Jordan Veretout : « ma fin à l’OM m’a fait un peu de mal »
Désormais joueur d’Al Arabi au Qatar, Jordan Veretout est revenu à notre micro sur son arrivée dans la Qatar Stars League, son adaptation à un football différent, mais aussi sur ses fins d’aventures compliquées de l’OM puis de l’OL.
Nouvelle destination et nouvel élan pour Jordan Veretout. Installé à Doha depuis son arrivée à Al Arabi, le milieu français découvre le quotidien de la Qatar Stars League et ses spécificités, entre rythme différent et nouvelle approche tactique. À l’occasion de notre présence au Qatar, Foot Mercato a pu échanger avec l’ancien joueur de l’OM et de l’OL, qui revient sans détours sur son adaptation au pays, son choix de carrière, mais aussi sur la fin délicate de ses aventures à Marseille puis à Lyon.
«J’avais besoin de changer d’air»
Foot Mercato : après quelques mois au Qatar, comment te sens-tu dans ta nouvelle expérience ?
Jordan Veretout : franchement, ils m’ont facilité l’intégration, ça se passe super bien, comme si ça faisait cinq ans que j’étais ici. Je me sens très heureux, très épanoui, et très content d’être venu ici. Franchement, tout va bien.
FM : d’un point de vue plus personnel, ta famille se plaît-elle également au Qatar ?
JV : ils sont venus directement avec moi. C’était important qu’ils soient avec moi, ils m’ont toujours suivi, et je voulais qu’ils viennent rapidement pour l’école, donc on a fait le nécessaire pour qu’ils m’accompagnent le plus rapidement possible. Mais ça se passe super bien, ils sont très contents, c’est un pays et une ville faits pour les enfants, donc ils sont très heureux. Ils sont dans une école française, donc ils se sont vite intégrés. Je suis content.
FM : Comment analyserais-tu le développement de la Qatar Stars League ?
JV : ils se développent bien, il y a de bonnes équipes et de très bons joueurs. J’étais agréablement surpris parce qu’on m’avait parlé comme quoi, c’était une fin de carrière tranquille, mais pas du tout, on s’entraîne tous les jours. Il y a de l’intensité aux entraînements, on fait beaucoup de gym contrairement à des clubs parfois, donc agréablement surpris, mais en positif. Franchement, je me sens très bien et j’espère rester le plus longtemps possible. Aujourd’hui, je suis un gars épanoui et j’ai envie que ça continue.
FM : comment juges-tu la place du football dans la société qatarie ?
JV : on vient tous les jours ici, donc franchement, on ne regarde pas tout ce qu’il y a autour. Après, il y a la barrière de la langue qui fait qu’on ne comprend pas tout, je ne comprends pas encore l’arabe, mais sinon, c’est sûr que oui, quand on joue devant peu de gens, ça change un peu par rapport à l’Europe. Mais on s’habitue. C’est un pays qui aime bien le foot, mais les Qataris aiment aussi le regarder entre amis chez eux, ce qu’on m’a expliqué. C’est un peu différent, mais après ce qui est bien aussi, c’est que dehors, tu peux sortir tranquillement. Il n’y a personne qui te reconnaît contrairement à l’Europe et ça, c’est le cadre de vie exceptionnel pour la famille surtout.
FM : pourquoi as-tu fait ce choix de t’expatrier au Qatar ?
JV : j’avais besoin de changer d’air vu comment ça s’est terminé à Marseille et après ma saison à Lyon qui n’a pas été comme j’aurais voulu qu’elle soit. J’ai voulu changer d’air et aujourd’hui je suis très content. Je reprends beaucoup de plaisir à jouer et à m’entraîner. Franchement, j’ai fait le bon choix aujourd’hui.
FM : as-tu déjà pensé à l’après-Qatar ? As-tu d’autres challenges en tête ou une idée de reconversion ?
JV : j’ai signé deux ans à Al Arabi. J’ai envie de continuer le plus longtemps possible. Tant que mon corps me le permet, je continuerai à jouer au foot parce que je prends énormément de plaisir. C’est ce que j’aime. Mais c’est sûr que plus j’avance dans l’âge, plus je pense aussi à ma reconversion. Le foot a été toute ma vie. J’espère qu’il le sera encore longtemps. Donc pourquoi pas rester dans le foot ou quelque chose qui se relie avec le football.
«Ma fin à l’OM m’a beaucoup frustré»
FM : peux-tu nous expliquer un peu plus en détail ton départ de l’OL après seulement une saison ?
JV : à Lyon, on ne m’a pas mis à ma place. Ils le savent, je leur ai dit, ils l’ont compris aussi. Il y a aussi Coco (Tolisso, ndlr) qui a fait une super saison. C’est un peu le poste que j’aime, donc je ne peux rien leur reprocher à part que de temps en temps, j’aurais voulu plus jouer à gauche et on m’a mis beaucoup à droite. Je n’ai pas été compris alors que j’avais fait une superbe saison à la Roma grâce à Paulo Fonseca. Malheureusement, je n’ai pas ressenti le même feeling à Lyon. C’est comme ça, mais je retiens que le positif dans tous les clubs où je suis passé. J’ai fait de belles rencontres à Lyon, j’ai travaillé avec des gens extraordinaires aussi. C’est ce qui m’a permis de vouloir changer d’air et venir ici.
FM : et justement à Marseille, raconte-nous un peu cette fin. De l’extérieur, il semblait y avoir un peu d’étincelles entre le club et toi ?
JV : il y a tout simplement un nouveau coach qui est arrivé avec un nouveau projet. On m’a expliqué que je ne rentrerai pas dans ce projet-là, ce que je peux comprendre. Bien sûr, chacun a sa philosophie, chacun ramène quelque chose quand il arrive dans le club. Donc sur ça, je peux comprendre. Ce qui me frustre le plus, c’est comment ça s’est passé. Je ne pense pas que je sois un garçon méchant. Je pense que pendant deux ans, j’ai passé de très bons moments à l’OM. J’ai tout donné. J’ai mouillé le maillot. Sincèrement, j’ai vraiment donné tout ce que j’avais pour l’Olympique de Marseille. Et de finir comme ça dans un loft, ça fait un peu mal. On a une fierté, et c’est sûr que d’être rétrogradé, ça fait mal.
FM : pourquoi as-tu choisi l’OL pour rebondir après cette fin mitigée à l’OM ?
JV : je n’ai pas lâché. J’ai essayé de voir la meilleure opportunité pour moi. C’était un mercato à ce moment-là qui était très difficile aussi, donc ça a pris du temps. Après qu’on a eu Lyon, on a pris la décision de venir. C’est un peu cette frustration-là où je peux comprendre le projet d’un club, d’un nouveau coach qui a un nouveau style de jeu. Tout ça, je peux le comprendre, mais de la sorte, comment ils m’ont éjecté… Après franchement je n’en garde que des bons souvenirs parce que Marseille, c’est une ville de foot, c’est extraordinaire. Si j’avais pu y rester le plus longtemps possible, je serais resté parce que voilà ça respire le foot. Aller au Vélodrome, rentrer dans ce stade, c’est quelque chose d’extraordinaire. Je pense qu’il n’y a pas un stade mieux dans le monde. Rentrer dans un stade tout le temps plein, c’était quelque chose d’incroyable à vivre et je suis content d’avoir pu vivre ça.
FM : tu as joué à Saint-Étienne et à Lyon, mais aussi à Marseille. Plusieurs clubs qui sont rivaux. En tant que joueur formé au FC Nantes, peux-tu comprendre la gronde des supporters rennais et nantais après les arrivées de Quentin Merlin et Valentin Rongier à Rennes ?
JV : je peux comprendre les supporters. Quand on a été dans un club formateur comme Nantes, c’est le derby. Maintenant, il faut savoir que le foot aujourd’hui, il est différent d’avant aussi. Aujourd’hui, pour trouver un club, c’est très compliqué. Il n’y a pas 50 opportunités non plus. S’ils ont fait ce choix-là, c’est que je pense que c’était le meilleur choix qu’ils avaient à ce moment-là. Le foot a changé aujourd’hui, mais je peux comprendre les supporters. Je pense que les clubs, le mercato… Tout est un peu différent.
FM : la saison dernière, le football français a été marqué par une crise institutionnelle historique à tous les étages. Quand tu es un joueur français, ce genre de situations doivent être difficiles à vivre ?
JV : moi, je ne regarde pas tout ça franchement. Ce qui me rend heureux, c’est d’être sur un terrain de foot, de jouer avec mes coéquipiers, de prendre du plaisir. Après avec ce qu’il s’est passé à Lyon, ce problème de multipropriété, cela peut faire cogiter, mais je me concentre uniquement sur le foot. Je pense que mon domaine, c’est le terrain. Il y a des gens plus compétents que moi pour parler de ça, pour parler de ce qui se passe en haut, mais voilà, moi je ne me consacre que sur le terrain, c’est ce qui me rend heureux, c’est ce qui me donne le plaisir de me lever le matin pour jouer au foot avec mes coéquipiers, avec la famille. Je me consacre que sur ça.
FM : malgré ton transfert au Qatar, as-tu encore l’Équipe de France dans un coin de ta tête à quelques mois de la Coupe du Monde ? On a vu Didier Deschamps appeler certains joueurs expatriés au Moyen-Orient ces derniers mois.
JV : ça risque d’être très compliqué depuis que je suis parti de Marseille. La saison que je fais à Lyon n’est pas bonne personnellement, donc c’est sûr que c’est très compliqué. Je suis réaliste. Je me concentre sur ce que je peux donner à mon équipe, mon expérience. Et aujourd’hui, le coach me demande ça. Je vais essayer d’apporter le maximum à cette équipe-là. Je montre aussi mon football. J’ai 32 ans, je ne suis pas rouillé et j’ai envie de jouer encore de longues années au foot.
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