double confrontation face à Manchester United ?

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VI : oui c’est la récompense de notre saison, de notre parcours européen exceptionnel car personne ne nous attendait. C’est le petit poucet qui s’invite dans la grande danse. C’est la chance pour nous d’avoir deux matches au plus haut niveau. On touche le sommet du football mondial. Ça va être encore d’un niveau plus grand que ce qu’on a pu connaître jusqu’à présent. Il faudra être confiant, courageux, jouer notre chance tout en étant conscient de la qualité de l’adversaire. Mais nous avons des principes de jeu que nous avons toujours appliqués. On ne s'est jamais posé la question de savoir qui était en face de nous. On joue notre jeu, on ne calcule pas à domicile comme à l'extérieur. Ce sera le même état d’esprit pour cette double confrontation face à Manchester United.

FM : comment aborde-t-on ce genre de rencontre de gala ?

VI : c’est une balance entre être bien concentré et être ouvert, cool, ne pas être crispé. Il faut être conscient de chaque minutes, de chaque heures qui se passent jusqu’au match, tout en étant concentré sur les objectifs à remplir et les principes de jeu qu'il y a à appliquer.

«on a battu des records en championnat»

FM : vous avez conscience de vivre une saison historique ou il est encore trop tôt ?

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Elle est déjà historique car on a battu des records en championnat. Dimanche dernier, on a gagné le 11e match à l’extérieur d’affilée. Aucune équipe ne l’avait réalisé. Le nombre de points après 22 journées a été battu. Jusqu’à présent, il y a eu des records. Ça prouve bien qu’on travaille dur, et qu’on croit en nous. On est capable d’atteindre des choses qui semblent inaccessibles mais quand on joue ces matches à 100 %, qu’on croit en nos principes, on est capable de relever des choses. Maintenant, dans notre championnat, on arrive en play-offs. Le tableau est coupé en deux. À partir de la semaine prochaine ce sont 10 matches aller-retour et tous les points sont divisés par deux. On avait 6 points d’avance sur Salzbourg, on en a plus que 3. Une nouvelle compétition commence et il va falloir élever notre niveau avec des matches très intenses, beaucoup de duels. Ça joue le titre, les places européennes. C’est une nouvelle compétition pour nous et un nouveau challenge, en plus du grand rendez-vous face à Manchester.

FM : quelle est la "recette" de votre succès ?

VI : il y a beaucoup de choses. Déjà à la tête du club, il y a un président et un vice-président qui sont très calmes et sereins. Ils prennent des décisions très claires car ils savent où ils veulent aller, toujours avec des ambitions. On va avoir de nouveaux bureaux. Cet été, 4 nouveaux terrains arrivent. Dans 2 ans, il y a le nouveau stade qui va être construit. On a l’impression qu’on est en train de progresser. Il y a vraiment cette ambition de s’améliorer et avec ces matches internationaux, ça va aider le club à grandir plus vite et d’avoir des rentrées d’argent plus importantes. Ça aidera le club à passer la nouvelle étape au niveau des infrastructures et permettre de rivaliser avec les autres clubs en Autriche. Ce sont des projets qui vont se faire. Autre chose, c’est une équipe qui joue ensemble depuis plusieurs années. 90% de l’effectif se connaît déjà en début de saison. Il y a un système et des principes de jeu qui sont appliqués. Cela permet à un nouvel entraîneur, comme moi, d’arriver et d’avoir une base très saine de travail. Il faut aussi apporter son identité. Ce qui a été bien avant que j'arrive, c’est que l’équipe jouait très bien sans le ballon : un pressing agressif, intense, haut. Ce que j’ai apporté, c’est de nous améliorer avec le ballon. On s’est rendu compte que les deux dernières années, le LASK avait 47 % de possession de balle en moyenne en championnat, et 51 % l’an dernier. Cette année après six mois, on est déjà à 56 %. La tendance montrait que les adversaires se mettaient en défense pour jouer les contres et nous laissaient le ballon. C’était important pour nous de nous améliorer, de franchir le cap avec l’équipe et d’avoir les deux principes de jeu, avec et sans le ballon. Les matches européens nous ont aidés à apprendre plus vite. Quand tu termines premier en laissant derrière toi le Sporting CP, le PSV Eindhoven et Rosenborg. C’est qu’il y a de la qualité. Ça nous a aidés à accélérer le processus. L’équipe a grandi semaine après semaine, a pris de la confiance et ça nous a aidés pour les grands matches en championnat contre Salzbourg, le Rapid et l’Austria.

FM : vous travaillez sur une base saine dans un club qui montre une progression linéaire, c'est un luxe et une chose rare dans le foot.

VI : ça montre que quand tout est sain à la tête du club, une vision claire de ce qu’il veut, que l‘équipe se connaît bien, ça aide. On a intégré les nouveaux joueurs rapidement. On a l’impression qu’ils jouent ensemble depuis 10 ans. Les nouveaux vont diront qu’ils savent déjà ce qu’ils doivent faire sur le terrain.

«J'ai lancé ma carrière d’entraîneur même si au départ, il y a eu des accrocs»

FM : à titre personnel, ça doit être une belle satisfaction pour vous qui sortiez d'une relative situation d’échec à Wolsbourg...

VI : oui c’est clair mais ça fait partie du métier d’entraîneur. Il faut vivre avec la possibilité d’être dans l’échec. Moi ce qui me fait plaisir, c’est d’avoir lancé ma carrière d’entraîneur même si au départ, il y a eu des accrocs. Ça fait partie d’une carrière comme quand tu es joueur. Il y a des hauts, des bas, des blessures, des moments où tu n’es plus titulaire. En tant qu’entraîneur, c’est pareil. Il y a des moments où ça ne fonctionne pas, tu te fais virer, et puis tu reviens. Ce qui est important, c’est de se remettre en question, de croire en soi, de toujours travailler, de se dire pourquoi ça n’a pas fonctionné pour prendre ensuite les meilleures décisions. Les problèmes et les échecs du passé m’ont aidé à prendre de meilleures décisions aujourd'hui. Tu mets encore plus de conséquences dans tes décisions. Tu sais ce que tu veux et ce que tu ne veux plus. C’est ce qui s’est passé avec le LASK.

FM : comment voyez-vous la suite avec le LASK ?

VI : pour l’instant, je me sens très bien. J’ai trouvé un environnement de travail qui me convient. Il y a une vision qui est là. Je fais partie aussi de ce projet, aider le club et à tous les niveaux. Je peux donner mon idée et mon mot. Je prends énormément de plaisir au quotidien. Et puis je vis à deux heures de route de Linz. Ma famille est proche de Munich. Tout est en équilibre dans ma vie et ça se ressent sur mon travail. Mes deux petites filles voient leur papa régulièrement. Elles viennent souvent au stade et ça aide à être performant. Je suis en plein épanouissement.

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