Suède : Mjällby, ce club d’un village de 1250 habitants sur le point de devenir le plus petit champion en Europe
C’est un véritable exploit qu’est sur le point de réaliser le petit club suédois du Mjällby AIF. Club mineur du football suédois, qui a parfois pu se hisser en première division, Mjällby s’y est stabilisé depuis 2020 et est sur le point de remporter le titre après une saison XXL. Un véritable tour de force pour ce club qui joue dans un village de pêcheur de moins de 1000 habitants et vient d’un village de 1250 habitants.

Le football est habitué aux histoires de petit Poucet. En France, le club de Guingamp a gagné deux Coupes de France malgré le fait qu’il évolue dans une ville d’un peu plus de 7000 habitants. On a bien l’exemple d’Hoffenheim et de ses 3000 habitants en Allemagne ou bien le club nord-irlandais de Loughgall qui est basé dans une ville de 282 habitants. En Suède, le phénomène se nomme Mjällby AIF et au-delà d’évoluer en première division, le club est sur le point de devenir champion. Une performance dingue pour le club de la commune de Sölvesborg (17 000 habitants) qui est situé dans le petit village de Mjällby où il y a 1250 habitants et dont le stade est situé à Hällevik, un village de pêcheur de 800 habitants.
Historiquement, Mjällby a eu une place assez petite dans l’histoire du football suédois. Même si le club a formé des internationaux suédois comme Christian Wilhelmsson (passé à Nantes) et Tobias Linderoth (ex Everton) mais aussi a aussi eu dans son effectif Amin Sarr, ancien joueur de l’Olympique Lyonnais. Fondé en 1939, le club naviguera longtemps entre la 3e et la 4e division suédoise avant sa première promotion dans l’élite en 1980 qui sera suivie d’une relégation. Mjällby jouera en Allsvenskan en 1983 (11e) et 1985 (11e) mais sera relégué. Il faudra attendre 2010 pour que Mjällby se maintienne avec une sixième place et restera en première division jusqu’à sa relégation en 2014 (15e). De nouveau champion de D2 en 2019, le club basé dans le sud de la Suède figure dans l’élite depuis 2020, date de son meilleur résultat, une cinquième place qui sera atteinte également en 2024. Mais cette saison est clairement historique pour Mjällby qui est à un souffle de devenir champion de Suède.
Des stars qui ont eu la cote en Ligue 1
En tête du championnat depuis la 15e journée sans interruption, Mjällby réalise un véritable tour de force avec 11 points d’avance sur son dauphin Hammarby alors qu’il ne reste que 4 journées. C’est simple, le lundi 20 octobre contre l’IFK Göteborg, une victoire permettrait au club jaune et noir de valider son exercice mené d’une main de maître pendant de longs mois. Le club suédois reste sur 19 matches de championnat sans défaite depuis ce revers 2-1 contre l’AIK Solna le 11 mai dernier. Disposant de la deuxième meilleure attaque du championnat avec 47 buts marqués, Mjällby se distingue surtout par sa défense de fer et n’a encaissé que 17 buts en 26 matches. D’ailleurs Brest avait flairé le bon coup et avait tenté de faire signer le gardien Noel Törnqvist (23 ans) comme nous vous l’avons annoncé mais le club italien de Côme a décidé de le signer et de le prêter à Mjällby jusqu’à fin novembre (et l’issue de la saison).
Parmi les autres cadres de l’équipe, on retrouve les redoutables ailiers Herman Johansson (27 ans) et Elliott Stroud (23 ans) qui sont les meilleurs buteurs (7 buts) et passeurs (5 offrandes) de l’équipe. Si le club suédois tente de prolonger le premier, il sera difficile de conserver le second. Le gaucher était d’ailleurs dans le viseur du club nordiste de Lille durant le mercato estival et faisait l’objet d’une offre de 3,5 millions d’euros qui en aurait fait la vente la plus chère de l’histoire de Mjällby. Cependant, le club suédois voulait d’abord valider son titre de champion et espère le vendre plutôt cet hiver. C’est donc pour cela qu’il est resté. Plus que des individualités, c’est surtout un collectif qui récompense la belle saison de Mjällby.
David qui défait Goliath
Avec son stade de 7 500 places situé au bord de la mer Baltique, et ce malgré une masse salariale et un budget réduit qui n’atteint que 2 millions d’euros, Mjällby a été tel David contre Goliath face aux grands clubs du pays que sont Hammarby (2e), l’AIK (4e), l’IFK Göteborg (5e), Djugardens (6e), Malmö (7e), Elfsborg (8e) ou encore Häcken (9e). Directeur du football au sein du club, Hasse Larsson n’aurait imaginé une telle trajectoire pour Mjällby. «Je n’aurais jamais pu imaginer ça, absolument pas. Nous sommes une très bonne équipe maintenant et nous avons nos chances. Nous n’avons pas les moyens d’acheter des joueurs coûteux. Pour réussir ici, il faut travailler dur.», a-t-il confié en août dernier au Guardian.
Au club depuis son arrivée en tant que joueur en 1979, Hasse Larsonn y sera resté comme capitaine pendant neuf saisons et a été agriculture en parallèle jusqu’en 2016 afin de payer les factures : «j’ai travaillé pendant trois ans sans salaire. Nous avons dû tout recommencer et trouver des personnes pour nous aider.» Une situation surprenante pour un club évoluant à ce niveau de compétition et qui tranche avec des clubs comme Malmö ou l’AIK Solna qui fonctionnent comme ce que l’on connaît en Ligue 1. Actuel coach de l’équipe première, Anders Torstensson (59 ans) ne s’attendait pas à vivre une telle histoire également lui qui est arrivé comme adjoint en 2017 avant de connaître trois mandats de coach en 2013, 2021 et depuis 2023 : «je n’avais jamais envisagé une carrière d’entraîneur. C’était un club encore plus petit à l’époque. Nous étions en Allsvenskan, mais c’était un club semi-professionnel.»
Un club familial
«La plupart des joueurs avaient un petit boulot, on s’entraînait en fin d’après-midi, seuls mon assistant et moi étions à temps plein. On avait un entraîneur des gardiens deux fois par semaine ; un préparateur physique travaillait à temps plein à son compte. On avait un médecin qui était enseignant à temps plein. On n’avait pas de salle de sport. On ne mangeait qu’un seul repas ensemble après l’entraînement du jeudi, et la situation économique était vraiment très difficile», a-t-il poursuivi. Et après avoir aidé le club à se maintenir dans l’élite en 2021, il a vu Mjällby revenir vers lui deux ans plus tard : «j’ai dit : "Je ne suis ni le meilleur instructeur, ni le meilleur entraîneur, ni le meilleur tactiquement." » Et ils m’ont répondu : "Ouais, presque, mais on s’en fiche, parce que tu gagnes des matchs." J’ai compris que si je refusais, mes perspectives dans le football seraient anéanties. J’adorais mon travail, mais c’était le moment ou jamais.»
«On dit qu’on est les cousins de la campagne. On nous a peut-être sous-estimés pendant quelques années. Mais maintenant, je peux dire avec certitude que tout le monde est vraiment impressionné par les cousins. On chérit la mentalité de David contre Goliath. On est une bonne équipe, mais on reste un petit club et une petite région, et on en est fiers. Et c’est ce qui nous motive», a-t-il également confié. Un joli état d’esprit dans un club à structure familial et dont le lien entre les membres dépasse le cadre du football. Ainsi, Hasse Larsson s’est remis d’une tumeur au cerveau et d’un cancer de la prostate, tout en recevant un grand soutien du groupe. Même chose pour le coach a qui on a diagnostiqué une leucémie lymphoïde chronique, une forme bénigne de la maladie.
Mjällby s’est exporté à l’international
Fort d’une union sacrée constante, Mjällby n’a eu de cesse de dépasser ses limites et se retrouve maintenant en passe de valider son titre de champion et la qualification européenne, pour les tours préliminaires de la Ligue des Champions, qui en découleront. Ainsi, l’histoire de Mjällby a dépassé depuis un moment le cadre de la Suède et le responsable de la communication James Wahlberg est surpris de l’effervescence internationale autour du club. «Après le match contre Brommapojkarna, j’avais prévu de prendre un jour de repos, mais cela n’a pas fonctionné.»
«Il existe une équipe de télévision américaine. Des médias chinois, marocains et italiens nous contactent pour en savoir plus sur l’équipe de Listerlandet, et des comptes Instagram comptant des centaines de milliers d’abonnés publient une photo des joueurs d’Elfsborgs avec le texte suivant : « La plus belle histoire du football est celle de Mjällby, qui joue dans une ville de moins de 1 000 habitants», a-t-il expliqué à Aftonbladet. Passé dans une autre dimension médiatique grâce à ses performances, Mjällby entend néanmoins conserver son identité et rester ce petit club du sud de la Suède qui tentera encore et encore de soulever des montagnes afin de mettre la lumière sur une région plus confidentielle du pays.
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