OL : dans les coulisses du centre de formation des Gones
Septuple champion de France de 2002 à 2008, l’Olympique Lyonnais n’en a pas pour autant délaissé son centre de formation. Entraîneur-adjoint du groupe Pro 2 de l’OL, Robert Valette a vu passer tous les jeunes talents formés entre Rhône et Saône. Pour Foot Mercato, il revient sur son métier de formateur et nous présente ces grands espoirs qui frappent désormais à la porte de l’équipe première.

Champion de France des réserves en 2009 et en 2010, l’Olympique Lyonnais possède l’un des centres de formation les plus performants de tout l’hexagone. Réputés pour avoir fait éclore bien des talents, les Gones ont donc fait de la formation une marque de fabrique. Au cœur de ce centre depuis 1996, Robert Valette a vu passer bien des prodiges. Après nous avoir parlé la semaine passée des anciens Lyonnais Ben Arfa, Benzema et Rémy, l’actuel entraîneur adjoint de la Pro 2 nous présente les futures pépites rhodaniennes.
Foot Mercato : L’Olympique Lyonnais s’est forgé une sacrée réputation en termes de formation. Comment procédez-vous pour détecter les jeunes pousses ?
Robert Valette : Je pense qu’on a tous les ingrédients pour faire de la formation. On est dans une région où il y a beaucoup de jeunes, beaucoup de licenciés. Et pendant 15 ans, on a fait beaucoup de travail au niveau de la cellule de recrutement et de la structure pour nos jeunes joueurs. Et puis les résultats sont venus petit à petit avec quand même pas mal de joueurs formés et présents au niveau de l’équipe première, qui sont souvent issus de la région lyonnaise. Ça nous a donc donné un savoir-faire. Et après les conditions ont fait que l’on a travaillé un peu plus avec deux-trois autres ligues.
FM : Il s’agit d’un pari sur l’avenir. Ce n’est donc pas forcément évident de détecter des talents de manière aussi précoce…
RV : C’est sûr que ce n’est pas tout à fait une science exacte. Mais bon, ça fait partie des règles du jeu. Sur 10 recrutements, il y en a peut-être 2 ou 3 qui seront professionnels. Disons que c’est un peu le ratio sur lequel il faut compter.
FM : L’OL a donc mis en place la structure Pro 2, en lieu et place de la CFA. Qu’est-ce qui change concrètement avec cette nouvelle organisation ?
RV : C’est de l’élitisme un peu plus poussé. C’est-à-dire que c’est une structure qui regroupe non seulement les meilleurs jeunes de 17-18 ans, mais aussi les jeunes professionnels qui ne sont plus forcément dans la formation, mais plutôt dans la post-formation. Et sur ceux-là, on avait pas mal de problèmes parce qu’on ne savait pas trop comment les gérer. Donc c’est une cellule qui nous a permis d’avoir des jeunes professionnels de 20-21 ans et de pouvoir encore travailler avec eux, tout en travaillant aussi sur des jeunes qui commencent leur formation.
FM : Avez-vous des discussions régulières, des échanges permanents en compagnie de Claude Puel au sujet de ces jeunes joueurs ?
RV : En tant qu’entraîneur de la Pro 2, c’est plutôt Bruno Genesio qui est plus à même de gérer cette cellule de Pro 2. On arrive quand même à se parler football. Il ne faut pas non plus oublier l’action de Georges Prost (ancien patron de la formation, Ndlr) l’an dernier et de Rémi Garde (actuel patron de la formation, Ndlr) cette année. C’est par eux que les informations circulent jusqu’à l’entraîneur des professionnels, qui n’a pas que ce problème-là à régler.
FM : Récemment, Jérémy Pied a fait ses débuts en tant que titulaire avec l’équipe première, inscrivant d’ailleurs un but. Êtes-vous surpris par son ascension ?
RV : C’est un joueur qu’on avait fait signer professionnel il y a, je crois, deux ans. Il avait un contrat élite. Pour parfaire sa formation, comme c’était un joueur qui était intéressant, on l’avait prêté à Metz l’an dernier. Il a fait toute une saison en Ligue 2. Il a fait pas mal de matches là-bas, à 20 ans ce n’est quand même pas trop mal. Cette saison-là a été très bénéfique pour lui. Et maintenant, il a intégré l’équipe professionnelle d’abord sur le banc, parce qu’il est encore jeune. Là, il peut avoir du temps de jeu. Claude Puel l’a titularisé du fait de la proximité d’un match de Champions’ League. Il avait peut-être besoin de faire tourner son effectif. Il a bien profité de cette titularisation. C’est comme ça que ça se passe, il faut être prêt quand on a besoin de vous.
FM : L’OL possède en son sein six joueurs sacrés champions d’Europe des moins de 19 ans cet été. Ça doit être une sacrée satisfaction…
RV : Évidemment, c’est une satisfaction. C’est un honneur. C’est un grand bonheur d’avoir pu compter six joueurs sur un effectif d’une vingtaine de jeunes. Ça fait donc pratiquement un tiers de l’effectif. C’est quand même intéressant. Après, dire quel est leur niveau et dans quelle mesure ils pourront intégrer l’équipe professionnelle… Il y a encore pas mal de chemins à faire. Même les U19, ça reste quand même un football de jeunes. Après, certains joueurs ont déjà participé quand même à pas mal de matches en équipe première dans les championnats étrangers. Chez les Espagnols, il y avait quand même pas mal de joueurs qui jouaient déjà en Liga. En Angleterre, ça doit être exactement pareil. À Lyon, c’est quand même assez difficile d’intégrer l’équipe première vu le niveau de compétitivité qu’on demande aux jeunes vu qu’on fait venir pas mal d’excellents joueurs. Donc pour intégrer l’équipe professionnelle, c’est quand même beaucoup plus difficile que dans certains clubs.
FM : Parmi ces jeunes champions d’Europe, il y a Yannis Tafer, qui a été prêté à Toulouse…
RV : Yannis Tafer entre un peu dans le même cadre que Jérémy Pied. C’était assez difficile pour lui compte tenu des objectifs et de l’effectif des pros, il se retrouvait donc sur le banc. Il a donc eu la possibilité de se faire prêter et de pouvoir jouer. Même s’il y a une option d’achat, c’est toujours un prêt qui va permettre de voir si son évolution peut être très favorable.
FM : Clément Grenier a lui aussi du mal à intégrer l’équipe première. Que lui manque-t-il encore pour franchir ce palier ?
RV : Ce n’est pas facile de jouer chez les professionnels à 19 ans. Il n’y en a pas beaucoup qui jouent chez les professionnels à cet âge là. Il y a des exceptions, mais il y en a beaucoup qui ont donné de belles promesses quand ils étaient plus jeunes et qui n’ont pas su confirmer. Il y a beaucoup d’exemples. Pour arriver à jouer chez les professionnels et à se faire une place, il faut faire preuve de beaucoup d’abnégation et surtout de maturité. Clément est l’un de ceux qui est le mieux armé pour faire une carrière professionnelle, mais ça viendra naturellement. Il ne faut pas brusquer les choses. Surtout à Lyon, nous ne sommes pas pressés. L’équipe première n’a pas un besoin impératif de la formation comme dans certains clubs. Zidane a commencé à devenir celui que l’on connaît aux alentours de 22 ans.
FM : Est-ce que n’est pas dommageable pour certains joueurs que l’on ait tendance à en faire des stars trop rapidement au lieu de les laisser mûrir ?
RV : C’est justement l’un de mes chevaux de bataille favoris. Je ne pense pas qu’il faille être pressé. À 17, 18 ou 19 ans, on a encore le temps. On a d’autres choses à faire que de penser à être professionnel à tout prix. Il y a des échelons à franchir, que ce soit footballistiquement, mais aussi dans les relations avec la presse, les entraîneurs et le public. Il y a un gros apprentissage à faire. Le métier de footballeur professionnel, ça je le répète, est un métier très difficile. Il y a certes l’aspect financier, mais c’est un métier physique d’abord. Il y a des blessures, il faut avoir de la chance. Il suffit que vous ne vous entendiez pas avec un entraîneur qui arrive au club et vous ne jouez plus. Dès fois, c’est comme ça que ça se passe. Il ne faut pas chercher plus loin. Les jeunes doivent donc ingurgiter tout ça avant de devenir non seulement des joueurs, mais aussi des hommes. Si on en fait des stars trop jeunes, ils se brûlent les ailes.
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