Espagne : les dessous de l'intégration réussie de Diego Costa

Par Max Franco Sanchez
6 min.
Espagne Diego da Silva Costa @Maxppp

Alors qu'il avait eu du mal à se faire une place en sélection sous les ordres de Del Bosque, l'attaquant de Chelsea est de plus en plus à l'aise dans le schéma tactique de Julen Lopetegui. Explications.

28 février 2014. Après un long feuilleton qui a régulièrement fait les unes de la presse brésilienne et espagnole, Diego Costa, qui venait d'acquérir la nationalité espagnole, débutait sous la tunique de la Roja. Auteur d'une excellente saison avec l'Atlético de Madrid - qui allait ensuite s'emparer du titre de champion d'Espagne - le goleador colchonero rayonnait. Les supporters espagnols pensaient enfin avoir trouvé leur goleador, à une position vierge de talents après la baisse de forme de David Villa ou Fernando Torres. Ni Roberto Soldado, Alvaro Negredo ou Fernando Llorente ne parvenaient à convaincre Vicente del Bosque. Pourtant, la sauce n'a pas pris. Le joueur n'était clairement pas à l'aise dans le 4-3-3 de Vicente Del Bosque, et ses coéquipiers avaient énormément de mal à le trouver. Il faut dire que le système alors utilisé par Diego Simeone était à l'opposé de celui utilisé en sélection espagnole, bien plus direct, et le joueur était alors habitué à jouer avec énormément d'espaces devant lui, partant dans le dos des défenseurs adverses pour prendre la profondeur. Il semblait même avoir perdu du terrain par rapport à Alvaro Morata dans les plans du champion du monde.

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Mais l'arrivée de Lopetegui a tout changé. D'entrée, pour le premier match des qualifications pour le Mondial - face au faible Liechtenstein certes - l'ancien entraîneur des Espoirs l'a aligné d'entrée, même s'il avait déjà joué lors de l'amical face à la Belgique pour la grande première du coach basque. Et contre la principauté imbriquée entre la Suisse et l'Autriche, Diego Costa s'est offert un doublé. Face à l'Italie, il n'a certes pas marqué, mais a été très important dans le jeu, avant de refaire trembler les filets contre l'Albanie. Non disponible contre la Macédoine, il a ensuite refait parler la poudre contre Israël. Il totalise donc quatre réalisations en autant de rencontres de qualifications de ce groupe G, dominé par les Espagnols qui vont se disputer cette première place avec les Italiens. Ce soir, pour le match amical face à la France, le joueur de Chelsea est incertain.

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La sauce commence à prendre

Forcément, lorsqu'il a été parachuté en sélection, avec une expérience du très haut niveau limitée et une formation totalement différente de celle de la plupart de ses partenaires, le natif de Lagarto a eu du mal à s'intégrer. Des lacunes techniques, un manque de synchronisation avec ses coéquipiers, une philosophie tactique et un système totalement différents de ce qu'il connaissait... Bref, les obstacles à surmonter étaient nombreux. Mais désormais, il semble bien plus à l'aise dans cette équipe. Techniquement parlant, il n'a pas forcément réalisé de progrès majeurs, mais plutôt que d'essayer d'imiter ses coéquipiers dans le style, il se sert de ses forces et de ses qualités pour servir ou demander des ballons à ses partenaires. C'est donc au niveau de la compréhension du jeu qu'il a progressé. On le voit surtout lorsqu'il décroche pour combiner avec ses coéquipiers ou dans les transmissions dans les petits espaces. Il a par exemple plutôt tendance à chercher un coéquipier, pour le lancer ou s'en servir en point d'appui, plutôt que de "foncer tête baissée", pour caricaturer.

Une meilleure science du placement

En Angleterre, Diego Costa a énormément progressé dans la surface. Face à des défenses généralement plus rugueuses et plus retranchées dans leur camp, il a dû apprendre à évoluer dans des espaces réduits. Un atout considérable sachant que la plupart des rivaux de la sélection espagnole ont tendance à évoluer bien regroupés dans leur surface. Comme expliqué ci-dessus, il a désormais plus de facilités à évoluer dans des petites espaces, et face à Israël, on l'a ainsi vu combiner dans la surface rivale à plusieurs reprises avec Andrés Iniesta ou David Silva. Déjà plutôt bon au niveau du placement et des appels de par son instinct naturel de goleador, il a encore progressé dans ce domaine. Sa lecture du jeu lui permet de régulièrement être à la retombée d'un centre ou d'une passe en retrait, et lorsqu'il aura trouvé une entente avec les nouveaux joueurs de côté de la sélection comme Vitolo ou Carvajal, on peut imaginer que les centres à destination de sa tête seront une arme redoutable pour Julen Lopetegui.

Il est moins esseulé devant

La "salle des machines" comme on dit en Espagne lorsqu'on mentionne l'entrejeu de la Roja, a tendance à évoluer un cran plus haut qu'auparavant sur le terrain. Il n'y a donc plus ce no man's land entre le milieu de terrain et les quelques joueurs offensifs comme on avait l'habitude de voir sur les dernières compétitions de l'ère Del Bosque. Des joueurs comme Thiago, Koke, ou Iniesta sont positionnés plus haut sur le terrain, pendant que les joueurs de côté, qu'ils soient latéraux ou ailiers, jouent eux aussi très avancés et repiquent souvent dans l'axe. Costa a donc plus de partenaires évoluant à ses côtés, et donc logiquement plus de possibilités de recevoir des ballons exploitables ou de combiner. La présence de joueurs aux abords de la surface permet aussi de distraire ou d'attirer les défenseurs adverses, qui pouvaient avant se permettre le luxe de le marquer à deux ou trois.

Un jeu un peu plus direct

Le jeu espagnol reste principalement basé sur le jeu de position, avec la volonté de contrôler le ballon. Mais Julen Lopetegui a inclus des variantes dans son jeu, et le ballon circule globalement plus vite dans les derniers mètres. Des joueurs comme Koke ou Thiago, qui se sont fait une place dans l'équipe, ont cette capacité à alterner jeu court ou jeu plus long, avec de longues diagonales ou des ballons en profondeur. De quoi mettre en valeur un Diego Costa qui s'est certes ajusté au jeu traditionnel ibérique, mais qui raffole toujours des ballons dans le dos des défenseurs et des un contre un avec les portiers rivaux. On voit également bien plus de centres dans la surface, ce qui était presque un sacrilège il y a encore quelques années.

Lopetegui l'a mis dans les meilleures conditions

En plus des quelques facteurs tactiques qui expliquent cette amélioration des performances de l'attaquant des Blues, la gestion du cas Diego Costa par Julen Lopetegui est pour l'instant parfaite. De l'extérieur, on sentait que Del Bosque voulait le faire entrer dans le moule, quitte à le brider, alors que Lopetegui estime justement que son profil atypique peut être une force supplémentaire pour son équipe et l'encourage à jouer à sa façon. « Nous le voulons tel qu'il est, il a beaucoup de qualités. Ce point d'agressivité positive est nécessaire. On veut un Diego Costa un peu énervé, c'est ce côté de Diego qu'on veut et dont on a besoin », expliquait le sélectionneur, convaincu de la valeur ajoutée qu'apporte et peut encore apporter l'ancien du Rayo.

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