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FC Sète, Yoni Ragioneri : « c’est inhumain ce qu’ils nous ont fait, il faut les griller à vie de la planète football ces escrocs ! »

Par Josué Cassé
11 min.
Le FC Sète passe sous pavillon étranger. @Maxppp

Racheté en janvier dernier par un duo Emirati-Nigérian, le FC Sète, au bord de la relégation en N3, doit par ailleurs gérer une profonde crise financière. Face aux promesses non-tenues des investisseurs Salem Ahmed Baobaid et Olatunji Olalekan Mayowa, les Dauphins tentent désormais de survivre. Entretien sans concession avec le président de la formation sétoise, Yoni Ragioneri.

Lanterne rouge du groupe C de National 2 avec 8 petits points, le FC Sète nage en plein cauchemar. Quasiment condamné à la relégation en N3, le club entraîné par Nicolas Le Bellec doit, par ailleurs, gérer une crise profonde sur le plan financier. Rachetés en janvier dernier par un duo Emirati-Nigérian, les Dauphins nourrissaient pourtant d’énormes espoirs mais sont, à ce jour, toujours dans l’attente des fonds promis par les investisseurs, Salem Ahmed Baobaid et Olatunji Olalekan Mayowa… Une situation critique poussant logiquement les hautes sphères du club à se tourner vers de nouvelles opportunités, à l’heure où les appartements des joueurs, normalement pris en charge par le club Vert et Blanc, n’ont toujours pas été payés et que le versement des salaires n’est plus assuré. Interrogé par nos soins, le président de la formation sétoise, Yoni Ragioneri, s’est ainsi longuement confié. L’occasion pour le successeur de Jean-François Gambetti à la tête du club d’exprimer ses craintes, sa colère mais également ses ambitions pour la suite…

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Foot Mercato : bonjour Yoni Ragioneri, avant de revenir sur la crise actuellement traversée par le FC Sète, pouvez-vous expliquer à nos lecteurs la chronologie des faits ?

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Yoni Ragioneri : on avait récupéré la présidence du club mais je savais depuis le début que la saison s’annonçait compliquée et que notre salut passerait par des repreneurs. Il nous fallait des repreneurs qui mettent de l’argent et qui prennent les clés du club. Nous en tant que responsables, notre souhait était de garder l’association en parallèle et de s’occuper de la jeunesse. Je savais qu’il fallait qu’on passe par là. De là, ils nous arrivent les péripéties de la DNCG, on se maintient sportivement en N1 et on achète des joueurs pour assurer une saison cohérente sur le plan sportif. On voulait jouer le milieu de tableau, sortir de cette zone rouge donc on a payé les essais, les hôtels, les vols pour attirer ces joueurs. Au final, la DNCG nous reconvoque et nous annonce qu’on descendra finalement en N2. C’est un premier coup dur.

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FM : après cette descente décidée par l’instance, comment réagissez-vous ?

YR : la DNCG ne se rend pas compte que c’est terrible pour nous car ces joueurs achetés ne veulent plus rester, il faut donc faire revenir en urgence des joueurs, refaire ces dépenses en hôtel, en vol, en transfert pour attirer de nouveaux joueurs mais le plus grave dans tout ça est que nous avons perdu 300 000 euros de la Fédération en descendant. Le budget devient fatigué. En descendant, nous sommes également exclu de l’Agglo, on repasse sous la houlette de la Mairie. Les subventions, il n’y a que 80-90 000 euros de différence, mais l’Agglo ça tombe en octobre, la Mairie ça tombe en janvier. Comment vous faites pour assumer un club de football avec toutes les charges et seulement 120 000 euros par mois ? On jongle, on se bat et au mois de juillet plusieurs investisseurs nous contactent et arrive une proposition de Laurent Dechaux, passé par le GF38, le PSG, qui représente deux investisseurs.

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Un duo Emirati-Nigérian pour sortir de la crise !

FM : comment avez-vous accueilli cette nouvelle ?

YR : Laurent Dechaux, c’est un gros CV, un homme droit dans ses bottes donc on y va, on se rencontre avec l’Emirati Salem Ahmed Baobaid et le Nigérian Olatunji Olalekan Mayowa, on prend des avocats, eux-aussi. Ils viennent avec nous à la DNCG en janvier et il était donc prévu que les nouveaux investisseurs commencent par verser les 300 000 euros pour combler les dettes antérieures et il était prévu surtout qu’à partir du mois de décembre, ils prennent le contrôle du club donc les paiements, les encours, les salaires, les futures charges… On était très serein vis à vis de cette arrivée.

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FM : mais les premiers problèmes surviennent…

YR : oui, en décembre, les fonds mettent du temps à arriver car ils viennent de l’étranger. Au départ, on comprend, on patiente, on fait confiance mais le pire dans tout ça, c’est que les investisseurs viennent, entrent dans le vestiaire et parlent aux joueurs en disant que tout va mieux se passer et qu’ils auront tout ce qu’il faut pour ne penser qu’au football. Ils assurent également que les joueurs seront payés en temps et en heure en janvier, qu’ils reconnaissent avoir eu un peu de retard mais que pour compenser ce retard ils paieront les joueurs le 15 décembre et qu’ils verseront le salaire de janvier le 25 ou 26 décembre… De cette discussion, les joueurs sortent contents, tout se passe bien mais on patiente et rien ne vient… ni le 15 décembre, ni le 20, ni le 25…

FM : quelles solutions pour vous face à cette situation critique ?

YR : par chance, on avait un gros sponsor qui nous aide donc je rentre ce sponsor et je dis aux investisseurs qu’on va payer les salaires des joueurs via ce sponsor malgré le fait que ce sponsor était prévu, au départ, pour l’association. Après ce premier coup d’arrêt, les investisseurs reviennent et rassurent à nouveau en disant qu’on va bientôt partir en stage. Au début, c’était l’Espagne, après Font-Romeu mais au final pas de salaire en décembre, ni en janvier… Ils continuent pourtant de nous assurer que les fonds vont être débloqués. En janvier arrive la subvention Mairie et on se sert d’une partie de cette subvention pour payer les salaires de décembre, les retards de paiement et au final l’erreur que j’ai faite c’est de ne pas avoir gardé une partie pour payer les salaires de janvier… Au cours du mois de janvier, je paye la Fédération, la Ligue etc, et les investisseurs se présentent, à nouveau, avec nous le 9 janvier à la DNCG. Ils font un speech et la DNCG croit le speech car au final on n’a pas d’amendes ni de points de pénalité et l’instance nous dit 'nous on libérera les transferts quand les fonds seront débloqués’.

Un projet de reprise qui vire au cauchemar !

FM : et ces fonds sont-ils débloqués ?

YR : non, le pire c’est qu’à partir de là, les investisseurs décident, par l’intermédiaire de Laurent Dechaux, de recruter. Ils font venir Robin Taillan, Rayan Frikeche, Georgios Kakko, ils assument le paiement du vol, de l’hôtel etc. On fait aussi venir Nicolas Taravel et on fait aussi un joueur du PSG en prêt (Mathyas Randriamamy, ndlr) et un joueur de l’OM en prêt (Idris Kabiru, ndlr) mais au final quand Taravel arrive, l’argent des investisseurs n’est toujours pas arrivé et la DNCG nous refuse ce transfert… On retombe, à partir de là, dans les problèmes.

FM : quelle est votre réaction en tant que président ? Vous vous sentez trahi ?

YR : je m’énerve, les investisseurs viennent donner une conférence de presse, parlent aux journaux locaux, flattent le club etc et depuis…. plus rien. Le Nigérian est resté un mois en France dans un appartement qu’on lui a prêté, il est parti et nous a volé les clés ! Il est rentré dans son pays en nous disant qu’il allait faire le virement et tous les jours il continue de nous le dire mais il ne se passe rien ! Il n’arrête pas de nous écrire mais rien ne se passe, en gros, il maintient la merde et depuis 10 jours, je n’ai plus de nouvelles. C’est une escroquerie mais comment l’expliquer ? Plusieurs fois, j’ai dit aux investisseurs ‘si le projet ne vous convient pas, on arrête, on arrête, on passe à autre chose avant que ce soit dramatique !’ Mais non, mais non… et au final, c’est dramatique ! C’est inhumain, ce sont des voyous, ils sont là pour faire souffrir les gens. Tous les jours, je me suis retrouvé avec mon groupe, il y a des joueurs avec des petits salaires, d’autres avec de gros salaires. En plus, les joueurs qu’ils ont fait venir, ce sont des joueurs avec des salaires bien plus gros que ceux qu’on a actuellement dans le club. On ne peut même pas les assumer alors que ce sont eux qui les ont recruté.

«Les gars s’amènent entre eux des sacs de riz, c’est un autre monde !»

FM : dans cette situation critique, quelles solutions s’offrent à vous ?

YR : je cherche des investisseurs, bien sûr que le FC Sète intéresse des gens, bien sûr que ça fait peur aussi mais le problème c’est le timing. Quel investisseur va venir poser 1 million sur la table en ce moment ? Personne. Le problème c’est que moi, en tant que président, j’ai des hommes en face, j’ai des familles, j’ai des gens qui crèvent de faim, j’ai des joueurs qui s’entraident, les gars s’amènent entre eux des sacs de riz, c’est un autre monde ! Ils viennent manger gratuitement à ma brasserie, ils viennent manger gratuitement à ma pizzeria. Hier, j’ai dû agir alors j’ai dit aux gars qu’on ne pouvait pas continuer comme ça, qu’il y avait des solutions mais pas dans l’immédiat alors on va mettre le club en cessation de paiement. Ça va permettre de prendre en compte le salaire des joueurs via l’AGS (régime de garantie des salaires, ndlr). On part sur un redressement judiciaire à partir de la semaine prochaine.

FM : comment le groupe a-t-il réagit face à cela ?

YR : hier ils m’ont tous dit merci avec les larmes aux yeux et aujourd’hui, ils étaient tous présents à l’entraînement avec un état d’esprit irréprochable. Je veux souligner ça. On va essayer de continuer comme ça et de s’en sortir comme ça. Le temps de ce redressement, les dettes vont se présenter, on va tirer un trait, en attendant on va gérer le quotidien comme on peut et à la fin de la saison on verra si les repreneurs sont arrivés. Le FC Sète intéresse, c’est une histoire, un club mythique.

Un groupe soudé malgré la tempête !

FM : globalement, dans quel état d’esprit est le groupe du FC Sète aujourd’hui ?

YR : aujourd’hui, les joueurs avaient le sourire. Je les ai remercié pour leur comportement, l’entraînement s’est parfaitement déroulé. Ça court, ça rigole, ils ont compris qu’on allait tous se battre ensemble et ça fait chaud au cœur de voir qu’il n’y a pas que des tordus dans ce monde. Honnêtement, je félicite mes joueurs et j’en suis fier. Ils sont incroyables, ils ont une superbe mentalité. Ils pourraient disjoncter mais ils sont là, soudés, ils s’entraînent, ils préparent le match suivant, ils sont dans un état d’esprit irréprochable, ils ont le sourire et ce n’est pas dit qu’on ne fasse pas un résultat ce week-end. La meilleure nouvelle pour eux aujourd’hui est qu’ils sachent qu’il y a une issue, c’est la fin du film ! Le club va être en redressement judiciaire, ils vont pouvoir percevoir leur salaire et c’est un premier gros point. Avec le ventre plein c’est plus facile de se battre. Si on avait eu les moyens avec un groupe comme celui-là, on ne serait pas à cette position là au classement, j’en suis certain. En tout cas, tout ça ne peut pas rester impuni, ces gens là n’ont pas le droit d’être dans le football. Ce n’est pas possible, il faut réagir là !

FM : sur le plan juridique justement, quels sont vos leviers d’action ?

YR : la semaine prochaine avec Laurent Dechaux, on récupère tous les documents, on va tous les deux porter plainte. Pour lui c’est dramatique aussi, ça fait 25 ans qu’il est dans le football, il n’a pas une tâche d’encre sur le dos et aujourd’hui il est sali. C’est une histoire de fou ! Il en est malade aussi mais on ne peut pas faire différemment, il a été floué, certains imbéciles diront que c’est de sa faute mais il a fait des recherches, l’argent été bien là mais c’est comme ça… On arrive pas à comprendre. Vous savez dans ma vie j’en ai vu des choses mais des choses comme ça j’en ai jamais vu. Un escroc normalement il a but, il a un intérêt mais là… ils ont rien a gagné, ils ont rien pris, ils font juste du mal gratuitement à des familles. C’est tout ! La semaine dernière, j’ai appris un truc qui m’a rendu encore plus fou, cet investisseur d’Arabie saoudite là, il est allé à Chypre, il a fait une conférence de presse pour acheter un autre club mais il faut le bannir du football, il faut que l’UEFA et la FIFA agissent. Ces mecs-là doivent être rayés de la carte. Leurs noms doivent être affichés dans tous les clubs de football du monde ! Il faut mettre leurs photos et prévenir que ces gens sont des voyous, des escrocs ! C’est affreux ce qu’ils ont fait ! C’est inhumain ! Ce sont des fous mais ces fous jouent pas avec des biens, des voitures ou des maisons, ils jouent avec des vies humaines ! C’est de la folie ! La semaine prochaine, je vais déposer plainte contre ces deux personnages. Il faut que ces gens soient griller, il faut que ça se sache partout ! C’est terrible. Je n’ai jamais vu ça de ma vie.

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