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RC Strasbourg, Thomas Delaine : « Patrick Vieira ? Quand il parle, tu l’écoutes ! »

Par Josué Cassé
15 min.
Thomas Delaine en action avec le Racing Club de Strasbourg. @Maxppp

Arrivé au Racing Club de Strasbourg en juillet 2022, Thomas Delaine retrouve de sa superbe après un exercice 2022-2023 tronqué par les blessures. Sous la houlette de Patrick Vieira, le latéral gauche de 32 ans enchaîne ainsi au plus haut niveau sous le maillot alsacien. Cadre du vestiaire et fort d’une très belle expérience au sein du championnat de France, il n’en reste pas moins l’un des piliers essentiels du vestiaire strasbourgeois, à l’heure où ce dernier veut valider, au plus vite, son maintien dans l’élite. Entretien.

Foot Mercato : bonjour Thomas, avant de revenir sur votre actualité, pourquoi avez-vous fait ce choix de rejoindre Strasbourg après votre passage à Metz, qui plus est au regard de cette rivalité existante entre les deux clubs ?

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Thomas Delaine : j’étais en fin de contrat à Metz et c’était sur le papier le meilleur projet qui se présentait à moi. C’était un projet qui me correspondait, qui correspondait aussi à ma famille donc j’ai décidé de venir à Strasbourg malgré la rivalité qui existe entre les deux clubs. Après, c’est un choix que j’ai fait et que je ne regrette pas. J’ai toujours respecté le maillot lors de mon passage à Metz, je me suis toujours donné à fond, je n’ai aucune rancœur envers eux, je leur souhaite le meilleur. J’espère qu’on sortira vainqueur de notre confrontation dans quelques semaines à la Meinau (33e journée, 12 mai prochain, ndlr) mais j’espère aussi qu’ils se maintiendront pour qu’on puisse vivre de beaux derbys parce que c’est aussi ce qui fait la beauté du championnat d’avoir ces duels.

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«Non le maintien n’est pas encore acté !»

FM : aujourd’hui, dans quel état d’esprit se trouve le Racing avant d’affronter Nice lors de cette 31e journée de Ligue 1 ?

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TD : on sort d’un match contre Lille (défaite 0-1, ndlr) où il y a un peu de frustration, que ce soit au niveau du résultat mais aussi de l’attitude. On les a peut-être un peu trop respecté en première mi-temps surtout. Aujourd’hui, l’état d’esprit est le même pour tous, à savoir très bien finir cette saison, finir le travail et acter ce maintien au plus vite et si possible dès dimanche devant nos supporters. On sent qu’il y a de la progression sur ce qu’on veut mettre en place dans le jeu. Même depuis notre première bonne série, on a vu ces choses se mettre en place, après même quand on a eu ce coup de moins bien, il y avait des choses positives à retirer dans le jeu. Globalement, on a fait une saison un peu cyclique avec des bonnes séries, des moins bonnes mais on a toujours su rester solidaire, ensemble et ne pas s’affoler. L’objectif maintenant est de bien finir cette saison, du mieux qu’on peut et aussi d’affiner nos qualités sur le plan collectif, d’être encore mieux dans le jeu pour aller chercher une fin de saison tranquille et basculer sur la prochaine avec, je l’espère, plus d’ambitions.

FM : vous êtes actuellement 13e du championnat de France avec 36 points, soit 8 de plus que le Havre, premier barragiste, le maintien est acté ?

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TD : non, le maintien il sera acté quand mathématiquement ça sera fait c’est pour ça aussi que j’ai dis qu’il fallait finir le job au plus vite et je pense que c’est important que mathématiquement on soit sûr de ne plus être à ces mauvaises places. Avec la densité de ce championnat, il ne doit pas y avoir un quelconque relâchement, on a 8 points d’avance, on les a mérité mais on doit désormais valider tout ça au plus vite.

FM : avec Matthieu Dreyer, Frédéric Guilbert, Jean-Eudes Aholou et Kévin Gameiro, vous faites partie des cadres expérimentés de ce collectif très jeune (troisième effectif le plus jeune à égalité avec Rennes), ça vous donne une fonction particulière ? Quel est votre rôle dans le vestiaire ?

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TD : je pense qu’il y a une bonne harmonie dans l’effectif, il n’y a pas cette notion de place particulière. Alors certes, il y a quelques joueurs plus expérimentés mais maintenant dans le football, on est expérimenté de plus en plus tôt, il y a de plus en plus de jeunes joueurs qui sont matures. Oui j’ai ce vécu avec certains du groupe où ça nous permet de donner des conseils dans ce contexte mais je pense que tout le monde appréhende ce sprint final de la même manière. On est tous d’accord pour dire que le maintien n’est pas acté et qu’il faut valider ça rapidement.

«Ce penalty manqué face à l’OL ? À la fin de ma carrière, ça fera partie de mes regrets…»

FM : le 27 février dernier vous étiez à deux doigts de rejoindre le dernier carré de la Coupe de France, qu’est ce qui vous a manqué pour renverser l’OL ce soir là ?

TD : un ou deux penaltys au fond (rires). Voilà ça fait partie d’une carrière, malheureusement ce n’est pas passé sur cette séance de tirs au but, c’est comme ça, ce sont des choses qu’on ne peut pas rattraper. Même à la fin de ma carrière, ça fera partie de mes regrets, je l’aurais toujours car on pouvait prétendre à aller loin dans cette compétition mais c’est comme ça, c’est fait et il faut savoir switcher sur les autres objectifs. Je prendrai le temps de me lamenter à la fin de ma carrière sur cet épisode.

FM : plus globalement sur cette saison, quel bilan tirez-vous sur le plan collectif ? Avez-vous des regrets ?

TD : pour moi, c’était plus une saison de transition avec le nouveau projet qui est arrivé au Racing. Oui elle peut être frustrante sur certains points car on sent qu’on a la qualité pour faire encore mieux mais elle doit aussi être encourageante parce qu’on a vu que sur certaines périodes, on a fait beaucoup de belles choses, on a embêté beaucoup d’équipes et c’est surtout sur ça qu’il faut qu’on s’appuie pour les années à venir. On a des jeunes prometteurs, une bonne alchimie dans le vestiaire et ça peut donner quelque chose de vraiment vraiment bien.

«La saison dernière, je pense que c’était la plus difficile à vivre depuis mes débuts en professionnel»

FM : sur le plan personnel, vous êtes arrivé à Strasbourg en juillet 2022 après une expérience à Metz, comment analysez vous votre trajectoire sous les couleurs alsaciennes ? Comment vous vous sentez ici ? (1 but et 1 passe décisive en 27 matches toutes compétitions confondues)

TD : je n’ai pas peur de le dire, sincèrement, ma saison dernière a été catastrophique. Aucune planète n’était alignée et je pense que c’était la saison la plus difficile à vivre depuis mes débuts en professionnel. J’ai réussi à la passer et je pense que le nouveau projet m’a fait beaucoup de bien, je suis reparti sur de nouvelles bases où je me sens très bien sur le terrain mais aussi en dehors, je me sens moi-même donc deux années complètement différentes pour moi et j’apprécie énormément cette évolution. Je me sentais bien en Alsace, je me sentais bien dans le club et malgré cette première saison très compliquée à tous les niveaux, je n’ai jamais demandé à mon agent de chercher autre chose car je savais que la roue allait tourner et que Strasbourg était un club qui peut me correspondre donc personnellement je suis vraiment content de cette deuxième saison que ce soit sur ou en dehors du terrain et je vais tout donner pour que ça continue l’année prochaine.

FM : votre expérience vous a aidé à surmonter ces moments difficiles ? Comment on gère sur le plan mental ces coups d’arrêt dans une carrière ?

TD : sincèrement, j’ai tendance à oublier complètement cette première saison car ce n’est jamais bon de ressasser des mauvais moments mais ça permet aussi de relativiser quand tu as des périodes un peu plus compliquées. Tu peux te retrouver un peu râleur ou en difficulté sur une saison et en ayant vécu une année noire, tu te dis ‘bon relativise et repars du bon pied’. Chaque jour apporte son lot d’expériences et de gestion des événements. Ce n’est pas forcément agréable de vivre ces périodes mais je sais que ça me servira pour plus tard que ce soit dans le football ou même pour la vie de tous les jours.

FM : le Racing a connu des changements importants avec l’arrivée récente d’un nouvel actionnaire (BlueCo, un consortium de milliardaires américains), comment avez-vous vécu ces choses de l’intérieur ?

TD : on avait été prévenu de la reprise à venir par le président qui nous avait tous envoyé un message. On a été reçu par la suite et il nous a expliqué très concrètement et explicitement pourquoi il avait pris cette décision. Après sincèrement, on est joueur et ça ne change pas grand-chose. Alors oui, là, il y a un rachat mais des chamboulements d’effectif, on en vit à chaque mercato de début de saison. Les équipes bougent tout le temps, là c’était un nouveau projet mais sincèrement ça a été bien vécu par l’ensemble des joueurs. Il faut se mettre dans le nouveau projet, s’intégrer et ça a marché. Pour les joueurs, ça n’a rien changé à notre approche du terrain et à l’environnement du club. C’est vrai, il y a eu cette arrivée avec un nouveau propriétaire mais au sein du club, on voyait toujours les mêmes têtes, c’est juste le projet et le rajeunissement de l’effectif qui a changé mais rien de plus pour nous.

«L’arrivée d’un nouvel actionnaire ? Je suis joueur, mon job est de performer sur le terrain»

FM : la relation Strasbourg-Chelsea avec cette multipropriété est quelque chose que vous ressentez au quotidien ? Que pensez-vous d’ailleurs de ce modèle qui est de plus en plus visible sur la planète football avec ces galaxies de club ?

TD : chacun a sa sensibilité sur cette question de la multipropriété. Personnellement avec tous les enjeux d’une saison, le terrain, je n’ai pas le temps de m’attarder sur ces choses là. Je suis très content d’être dans un effectif de Ligue 1, j’essaie de performer tous les jours mais après ce n’est pas mon job de choisir l’orientation d’un club. Multipropriété ou non, ce n’est pas mon rôle. Si un jour je suis décisionnaire, je prendrais des décisions (rires) mais pour l’instant je suis juste joueur et j’essaie juste de m’adapter au mieux au projet qu’on me propose. Je suis très bien à ce niveau-là et j’essaie de continuer ma route ainsi.

FM : aujourd’hui vous êtes le seul latéral gauche de formation au Racing après les départs de Maxime Bastian et Eduard Sobol, est ce que cela change quelque chose pour vous, êtes-vous plus libéré en l’absence de réelle concurrence ?

TD : je ne le vis pas trop comme ça, il y a toujours de la cooccurrence dans un club, il y a des joueurs qui peuvent jouer à mon poste et qu’il y ait des spécialistes du poste ou non, pour moi, ma place est remise en cause chaque dimanche. J’appréhende les matches semaine après semaine, je ne vois pas sur la durée, sur le championnat entier, j’essaie de rendre au mieux la confiance que me donne le coach et le club mais je remets ça à plat après chaque prestation pour repartir au mieux et essayer à nouveau de performer. Je n’ai pas la sensation de changer, qu’il y ait une concurrence ou non. C’est un état d’esprit avant tout.

FM : pour nos lecteurs, pouvez-vous nous en dire plus sur votre profil ? Vos forces et vos axes d’amélioration si vous estimez en avoir aujourd’hui…

TD : je suis un latéral un peu plus porté sur l’offensive, je pense être un bon contre-attaquant, j’aime bien arpenter mon couloir, multiplier les courses, centrer pied gauche mais j’ai aussi un bon pied droit qui me permet de m’ouvrir des espaces vers l’intérieur. Après ce que j’ai à améliorer, c’est surtout sur le plan défensif, mes coulissements, ma gestion de la profondeur. Ce qui reste important à dire c’est que qu’importe l’âge ou le nombre de matches joués, on cherche toujours à s’améliorer, que ce soit dans nos points forts ou dans nos points faibles. J’ai ce point fort dans le couloir avec ma vitesse, mon endurance et la distribution de centres et ce point faible avec cet aspect défensif et cette notion de placement. Comment on gère la gestion de la profondeur ? Par exemple, quand on est à l’entraînement, quand on bosse un peu à vide, que l’adversaire n’est pas cadré, prendre ces deux trois mètres de recul, quand il est en train d’armer, commencer à anticiper.

«Patrick Vieira ? C’est un plaisir de travailler avec lui et son staff !»

FM : pouvez-vous nous parler de votre relation avec Patrick Vieira ?

TD : je pense, sincèrement, beaucoup de positif de Patrick Vieira. Quand il est arrivé, je n’étais pas bien et il m’a aidé, il m’a laissé être moi-même, il m’a fait confiance donc forcément j’ai envie de lui rendre cette confiance au quotidien. Plus que ça, il a apporté toute son expérience et son vécu, je ne vais pas vous le présenter, c’est un personnage qui a beaucoup compté dans le football donc quand il parle, tu l’écoutes. Si tu ne l’écoutes pas, c’est que tu as un problème (rires). Il apporte tout ça. Après sur le plan tactique, il aime repartir de l’arrière, des passes courtes, trouver les décalages mais il sait aussi s’adapter. Cette saison, on a joué à quatre derrière, à cinq aussi, il a différents systèmes de jeu qu’il sait maîtriser donc sincèrement c’est un plaisir de travailler avec lui et son staff plus globalement. Au quotidien, ça se voit que c’est fluide entre eux et avec nous et comme je l’ai dit précédemment, que ce soit dans les bons ou dans les mauvais moments, il n’y a pas eu différences dans l’approche et dans le discours. Forcément, cette harmonie et cette continuité fait du bien au Racing aujourd’hui.

FM : j’aimerais aussi évoquer avec vous les performances d’Emanuel Emegha… Attaquant, génération 2003, 7 buts en Ligue 1 cette saison et d’ores et déjà très impactant. Que pensez-vous de sa trajectoire ?

TD : c’est un attaquant et un attaquant veut forcément mettre des buts, beaucoup de buts. Il est arrivé au club avec beaucoup de personnalité, c’est un joueur avec beaucoup de caractère et de personnalité et c’est très bien, c’est une grosse qualité pour un buteur. Il est sûr de lui et il travaille beaucoup pour progresser. Pour une première saison, c’est top… 7 buts et l’impact qu’il a eu dans le jeu aussi car on regarde souvent les buts mais sur le terrain, il a un vrai apport pour Strasbourg avec son volume de course, avec ses appels en profondeur qui nous permettent de jouer entre les lignes. C’est quelqu’un que j’aime beaucoup, après à titre personnel, je trouve qu’on est très dur avec lui. Je pense que les observateurs ne regardent pas assez ses efforts sur le terrain. Je suis persuadé que c’est un joueur qui nous apporte beaucoup et va continuer de le faire et que ça va devenir un très très bon joueur.

FM : justement sur cette évolution du football très axé sur la statistique, qu’en pensez vous ?

TD : comme je l’ai déjà dit, ça fait partie de l’évolution du football, très statistique, beaucoup de datas, de chiffres, ça intéresse beaucoup les gens… alors oui c’est important sinon on en ferait pas autant avec ça mais pour moi, il y a quand même autre chose à regarder sur un terrain que ce bilan data. Dans une course, la fermeture d’un espace ou autre chose, la data ne va pas le comptabiliser et pourtant ça va s’avérer plus que précieux pour nous. Honnêtement, je ne suis pas un grand adepte de la data et ce n’est pas le football que moi je regarde. Après oui ça reste utile mais il faut aussi bien l’utiliser.

«Mon avenir ? Je suis très bien à Strasbourg !»

FM : en se projetant un peu sur la saison prochaine, quels seront les objectifs du Racing ?

TD : c’est difficile de se projeter sur la saison prochaine en sachant que cette année n’est pas encore terminée. Je n’ai pas envie de dire des choses que tu peux regretter après si un cataclysme arrive. L’objectif est de faire mieux que cette année évidemment mais je préfère qu’on en parle quand le maintien sera acté.

FM : vous êtes sous contrat jusqu’en juin 2025, à titre personnel, comment envisagez-vous l’avenir ?

TD : je me sens très bien (rires). Je n’ai rien à dire de plus, je me sens très bien en Alsace. Je connais le football je ne suis pas un grand naïf donc on verra bien quand sera venu le moment de discuter mais sincèrement je n’ai aucune autre projection que d’être ici.

FM : La Meinau est réputée pour son ambiance, qu’est ce que ça fait de joueur dans ce stade historique ?

TD : quand j’ai signé à Strasbourg, ça a aussi fait partie de ma réflexion et de mes envies, je voulais aussi découvrir un public mythique. Quand on dit Strasbourg, on pense tout de suite à la Meinau et son ambiance mais c’est mérite. Cette réputation, ce n’est pas du vent, c’est intense, ça pousse fort pendant tout le match. Je ne veux pas dire de bêtise mais on va faire le 42e guichet fermé contre Nice donc on est chanceux d’avoir ça. C’est une terre de football ici et tous les clubs n’ont pas ça.

FM : pour finir, avez-vous un message à faire passer aux supporters avant ce sprint final ?

TD : j’ai envie de les remercier sincèrement pour le soutien qu’ils nous ont donné durant toutes ces journées. Maintenant, de notre côté, on va essayer de faire le travail pour ces deux derniers matches à domicile et que ce soit une fête pour eux. Quand on gagne à la Meinau, c’est toujours une fête et ça continue aussi durant la semaine donc c’est important de bien finir ce championnat, de faire plaisir au maximum à nos supporters et de repartir la saison prochaine avec eux pour, on l’espère, une meilleure saison.

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