Ce qu’a apporté Arsène Wenger à Arsenal

Par Cédric Rablat
5 min.
Arsenal FC Arsène Wenger @Maxppp

Vendredi, le technicien français d'Arsenal a officialisé son départ des Gunners à la fin de la saison. La fin d'un règne qui a débuté le 22 septembre 1996. Débarqué à Londres dans un scepticisme non dissimulé, l'ancien entraîneur d'Arsenal laissera une trace indélébile aussi bien au sein du club londonien qu'en Premier League.

« Arsène Who? » Voilà comment la presse anglaise accueillait Arsène Wenger en provenance de Nagoya le 22 septembre 1996. Déniché par le vice-président de l'époque David Dein, le technicien alsacien débarque à Londres pour redresser une équipe surnommée à l'époque « Boring Arsenal » («L'ennuyeux Arsenal»). À l'époque, Wenger découvre un vestiaire pourtant constitué de stars anglaises comme Dixon, Platt, Adams, Seaman ou encore Ian Wright et du célèbre Dennis Bergkamp. « Qu'est-ce qu'il peut bien savoir ? Un Français venu du Japon », ironisait Sir Alex Ferguson alors entraîneur de Manchester United.

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Mais rapidement, l'ancien entraîneur de l'AS Monaco tranche dans le vif, conscient qu'il va devoir casser subtilement les habitudes trop encombrantes de ses nouveaux joueurs. La renaissance d'Arsenal passera par une préparation optimale sur et en dehors des terrains. Exit les échauffements en dilettante, les tenues vestimentaires inappropriées, ou encore les étirements négligés et la malbouffe. Fléaux du vestiaire, alcool, drogue et cigarettes sont prohibés, n'en déplaise à Tony Adams and co.

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Hygiène de vie contrôlée, des méthodes d'entraînement révolutionnaires

Le coach tricolore instaure un règlement intérieur à ses ouailles, milite pour la prise des petits déjeuners au centre d'entraînement ainsi que du repas du midi. Le poids des joueurs est constamment surveillé, les analyses sanguines se multiplient. Les prémices d'une révolution à Arsenal. Déboussolés au départ, les cadres du vestiaire ne sont pas au bout de leur peine. Leur quotidien à l'entraînement va radicalement évoluer. Wenger propose l'individualisation du travail pour tous les joueurs en fonction du poste occupé, de l'âge, du nombre de matchs joués dans la semaine...

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Les interminables footings ou les 400m autour d'une piste sont bannis désormais, le coach français privilégie lui le travail physique avec ballon. Véritable visionnaire, Wenger utilise les statistiques pour analyser les performances collectives et individuelles. Le nombre de kilomètres parcourus, les courses vers l'avant, le pourcentage de passes réussies, les zones d'influence... Tout y passe, et à la fin des années 90, cette méthode de travail se voulait novatrice. Cette méthodologie permet aussi à l’Alsacien de peaufiner son recrutement de joueurs en décelant des jeunes joueurs à fort potentiel, mais mal exploité.

Wenger prône l'internationalisation du vestiaire

Le recrutement justement. À l'époque, la Premier League constituait un championnat relativement cadenacé pour les joueurs étrangers. Les Eric Cantona, David Ginola ou Dennis Bergkamp demeuraient les rares exceptions à la règle. Arsène Wenger lui, chamboule tout sur ce point. Pour preuve, le 14 février 2005 face à Palace (5-1), Arsenal aligne pour la première fois de l'histoire, un onze sans aucun joueur anglais. Car le style Wenger c'est aussi cela : prouver à l'Angleterre qu'il s'avère possible d'acheter de meilleurs joueurs, moins chers, en provenance de l'étranger.

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La French connection débarque avec les Petit, Vieira, Anelka (acheté 5 millions de francs, revendu 220 millions de francs), Pires, Henry, Garde, Grimandi and co. Wenger n'occulte pas le championnat hollandais où il débauche un certain Marc Overmas. Zlatan Ibrahimovic a effectué plusieurs essais avec les Gunners sans parapher le moindre contrat cependant. Les joueurs africains comme Lauren, Kolo Touré, Kanu ou encore Eboué ont tous apporté leur contribution à la réussite sportive d'Arsenal. Une méthode qui a porté ses fruits avec notamment trois titres de champion d'Angleterre.

Des préceptes de jeu qui ont marqué la Premier League

Arsène Wenger laissera également une trace indélébile dans l'histoire de la Premier League au niveau du jeu. À son arrivée en Angleterre, les équipes prônaient un kick and rush sans saveur. Choqué par un style de jeu qui ne lui plait guère, il inculque alors ses préceptes unanimement salués aujourd'hui au sein du Royaume. Arsenal apprend ainsi à poser le jeu, passer par le milieu de terrain, à désarçonner les défenses adverses grâce aux facultés techniques de ses joueurs. Des convictions qui permettent aussi aux attaquants de demander le ballon dans les pieds ou dans la profondeur. Caractéristiques qui favoriseront notamment l’avènement d'un certain Thierry Henry, meilleur buteur de l'histoire du club.

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Un vent nouveau souffle alors sur la Premier League. De nombreux entraîneurs vont s'inspirer de la dynamique insufflée par Wenger et n'hésiteront pas à lui rendre hommage. Une prise de position qui se matérialise par des résultats sportifs incroyables. Trois titres de champion (1998, 2002, 2004), sept FA Cup (1998, 2002, 2003, 2005, 2014, 2015, 2017), sept Community Shield (1998, 1999, 2002, 2004, 2014, 2015, 2017). À cela convient d'ajouter une finale de Coupe UEFA en 2000 perdue face à Galatasaray et une de Ligue des champions en 2006 perdue face au Barça. Son bilan en Premier League reste éloquent : sur 823 matchs dirigés, Arsenal a raflé la mise 473 fois, concédé le nul 199 fois et perdu à 151 reprises.

Une nouvelle dimension avec l'Emirates Stadium

Mais l'emprise de Wenger s'étend aussi en coulisses. En 2004, Arsène Wenger souhaite que son club franchisse un nouveau palier aussi bien sur le plan sportif que financier. Ce dernier émet alors l'idée de construire une enceinte ultra-moderne pour apporter de nouvelles ressources financières à Arsenal. Un projet validé par la direction. En 2006, les Gunners quittent Highbury et emménagent à l'Emirates Stadium, magnifique écrin de 60 000 places, ultra-confortable et faisant la part belle au merchandising. Les retombées économiques ne tardent pas à se faire sentir avec des recettes billetteries qui ont presque triplé par rapport à 2004. Celles-ci atteindront même 111 millions d'euros en 2012, soit un tiers du chiffre d'affaires. En tout, l'Emirates aura coûté 450 millions d'euros, financés aux deux tiers par le club londonien.

Si ce changement de dimension provoque des dommages collatéraux sur le plan sportif pendant quelques années avec la perte des Vieira, Henry, Fabregas, Nasri ou Van Persie, il reste un passage obligé dans la vision à long terme d'Arsène Wenger. En 2013, après plusieurs années d'abstinence au niveau du recrutement, Arsenal dégaine et débourse 50 millions d'euros pour enrôler Mesut Özil, transfert record dans l'histoire des Gunners. Preuve que ce défi qui paraissait risqué à l'époque, s'avère une réussite aujourd'hui, Arsenal est capable de casser sa tirelire cette saison pour attirer Alexandre Lacazette (53 millions d'euros) ou encore Pierre-Emerick Aubameyang (63 millions d'euros). Pour achever ce règne comme il se doit, Arsène Wenger rêve de remporter un dernier trophée. La Ligue Europa lui tend les bras. À moins que l'Atlético de Madrid ne brise son rêve en demi-finale et ne lui offre pas une fin en apothéose...

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