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Marco Otero, OM : «gagner ne suffit pas dans la formation, mais nous sommes sur la bonne voie»

Par Sebastien Denis
11 min.
Marco Otero et Yann Danielou au centre de formation de l'OM @Maxppp

Longtemps snobée à Marseille, la formation redevient doucement, mais sûrement un levier sur lequel compte s’appuyer le club. À la lumière des premiers fruits visibles en équipe première mais aussi des excellents résultats chez les jeunes, Marco Otero, Directeur technique du centre de formation phocéen, explique la nouvelle méthodologie mise en place.

«La formation doit être l’un des piliers du projet. La formation, c’est l’identification au club, l’identification à la ville. C’est très important pour notre identité. Le club doit transmettre ses valeurs et sa culture dès les premiers instants. Et la formation, c’est la porte d’entrée des joueurs de l’Olympique de Marseille de demain. C’est une question d’identité et de culture du club». En juin 2022, Pablo Longoria évoquait un sujet qui lui tenait alors à coeur et qui était un problème bien connu de l’Olympique de Marseille, à savoir la formation. Longtemps considéré, à juste titre, comme l’un des clubs qui sortait le moins de joueurs de son centre de formation (hormis Samir Nasri, Mathieu Flamini, Maxime Lopez ou Boubacar Kamara), le club phocéen, sous l’égide de son président, a effectué un virage à 180 degrés en recrutant deux éléments clés pour porter le projet de la formation marseillaise, à savoir Marco Otero en tant que Directeur Technique et Yann Danielou au poste de directeur du centre de formation.

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En moins de deux ans, les résultats sont déjà visibles. Que ce soit au niveau de la performance des équipes de jeunes (l’OM est actuellement premier de son groupe en U17 après avoir remporté le titre national l’an passé et aussi leader en U19 et encore en lice pour les quarts de finale de la Gambardella face à Rennes), dans l’intégration d’éléments passés par les équipes de jeunes chez les pros cette saison (Mughe, Nadir, Soglo ou Mayoka-Tika), ou dans le contingent marseillais présent en équipe de France chez les jeunes (Sellami, Sternal et Bakola en U17), Pablo Longoria et l’OM ont de quoi voir l’avenir avec une pointe d’optimisme. Pour autant, le projet n’en est qu’à ses prémices.

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«80 à 90 % des joueurs recrutés sont issus du sud de la France, de préférence de Marseille»

Pour Yann Danielou, le directeur du centre de formation passé notamment par Brest, Amiens et l’AC Ajaccio, si les premiers résultats sont encourageants, il faut nécessairement du temps. «Nous avons initié un parcours et un nouveau modèle de formation à l’OM, mais nous ne sommes qu’aux balbutiements de celui-ci et le temps reste la clé de la réussite. Nous avons des signes avant-coureurs qui sont très encourageants mais, pour pouvoir juger le travail dans sa globalité, il faut avoir une horloge du temps un peu plus longue. En attendant, nous faisons de notre mieux au quotidien pour faire monter le niveau d’exigence et d’investissement à tous les niveaux. Il y a une vraie volonté de tous de faire évoluer la formation au sein du club et c’est peut-être la grande différence entre le passé et le présent. On doit continuer dans cette voie pour répondre aux attentes.» Danielou ne croit pas si bien dire.

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Au-delà du renfort d’hommes clés à la formation et d’une nouvelle méthodologie de travail, le club phocéen a investi dans la modernisation des infrastructures de son centre et développé une stratégie de recrutement au niveau de la région marseillaise, et plus généralement du sud de la France, avec un vrai maillage local. Arrivé lui aussi en Provence durant l’été 2022 et précédé d’une solide réputation à l’international dans le domaine de la formation, qu’il doit notamment à son passage à Valence CF en tant que Directeur Technique de l’une des meilleures académies d’Europe selon le CIES, Marco Otero explique : «je dirais que la direction veut désormais faire de la vraie formation, et non pas avoir seulement un centre de formation par obligation. La différence est que tout est mis en œuvre pour créer des conditions de haute performance», souligne l’Espagnol avant d’aller plus loin. «On voit que le club a pris très au sérieux la question de la formation et la projection associée. On le constate de manière concrète au niveau de l’investissement du club dans les infrastructures mais aussi sur la posture claire prise sur la territorialité du recrutement : aujourd’hui, on essaie de faire en sorte que 80 à 90 % des joueurs recrutés soient issus du sud de la France, de préférence de Marseille, parce qu’ils ont une identité locale forte et ont déjà une parfaite connaissance des exigences des supporters, de la ferveur, du poids de l’institution, bref tout ce qui implique de jouer avec le maillot de l’Olympique de Marseille.»

En ce sens, le club met également en place des sessions de media training auprès des équipes de jeunes pour les sensibiliser et pour qu’ils soient en mesure de faire face aux nombreuses sollicitations médiatiques auxquelles les jeunes professionnels de l’OM sont confrontés dès leur arrivée dans le monde professionnel. De même, des rencontres sont organisées avec des anciennes légendes du club comme récemment avec Basile Boli pour leur parler de ce que représente, y compris d’un point de vue historique, le fait de porter le maillot de l’OM. La nomination comme entraineur de la réserve de Jean-Pierre Papin, lui qui est également ambassadeur du club depuis un an et demi et qui éprouvait le besoin de se rapprocher en parallèle des terrains, s’inscrit également dans cette dynamique. En effet, qui mieux que le Ballon d’or 1991 sous le maillot de l’OM pour faire progresser et partager l’histoire et les valeurs du club auprès des jeunes pousses olympiennes ?

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«On veut former des joueurs pros oui, mais aussi des hommes»

Une stratégie et des initiatives qui permettent au club phocéen de se positionner désormais en acteur crédible du recrutement de jeunes talents dans le Sud de la France, chose qui était loin d’être actée ces dernières années. « Tout faire pour convaincre quelqu’un de nous rejoindre, ce n’est pas le bon chemin. En tant qu’Olympique de Marseille, nous voulons voir les choses différemment. À partir du premier contact avec un jeune ciblé, évalué et profilé de notre part, nous souhaitons ressentir chez lui que nous sommes le premier choix», explique Otero. Une stratégie assumée donc pour espérer voir le maximum de jeunes joueurs garnir le groupe pro mais pas que. Au-delà du projet d’amener des joueurs de la région au plus haut niveau, l’OM joue également un rôle d’accompagnement fondamental. «Notre projet Next Generation avec tous nos clubs partenaires, y compris leurs éducateurs que nous formons également, n’est pas un projet de recrutement mais d’accompagnement et de développement à partir de 5 ans pour les plus jeunes dans toute la région. On se laisse ainsi le temps d’observer les jeunes joueurs progresser dans nos clubs partenaires tout en renforçant l’attachement des jeunes du territoire à l’OM.»

«Ensuite, il y a également toute une partie qui se passe en dehors des terrains une fois que le jeune intègre le centre. Parce que l’on veut former des joueurs pros, oui, mais aussi des hommes. Environ 80 % des jeunes d’une génération ne vont pas parvenir à percer au plus haut niveau et vont aller travailler, mais pas forcément sur les terrains de football, pour y gagner leur vie. Il est donc de notre devoir de les préparer aussi bien dans le cadre des études que dans l’accompagnement extra-scolaire. À cet égard, nous organisons régulièrement des initiations ou des activités sur certains thèmes comme la laïcité ou la protection de l’environnement. Nous attirons aussi leur attention sur de nombreux métiers qui existent autour du football… En somme, nous essayons de transmettre des valeurs pour faire de nos jeunes de bonnes personnes. On parle d’un projet d’éducation global, pas seulement du football.»

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«Notre rôle est de mettre à disposition les meilleurs jeunes à l’entraineur de l’équipe pro»

Bien évidemment, l’objectif est de pouvoir intégrer à terme et de manière régulière les meilleurs talents au sein de l’effectif pro de l’OM. «On a une horloge du temps qui est un peu différente, on n’est pas sur l’instantanéité, on est sur ce que va devenir le joueur, son potentiel. Cela demande du temps, de la patience. Des propos validés par Marco Otero. «Bien sûr, les résultats, c’est la première chose qu’on regarde. Mais dès notre arrivée, on a immédiatement dit que gagner ne suffit pas dans la formation. On doit voir la formation dans un contexte plus large. Ce n’est pas seulement le joueur d’aujourd’hui qui nous intéresse, c’est aussi et surtout celui qu’il va être demain et comment il va se développer. L’important pour nous est de donner les outils à nos jeunes pour progresser et être un jour en mesure d’évoluer durablement en pro, si possible à l’OM»*, nous explique l’ancien de Valence.

Et le moins que l’on puisse dire c’est que les premiers résultats concrets sont apparus ces derniers mois en équipe première avec un afflux de joueurs régulier, quasiment une première dans l’histoire du club olympien. «Nous avons créé une forme de passerelle avec les pros, il y a de nombreux jeunes joueurs qui s’entraînent régulièrement avec l’équipe première. Notre rôle est de mettre à disposition les meilleurs jeunes, après c’est l’entraîneur de l’équipe pro qui fait le choix comme ça c’est déjà passé cette saison avec Bilal Nadir, François Mughe, Emran Soglo, Noam Mayoka-Tika qui ont eu l’opportunité de se montrer en compétition officielle après avoir joué avec les équipes de jeunes du club», abonde Otero. Mais le travail est long pour Otero qui ne cesse de réclamer de la patience. «Une chose importante pour que tout le monde puisse travailler sereinement, c’est comprendre qu’on ne peut pas brûler les étapes. La formation à Marseille est une tâche difficile mais pas impossible. Grâce à l’appui de la direction, nous devons poursuivre nos efforts pour instaurer et pérenniser un cercle vertueux au sein du club. Nous avons de nombreux points d’amélioration que nous avons identifiés et sur lesquels nous travaillons. Je me répète, nous avons de très bons résultats chez les jeunes, nous savons que ce n’est pas l’objectif final car cela ne suffit pas, mais nous sommes sur la bonne voie.»

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