Comment le Betis est devenu un des rois du mercato en Europe

Par Max Franco Sanchez
8 min.
Real Bétis @Maxppp

Cet hiver, le club andalou a encore frappé un grand coup avec l'arrivée de la pépite mexicaine Diego Lainez, convoité par d'autres bons clubs du Vieux Continent. Et ce n'est pas la première fois que le Betis chipe un joueur à la barbe de clubs plus huppés sur le papier...

Depuis l'arrivée de Quique Setién sur le banc de touche andalou à l'été 2017, le Betis est devenu un des clubs à la mode en Espagne et même en Europe. Et pour cause, les Verdiblancos pratiquent un jeu plutôt agréable, très porté sur l'offensive et avec des individualités qui brillent de mille feux. Mais si le labeur de Quique Setién est déjà bien reconnu, même sur la scène internationale, le travail réalisé par la direction du club "en arrière-plan" n'est pas forcément toujours mis en lumière. Parce que si le coach peut mettre en place un 3-5-2 aussi efficace, c'est grâce aux joueurs du niveau de Sergio Canales ou de Giovani Lo Celso, entre autres, qu'il possède dans son effectif. Des joueurs qui n'auraient clairement pas fait tâche dans des équipes théoriquement plus importantes. « J'ai eu des offres du Real Madrid et du Barça », confiait par exemple l'international portugais William Carvalho le week-end dernier.

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Et si ces joueurs ont choisi le Betis, alors qu'ils auraient pu rejoindre des clubs plus huppés, c'est qu'il y a une raison, et plus particulièrement un homme derrière tout ça... Lorenzo Serra Ferrer, le vice-président sportif du club. Depuis son arrivée avant l'été 2017, il a multiplié les bons coups, à commencer par la nomination de Quique Setién, un pari personnel. William Carvalho (20M€), Marc Bartra (10M€), Andrés Guardado (2,5M€) Sergio Canales (0€), le neo-international espagnol Pau Lopez (0€), tous particulièrement bons, pendant qu'on salive à l'idée de voir l'espoir Diego Lainez (14M€) à l'oeuvre de façon régulière en Liga. Jesé est également arrivé pour tenter de relancer sa carrière. Quelques échecs tout de même, comme Takashi Inui, l'international japonais, qui était cependant arrivé gratuitement lui aussi. Le contraste avec les mercatos précédents - où le Betis dilapidait les quelques millions présents dans les caisses sur des joueurs qui n'ont pas brillé - est pour le moins saisissant.

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Lorenzo Serra Ferrer, l'architecte du renouveau en coulisses

« Serra est la principale arme sur le marché et il parle avec Setién de tous ou presque tous les joueurs qui intéressent. Même si parfois il peut y avoir des désaccords. Son objectif est de retourner la situation après les mauvaises gestions précédentes et pour l'instant il y parvient », nous confie le journaliste Daniel Lagos de AS. Homme de caractère, passionné et amoureux de son club, fan de Johan Cruyff, il a ainsi su « redonner à tout un club une ambition et une exigence qui manquaient au Betis ces derniers temps », explique Jesus Sevillano, de ABC de Sevilla, qui met en avant le fait que maintenant, le Betis est capable de tenir tête à son voisin et ennemi du Sevilla FC.

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« Il a convaincu tout le monde en interne que le Betis est une équipe qui doit toujours être en Europe et jouer des coudes avec les équipes les plus importantes du pays, le Barça, le Real Madrid et l'Atlético, en sachant la difficulté que ça comporte à cause du potentiel économique et financier de ces trois clubs », conclut-il. Il ne faut également pas oublier que lorsqu'il était entraîneur, il avait réussi à emmener le Betis jusqu'à la troisième place à deux reprises entre 1994 et 1997, et sa figure est donc plus que respectée dans la capitale andalouse. Peut-on dire que Serra Ferrer est l'homme le plus important du club aujourd'hui ? Les avis sont divisés, puisque Quique Setién pourrait aussi prétendre à ce "titre", mais il n'y a aucun doute sur le fait que les deux hommes sont les principaux artisans de ce retour sur le devant de la scène.

Le Betis a d'excellents atouts pour attirer les joueurs

Mais comment expliquer qu'un club certes important sur la scène nationale, mais ayant souvent fait l'ascenseur sur la dernière décennie et ne roulant a priori pas sur l'or puisse arracher Diego Lainez à l'Ajax ou à l'OL, ou William Carvalho à de nombreux cadors espagnols et anglais ? « Le Betis a divers arguments. Le club est en croissance, et il a réussi à avoir une certaine stabilité institutionnelle, ce qui était un petit frein avant. Les salaires sont aussi plutôt élevés. Mais actuellement le principal atout pour convaincre les joueurs c'est Quique Setién. Et beaucoup de joueurs qui viennent l'admettent. Cette équipe est une vraie attraction pour le spectateur, et c'est une vitrine. Tous les joueurs aiment cette philosophie de jeu qui se transforme en un divertissement », explique Daniel Lagos.

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Le projet de jeu de l'équipe est donc un argument tout aussi important que le côté financier. Un joueur qui débarque au Betis, notamment ceux qui ont des rôles plus offensifs, sait qu'il a de grandes chances de pouvoir briller sous les ordres de Quique Setién. Il faut aussi dire que le Benito Villamarin impressionne plus d'un joueur. Le stade, qui peut abriter jusqu'à 60.000 supporters, a récemment été rénové et a plus que fière allure. D'autant plus que le public du Betis est l'un des plus fidèles du pays, et l'ambiance y est toujours bouillante.

Le club ne dépense pas tant que ça !

Depuis qu'on sait plus ou moins de façon officielle que le Betis va lever l'option d'achat de Giovani Lo Celso, estimée à un peu plus de 20 millions d'euros, de nombreux fans de foot en France se posent la question : les Verdiblancos peuvent-ils vraiment se l'offrir ? Et si oui, avec quel argent ? « Le Betis a vendu Fabian pour 30M€ l'été dernier et il essaye de réaliser des achats soutenables avec des qualifications européennes et des droits télévisuels importants. On attend aussi peut-être que l'été prochain un autre joueur important puisse être vendu comme l'a été Fabian. Il y a aussi des joueurs prêtés comme Camarasa qui peuvent laisser une belle somme s'ils sont vendus définitivement », explique Daniel Lagos. « Il faut prendre en compte que Lainez a été payé 14 millions, mais que le Betis a réussi à pouvoir espacer les paiements, Lo Celso est arrivé pour 3 millions d'euros et les 22 restants vont se payer sur plusieurs échéances confortables. Tu peux appeler ça de l'ingénierie financière. La santé du club côté économique est très bonne. Le budget augmente », ajoute de son côté Jesus Sevillano, dévoilant ainsi une des raisons pour lesquelles les Andalous peuvent débourser des montants intéressants.

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Si on regarde de plus près, on voit cependant que le club ne jette pas l'argent par les fenêtres. Le club a même été dans le vert la saison dernière, ayant vendu pour 46,5 millions d'euros et n'en ayant dépensé "que" 41,5 millions d'euros (chiffres transfermarkt). Les Beticos sont donc loin de vivre au-dessus de leurs moyens. Il faut dire qu'en Espagne, les droits TV continuent d'augmenter. Sur la saison 2017/2018, le Betis a touché 53 millions d'euros en provenance des diffuseurs. C'est 19 millions d'euros de plus que sur la saison 2015/2016, seulement deux ans plus tôt donc. Et ça devrait continuer à augmenter avec l'entrée en vigueur des nouveaux droits dès la saison 2019/2020. On peut donc s'attendre à voir un club de plus en plus puissant financièrement sur le marché des transferts.

Jusqu'où peut aller ce Betis ?

Le projet est cohérent et construit sur des fondations solides, mais forcément, il peut très rapidement être mis en danger par d'autres clubs souhaitant venir faire leurs courses au Betis. Une question va se poser : tous ces joueurs recrutés vont-ils s'inscrire sur la durée à Séville ou risquent-ils de partir dès qu'un top club se positionnera ? « Tous les joueurs qui sont recrutés viennent pour faire les choses bien avec le Betis. C'est le but des dirigeants et des joueurs eux-mêmes. Après, ça peut bien ou mal se passer. Mais pour Lo Celso ou Lainez par exemple on attend qu'ils offrent les meilleures performances possibles pour aider le club à continuer de grandir sportivement. Après, si Lo Celso fait par exemple une très bonne saison et qu'un club arrive avec 70 ou 80 millions sur la table et qu'il est vendu... Il aura aidé sur le plan sportif et ça aura aussi été une bonne affaire financièrement », détaille Jesus Sevillano.

« Je pense que beaucoup sont ici pour rester. C'est un club confirmé en Liga, stable, et une ville attirante. Mais les meilleurs le voient aussi comme un possible tremplin. N'oublions pas que des joueurs comme Lo Celso ou Boudebouz (parti au Celta en prêt depuis, NDLR) avaient besoin de faire un pas en avant pour franchir un palier. Certains y parviennent, d'autres pas autant », confie Daniel Lagos. Le projet du club ne semble en tout cas pas d'être de faire de la spéculation et de l'achat/revente de joueurs, comme c'est parfois le cas chez certaines formations de la première moitié de tableau en Espagne. Mais plutôt que de se projeter vers l'avenir, les amateurs de football peuvent déjà se régaler en voyant Sergio Canales, William Carvalho, Joaquin, Giovani Lo Celso, Junior Firpo et bientôt la pépite mexicaine Diego Lainez à l'oeuvre tous les week-ends...

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