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Info FM : à la découverte du jeune Bora Deyonge, latéral gauche créateur du PSV et « Héritier » du football belge !

Par Mathieu Rault
9 min.
PSV Eindhoven @Maxppp

Il n’a que seize ans et fait déjà tourner les têtes des scouts des plus grands clubs européens. Le latéral gauche Héritier Bora Deyonge détonne au PSV, où son aisance technique et sa puissance en font l’une des promesses les plus attendues des Pays-Bas...mais également de Belgique. Rencontre.

C’est avec une mine sérieuse qu’Héritier Bora Deyonge, « Heri » ou « Titi » pour les intimes, passe la porte des bureaux de Foot Mercato. Sans doute la fatigue de la route. Le chemin d’Eindhoven à Paris est semé d’embûches. Lorsqu’il ôte sa casquette avant d’offrir sa main, tendue, pour une poignée cordiale mais virile, Héritier ne laisse échapper qu’un petit sourire forcé. Mais malgré une timidité apparente, le jeune homme sait ce qu’il veux et où il va. En tout cas, c’est l’air qu’il donne. Après avoir pris place autour de la table, accompagné de sa maman, qui le suit comme son ombre, il déploie une tablette et prévient qu’il va enregistrer notre échange. Un moyen de s’écouter pour «être sûr de ne pas dire de bêtise».

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Héritier -un prénom lourd de responsabilités- est le benjamin d’une famille de trois enfants. Le petit dernier que sa maman couve et encourage. Soutien numéro un du jeune prodige, cette dernière n'hésite pas à lui rappeler que le football s'est présenté à lui bien plus tôt qu'il ne le croit. «À six mois, alors qu'il ne marchait qu'à quatre pattes, il jouait déjà au foot. Il aimait déjà ça et quand il voyait quelqu'un lancer une balle, il souriait. Alors, tout le monde me disait "ce sera un grand joueur". Quand il a eu 1 an, il a commencé à marcher et il cassait tout dans la maison. Au départ, on habitait au troisième étage mais avec le boucan qu'il faisait on a ensuite été déplacés au rez-de-chaussée,» se souvient celle qui le guide chaque jour.

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Changement d’étage et premières échappées sur les terrains

Ottignies-Louvain-la-Neuve, vingt-cinq kilomètres au sud de Bruxelles, 30 000 habitants et une cité universitaire où la maman d'Héritier Bora Deyonge, originaire de République Démocratique du Congo, a étudié. «Une famille», dit-elle. Cinquante-deux nationalités, une génération d'étudiants qui ont eu des enfants, tous au même âge. À quatre ans, le petit Héritier s'échappe des jupes de sa chère mère pour aller courir sur les terrains du quartier avec ceux qu'il appelle ses «frères». «Je jouais avec des plus vieux, dehors. Ils ne faisaient pas vraiment attention à moi. Je devais faire avec les coups, dès tout jeune, il a fallu que je m'adapte,» se souvient Héritier. La Wallonie.

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C'est ensuite grâce au Royal Ottignies Stimont (ROS), club local, qu'Héritier foule ses premières pelouses de manière "officielle", même si son très jeune âge l'empêche au départ de disputer les rencontres qui comptent. «J'ai commencé un an plus tôt que les autres, alors parfois je ne pouvais pas jouer les matches. Mais j'ai continué à jouer à côté, sur les terrains près de la maison, jusqu'à mes six ans et notre déménagement dans une ville d'à côté, Mol». «À côté», tout est relatif. Les Bora Deyonge déménagent à 100 km à l'est et se rapprochent des Pays-Bas. L'idée est de trouver une meilleure école pour Héritier et ses frère et sœur. Dans cette commune de 36 000 habitants située en périphérie d'Anvers, Héritier fréquente l'Ecole Européenne de 6 à 12 ans. Une fierté. La Flandre.

Le KVC Westerlo et le recrutement en Belgique

«En arrivant à Mol, on a tout de suite cherché un nouveau club de foot parce que je n'arrivais pas à rester calme. On a trouvé Westerlo.» Au KVC, s'il est conscient d'évoluer dans un club qui compte dans le paysage du football belge, tout jeune, Héritier joue pour s'amuser, pas encore certain que cette voie sera celle qu'il choisira par la suite. Aujourd'hui latéral gauche, Héritier Deyonge débute sur l'aile gauche, affublé du numéro onze, et évolue également au poste de numéro 9. Après trois années chez les Campagnards, il attire les regards des parents et de scouts -d'anciens joueurs de Westerlo reconvertis dans le recrutement- présents derrières les balustrades les jours de matches.

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Il faut savoir qu’en Belgique le recrutement se fait dès la catégorie U6, alors même que les apprentis footballeurs tapent leurs premiers ballons en clubs. «Il y a tellement de concurrence ici, que si tu ne les a pas en U7, U8, tu ne les as plus. Un enfant de 7 ans qui est doué doit avoir accès à un club élite, où il bénéficiera de plus d’entraînements. En Belgique, on ne veut pas rater un seul talent. On n’est pas un grand pays donc on a la tolérance zéro,» nous expliquait encore récemment Philippe Brutsaert, responsable du recrutement au KV Courtrai, club de Jupiler Pro League.

Le PSV plutôt qu’Arsenal ou l’AC Milan

Invité par le PSV, il rejoint Eindhoven tous les mercredis, pour s'adapter à l'équipe. Puis après l'école. Quarante-cinq minutes séparent Mol de De Herdgang, centre d'entraînement du PSV. Un chauffeur vient le chercher et le raccompagne au domicile familial après les entraînements. La proximité du club estampillé Philipps a penché dans la balance au moment de faire un choix. Une décision prise par sa maman. «L'AC Milan, Arsenal, l'Ajax, Genk et le PSV étaient intéressés par Héritier,» se souvient-elle. Si les deux premiers cités trottent dans la tête de la maman d'Héritier, elle craint que la pression exercée dans ces grands clubs puissent être lassante. Le PSV propose également une famille d'accueil à son fils, lorsqu'elle doit s'absenter plusieurs jours.

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Dès ses débuts, Héritier fait l’expérience de la rivalité entre le PSV et l’Ajax. Peu importe l’âge des forces en présence, ce "nouveau" Klassieker a une saveur particulière. «On ressent la rivalité historique dans les matches. Le match « donne » la concurrence, pas vraiment le nom. Quand tu gagnes ce match, ta semaine ne peut plus être gâchée. Il y a plus d’agressivité, les arbitres laissent jouer, il y a aussi plus de monde qui vient au stade. C’est toujours plein. Une vraie atmosphère !», raconte Héritier, non sans fierté.

Un latéral dribbleur, porté vers l’avant

Aujourd'hui latéral gauche, Héritier a débuté au poste d'attaquant, il se dit «porté sur l'offensive, à la recherche de la passe décisive ou du but.» Les vidéos qu'il poste sur les réseaux sociaux en attestent, il aime dribbler, partir de son côté gauche et repiquer dans l'axe. Sa puissance physique est également un atout au moment de provoquer en un-contre-un. «Il faut aussi que je fasse mes tâches défensives,» finit-il par lâcher, un sourire aux lèvres, comme un enfant pris en faute, qui aurait oublié quelque chose. «Le poste que j'occupe actuellement me convient très bien. Il y a bien des fois où j'aimerais m'amuser en attaque, mais latéral gauche c'est très bien». Sous l’égide de Mark van Bommel ou Andre Oijer, il cherche à progresser sur les aspects défensifs.

Ses trois premières années sous le maillot rouge et blanc, Héritier remporte le championnat. Chez les U16, l’an passé, il remporte la première phase. Dans cette catégorie, il décroche également le U16 International Tournament Premier League, en venant à bout de Manchester City (3-1) en finale, en octobre dernier. Et la moisson se poursuit cette année. Avec les U17 du PSV, Héritier vient de remporter la Supercoupe des Pays-Bas contre N.E.C., «un match qui  normalement n'aurait pas dû être très difficile, mais qui en tant que finale a pris peu plus de poids.» N.E.C a bien joué mais les jeunes hommes de Johann Vogel, l'ancien milieu international suisse qui avait fréquenté le club de 1999 à 2005, ont su faire la différence en inscrivant un troisième but avant la pause (score final 3-2).

Jetro Willems, David Alaba et Marcelo comme inspiration

Surnommé Jetro Willems, pour sa ressemblance avec l’international néerlandais et ancien défenseur du PSV qui évolue dorénavant à l’Eintracht Francfort, Héritier veut à tout prix s’imposer chez les Boeren. Avec l’ambition de décrocher un premier contrat professionnel dans les prochains mois. Et pourquoi pas gravir les marches menant au groupe pro quatre à quatre. Après tout, s’il reste à passer les étapes U19 et U21 avant d’atteindre l’équipe première, il semble que le PSV de Mark van Bommel n’ait pas encore trouvé chaussure à son pied sur le côté gauche de la défense. Le départ de Joshua Brenet, en partie formé au club, et les arrivées combinées d’Aziz Behich et d’Angeliño cet été en sont la preuve.

«Si je dois imaginer où je serai dans deux ans, je dirais aux portes de l’équipe première (il aura 18 ans, ndlr), je crois que c’est assez raisonnable.» Si l’on demande à Héritier de voir plus loin, de mettre un voile sur son amour du PSV quelques instants et de s’imaginer dans un grand club européen, son choix se porte sur le Paris Saint-Germain. «J’aime bien les Neymar, Kylian Mbappé,» lâche-t-il, réminiscence de sa vie passée d’attaquant, lien présent du joueur technique qu’il est. À son poste, l’international autrichien du Bayern Munich David Alaba (26 ans) et son homologue brésilien du Real Madrid Marcelo (30 ans) remportent son suffrage.

Le rêve des Diables Rouges

À plus long terme, le garçon ne manque pas d’ambition. «Gagner la Coupe du monde avec la Belgique. Je crois qu’il n’y aurait rien de plus beau. Je trouve que la Belgique se développe bien chez les jeunes. On peut s’appuyer sur une très bonne génération, ils m’ont surpris cet été à la Coupe du monde. Je suis content de leur parcours, c’est quand même assez unique pour nous. Je crois que maintenant c’est notre standard, on ne peut que faire mieux. » Chez les Diables Rouges, Héritier ne surprend personne en déclarant qu’Eden Hazard est celui qu’il apprécie le plus. «J’aime bien son dribble, c’est, comment dire… très entraînant. Très spécial. Comme une danse.» Il n’oublie cependant pas ses compères de la défense. Thomas Meunier et Jan Vertonghen, qu’il décrit comme des joueurs «secs», ont sa préférence. Pas loin de le zapper, il cite enfin Romelu Lukaku en fin de parcours.

Un rêve de sélection qu'il ne réalisera pas seul. «Ma maman, elle joue avec moi en fait. Elle se lève avec moi, à six heures du matin. On prie ensemble, quand je rentre ma nourriture est prête. Chaque samedi, si elle peut...non pas si elle peut, elle est toujours là. À domicile, à l’extérieur, même quand je vais dans un autre pays, elle vient avec moi. C’est mon premier soutien, elle joue vraiment avec moi. Elle fait beaucoup, alors je serais heureux de lui rendre quelque chose. Mais je ne me dis pas chaque jour « je lui dois ça, je lui dois ça », je ne me mets pas de pression mais ça me ferait vraiment du bien de réussir. Ce serait vraiment un cadeau. Si moi je réussis, alors on réussit tous.»

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