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Comment Christian Gourcuff a imposé sa patte sur l’Algérie…

Par La Rédaction FM
7 min.
Algérie Christian Gourcuff @Maxppp

L'euphorie de la Coupe du Monde 2014 n'est pas retombée en Algérie. Les Fennecs restent sur leur lancée positive et sont déjà qualifiés pour la CAN 2015. L'arrivée de Christian Gourcuff au poste de sélectionneur n'a visiblement en rien perturbé les Algériens. L'ancien coach du FC Lorient impose sa patte et semble faire l'unanimité. Mais qu'apporte-t-il vraiment aux Fennecs ? Éléments de réponses avec des journalistes spécialistes de l’Équipe nationale.

Le 30 juin 2014, l'Algérie sortait de la Coupe du Monde la tête haute, éliminée par l'Allemagne en 1/8ème de finale. Un palier que la sélection nationale a atteint pour la première fois de son histoire. Une véritable fierté nationale qui s'est traduite par une fête exceptionnelle au pays lors du retour des héros. Les supporters algériens n'ont d'ailleurs pas manqué de montrer leur soutien à Vahid Halilhodzic. Ils avaient même lancé une pétition sur le net afin que la Fédération Algérienne de Football conserve le Bosnien à la tête d'El Khadra. En vain. La FAF avait déjà décidé de confier les clés de la sélection à Christian Gourcuff, libre de tout contrat. Une décision actée avant le début du Mondial. Tant sportivement que humainement, le challenge était donc de taille pour l'ancien entraîneur du FC Lorient. Mais l'homme en a vu d'autres. Quatre mois après la fin du Mondial, le technicien tricolore impose sa patte sur une sélection qui pointe à la 15ème place au classement FIFA. Sous ses ordres, l'Algérie est invaincue. Mieux, elle est déjà qualifiée pour la prochaine Coupe d'Afrique des Nations 2015. Il devra également mener ses troupes à la CAN 2017 et à la Coupe du Monde 2018 en Russie. Des objectifs à long terme pour Gourcuff. Même s'il reste encore du chemin à parcourir et qu'il n'en est qu'au début de sa mission, le Breton a commencé à mettre en place certaines choses. Mais qu'apporte-t-il aux Fennecs ?

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Le style Gourcuff

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Si succéder à Coach Vahid était difficile par rapport à la cote de popularité dont le Bosnien jouissait auprès des fans à l'issue du Mondial, Christian Gourcuff s'en sort plutôt bien pour le moment. Avec quatre victoires en autant de matches, l'ancien entraîneur de Lorient a réussi ses débuts à la tête de la sélection algérienne. Plus que les bons résultats, les Fennecs séduisent par le style de jeu proposé notamment offensivement. Spécialiste du foot maghrébin pour France Football, Nabil Djellit apprécie : «Ça fait peu de temps qu'il est là donc ce n'est pas encore palpable. C'est une équipe qui tournait déjà bien. Elle continue à bien tourner. Il a surtout changé le schéma tactique. Jusqu'à présent, l'équipe d'Algérie évoluait en 4-3-3 ou en 4-2-3-1. Avec Christian Gourcuff, elle est passée en 4-4-2. Donc on va dire qu'il y a eu surtout un changement tactique. C'était attendu. Il arrive avec ses idées. On a l'impression que le principal changement est à titre individuel. Cela a libéré un joueur comme Yacine Brahimi. Il a encore pris plus d'importance qu'il n'en avait par le passé. Idem pour Riyad Mahrez qui a pris plus d'épaisseur avec lui. Maintenant dans le jeu, les joueurs commencent à assimiler ses méthodes. Je pense qu'il faut encore attendre le vrai rendu».

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Même constat pour Bilel Ghazi, journaliste à L’Équipe et spécialiste du football algérien. «J'ai l'impression que l'Algérie cherche davantage à imposer son jeu par rapport aux précédentes années. Aujourd'hui, Christian Gourcuff a peut-être permis aux Fennecs de prendre conscience qu'ils n'avaient pas seulement les arguments dans l'envie, dans la hargne. Avec Vahid, c'était surtout une équipe qui jouait avec le cœur. Tout en gardant cette base là, il a réussi à inculquer des notions tactiques un peu plus poussées. Après deux rassemblements, c'est un petit peu court pour véritablement juger de ce qu'il a pu révolutionner ou non. Mais avec quatre matches et quatre victoires, le bilan est plus que positif. On a le sentiment qu'il y a une base qui a été jetée par Christian Gourcuff avec son fameux 4-4-2 qui accorde une place toute particulière à Yacine Brahimi. Il ne faut pas oublier que toute l'Europe s’enthousiasme aujourd'hui pour lui. Il y a quelques mois, ce n'était encore qu'un joker pour Vahid. Christian Gourcuff le place en soutien d'Islam Slimani. Toute l'équipe bénéficie de ce rôle plus important accordé à Brahimi».

Un management différent de Vahid

Petit à petit, le nouveau sélectionneur pose donc les jalons de son projet avec l’Équipe nationale algérienne. Un fond de jeu basé sur les qualités intrinsèques du groupe et une discipline tactique, voici ce qu'apporte pour le moment l'ancien coach de Lorient. Par rapport à son prédécesseur, il faut également souligner que Christian Gourcuff se distingue par ses méthodes et sa façon d'appréhender la vie de groupe. «Aujourd'hui, c'est un management différent de celui de Vahid Halilhodzic, précise Bilel Ghazi. C'est un peu moins rigoureux, un peu moins militaire si on veut reprendre la caricature suscitée par Vahid parfois. Christian Gourcuff responsabilise énormément son groupe. Tout n'est pas forcément ultra cadré comme ça pouvait être le cas il y a quelques mois. Lui-même me confiait qu'il n'avait pas forcément besoin de mettre trop de cadre parce que les joueurs s'auto-régulaient assez bien. Il n'y avait pas de débordements. Il n'y a pas de joueurs qui profitaient du fait qu'il soit cool pour dépasser les limites. Le groupe a toujours bien vécu. Au niveau des jeunes, peut-être qu'ils s’épanouissent un peu plus avec Gourcuff. On sait que les méthodes de Vahid, à la longue, peuvent être "usantes" et "contraignantes" pour de jeunes joueurs. Gourcuff est jusqu'ici efficace en matière de management».

Outre les relations avec les joueurs et le staff, les deux hommes ont également des rapports différents avec la presse comme nous l'explique Nabil Djellit : «Vahid, c'est un personnage. Un coach qui est un peu la star. C'est un meneur d'hommes avec beaucoup de rigueur. Il donnait une vraie philosophie de jeu. Christian Gourcuff est vraiment porté sur le jeu et sa manière de l'expliquer. Il passe son temps à parler tactique. C'est quelqu'un d'un peu plus austère. Il est peut-être moins conflictuel que Vahid. S'il fallait aller au clash, il y allait. On l'a vu notamment au travers de ses sorties face à la presse. Le rapport avec la presse a vachement changé. C'est beaucoup plus pacifié. Le rapport entre la presse algérienne et Vahid n'était pas très bon. En revanche, avec Christian Gourcuff les choses semblent être rentrées dans l'ordre. L'avantage avec lui quand il est en conférence de presse, c'est qu'il ne parle que de foot. Donc il n'y a pas de prises de bec sur des sujets polémiques. C'est une différence entre les deux».

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Des priorités établies

Si le bilan de Coach Vahid est plutôt positif, Christian Gourcuff devra tenir la distance sur la longueur tout en continuant d'imposer sa patte. Comparer les deux hommes peut donc sembler prématuré. D'autant que le technicien français sera jugé sur l'ensemble de son travail même si en quelques mois il a séduit les différents observateurs. Avant lui, Vahid Halilhodzic s'est distingué en misant sur le vivier local. Un point sur lequel Gourcuff sera lui aussi amené à travailler : «Il a appelé de nouveaux joueurs pour le prochain rassemblement, souligne Bilel Ghazi. Je sais qu'aujourd'hui une de ses priorités est de s'appuyer encore un peu plus sur le championnat local. Il veut aider le football algérien à se développer mais pas en allant chercher uniquement des joueurs qui ont la double nationalité et qui ont été formés en Europe. Il a été justement recruté par la Fédération pour cela. Si on fait un parallèle avec Lorient, c'est plus sur la notion de projet. L'Algérie veut rebâtir des fondations solides et se concentrer davantage sur son vivier local, c'est-à-dire des joueurs formés en Algérie. Christian Gourcuff est appelé à participer à cela. Je sais que c'est quelque chose qui l'avait énormément motivé dans sa volonté de rejoindre l'Algérie».

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Une tâche qui prendra du temps. Mais l'entraîneur âgé de 59 ans ne s'y est pas encore réellement consacré nous explique Nabil Djellit : «Je pense qu'il n'a pas encore vraiment fait un travail de détection parce qu'il vient juste d'arriver. Vahid l'avait fait avec le temps. Il avait réussi à sortir des joueurs comme Slimani, Soudani, Djabou, Belkalem. Pour l'instant, quand on regarde les listes de Gourcuff, il n'a pas vraiment travaillé sur les locaux. Il a une équipe A' dans laquelle il viendra piocher s'il repère des joueurs là-dedans. Éventuellement, il pourrait en promouvoir un ou deux dans la liste finale. Les places valent cher. Là, il a appelé le meilleur buteur du championnat tunisien, Baghdad Bounedjah, au détriment d'un joueur comme Belfodil. Je pense qu'il n'a pas encore fait le tour du championnat d'Algérie». Un championnat qu'il aura largement le temps de découvrir et où il dénichera peut-être les futures stars des Fennecs. Une mission que Gourcuff prend à cœur; lui qui souhaite aider le football algérien à poursuivre sa progression. Un processus déjà bien entamé par Vahid Halilhodzic. Reste à savoir si Gourcuff aura la même réussite avec les Algériens. Ce qui est sûr, c'est que tout est réuni pour qu'il arrive à ses fins.

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