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Info FM, Jean-Pierre Caillot : « Un jeune parisien a plus de chances de jouer dans l’équipe première du Stade de Reims qu’au PSG »

Par Cédric Rablat
11 min.
Reims @Maxppp

Cette saison, le Stade de Reims retrouve l'élite avec un certain appétit. L'occasion pour Foot Mercato d'effectuer un petit tour d'horizon de l'actualité champenoise avec son président qui ne cache pas ses ambitions. De la formation via le projet « Horizon 2020 », à la gestion économique de son club, l'homme fort rémois nous dit tout sur le fonctionnement au quotidien du promu.

Foot Mercato : Président, en 2015 vous lanciez le projet « Horizon 2020 ». Trois ans après, quel bilan faites-vous de celui-ci et êtes-vous dans les clous par rapport aux objectifs fixés initialement ?

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Jean-Pierre Caillot : Pour nous c'était surtout la stratégie du club que l'on souhaitait définir et il y avait un certain nombre de points au niveau du développement de l'équipe première mais aussi des infrastructures, du recrutement, du budget que nous voulions aborder. On aurait pu craindre qu'avec notre descente en Ligue 2 tout soit remis en question. Mais avec notre retour en Ligue 1, on peut constater que si quelques points comme les travaux d'aménagements dans le stade ont été un peu freinés, tout a continué à se développer. J'avais notamment évoqué le fait que le Stade de Reims se dote d'un budget de 40 millions d'euros. Nous l'avions mis en objectif 2020, mais l'objectif a déjà été atteint. Ce qui est remarquable c'est que malgré un passage par la Ligue 2, la gestion du club mise en place depuis des années a permis de remplir les objectifs qu'on s'était fixés. Ce qui est important aussi au Stade de Reims c'est qu'il existe une certaine stabilité dans la gouvernance du club. Les principaux actionnaires sont des locaux. On peut travailler sur la durée ce qui est rare dans ce milieu.

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FM : Ce projet faisait d'ailleurs la part belle à la formation. Etes-vous satisfait du nombre de joueurs sortis par le centre de formation depuis 2015 et qui ont intégré l'équipe première ?

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JPC : Au niveau des infrastructures, on commençait à rentrer dans notre nouveau centre de formation. Centre que nous avons pratiquement dû autofinancer car les banques françaises sont plutôt frileuses dès qu'on leur parle de sport professionnel. Même si la gestion du club, les fonds propres du club étaient reconnus par tout le monde, on a réussi à pousser notre investissement. Aujourd'hui, les personnes qui nous rejoignent, que cela soit les professionnels ou les familles de jeunes, trouvent que ce site est fantastique pour pratiquer le football. C'est l'un des plus fonctionnels en France. Cela a donné les moyens à nos équipes dédiées à la formation de pouvoir travailler encore mieux. Ce qui peut paraître paradoxal puisque sans grand moyen, nous avons été champions de France en U19 et on a réussi à faire une finale Gambardella, ce qui est plutôt encourageant. La formation pour nous est un élément essentiel, des clubs de la taille du Stade de Reims ne peuvent pas acheter des stars du football et notre boulot à nous c'est de détecter les bons joueurs de demain, les former. Et cela commence à porter ses fruits comme avec Aissa Mandi dont la carrière au Betis Séville est absolument remarquable. On intègre à présent très régulièrement dans l'effectif pro, des jeunes qui viennent du centre de formation.

Sachant que notre philosophie est de détecter les bons joueurs, les former à nos valeurs, à notre image, et ensuite les intégrer à l'équipe première. Et une fois qu'ils ont rendu au Stade de Reims le fait d'avoir été bien formés, leur offrir la possibilité de les transférer comme ce fut le cas avec Jordan Siebatcheu qui a démarré chez nous à l'âge de sept ans. Aujourd'hui quand on regarde l'effectif, il y a pas mal de garçons qui viennent de la formation. On a tendance à l'oublier, mais pour faire de la formation il faut beaucoup de temps, de la compétence chez les éducateurs évidemment. Ce que je décèle aujourd'hui c'est qu'autre fois on obtenait les troisièmes choix, ensuite on a commencé à bien travailler et à obtenir les deuxièmes choix. Aujourd'hui pour plein de raisons on a des joueurs et des familles qui nous rejoignent malgré des sollicitations de clubs historiques de la formation ou des grands clubs. Un jeune parisien a plus de chances de jouer dans l'équipe première du Stade de Reims qu'au PSG, ce n'est pas la même stratégie. Même si aujourd'hui ils intègrent des jeunes c'est vrai. La marche est beaucoup plus haute pour intégrer un club de Ligue des champions qu'un club moyen de Ligue 1.

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FM : Après sept journées de championnat, comment jugez-vous votre retour en Ligue 1 ?

JPC : Au risque de paraître présomptueux, venir en Ligue 1 pour le Stade de Reims c'était il y a six ans et on avait mis alors trente trois ans à rejoindre l'élite. Il y avait à ce moment-là beaucoup d'appréhension. On ne savait pas trop quel monde on allait découvrir. En réalité, le Stade de Reims a passé quatre ans en Ligue 1, est descendu à dix minutes de la fin de la dernière saison. A l'époque, les services de la DNCG n'ont pas regardé les dossiers avec lesquels on se trouvait en concurrence. Je ne vais pas en rajouter une couche, tout le monde sait ce qui est arrivé à Bastia un an après. Cela aurait été peut-être un moyen d'éviter le chaos chez eux. Sur le terrain nous sommes malgré tout descendus. Les deux ans qu'on a passés en Ligue 2 avec tout le respect que j'ai pour mes copains présidents, le Stade de Reims se comportait comme un club de Ligue 1. Même eux le concédaient volontiers d'ailleurs. Que cela soit dans nos infrastructures, dans l'administratif où nous n'avons licencié personne. Cela n'a pas été un choc économique pour nous comme pour certains clubs de descendre en Ligue 2. Nous étions déjà en ordre de marche pour organiser par exemple une rencontre à Delaune au mois d'août face à l'Olympique Lyonnais. On sait comment fonctionne la Ligue 1, cela n'a pas été une vraie découverte pour nous de revenir. Même David Guion avait touché du doigt la Ligue 1 puisque j'avais décidé de lui confier l'équipe première à trois journées de la fin lors de la descente.

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FM : Quels sont les objectifs du club pour cette saison ?

JPC : Des clubs de notre dimension, avec notre budget, il n'y a pas de secret notre objectif numéro un c'est le maintien. Le langage qu'on a eu avant de descendre c'était de pérenniser le club en Ligue 1. Même si nous n'avons pas réussi pendant deux ans sportivement à rester en Ligue 1, notre objectif reste le même. Le club de la douzième ville de France, un club avec un certain palmarès, se doit d'arriver à se pérenniser. Sur les quatre années passées en Ligue 1, on s'est maintenus deux fois dans la souffrance. L'objectif se serait donc de se maintenir avec le plus de sérénité possible. Pour y parvenir il faut se doter de moyen, ce qu'on a aujourd'hui au Stade de Reims, se doter de la meilleure équipe possible, c'est pour cela qu'on a eu un mercato assez ambitieux pour compléter notre groupe de la saison dernière qui nous avait évidemment apporter beaucoup de satisfactions vu les résultats et les records qui ont été battus. Mais on sait que la dynamique c'est une chose, mais il existe aussi des écarts de jeu entre la Ligue 2 et la Ligue 1. Un certain nombre de joueurs ont préféré s'envoler vers d'autres cieux car ils ne se voyaient pas jouer en Ligue 1. Je salue l'attitude de Danilson Da Cruz qui de lui-même a souhaité partir sur un autre projet car il ne se voyait pas jouer en Ligue 1. Et on a essayé d'intégrer des joueurs qui pour la plupart avaient soit de l'expérience du haut niveau, soit de la Ligue 1.

FM : On imagine que votre retour en Ligue 1 a provoqué un certain engouement au niveau des recettes, des abonnés, mais qu'il a fallu aussi procéder à certains ajustements au sein du club pour mieux répondre aux exigences du haut niveau...

JPC : Si on parle de la structure humaine il n'y a pas eu d'évolution puisque nous étions déjà en ordre de marche quand nous sommes descendus. L'échec sportif n'a pas eu d'incidence sur l'humain, car on a des personnes de qualité au Stade de Reims. On a les bonnes personnes, aux bons endroits. Cela n'a pas été une grande révolution humaine pour se mettre en mode Ligue 1. En ce qui concerne les abonnés, il y a un contexte particulier à Reims puisqu'on remarque un engouement très fort en ville, se passionne pour le club mais ce la ne se traduit pas par une venue au stade. En ce qui concerne les VIP, c'est plutôt la pénurie. Il n'y aucune loge de disponible, il y a très peu de sièges VIP à vendre. On parle tout de même d'une offre qui repose sur 1 400, 1 500 sièges. Il y a un engouement des entreprises qui viennent au stade. Tout le monde a compris que c'était un vecteur de communication très important pour la ville. En ce qui concerne l'affluence au stade, et ce malgré un travail énorme et toutes les opérations effectuées par nos équipes commerciales, on a du mal à faire venir les Rémois au stade pour les matchs qui ne sont pas des affiches. En plein mois d'août on arrive à faire venir 20 000 personnes contre Lyon mais quinze jours plus tard seulement 12 500 contre Montpellier qui est la neuvième affluence de la journée. C'est un peu frustrant parce que ce n'est pas du désintérêt mais d'un autre côté on a du mal à faire bouger les Rémois. Même si pour moi qui suis dirigeant bénévole c'est frustrant, mais pour en avoir discuté avec les anciens, cela s'est toujours passé comme ça à Reims. Notre boulot à nous c'est réussir à augmenter notre nombre d'abonnés et à faire bouger la ville les soirs de matchs.

FM : Comment parvient-on économiquement à pérenniser un club comme le Stade de Reims ?

JPC : Comme tout le monde on essaye de le gérer le plus finement possible. Et surtout ne pas dépenser ce que l'on a pas, car beaucoup de personnes ont tendance à l'oublier... Dans notre cas, notre budget repose sur les droits télés, le trading de joueurs et les hospitalités. Ces trois aspects composent aujourd'hui notre budget.

FM : L'accession à la Ligue 1 vous-a-t-elle ouvert de nouveaux horizons notamment au niveau partenariats, sponsoring ?

JPC : Pas spécialement. On a toujours des sponsors régionaux et locaux. On tourne à peu près à 350 sponsors représentatifs qui sont des PME ou des grands groupes de la région. Ils étaient déjà avec nous en Ligue 1, avec nous en Ligue 2 et ils en sont remerciés aujourd'hui car on retrouve la Ligue 1. Au niveau des sponsors nationaux on en avait quelques-uns quand on était en Ligue 1. Après ce sont souvent des apports en régies. Aujourd'hui il n'y a pas d'engouement particulier mais on sent tout de même que le Stade de Reims diffuse une image positive, qui n'est pas réputé pour avoir des problèmes, on a toujours su gérer des situations même quand elles étaient particulières. Nous n'avons pas de sponsor principal sur notre maillot. Il y a deux politiques, soit on estime que ça vaut un certain prix et on brade le produit mais quelque part on tue le produit. Ou alors on a la capacité de dire, on ne fera pas et on attend de trouver l'annonceur qui nous convient.

FM : Sur le plan marketing, quels changements opère-t-on pour que le club puisse profiter à plein de son exposition en Ligue 1 ?

JPC : En Ligue 2, les équipes marketing travaillaient déjà et mettaient beaucoup d'offres en place. Après c'est vrai que c'est plus facile de valoriser une affiche quand vous recevez Paris, Lyon, Marseille, que quand vous receviez, Quevilly, ou Orléans. L'offre est différente mais le travail est le même. Il faut contacter les gens, proposer des choses attachantes. Pour un petit club comme le nôtre, quand on voit ce que nos équipes spécialisées communication ont réalisé pour le clip d'accession à la Ligue 1, ou pour les vidéos de présentation des joueurs, à chaque fois les idées sont géniales.

FM : Pour finir, à quoi ressemblerait sur tous les aspects, une bonne saison pour le Stade de Reims ?

JPC : Quand je lance une saison, j'explique toujours à mes joueurs qu'on va avoir une aventure humaine. Ils en sont les acteurs principaux. De par leur attitude, leur état d'esprit, découlera la réussite du club et le bonheur de nos supporters. Une saison réussie pour moi c'est une saison où tous les supporters rémois seraient fiers de leur équipe, je sais que personne ne peut nous en vouloir quand on perd contre une très grosse équipe, mais quand on arrive à faire un exploit cela donne des couleurs à notre ville, les Rémois sont fiers. Il faut bien avoir en tête que pendant 33 ans il n'y a pas eu de Ligue 1 ici. Avant on ne voyait que des maillots de grandes équipes européennes. Aujourd'hui, il n'est pas rare de voir des enfants porter le maillot du Stade de Reims. Une saison réussie c'est qu'on se maintienne confortablement et qu'on passe des bons moments. Et puis la cerise sur le gâteau, ça serait que le Stade de Reims réalise un beau parcours en Coupe. Parce que cela peut créer un engouement populaire encore différent qu'un parcours en championnat. Quand vous êtes en Ligue 1 vous pouvez vous permettre de figurer sur plusieurs tableaux. Quand vous jouez une montée c'est différent. C'est moins préoccupant si vous jouez un maintien confortable et que vous perdez trois ou quatre points et que vous êtes encore engagés en coupe, que quand vous jouez une montée.

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