Russie : l’étonnante résurrection de l’Anzhi Makhachkala
Phénomène du début des années 2010 au Daghestan, le club de l’Anzhi Makhachkala a joué les premiers rôles dans le championnat russe mais surtout sur le marché du transfert avec notamment les transferts de Roberto Carlos, Samuel Eto’o, Willian ou encore Lassana Diarra. Mort en 2022, le club russe est sur le point de faire son grand retour.

Il y a 15 ans, un club surprenait son monde en attirant de nombreuses stars avec un projet ambitieux. Pourtant mineur à l’échelle du football russe où il était remonté en première division en 2009, le FK Anzhi Makhachkala a vite fait parler de lui. Se maintenant dans l’élite après une première saison compliquée, le club basé dans le Daghestan frappait fort à l’été 2011 en s’offrant la légende brésilienne Roberto Carlos en lui offrant un contrat de 5 millions d’euros annuels et sera suivi par de nombreux bons joueurs comme l’Ouzbek Odil Ahmedov et le Marocain Moubarak Boussoufa. Détenu à partir du 17 juin 2011 par Suleyman Kerimov, un homme d’affaires qui est devenu milliardaire en investissant dans des sociétés comme Gazprom et Uralikali, l’Anzhi Makhachkala avait les moyens de ses ambitions pour s’imposer dans le paysage footballistique russe et son projet allait s’accélérer.
Un an après avoir remporté la Ligue des Champions en tant que joueur majeur de l’Inter Milan, le buteur camerounais Samuel Eto’o était transféré pour plus de 25 millions d’euros et se voyait offrir un salaire de 20 millions d’euros annuels dans son contrat de trois ans. L’international russe Yuri Zhirkov allait également arriver de Chelsea tout comme le coach néerlandais Guus Hiddink qui avait été sélectionneur de la Russie entre 2006 et 2010. Cela aboutira sur une 5e place en championnat qui permettait au club de se qualifier en Ligue Europa. Pour la saison 2012/2013, la montée en puissance se confirmera avec les transferts de Lacina Traoré (Kuban Krasnodar), Fyodor Smolov (Dinamo Moscou) et Lassana Diarra (Real Madrid). Jouant le titre pendant longtemps et se retrouvant leader à la 18e journée, le FK Anzhi allait finalement terminer à la troisième place derrière le CSKA Moscou et le Zenit Saint-Pétersbourg tout en atteignant les 1/8e de finale de la Ligue Europa en échouant face à Newcastle (0-0/1-0). Un exercice marqué à l’hiver par les arrivées de Willian (Shakhtar Donetsk) et Emir Spahic (Séville FC) et qui sera suivi d’un été 2014 historique.
Un projet grandiose qui a volé en éclats
Débutant fort avec les transferts des internationaux russes Igor Denisov (Zenit), Aleksandr Ionov (Kuban Krasnodar) et Aleksandr Kokorin (Dinamo Moscou), l’Anzhi Makhachkala était plus que jamais candidat au titre. Pourtant, le club commençait la saison par deux matches nuls et deux défaites en quatre matches. Les prémices d’une catastrophe industrielle. L’instauration du fair-play financier de l’UEFA et les résultats sportifs pas assez intéressants pour le président Suleyman Kerimov vont pousser ce dernier de mettre un frein terrible au projet après 450 millions d’euros déboursés en trois ans. Par exemple, Aleksandr Kokorin quittait le club sans avoir joué un match pour revenir dans son club précédent, le Dinamo Moscou.
«Quand je suis arrivé, j’ai commencé à m’entraîner et après un mois au club, le "Big Boss" a annoncé que c’était la fin du projet. C’était terminé. Samuel Eto’o est reparti chez lui, Roberto Carlos est reparti chez lui et pour moi c’était bien. Je n’ai pas joué, c’était assez sympa, j’avais fait des entraînements individuels. Physiquement, j’étais bien. Je suis retourné au Dynamo et rien n’a changé pour moi. Je suis allé à Anzhi, j’ai vu Eto’o et je suis reparti (rires)» nous avait d’ailleurs raconté le buteur russe amusé de cette situation ubuesque à l’hiver 2023. Vendant toutes ses stars, l’Anzhi Makhachkala terminait la saison avec un effectif affaibli et terminait dernier du championnat synonyme de relégation en D2 russe. Remontant directement dans l’élite, le club du Daghestan ne retrouvait pas son statut et jouait le maintien 4 ans jusqu’à sa relégation en 2019. Le club avait même eu un sursis en 2018 puisque les banqueroutes du FK Tosno et de l’Amkar Perm ont permis à l’Anzhi Makhachkala de repartir pour une saison malgré 3,42 millions d’euros de dettes.
La mort du club …
La saison 2018/2019 sera finalement un cadeau empoisonné. Osman Kadiev qui avait repris le club en 2016 après le retrait de Suleyman Kerimov n’a pas su trouver un équilibre financier et le club Magomed Adiev a failli faire un miracle en obtenant la 15e place avec un groupe réduit où il a dû s’appuyer sur des jeunes du centre de formation. Fin avril à quelques journées de la fin de la saison alors que le club était déclaré en banqueroute, il sortait du silence : «lors de la signature des contrats, nous devrions rester calmes. Nous ne nous soucions pas du classement et du score. Nous voulions nous améliorer, devant les fans. Si nous réussissons, ils seront heureux. Chanceux ? Allez au vestiaire et dites aux personnes qui n’ont pas été payées depuis huit mois, qu’elles ont de la chance»
«Je ne porte pas atteinte aux mérites de notre président et du gouvernement de la République du Daghestan. Ce sont des gens honorables, brillants et ambitieux. Ils ont beaucoup accompli dans leur domaine. Mais le résultat de tout cela c’est que le club souffre. Le club souffre, le mot est faible. Il est même mourant», a-t-il poursuivi. Rétrogradé administrativement en 3e division, l’Anzhi Makhachkala allait se maintenir péniblement dans cette division en 2020, 2021 et 2022. Une dernière saison en 2021/2022 où l’inévitable allait arriver. Ne recevant pas la licence nécessaire pour évoluer à ce niveau, l’Anzhi Makhachkala a arrêté d’évoluer au niveau professionnel. Un mort de plus de deux ans qui pourrait néanmoins amener à une renaissance prochaine.
… Une résurrection inattendue
Devenu le bastion du football daghestanais même si cette saison le FK Dinamo Makhatchkala a réussi à évoluer en Premier League Russe, l’Anzhi Makhachkala manque dans le paysage footballistique russe. Une absence qui est sur le point de prendre fin. En effet, un nouveau projet privé va voir le jour pour faire renaître le club russe. Dans un communiqué publié le 28 janvier dernier annonçait son grand retour : «chers fans, partenaires et tous ceux qui soutiennent notre club ! Nous sommes heureux d’annoncer que le FC Anzhi revient au grand football ! L’Anzhi jouera en troisième division russe. Cet événement constituera une partie importante de l’histoire du club et un signe que l’équipe est prête à entamer une nouvelle étape de sa vie. Le grand retour au football est une opportunité d’attirer de nouveaux sponsors et investisseurs, ce qui, à son tour, contribuera à assurer la stabilité de la situation financière du club. De plus, c’est l’occasion de faire revivre les glorieuses traditions de l’Anzhi et de restaurer la confiance des supporters.»
«Après un long chemin de récupération et une préparation difficile, nous sommes prêts à vous ravir à nouveau avec des matchs brillants, des émotions inoubliables et l’envie de gagner. Nous nous souvenons de notre histoire, apprécions votre fidélité et croyons qu’ensemble nous pouvons atteindre de nouveaux sommets. Le retour de l’Anzhi n’est pas seulement un événement sportif, c’est le retour d’une grande famille qui a toujours été ensemble, malgré toutes les difficultés», pouvait-on ainsi lire. Ce retour reste encore un peu flou comme l’a souligné le vice-ministre des Sports du Daghestan, Boudoun Boudounov : «il est difficile de dire encore à quel point cet événement est important. Je ne sais pas ce que le club va faire. Anzhi est notre histoire, notre marque, une partie importante de notre culture. Nous espérons que le club continuera d’exister.»
Ancien directeur général du club, Aivaz Kaziakhmedov avait été lui aussi optimiste et intrigué le mois dernier auprès de Championat : «la renaissance d’Anzhi est une très bonne nouvelle. Mais il reste encore beaucoup à découvrir sur ce qui se passe. Tout ce que l’on sait, c’est que le club est en train de renaître et jouera en troisième division. Je ne sais même pas qui dirige et sponsorise le club. En tout cas, ces personnes ne méritent que des mots de gratitude pour être là et être prêtes à financer et à relancer une marque de sport assez connue au Daghestan et en Russie.» Le chemin s’annonce encore long pour l’Anzhi Makhachkala mais le club russe va pouvoir revivre en troisième division et aura évidemment en tête de retrouver l’élite russe.
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