Fiorentina : Borja Valero, le sous-coté

Par Alexandre Pauwels
4 min.
Fiorentina Borja Valero Iglesias @Maxppp

Sous-coté. Voilà un terme bien souvent employé dans le petit monde du ballon rond, pour qualifier un joueur dont les performances dantesques passeraient inaperçues, tant au regard du public que des clubs les plus huppés. Un constat qui s’applique donc parfaitement au milieu de la Fiorentina Borja Valero, qui, à 28 ans, connaît déjà son destin : celui de briller loin des projecteurs. Portrait d’un génie méconnu et surtout incompris.

Un étrange paradoxe entoure Borja Valero. Le milieu de terrain, considéré comme l’un des meilleurs éléments du championnat italien, est adulé de l'autre côté des Alpes et plus précisément à Florence, lui qui est souvent cité comme le symbole de la Viola. En Espagne en revanche, il n’est qu’un joueur parmi tant d’autres, noyé au milieu d’une génération d’immenses talents. Mais est-ce une raison suffisante pour dénigrer ses performances ? Sûrement pas. Quand bien même, au travers d'une carrière atypique marquée par la malchance, le joueur y soit finalement habitué.

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Pur produit du Real Madrid, Borja Valero, considéré très tôt comme un futur grand – il a fréquenté toutes les sélections de jeunes espagnoles – a d’abord été victime de la politique de recrutement « galactique » de son club formateur. Barré par les stars qui peuplent le vestiaire merengue, le jeune milieu, calvitie déjà naissante, ne joue finalement que deux petites rencontres avec l’équipe première, une en Copa del Rey, une autre en Ligue des Champions. Après quoi, son contrat n’est pas reconduit. C’est ainsi qu’il rejoint à l’été 2007, libre de tout contrat, le plus modeste Majorque. Une formation où il trouvera enfin l’espace nécessaire pour s’imposer, dans un rôle de meneur de jeu reculé. Parmi les révélations de la saison, Borja décide alors de faire le grand saut pour rallier la Premier League, et le club de West Bromwich.

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Alors que la mode espagnole commence à s’instaurer outre-Manche, le promu se déleste de 7 M€ pour attirer l’espoir ibérique. Une somme qui fait de lui, à ce moment précis, la recrue la plus chère de l’histoire du club. De quoi placer de lourdes attentes sur des épaules pas encore assez larges : les Baggies, qui affichent un trop grand nombre de carences, finissent par descendre. Et Valero, sa première expérience étrangère évaluée en échec, de retourner en prêt à Majorque pour se refaire une santé. Crâne rasé pour marquer le renouveau, le milieu de terrain obtient alors, au terme d'un exercice abouti, la distinction de Don Balón – meilleur joueur espagnol du championnat – ainsi qu'un strapontin pour un classique du haut de tableau : Villarreal. La première saison au sous-marin jaune est une réussite, et il glane même sa première et jusqu'ici unique sélection avec la Roja. La seconde est en revanche marquée par l’enfer de la relégation. Avec la Fiorentina au bout du tunnel.

Le symbole de la réconciliation des Espagnols avec la Serie A

Sur le papier, Borja Valero n’allait pas avoir la tâche facile en Italie, terre de l’exigence tactique et de la gagne à tout prix. Des composants loin d’être inhérents au quotidien d’un joueur espagnol, ce qui se traduit par un historique de transferts désastreux, de De La Peña à Mendieta, en passant par José Mari. Mais Borja aura l’avantage de tomber sur un technicien particulier, Vincenzo Montella, et une philosophie de jeu finalement très ibérique, basée sur la possession de balle. D’où, sa réussite immédiate à Florence. S’il n’est pas – et ne sera jamais – un monstre statistique, le divin chauve brille par son influence sur la pelouse, et sa capacité à dicter le tempo de son équipe.
« Borja Valero a une intelligence dans le jeu qui relève du sublime, et possède une fine technique » décrit coach Montella. De fait, le milieu de terrain est aujourd’hui considéré comme l’un des meilleurs à son poste en Serie A. Érigé en symbole d’une Viola de nouveau compétitive, il savoure. « Quand je suis arrivé en 2012, j’ai signé un contrat de 4 années plus une en option, afin de m’intégrer sur le long terme au projet du club. Un projet en lequel je crois. Après, le football est étrange. Mais je veux rester ici » commentait-il ce jeudi dans une interview à la Gazzetta dello Sport.

Pour autant, et c’est bien étrange, cette réussite loin de ses frontières passe toujours inaperçue en Espagne. Inaperçue, surtout aux yeux du sélectionneur Vicente Del Bosque, lequel n’a jamais daigné se déplacer en Italie pour le voir à l’œuvre. Alors, une explication au fait que le technicien ne le convoque pas ? Le joueur assure « qu'il n’y en a pas, et qu'il n’y a pas besoin d’en avoir. Il a tout gagné avec son groupe et veut aller de l’avant avec les mêmes hommes. Je vous remercie, vous les Italiens, pour vos compliments à mon égard. En Espagne, je suis perçu différemment qu’à Florence. » Victime collatérale de la plus belle génération de footballeurs qu’ait connu l’Espagne ? Il y a de ça. Mais à 28 ans, le destin de Borja Valero semble d'ores et déjà tracé. Depuis toujours dans l’ombre, il devrait y rester. « C’est égoïste, mais je suis plutôt content que Del Bosque ne le convoque pas. De cette manière, il peut rester ici. J’espère tout de même qu’il ira au Mondial, il le mérite » assurait récemment Montella. Le mérite. L'attribut majeur du sous-coté.

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