Lokomotiv - FK Zenit : quand la stabilité prime sur le bouleversement permanent

Par Aurélien Macedo
7 min.
Lokomotiv Moscou @Maxppp

Club le plus riche de Russie, le FK Zenit s'est illustré lors de la dernière décennie avec une Coupe UEFA et quatre titres de champions. Fer de lance dans son pays, la formation de Roberto Mancini est néanmoins rentrée dans le rang depuis trois ans et risque encore une fois de finir la saison fanny. De son côté, le Lokomotiv Moscou se dirige vers son premier titre depuis 2004. Un tour de force qui résulte d'un groupe uni mêlant fougue et expérience. Les deux équipes se retrouvent ce samedi (15h30) pour une rencontre qui sent le soufre.

Parfaitement accroché à son fauteuil de leader depuis la quatorzième journée, le Lokomotiv Moscou n'est qu'à un succès de s'offrir un troisième titre de champion de Russie dans son histoire. Un trophée qui viendrait récompenser une saison où les Cheminots ont fait preuve d'une régularité sans faille. Pourtant rien n'était annoncé en juillet dernier. Huitième du dernier exercice, le Lokomotiv avait fortement déçu. Loin d'accrocher l'Europe et encore plus de jouer le titre en Championnat, le club vivait une saison quelconque. Néanmoins, un succès en Coupe de Russie contre Ural (2-0) venait nuancer le tableau et permettait aux rouges et verts de se qualifier miraculeusement pour l'Europa League. Malgré un semi-échec collectif, quelques individualités ressortaient à l'image d'Aleksei Miranchuk et de Manuel Fernandes. Un potentiel sur lequel les dirigeants du club ont opté avant de confirmer l'entraîneur Yuri Semin dans ses fonctions.

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Un choix de la continuité qui se confirmait sur le marché des transferts. Ainsi seuls Maciej Rybus (Olympique Lyonnais), Solomon Kverkvelia (Rubin Kazan) et Eder (Lille OSC) venaient renforcer les rangs du Lokomotiv Moscou. De petits réajustements qui n'ont toutefois pas bouleversé l'équilibre trouvé par Yuri Semin. Son jeu très vertical a vite fait mouche avec un très grand Manuel Fernandes à la baguette. Précieux, les frères Miranchuk, Igor Denisov et Jefferson Farfan propulsaient la formation moscovite vers les sommets du championnat russe. Si offensivement le Loko a séduit, sa défense n'a pas eu à rougir. Avec 19 buts encaissés en 28 matches, elle a fait preuve d'une grande imperméabilité tout au long de la saison. Pas forcément rapide, l'arrière garde des Cheminots possède une forte expérience avec ses trentenaires : Vedran Ćorluka (32 ans), Taras Mykhalyk (34 ans), Nemanja Pejčinović (30 ans), Guilherme (32 ans) ou encore Vladislav Ignatyev (31 ans).

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Encore miser sur la continuité ?

Seule légère faiblesse, un manque de dynamisme dans les couloirs qui peut coûter cher. Pour compenser cela, Yuri Semin a misé sur le jeune Mikhail Lysov (20 ans), mais ce dernier manque encore de régularité. Sûr de ces forces, le Lokomotiv dispose de quatre points d'avance sur le Spartak et de cinq sur le CSKA. Pour convertir l'essai, il ne suffit que d'un succès, mais la mission est loin d'être évidente. Opposé au FK Zenit (4e), le club de la capitale russe accueille une équipe irrégulière, mais capable de se transcender. D'autant plus que les joueurs de Roberto Mancini sont conscients des qualités du Loko à l'image de Yuri Lodygin, interrogé par Sport Soviétique : «Ils n'ont pas beaucoup changé par rapport à la saison dernière. Le jeu collectif est juste un peu différent. De bons joueurs sont arrivés. Je peux également souligner que Miranchuk a vraiment franchi un cap. Peut-être qu'ils ont grandi en quelque sorte leur football. En plus, il y a de l'expérience et un coach. N'oublions pas cependant qu'il est un peu plus facile pour Lokomotiv de remporter ce titre, car les autres clubs n'ont pas l'air aussi forts que lors des saisons précédentes.»

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Complètement concentré sur l'obtention du titre, le Lokomotiv Moscou a malgré tout entamé la préparation de la saison prochaine. Assurés de participer à minima au tour préliminaire de la Ligue des Champions, les rouges et verts vont retrouver une compétition qui les fuit depuis l'exercice 2005-2006. Pour ce faire, le nom de Carlo Ancelotti a été évoqué. Malgré le statut de l'entraîneur italien, ce choix est assez contesté à l'image de l'ancien défenseur russe Evgeny Lovchev. Ce dernier a tenu à défendre Yuri Semin dans Sport Express : «Avant le match contre Krasnodar (lundi dernier) il y avait des rumeurs affirmant qu'Ancelotti dirigera le Lokomotiv lors de la prochaine saison. Je n'y crois pas, mais apparemment, il se passe quelque chose à l'intérieur du club. Semin pour la première fois depuis de nombreuses années a amené l'équipe à la première place. Sans dépenser beaucoup d'argent. Palych (le surnom de Yuri Semin) travaille avec ceux qui le méritent. Par conséquent, je veux rappeler à tous où le Loko était sans Semin.» Finalement la direction du club semble avoir décidé de maintenir sa confiance en son chef d'orchestre. D'après Sport24.ru, l'entraîneur de 70 ans devrait continuer l'aventure au Lokomotiv et prolongerait d'une année supplémentaire. Un choix cohérent qui viendrait confirmer le retour au premier plan des Cheminots.

Le bourbier de "Leningrad"

La continuité est loin d'être le fort de l'adversaire du Lokomotiv, le FK Zenit. Avec déjà neuf coaches différents depuis la prise de contrôle du club par le géant énergétique Gazprom, le club préféré de l'ancien président Dimitri Medvedev pourrait couper une nouvelle tête. Celle-ci appartient à Roberto Mancini. Arrivé en véritable star l'été dernier pour remplacer Mircea Lucescu, l'Italien a pu investir massivement sur le marché des transferts. Ainsi en l'espace d'un été, le Zénith Saint-Pétersbourg investissait 90 millions d'euros sur le marché des transferts. En tête de file, une jeune colonie argentine prometteuse composée d'Emanuel Mammana (Olympique Lyonnais, 16 M€), d'Emiliano Rigoni (Independiente, 9 M€), de Leandro Paredes (AS Roma, 23 M€), de Matías Kranevitter (Atlético, 8M€) et de Sebastián Driussi (River Plate, 20M€). À ses arrivées s'ajoutaient celles d'Aleksandr Erokhin (Rostov), de Daler Kuzayev (Akhmat Grozny) et de Miha Mevlja (Rostov). Tant de bouleversements qui venaient perturber une équipe en manque de repères.

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Troisième des deux derniers championnats russes, le club du nouveau "Leningrad" (ancien nom de Saint-Pétersbourg) a certes terminé ces saisons avec les honneurs, mais a échoué dans sa quête de qualification en Ligue des Champions. Une compétition que pourrait encore louper le FK Zenit à la fin de cette saison. Ces échecs s'expliquent notamment par un manque de vécu de son groupe et par le statut du championnat russe. Le fair-play financier a contraint le club à vendre ses gros salaires (Witsel, Hulk, Luis Garcia ...) et de changer complètement de politique sportive. Une transition longue que le club pensait terminer l'été dernier. Cependant les crises internes ont repris de plus belle. Après un mercato ambitieux, le directeur sportif Konstantin Sarsania se retrouvait malgré tout écarté. Un choix douteux à laquelle s'est ajoutée une saison difficile. Ainsi le président Andreï Foursenko arrivé en mai 2017 pourrait quitter le club et se voir remplacer par Ilya Gerkus ... le président du Lokomotiv Moscou. Une nouvelle décision forte qui fragilise encore plus le faible équilibre du FK Zenit.

Repartir sur de bonnes bases

Au-delà de ses crises internes qui concernent la sphère politique du club s'ajoutent de grandes difficultés sportives. Si le début de saison était satisfaisant avec une qualification probante en seizième de finale d'Europa League et une deuxième place en championnat, l'équipe s'écroulait par la suite. Sorti en huitième de finale de C3 par le RB Leipzig, la formation de Roberto Mancini végète à la quatrième place du championnat à deux matches de son terme. Bien en place lors des mois d'octobre et novembre 2017, les Zénitiens payaient en partie les ambitions de leur entraîneur. Voulant rejoindre la sélection italienne Roberto Mancini n'hésitait pas à clamer publiquement ses envies de coacher la Nazionale. Des prises de position qui ont clairement fragilisé l'équilibre de son groupe. Dès lors, certains joueurs à l'image de Leandro Paredes ont ressenti des envies de départs.

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Même si les rumeurs ont parasité la vie de l'équipe, Matías Kranevitter ne veut pas accabler son entraîneur. Dans une interview pour Sport Express, il a expliqué les mauvais résultats en évoquant la faillite collective : «Je pense que toute l'équipe est responsable du résultat sportif, pas seulement l'entraîneur. Peut-être que nous méritions plus, mais on ne pouvait pas rattraper le Lokomotiv. Il faut continuer à travailler, à partager cette responsabilité, parce que Mancini est celui qui nous dirige, et nous sommes ceux qui suivent ses instructions sur le terrain.» Malgré ce soutien la succession de l'Italien apparaît comme le dossier prioritaire du club et les noms ne manquent pas. De Laurent Blanc à Carlo Ancelotti en passant par Luciano Spalletti, plusieurs pointures ont été annoncées dans le viseur du FK Zenit. Cependant, les échecs d'André Villas-Boas, Mircea Lucescu et donc Roberto Mancini pourraient conduire le Zenit à miser sur un technicien rompu aux joutes du championnat russe. Kuban Berdyev (Rubin Kazan) et Victor Goncharenko (CSKA Moscou) apparaissent donc comme des prétendants très crédibles. Quoi qu'il en soit, du côté de Krestovsky, l'été s'annonce brûlant.

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