Droits TV : le patron de Médiapro, Jaume Roures, se paie la LFP

Par Aurélien Macedo
5 min.
Jaume Roures, le patron de Mediapro @Maxppp

Vainqueur du dernier appel d’offres de la Ligue de Football Professionnel, Jaume Roures et son entreprise Mediapro ont marqué tristement le football français en se désengageant après seulement quelques mois d’activité. Alors qu’un nouvel appel d’offres pour les droits de la Ligue 1 à partir de la saison 2024/2025 est prévu dans une semaine, Jaume Roures a décidé de revenir sur le fiasco Mediapro et régler ses comptes avec la Ligue.

Véritable chimère, la volonté de la part de la Ligue 1 d’atteindre le milliard au niveau de ses revenus télévisés aurait pu provoquer sa perte. Saison 2019/2020, le groupe espagnol Mediapro avait obtenu l’obtention des droits TV de 8 rencontres du championnat français en échange d’un chèque de 850 millions d’euros par an. Une somme importante qui conjuguée à l’argent déboursé par Canal + pour les deux dernières affiches permettait d’entrevoir le milliard de recette pour le football français. Oui, mais voila, cette somme n’est jamais arrivée puisqu’il n’aura fallu que quelques mois de diffusion pour que la chaîne Téléfoot ne soit plus diffusée. Un fiasco retentissant dans le monde télévisuel français qui a depuis permis à Amazon Prime de s’immiscer à un tarif largement inférieur.

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Mais la barre du milliard n’a pas été abandonnée et le président de la LFP - qui n’était pas encore en poste au moment de l’histoire Mediapro - Vincent Labrune estime que la Ligue 1 peut espérer la toucher de nouveau. «On s’en tient au plan d’affaires élaboré en compagnie de CVC avec des revenus audiovisuels globaux aux alentours du milliard d’euros. On vise le milliard d’euros, même si le contexte macroéconomique et financier est délicat. C’est peut-être un peu optimiste, mais on a une marge de progression importante sur l’international. En France, c’est un peu plus compliqué, surtout quand l’acteur majeur, Canal+, ne souhaite pas participer. Mais on travaille, on voit des gens» lâchait-il pour [L’Équipe] en juin dernier.

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Jaume Roures ne croit pas au milliard d’euros rêvé par la LFP

Quelques mois plus tard et alors que l’appel d’offres va débuter le 12 septembre, soit d’ici une semaine, le président de Mediapro Jaumes Roures estime que Vincent Labrune se berce d’illusions. «Non, je crois que ce n’est pas possible. La situation du marché est difficile. Il faut aussi regarder la situation économique et le rôle de la Ligue 1 parmi les Ligues européennes. On a pu voir en Italie avec l’appel d’offres, où ils demandaient un peu plus d’un milliard et ils n’ont pas abouti à ce résultat. Le processus est toujours en cours. Le marché des droits sportifs est encore dans une situation difficile. En plus, Canal+ a trouvé des vraies alternatives avec le rugby, la Champions League, la F1 et la moto. Ils n’ont plus besoin du football français comme avant. On va voir», a-t-il notamment expliqué dans un entretien pour RMC Sport.

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D’ailleurs sur le milliard espéré par Vincent Labrune, une somme de 200 millions d’euros provenant des droits internationaux est espérée contre les 80 millions d’euros touchés actuellement. Là encore, Jaume Roures est assez pessimiste quant à l’issue : «il faut penser que la situation à l’international, comme avec le championnat d’Italie et en Allemagne, n’est pas très positive. C’est loin d’être réaliste, ce chiffre.» L’homme d’affaires espagnol a d’ailleurs appuyé ses propos en revenant sur le contexte ambiant : «on croyait qu’on était sorti d’une crise économique et sanitaire. La guerre en Ukraine est arrivée. La pandémie a affecté les droits, la guerre et ses conséquences affectent aussi les droits. Ce n’est pas une situation spéciale de la Ligue française, c’est une situation globale qui n’est pas favorable. Il faut ajouter à cela les problèmes entre Canal et la Ligue et prendre en compte le retour d’expérience d’Amazon sur les trois dernières années.»

Jaume Roures règle ses comptes

Jaume Roures n’a d’ailleurs pas fermé la porte à un retour de Mediapro sur la scène audiovisuelle française. Cependant, cela ne sera pas aux conditions réclamées actuellement par la LFP : «on ne déposera pas d’offre, ça c’est sûr. La France n’est pas terminée pour nous. Nous avions un contrat de 850 millions d’euros par an et une pandémie est arrivée. On a proposé 650 millions d’euros par an, on nous a condamnés à l’enfer. Je n’avais aucun problème, le problème était peut-être ailleurs. Avec un appel d’offres où on réclame un milliard, je ne crois pas avoir ma place pour la Ligue française. Ce n’est pas réaliste, on va voir ce que font Canal+ et DAZN. Je ne crois pas que les GAFA participeront à ce processus, ni pour le domestique, ni pour l’international. À mon avis, les acteurs ne seront pas très nombreux.»

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Jaume Roures estime que la Ligue 1 manque d’attractivité pour atteindre le milliard d’euros, surtout pour deux raisons, la stratégie des clubs sur le mercato, mais aussi les horaires de ses rencontres avec notamment le Multiplex de 15h alors qu’en Espagne par exemple, très peu de matches se déroulent en même temps. Il regrette un manque de remise en question des instances qui gèrent le football français : «le modèle du football français est trop basé sur la vente des joueurs. C’est très difficile de constituer une référence si les meilleurs joueurs quittent le championnat au bout d’une saison. Il y a aussi le problème des horaires. La plupart des matches sont joués dans la même tranche horaire en Ligue 1. La crise avec Mediapro en 2020 n’a emmené personne à faire une réflexion sur le football français.»

Enfin, Jaume Roures en a profité pour revenir sur cette rupture entre la LFP et Mediapro, il y a déjà presque trois ans. Il estime notamment que des renégociations étaient totalement compréhensibles par rapport au contexte sanitaire qui avait paralysé l’économie. De plus, il a eu du mal à comprendre les décisions de la LFP qui ont découlé avec l’arrivée d’Amazon et la brouille avec Canal +. L’arrivée de CVC qui a permis de dégager des fonds sur le court terme n’a rien changé au problème selon lui : «l’opération CVC ne résout pas les problèmes de fond, ça résout les problèmes de liquidité pendant une ou deux saisons.» Une prise de parole forte de la part de Jaume Roures qui ne manquera pas de faire réagir alors que l’appel d’offres pour déterminer le prochain diffuseur de la Ligue 1 débutera dans sept jours.

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