Eliminatoires CM - Asie

Le Japon lance de grandes menaces révolutionnaires contre le Qatar et l’Arabie saoudite

Excédée par l’influence grandissante du Qatar et des pays du Golfe au sein de la Confédération asiatique de football (AFC), la Fédération japonaise (JFA) envisage de claquer la porte et de fonder une nouvelle entité, la Fédération d’Asie de l’Est. Une révolte qui pourrait bouleverser l’équilibre du football asiatique.

Par Valentin Feuillette
3 min.
Japon @Maxppp

La Fédération japonaise de football (JFA) envisagerait une rupture historique avec la Confédération asiatique (AFC). Selon plusieurs médias irakiens et japonais, Tokyo songerait à se retirer de l’organisation continentale pour créer une nouvelle entité : la Fédération d’Asie de l’Est (East Asian Football Federation). Cette idée, qui semblait encore inimaginable il y a quelques mois, est née d’un profond malaise au sein de la JFA. Les dirigeants nippons dénoncent une dérive de la gouvernance de l’AFC, jugée de plus en plus sous l’influence des pays du Golfe, en particulier du Qatar et de l’Arabie saoudite. Les récentes décisions autour de la Ligue des Champions asiatique élite ont été le détonateur d’un mécontentement latent.

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Au cœur de cette colère : une série d’incidents qui ont mis à mal la crédibilité de l’AFC. La tenue intégrale de l’édition 2024-2025 de l’ACLE en Arabie saoudite a été perçue au Japon comme un affront, imposant aux clubs de l’Est asiatique des conditions de déplacement et de récupération bien plus difficiles. Plus récemment, le retrait du club chinois Shandong Taishan, en plein milieu de la compétition, a provoqué un bouleversement du classement, au détriment du japonais Vissel Kobe, rétrogradé malgré sa bonne performance. À cela s’est ajoutée une amende de 10 000 dollars infligée à Kobe pour un incident mineur, perçue à Tokyo comme un exemple flagrant de double standard. Ces décisions, jugées arbitraires, ont achevé de convaincre la JFA que l’équité sportive n’était plus garantie au sein de l’AFC.

Un projet pour métamorphoser le football mondial

Au-delà des incidents ponctuels, la JFA estime que le modèle de gouvernance de l’AFC est profondément déséquilibré. Le Qatar, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, grâce à leur poids économique, y exerceraient une influence grandissante sur les arbitrages, les droits télévisés et la répartition des compétitions. De nombreux observateurs japonais pointent également une mainmise politique sur les nominations internes et les décisions disciplinaires. À cela s’ajoute une frustration sportive : les calendriers imposés par l’AFC pénalisent fortement les sélections et clubs d’Asie de l’Est, dont les joueurs évoluent souvent en Europe. Des stars comme Takefusa Kubo, Takumi Minamino ou encore Kaoru Mitoma doivent parcourir des milliers de kilomètres pour rejoindre leurs sélections, au détriment de leur récupération et de leurs performances.

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L’hypothèse d’une nouvelle confédération régionale, rassemblant le Japon, la Corée du Sud, la Corée du Nord, la Chine, Hong Kong et plusieurs nations du Sud-Est asiatique (Vietnam, Thaïlande, Indonésie) est donc désormais prise au sérieux. Des sources proches de la JFA affirment que l’Irak, par ailleurs mécontent de l’AFC, aurait manifesté son intérêt pour rejoindre cette éventuelle « East Asian Federation ». Si un tel projet voyait le jour, il provoquerait un séisme dans le football asiatique. L’AFC perdrait non seulement ses marchés les plus dynamiques comme le Japon, la Corée du Sud, la Chine, mais aussi une grande part de ses revenus commerciaux et télévisuels. L’équilibre géopolitique du football continental serait alors totalement redessiné, avec deux pôles rivaux dont l’un serait dominé par le Golfe, l’autre par l’Asie orientale.

Une telle scission aurait également des conséquences internationales. D’un point de vue sportif, la FIFA serait confrontée à un dilemme inédit puisque Gianni Infantino et ses assistants devraient ainsi reconnaître une nouvelle confédération, reviendrait à redéfinir les zones de qualification pour la Coupe du monde et à bouleverser les circuits de compétition existants. D’un point de vue politique, le geste japonais pourrait être perçu comme un acte d’indépendance vis-à-vis des puissances pétrolières du Golfe, mais aussi comme une tentative de rééquilibrer les rapports de force au sein du football mondial. Pour de nombreux analystes, ce projet n’est pas seulement une question sportive : il traduit un conflit d’influence entre deux visions de l’Asie, l’une tournée vers le soft power et la modernité, l’autre vers la puissance financière et diplomatique. Quoi qu’il en soit, si la JFA franchit le pas, c’est tout le visage du football asiatique et peut-être mondial qui pourrait changer dans les années à venir.

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