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En Avant Guingamp, Stéphane Dumont : «jouer un match de Coupe de France contre Rennes, ça provoque des émotions chez les gens»

Par Maxime Barbaud
11 min.
Stéphane Dumont sur le banc de l'EAG @Maxppp

Pour sa troisième saison sur le banc de l’En Avant Guingamp, Stéphane Dumont est dans la continuité des résultats mais revendique une approche tactique différente. Si son équipe manque de réalisme dans le dernier geste, le collectif plus structuré permet au club de titiller le haut du tableau de Ligue 2 avant de défier le Stade Rennais à la rentrée en Coupe de France.

Frustrant. C’est peut-être le mot qui résume le mieux cette première partie de saison de l’En Avant Guingamp. 8e à la trêve à 11 points de la 2e place qualificative pour la promotion en Ligue 1, le club breton reste dans le coup des play-offs, comme lors des deux premiers exercices de Stéphan Dumont sur le banc terminés à la 6e place. Mais le manque d’efficacité et de résultats à domicile empêchent encore l’EAG de voir plus haut malgré une qualité de jeu collective reconnue. Un constat que fait également le technicien de 41 ans, qui évoque avec nous la seconde partie de saison à commencer par le mercato et ce 32e de finale de la Coupe de France face au Stade Rennais ce dimanche (14h30), sans oublier son avenir personnel, lui qui arrive en fin de contrat en juin prochain.

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FM : quel bilan tirez-vous de cette première partie de saison de Ligue 2 ?

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Stéphane Dumont : le bilan est correct mais atténué par ces deux derniers matchs (des défaites contre Concarneau et Angers, ndlr) qui ne reflètent pas vraiment cette première partie. Il nous manque des points au regard des prestations alignées. Il y a une progression individuelle de certains joueurs. De la même manière, sur un plan collectif, on a été capable d’être acteur de chaque match. On a progressé dans la faculté à être plus rigoureux, on est mieux structuré que les années précédentes. On est organisé de manière cohérente. Ce n’est pas anodin qu’on soit la 2e défense du championnat et au regard des deux dernières saisons, c’est un vrai axe de progression. Maintenant, on n’est pas récompensé parce qu’on a un manque d’efficacité criant. C’est une frustration.

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FM : comment faire pour corriger ce problème d’efficacité ?

SD : ces analyses-là sont difficiles car vous avez la sensation de faire le plus dur mais il manque la finalité : marquer. L’axe d’amélioration prioritaire, c’est d’être plus efficace. C’est une certitude. Il faut qu’on soit capable de valoriser notre contenu en étant plus froid et plus lucide. Pour nous améliorer dans ce domaine, il faut continuer à diffuser de la confiance et malgré tout de valoriser le fait qu’on se procure beaucoup de situations. Peut-être qu’il faut plus jouer sur les émotions et forcer la réussite. Sur le plan du jeu, être capable d’amener les joueurs à se retrouver sur des postures plus positives. Il faut avant tout qu’on persiste. On a fait de très bonnes choses. Il faut se réfugier dans le travail pour valider les situations et les performances qu’on propose. Comme toutes les équipes, on a cherché une forme d’équilibre dans la faculté à créer un maximum d’occasions et d’en concéder le moins possible. Cet équilibre, on l’a mais on ne le valide pas. On n’en tire pas profit.

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FM : lors de vos premières saisons à Guingamp, vous prôniez un style de jeu plus offensif. Pourquoi avez-vous évolué dans votre approche tactique ?

SD : oui, on a évolué dans notre approche. Déjà parce qu’offensivement depuis deux saisons, on a toujours perdu nos éléments les plus décisifs, nos meilleurs buteurs comme Frantzdy Pierrot, Youssouf M’Changama, Jérémy Livolant. À chaque intersaison, on a perdu nos joueurs efficaces. Il faut être capable de se renouveler et surtout de ne pas faire du copier/coller parce que ce n’est pas possible. Ça demande une remise en question. Et puis grâce à notre organisation, à notre faculté à presser et au profil de nos défenseurs, qui sont plus à même de défendre haut, on souhaite avoir un peu moins de temps de préparation dans nos actions mais d’avoir la faculté à imposer un rapport de force plus conséquent chez l’adversaire. Être plus souvent dans le camp adverse, c’est un peu notre ADN depuis le début de saison mais une nouvelle fois, pour valider ça, il faut être plus efficace.

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«On amène beaucoup de centres mais de moins bonnes factures»

FM : Guingamp est actuellement la 12e équipe à domicile. L’an passé, vous étiez même 17e de ce classement alors qu’à l’extérieur, vous êtes l’une des meilleures équipes du championnat. Comment expliquez-vous cette différence ?

SD : je pense que c’est multifactoriel. On a la capacité à s’offrir plus d’espaces à l’extérieur. Dès que le jeu est plus dense, on manque de justesse, de créativité, de joueurs de déséquilibre. Malgré tout, si on regarde nos matchs à domicile, je pense aux deux derniers notamment, par rapport à ce qu’on faisait en amont, l’efficacité revient toujours dans les analyses. On a toujours été puni alors qu’on était acteur des matchs. On a eu deux penaltys cette saison, on a raté les deux pour un nul 0-0 et une défaite 0-1. Ça aussi, ça fait partie de l’efficacité qui nous a manqué sur cette première partie de saison. On va essayer d’appréhender les choses de manière différente, tant psychologiquement qu’à travers le jeu, notamment face à des blocs regroupés. Peut-être accepter aussi d’avoir un bloc un peu moins haut à domicile pour pouvoir s’offrir un peu plus d’espace. Puis avoir la capacité durant les entames d’ouvrir le score. Ça nous permettrait de faire sortir les équipes. Et être capable aussi d’être performant sur les coups de pied arrêtés. C’est un panel complet et puis je pense qu’il faut persister dans ce qu’on fait de bien, comme je le disais avant. Il manque la finition et le dernier geste. On n’aurait pas la même analyse avec plus de justesse dans la surface.

FM : le mercato peut-il vous aider à résoudre ces problèmes ?

SD : le mercato peut nous aider mais encore faut-il pouvoir faire un joueur qui soit une plus-value. Est-ce qu’on en a la possibilité ? Ce qui est certain, c’est qu’on a une réflexion sur ce qui pourrait nous rendre meilleurs sur la seconde partie de saison, et même dans un futur plus lointain. Maintenant, est-ce que c’est un joueur avec un profil particulier ? Un jeune joueur de chez nous qu’on souhaite faire émerger mais qui doit avancer plus vite que ce qu’il a fait sur cette première partie de saison ? Ce sont ces réflexions qu’on a. Je ne pense pas qu’il faille un changement radical. Un changement tactique pourrait nous amener à plus d’efficacité. Ce qui est sur c’est que j’aime la faculté à développer du jeu dans les couloirs, sous toutes ces formes : le jeu combiné, la capacité à prendre la profondeur, d’avoir du jeu à deux ou à trois. Aujourd’hui, on est moins performant dans ce domaine que les saisons précédentes. On amène beaucoup de centres mais de moins bonnes factures. Je ne pense pas forcément que cela vient de ceux qui jouent dans le couloir. Parfois, ça part de la ligne du bas, ce sont des profils, des complémentarités. Dans ce registre, on doit être capable de mieux faire et on va voir comment on peut corriger ça parce que c’est le sel de ce que j’essaye de mettre en place. On va essayer d’évoluer dans ce domaine en gardant nos équilibres, soit par la venue d’un joueur supplémentaire au profil différent, soit par une articulation différente, une complémentarité qu’on a pas encore essayée. On a toutes ces réflexions-là et ça va encore se générer dans les jours à venir.

FM : avez-vous déjà discuté du mercato avec votre direction ?

SD : je leur pose ces réflexions là, très détaillées, très foot. Et puis d’autres plus globales. Est-ce qu’on prend juste quelqu’un pour six mois ? Est-ce qu’on fait comme avec Amine El Ouazzani l’an passé, c’est-à-dire qu’il vient et on le prépare pour la suite ? Quand Amine arrive, il est entouré de joueurs d’expérience. Aujourd’hui, on a Amine, on a Hugo Picard, Amadou Sagna, Jacques Siwe, des joueurs encore jeunes et à développer. Donc, soit on prend quelqu’un, soit on continue à les faire progresser et ils peuvent être nos meilleures recrues. Ça bout dans nos têtes. On a ces réflexions et forcément notre direction écoute.

Les play-offs en ligne de mire

FM : vous avez terminé deux fois 6e de Ligue 2, aujourd’hui vous êtes 8e, quel est l’objectif pour la fin de saison ?

SD : l’objectif c’est de continuer à être performant. Être capable de faire deux fois 6e en Ligue 2 avec Guingamp qui sortait d’exercices difficiles, c’est déjà une performance. Maintenant, on veut continuer, véhiculer les valeurs du club en continuant à avoir des contenus de qualité. C’est ce qui m’intéresse mais il faut qu’on gagne plus de matchs que les saisons précédentes. On a gagné 15 matchs par saison, on a marqué plus de 50 buts par saison et on a l’envie de mieux faire. On a réussi à corriger le tir sur l’aspect défensif mais au-delà de nos résultats, on souhaite continuer à développer nos jeunes joueurs comme Amine El Ouazzani, Sagna, Siwe, les formés au club comme Baptiste Roux, Matthis Riou, et en même temps avoir des performances avec l’espoir qu’à 10 matchs de la fin, on puisse s’accrocher à quelque chose, pouvoir essayer de vivre des émotions. A la trêve, cet espoir est là. Maintenant, je considère qu’on aurait du avoir plus de points et c’est aussi nous qui n’avons pas réussi à forcer cette réussite.

FM : les deux premières places s’éloignent mais vous êtes toujours dans le coup pour les play-offs…

SD : oui c’est intéressant pour nous. On est présent et la saison est encore longue. On veut s’accrocher à ça. Et on a le sentiment sur le terrain qu’on n’est pas loin. Forcément, c’est l’objectif de cette seconde partie de saison.

FM : pour lancer cette année 2024, vous avez un grand rendez-vous en Coupe de France avec un derby contre le Stade Rennais, qui n’est pas au meilleur de sa forme. Ça vous donne des idées ?

SD : c’est surtout important de vivre des émotions avec le club et les supporters. À travers les challenges qu’on s’est fixés, avec ces deux saisons où on a fini 6e et des choses très agréables, sur une troisième saison avoir l’ambition de pouvoir accrocher quelque chose, d’être dans le coup et de jouer un match de Coupe de France contre Rennes, un derby, une Ligue 1, ça provoque des émotions chez les gens. Il faut savoir s’en servir, parfois les canaliser aussi mais c’est top. Après, c’est un match contre une équipe qui vient de tirer l’AC Milan en coupe d’Europe. Ça montre quel adversaire sera devant nous dimanche. C’est très intéressant et dans la préparation, ce sont des choses que nous n’avons pas connues depuis deux ans. On n’a jamais eu l’occasion d’être le petit contre le gros. Dans la façon d’amener l’équipe, c’est aussi appréhender les choses de manière différente qu’en championnat et c’est très constructif pour nous et les joueurs.

FM : un Guingamp-Stade Rennais, ça rappelle de bons souvenirs aux supporters guingampais…

SD : exactement (rires), c’est d’autant plus d’émotions. Dès le tirage, on nous a parlé de ça. On le sent bien. Il faut essayer de s’en servir, tout en étant lucide, calme. On est obligé.

La Ligue 1 dans un coin de la tête

FM : à titre personnel vous arrivez en fin de contrat en juin prochain. Comment voyez-vous la suite ?

SD : je suis en fin de contrat, sauf en cas de montée car il y a une option d’un an. Après je suis concentré sur la saison. Je ne me suis pas posé la question. Je suis concentré sur la faculté à essayer de faire progresser l’équipe, le club, les joueurs et moi-même. Je reste concentré là-dessus et je me pose la question de la suite. Je suis focus sur l’instant présent je n’essaye pas de me projeter. Même si j’ai une réflexion forcément mais à l’heure où je vous parle, l’idée est simplement d’être concentré sur ce qu’on fait aujourd’hui.

FM : on dit souvent qu’il peut y avoir une fin de cycle après trois ans, ce n’est pas le cas de votre côté ?

SD : il y a 15 jours, on m’a dit que j’avais passé le cap des 100 matchs sur le banc de Guingamp. Ça veut dire que dans le foot de maintenant, des entraîneurs qui sont capables d’être deux ou trois ans de suite sur le même poste, c’est rare. C’est un métier difficile. Avec le contexte qui évolue dans tous les sens, qu’on soit en France ou ailleurs, c’est un métier instable. C’est déjà une fierté de continuer à être performant et d’avoir la volonté de continuer à avancer mais je ne me projette pas sur la suite. Je suis vraiment focus sur la saison.

FM : vous faites de la Ligue 1 un objectif personnel ?

SD : bien sûr car j’ai toujours été très ambitieux. À un peu plus de 40 ans, je suis sur un banc de Ligue 2, c’est que j’ai réussi à franchir les étapes une par une depuis le début, en prenant mon temps, en essayant de construire. En passant aussi par plusieurs métiers avec la formation, être adjoint, être numéro un. Je n’ai pas un ego surdimensionné mais il est assez développé pour savoir qui je suis. J’ai confiance en moi et même si je suis concentré sur la saison de l’EAG, à l’avenir, on a tous envie d’évoluer et d’entrainer au plus haut niveau. Je suis concentré pour que ça soit le cas avec l’EAG.

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