Jordan Lefort : « je préférerais rejouer quitte à ne pas avoir de vacances entre les deux saisons »

Par Aurélien Léger-Moëc
7 min.
Amiens SC Jordan Lefort @Maxppp

Prêté par Amiens aux Young Boys de Berne lors du dernier mercato hivernal, le défenseur Jordan Lefort (26 ans) n'a eu le temps de disputer que trois matches avec son nouveau club avant que l'épidémie liée au coronavirus aboutisse à la suspension du championnat suisse. Cela ne l'a pas empêché de réaliser de bons débuts avec son nouveau club. Pour Foot Mercato, il a raconté comment se déroulait le confinement chez nos voisins suisses, ce qu'il pensait de son expérience, du niveau du championnat et de son avenir.

**Foot Mercato : tout d'abord, comment allez-vous ?

Jordan Lefort :** ça va super bien. Je suis au soleil. Il fait beau depuis quelques jours.

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**FM : comment cela se passe en Suisse quant au confinement ?

JL :** je suis resté en Suisse car c'était déconseillé par le club de rentrer dans son pays. C'est un semi-confinement ici. Tous les bars et restaurants sont fermés évidemment. Mais les grands magasins sont ouverts, avec règles strictes, sur la distanciation notamment. Ils distribuent un numéro à l'entrée des magasins pour ne pas dépasser les 100 personnes à l'intérieur. Pour les caddies, ils fournissent des gants, du désinfectant. Les files d'attente, c'est en zig zag pour que les gens respectent les distances. En Suisse, la mentalité est différente. Je suis arrivé ici en février. Les gens sont disciplinés. Ici, tu peux sortir comme tu veux. Ce qui est interdit, ce sont les regroupements de 5 personnes. J'ai la forêt en face de chez moi, je pars courir là-bas. Ce qui est cool avec la forêt, c'est qu'il y a une rivière. Après la course, on peut se baigner dedans, c'est plutôt agréable.

**FM : au niveau du club, quelle est l'organisation mise en place ? Comment vous vous entretenez physiquement ?

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JL :** en Suisse, le championnat s'est arrêté deux-trois semaines avant la France. Les mesures ont été prises de suite. C'est collé à l'Italie donc ils ont vite pris les bonnes décisions. Le championnat a vite été arrêté (la dernière journée a eu lieu le 23 février, ndlr). Le docteur du club est venu nous donner les premières consignes. Le club a bien pris les devants par rapport à ça. Depuis, on s'entraîne chez nous, on a un programme fourni le soir pour le lendemain. On a des entraînement via visioconférence. Ça permet de rester au contact. Ils ont livré un vélo d'appartement à domicile à tous les joueurs, ils ont fourni des élastiques, des montres, etc.

**FM : vous a-t-on donné une date potentielle de reprise ?

JL :** on n'a pas eu de date potentielle de reprise. Le semi-confinement sera prolongé sûrement d'une semaine, jusqu'au 26 avril, et après ils commenceront le déconfinement. C'est ce qui est prévu. C'est particulier la Suisse, la mentalité est différente. Les chiffres sont en baisse, les Suisses se comportent bien. Par rapport au foot, je sens qu'ils sont plutôt optimistes par rapport à une reprise.

**FM : et vous l'êtes aussi ? Vous avez envie de reprendre ?

JL :** c'est sur que c'est compliqué, les premiers matches se joueront sûrement à huis clos, avec des règles drastiques. Je parle pour moi, j'ai envie de jouer au foot, ma vie tourne autour du foot. Les deux premières semaines, s'entraîner tout seul, ok c'était cool mais là ça devient chiant. On joue au foot pour les relations humaines et là, il n'y en a pas.

**FM : vous devez vous envoyer des petits défis avec vos coéquipiers quand même ?

JL :** oui, on s'envoie des défis, on joue à FIFA, à Call of Duty. Le club avait aussi mis en place chaque jour des choses, on pouvait envoyer des vidéos pour montrer ce qu'on faisait, c'est plutôt sympa. Je profite du soleil, je prends aussi des cours d'allemand. On fait ça par visioconférence. On apprend l'allemand. Et je lis aussi.

**FM : avant le début de l'épidémie et l'arrêt du football, quelles différences aviez-vous notées entre la France et la Suisse ?

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JL :** pour parler foot, aux Young Boys, pendant les séances, c'était une intensité à 100-150 %, ce qui n'était pas toujours le cas en France, à Amiens. C'est une mentalité allemande, il n'y a pas grand-monde qui parle, on applique les ordres et ça s'arrête à la fin. L'organisation est très carrée, très stricte. Ici à Berne, c'est la même chose du point de vue de la ville, les gens sont très corrects. Quand tu te promènes dans la rue, les gens se saluent, disent bonjour. Ça change des grandes villes françaises. Sur mon premier match, j'avais joué, après tu montes en loge, tu rejoins les familles. Les gens ont l'esprit foot, ils demandent des photos, des autographes.

**FM : qu'est-ce qui vous a le plus marqué depuis votre arrivée aux Young Boys ?

JL :** pour mon premier match, c'était incroyable. Le truc fou, c'était le match contre Saint-Gaal. Il y avait une ambiance de malade, je n'avais même pas connu ça en Ligue 1, le stade rempli, deux tifos incroyables, des fumigènes, un vrai match à l'allemande. Le seul défaut de la Suisse, c'est les terrains. Nous, on a un synthétique dernière génération. Deux-trois autres clubs l'ont aussi. Pour les autres, c'est plus compliqué. Le climat en Suisse est très changeant, il peut faire très beau comme il peut neiger, ça donne des pelouses compliquées.

**FM : quel constat faites-vous pour votre première expérience à l'étranger ?

JL :** c'est une super expérience. J'ai fait quasi 10 ans à Amiens. Sortir du club, ça me tenait à cœur pour découvrir autre chose. J'ai trouvé ici ce que je recherchais, une nouvelle ambiance, une nouvelle manière de travailler.

**FM : ça vous ouvre de nouvelles perspectives pour la suite ?

JL :** il y a une option d'achat qui peut être levée. Je suis dans le flou total. J'ai réalisé de bons débuts et j'aimerais bien rester.

**FM : des nouvelles d'Amiens ?

JL :** je parle avec mes potes. Le coach m'envoie quelques messages. Il est toujours resté en contact avec moi. La direction par contre, je n'ai pas de nouvelle, je n'avais déjà pas reçu de message au moment de mon départ.

**FM : y a-t-il un joueur qui vous a marqué en Suisse ?

JL :** aux Young Boys, il y a un effectif très jeune, avec énormément de qualités. C'est la politique du club, de former de jeunes joueurs et de les revendre. Il y en a de très très bons. Il y en a qui joueront au plus haut niveau, c'est sûr. Sur notre groupe de 25-26 joueurs, il doit y avoir 20 jeunes entre 18 et 23 ans. Alors oui, c'est le championnat suisse. Mais en tant que coach, je leur donnerai la chance. On a un gardien, il a 22-23 ans, il est très bon, un arrière droit qui joue en équipe nationale, un autre au milieu. Il y a l'ancien Lyonnais Christopher Martins-Pereira, qui est très très bon. Et il y a des plus vieux pour encadrer comme Hoarau ou Lustenberger. Et moi, puisque je dois être le troisième plus vieux de l'effectif. Alors qu'à Amiens, j'étais encore considéré comme un jeune. Je trouve ça sympa, je peux donner quelques conseils alors que je n'ai pas fait une grande carrière. Ils sont à l'écoute. Personne ne se prend pour un autre. Ils écoutent.

**FM : revenons-en à la France et à la Ligue 1, quel adversaire vous causait le plus de souci ?

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JL :** moi, j'en ai eu plusieurs (rires). Je me souviens de mon premier match en Ligue 1 il y a deux ans. Je suis tombé sur un Bertrand Traoré à 100 % de sa forme. C'était vraiment compliqué. J'ai eu aussi un Thauvin à 100 % de sa forme. J'avais joué face à lui, c'était horrible. C'étaient mes premiers matches de Ligue 1. J'ai rejoué contre Traoré par la suite et ça avait été différent.

**FM : comment vous voyez la fin de saison pour Amiens si jamais le championnat devait reprendre ? Vous croyez au maintien ?

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JL :** oui, je crois en Amiens, c'est mon club de cœur. J'espère qu'ils accrocheront les barrages. Aller chercher la 17e place, ça sera compliqué mais les barrages, ce n'est pas impossible. Connaissant le club, on est habitué à ça, à ce genre d'exploit.

**FM : comment vous imaginez que le football va repartir ?

JL :** en France, c'est plus compliqué qu'en Suisse, il y a un aspect économique tellement important que les clubs veulent finir la saison. Quand ça fait un mois que t'as arrêté, que tu dois reprendre, refaire une préparation, jouer à un rythme élevé, terminer la saison et enchaîner directement la suivante, est-ce que ce n'est pas mieux d'annuler ? Moi, je préférerais rejouer quitte à ne pas avoir de vraies vacances entre les deux saisons.

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