Le curieux développement unique du football en Mongolie
Loin des projecteurs mondiaux, la Mongolie mise sur une stratégie de fond pour développer son football. Infrastructures innovantes, soutien de la FIFA, affluences record et ligue en pleine structuration : l’archipel des steppes rêve d’exister un jour sur la carte du ballon rond asiatique.

Alors que certains pays asiatiques se battent pour une qualification historique à la Coupe du Monde, la Mongolie choisit une approche différente : développer son football de manière structurelle et durable, au niveau national et régional. Le pays, longtemps considéré comme périphérique sur la scène asiatique, mise sur la formation, l’infrastructure et la gouvernance pour rattraper son retard. Les autorités sportives locales, soutenues par la FIFA à travers le programme FIFA Forward, ont investi dans des infrastructures inédites pour le pays, comme le MFF Football Centre à Oulan-Bator, doté de terrains synthétiques et d’un dôme gonflable pour entraîner les équipes toute l’année malgré des hivers extrêmes. Cette stratégie s’inscrit dans un plan de long terme : créer une base solide qui permettra à terme à la Mongolie d’être compétitive sur la scène régionale et de rêver d’un jour, participer à des compétitions majeures. La Fédération mongole de football (MFF) a engagé une réforme profonde pour professionnaliser la discipline. Elle développe des programmes de formation pour entraîneurs, arbitres et jeunes joueurs, en partenariat avec la FIFA et la Confédération asiatique de football (AFC).
Ces mesures visent à améliorer la qualité du jeu, mais aussi à créer un modèle durable pour les générations futures. L’accent est donc mis sur la structuration des ligues régionales, la certification des clubs et la création de centres techniques capables de préparer la sélection nationale et les clubs à des compétitions internationales, tout en intégrant des standards modernes de gestion et de gouvernance. Par exemple, la Mongolian Premier League (MPL) est en pleine mutation. La saison 2024-2025 a vu 135 matchs se jouer pour un total de 622 buts inscrits, avec le SP Falcons dominant le championnat grâce à 61 points et 99 buts marqués. Ces statistiques traduisent une compétitivité grandissante et un niveau de jeu qui s’améliore d’année en année. Les clubs investissent également dans des programmes de développement jeunesse et des partenariats internationaux pour recruter et former des joueurs et des entraîneurs. La médiatisation de la ligue progresse, elle aussi, avec des diffusions en ligne et des retransmissions locales, contribuant à créer une culture footballistique plus visible et à attirer les sponsors nationaux et régionaux.
Un développement particulier unique au monde
La Mongolie fait preuve d’ingéniosité pour surmonter ses contraintes climatiques. Le dôme gonflable du MFF Football Centre permet d’organiser des entraînements en plein hiver, lorsque les températures descendent régulièrement sous -45 °C. En parallèle, plusieurs terrains synthétiques ont été installés à Oulan-Bator et dans les principales villes provinciales, complétés par des systèmes d’éclairage et de chauffage pour rendre le jeu praticable toute l’année. Ces infrastructures ne servent pas seulement aux équipes professionnelles : elles permettent par ailleurs l’accès au football pour des centaines de jeunes, filles et garçons, dans le cadre de programmes éducatifs et sociaux. C’est un modèle de modernisation rare pour un pays où le climat et la géographie rendaient historiquement la pratique régulière quasi impossible. Et pour ce faire, la MFF reçoit environ 1 million de dollars américains par an de la part de la FIFA et de l’AFC, via le programme FIFA Forward. En 2017, la MFF a rapporté des revenus totaux compris entre 2,9 et 3,5 milliards de tugriks (environ 1,1 à 1,3 million de dollars), dont une partie provient de ces fonds internationaux. Les dépenses de la MFF en 2017 s’élevaient à 3,4 milliards de tugrik avec les plus grandes parts allouées aux équipes nationales (40,7 %) et aux associations régionales de football (20,1 %). La MFF a enregistré environ 6 000 joueurs licenciés en 2017, répartis entre les équipes nationales, les clubs professionnels et les académies de jeunes. Ce chiffre a probablement augmenté depuis, en raison des investissements dans les infrastructures et des programmes de développement du football de base.
Malgré des conditions climatiques difficiles, le football suscite un engouement croissant dans le pays. La sélection nationale, qui a participé aux éliminatoires asiatiques, a enregistré en 2024 une affluence record de 15 266 spectateurs lors d’un match contre le Cambodge, un chiffre historique pour le pays. Dans un pays où d’autres sports comme la lutte et le tir à l’arc dominent culturellement, le football devient un vecteur d’unité et de cohésion sociale. Les programmes de jeunesse et les académies locales renforcent cette dynamique, et la pratique se diffuse au-delà de la capitale, touchant des régions reculées grâce à des installations modulables et des partenariats locaux. «Le football progresse à une vitesse incroyable en Mongolie et j’ai été très heureux de m’entretenir avec le nouveau président de la Fédération Mongole de Football, M. Anandbazar Tsogt-Ochi. Nous avons évoqué ses projets pour l’avenir et il a pu me faire part de ses commentaires à la suite de la participation de la Mongolie aux FIFA Series. Les défis uniques que pose la pratique du football dans ce pays ont été relevés avec intelligence et détermination, notamment grâce à la construction d’un dôme gonflable financé par les fonds Forward de la FIFA, qui abrite le centre d’entraînement de l’équipe nationale. Par ailleurs, l’initiative Football for Schools de la FIFA ainsi que le Programme de développement des talents de la FIFA sont déjà bien implantés dans le pays, et je suis certain que le président Tsogt-Ochi saura les exploiter au mieux afin de garantir un avenir radieux au football mongol», a expliqué Gianni Infantino, lors d’une rencontre avec Anandbazar Tsogt-Ochir, à Miami aux Etats-Unis en juin dernier.
À long terme, la Mongolie espère se positionner sur la scène asiatique et participer à des compétitions continentales comme la Coupe d’Asie ou les éliminatoires de la Coupe du Monde. Mais pour l’instant, la priorité est la consolidation nationale et régionale : renforcer les clubs, développer les jeunes talents et moderniser les infrastructures. «Il est compliqué de développer de nouvelles infrastructures en Mongolie, car il s’agit de l’un des plus grands pays au monde. De ce fait, nous avons besoin de plus d’installations si nous voulons maintenir notre dynamique. Nous pouvons compter sur une population très instruite et talentueuse. Je souhaite donc m’appuyer sur elle pour poursuivre le développement du football de jeunes, du football féminin et de l’équipe nationale, qui occupe actuellement son meilleur classement mondial puisqu’elle pointe à la 188e place. Mon rêve serait qu’elle se hisse dans le top 100», a expliqué Anandbazar Tsogt-Ochir qui a également annoncé vouloir construire un deuxième stade en dôme gonflable. Cette stratégie pragmatique permet au pays de rêver grand sans brûler les étapes et transforme le football en véritable projet national, soutenu par des partenaires internationaux et une communauté locale de plus en plus impliquée. La Mongolie, loin des projecteurs médiatiques habituels, s’impose ainsi comme un exemple d’essor progressif, mais ambitieux dans le football asiatique.
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