Patrick Vieira : «Désiré Doué est le meilleur jeune joueur du monde»
À l’occasion de la révélation des 25 finalistes du Golden Boy 2025 à Gênes, la légende Patrick Vieira, actuellement entraîneur du Genoa, a répondu aux questions de Foot Mercato.

Quelques minutes après l’annonce officielle des 25 finalistes du Golden Boy 2025, Patrick Vieira a pris le temps d’échanger avec Foot Mercato au cœur de la Badia di Sant’Andrea, le nouveau centre d’entraînement du Genoa. Invité d’honneur et maître de cérémonie de la journée organisée par Tuttosport, l’entraîneur du Genoa a livré un regard éclairé sur cette génération montante. Entre son admiration pour Désiré Doué, et ses réflexions sur le travail du Paris Saint-Germain en matière de formation, Vieira a également partagé sa propre philosophie d’accompagnement des jeunes joueurs.
«On voit le talent et le travail effectué par le PSG»
Foot Mercato : On peut dire que le football français est une nouvelle fois très bien représenté dans cette édition 2025 du Golden Boy… Comment expliquez-vous que le football français sorte autant de jeunes talents ces dernières années ?
Patrick Vieira : Je trouve que ça souligne la qualité du travail au niveau de la formation en France ou de la préformation. Et la chose qui est vraiment positive, c’est qu’en France, les jeunes joueurs ont une possibilité de jouer en Ligue 1 assez rapidement. Et ça donne encore un peu plus de motivation. Je pense que pour un jeune joueur, c’est quand même quelque chose d’encourageant et quelque chose de positif. Tu sais que tu ne travailles pas pour rien. Ça veut dire qu’à l’arrivée, tu as la possibilité de jouer en Ligue 1, plus vite, plus tôt, qu’en Angleterre, en Italie, ou même en Espagne, ça pousse aussi des joueurs à avoir cette motivation au quotidien qui leur permet de progresser. Mais la force principale en France, c’est la qualité des formateurs.
FM : Cela présage un nouvel avenir radieux pour l’Équipe de France après 2026, sûrement sous la houlette de votre ami Zinedine Zidane
PV : Ce sont des bons problèmes, ce sont des problèmes de riches, comme on dit (rire, ndlr).
FM : Le grand favori se nomme Désiré Doué. Avez-vous été surpris par son ascension fulgurante au PSG ?
PV : Désiré Doué est le meilleur jeune joueur d’Europe. Non seulement il a marqué en finale de la Ligue des champions où il a montré tout son talent, mais il avait aussi beaucoup progressé à Rennes et continue sa progression au PSG. Il a traversé une période difficile, mais il a travaillé dur et n’a jamais abandonné. Lamine Yamal ne peut pas être nommé cette année, donc je pense donc que Doué va gagner. C’est un jeune joueur avec beaucoup de talent. Un club doit créer un bon environnement pour apprendre, commettre des erreurs et tirer des enseignements. Désiré Doué est le parfait exemple. Je pense qu’il est le meilleur parmi les meilleurs du monde.
FM : Le PSG sera aussi très bien représenté à la cérémonie de décembre. Zaïre-Emery, Doué Mayulu, Mbaye et plus récemment Ndjantou, le PSG est clairement un exemple à suivre ?
PV : Oui, mais après, il y en a beaucoup qui y sont formés et beaucoup qui, malheureusement ou heureusement pour eux, ne sont pas au Paris Saint-Germain et qui, aujourd’hui, sont en train de jouer en Liga et en Italie. Je pense que Paris est un club aussi formateur. Quand on voit les jeunes joueurs qui sont rentrés à la Coupe du monde des clubs, ça montre le talent et le travail qui est fait au Paris Saint-Germain. Après, il est arrivé à un certain moment où il est important pour eux de jouer tous les week-ends.
«Un jeune joueur a besoin de soutien»
FM : Votre expérience d’ancienne pépite française de l’AS Cannes vous aide-t-elle à communiquer avec les jeunes joueurs ?
PV : J’ai eu la chance d’avoir été capitaine à Cannes, à 19 ans, et cette expérience, elle me sert aujourd’hui dans le fait que je sais ce dont un jeune joueur a besoin pour pouvoir se développer. À Cannes, j’étais entouré de joueurs exemplaires et professionnels. Je pouvais vraiment apprendre d’eux. J’avais la chance d’avoir un entraîneur qui m’a mis dans le grand bain de suite sans avoir peur des erreurs que je pouvais commettre. Et cette confiance de la part de l’entraîneur a fait que j’ai joué avec plus de confiance et c’est ce qui m’a permis de franchir les étapes. Même à l’époque d’Arsenal, j’arrive, j’ai 20 ans, et lors d’un match, je perds la balle, je prends un carton rouge et on se prend un but. Mais la force d’Arsène (Wenger, ndlr), c’était d’avoir vu ce talent en moi et de continuer à me donner cette confiance qui m’a réellement aidé à faire carrière.
FM : D’après vous, les jeunes joueurs ne sont-ils justement pas lancés «dans le grand bain» trop vite en comparaison à votre génération ?
PV : Je pense que c’est différent parce qu’aujourd’hui, on pousse les jeunes joueurs à jouer beaucoup plus tôt parce qu’il y a l’aspect économique qui rentre en compte aussi pour les clubs, et surtout en France. Ils ont besoin de vendre les joueurs et pour les vendre, on est obligé de les exposer. Et parfois, ces jeunes joueurs ne sont peut-être pas prêts. C’est en enchaînant les matchs qu’ils se développent petit à petit. Un jeune joueur, qui va dans l’équipe professionnelle tôt, doit continuer à se développer. Ça veut dire qu’il doit continuer à faire beaucoup de travail individuel sur l’aspect technique, sur l’aspect physique, sur l’aspect athlétique et sur l’aspect mental. Un jeune joueur a besoin de soutien. Quand on quitte l’académie pour l’équipe première, il y a des choses qui manquent, surtout quand on ne joue pas. Si on ne fait pas attention, on risque de prendre du retard. Et quand on court après le retard, c’est très compliqué de rattraper ce gap.
FM : En tant qu’entraîneur, quelle stratégie adoptez-vous quotidiennement avec les jeunes joueurs
PV : Je ne peux pas dire qu’une année perdue ne se rattrape jamais, mais c’est très difficile à cet âge. Pour cette raison, je pense qu’un jeune, quand il est dans le groupe professionnel, s’il n’a pas assez de temps de jeu, c’est important pour lui d’aller jouer avec l’équipe réserve une, deux ou trois fois dans le mois. Jouer des matchs à 90 minutes, c’est vachement important pour le développement des jeunes. Ce travail, qui doit être fait en plus, est très important. Le problème dans les grands clubs où tu joues deux matchs dans la semaine, c’est ceux qui ont l’habitude de jouer font plus d’entraînement pour se maintenir. Et si c’est seulement cet entraînement qui est pris en considération, le jeune joueur ne va pas progresser et ça va devenir un problème.
FM : N’est-il pas trop compliqué de lancer des jeunes joueurs en Italie, dans un championnat qui peine à faire confiance aux pépites ?
PV : En Italie, on hésite souvent à faire jouer les jeunes, car l’attention est focalisée sur le résultat immédiat. De notre côté, nous devons penser à long terme. Il ne faut pas perdre confiance en la jeunesse, même si certaines décisions sont parfois prises trop rapidement. Il y a quand même un vrai écart énorme de niveau entre la Primavera et la Serie A. Le temps de jeu des jeunes joueurs fait qu’il y a moins de développement. Il y a eu une crise dans ce domaine parce qu’il n’y a pas beaucoup de temps de jeu pour les jeunes joueurs.
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