PSG : que vaut la nouvelle Atalanta sans Gian Piero Gasperini
Privée de Gasperini mais armée d’un mercato XXL, l’Atalanta version Ivan Jurić débarque au Parc des Princes avec un effectif quelque peu renouvelé et des ambitions intactes. Entre héritage tactique, profondes mutations et début de saison hésitant, la «nouvelle Dea» entend prouver face au PSG qu’elle reste un outsider redoutable sur la scène européenne.
Depuis plusieurs saisons, l’Atalanta s’est imposée comme l’un des clubs les plus fascinants d’Italie, bousculant hiérarchies et codes tactiques sur la scène nationale et continentale. Sous la houlette de Gian Piero Gasperini, nommé en 2016, la Dea est passée du statut d’outsider séduisant de Serie A à celui d’habituée des joutes européennes, capable d’inquiéter les géants et de proposer un football offensif, intense et d’une cohérence collective rare. Pendant quasiment 10 ans, Gasperini n’était pas seulement un entraîneur, mais incarnait le projet sportif, le développement des jeunes et une vision globale allant de la cellule de recrutement à l’identité de jeu, marquée par ses fameux schémas en 3-4-3 et 3-4-1-2, en passant par le centre de formation en constance développement et devenu aujourd’hui l’un des plus performants de la Botte. Son départ pour l’AS Roma l’été dernier, après près de dix années à sculpter une équipe à son image, laisse un vide immense et soulève de nombreuses interrogations quant à la continuité de ce cycle sportif lancé avec l’appui de la famille Percassi, Tony D’Amico et Stephen Pagliuca. Comment préserver ce modèle d’intensité et de verticalité sans celui qui en était l’architecte, alors même que la concurrence en Italie et en Europe s’intensifie ?
En ce sens, la direction sportive a choisi une transition en douceur, en nommant le tacticien croate Ivan Jurić, qui sort de deux grosses désillusions à l’AS Roma puis Southampton en Angleterre. C’est à lui qu’est revenue la lourde tâche de succéder à Gasperini. L’ancien entraîneur du Hellas Vérone et du Torino, formé à l’école du maître où il a été son assistant au Genoa, à l’Inter et à Palerme, a bâti sa réputation sur la reprise et l’adaptation des principes « gasperiniens » : pressing haut, transitions rapides et système à trois défenseurs. Considéré comme l’un des disciples les plus fidèles du technicien piémontais, Jurić n’en reste pas moins doté de sa propre sensibilité tactique, davantage axée sur l’agressivité défensive et l’exploitation de l’axe. À Bergame, le natif de Split hérite d’un effectif déjà aguerri à ces principes et d’un club structuré pour soutenir ce type de football. La question, avant ce choc européen face au PSG au Parc des Princes puis celui contre l’OM au Vélodrome, est donc double : Jurić saura-t-il maintenir l’Atalanta dans le cercle des outsiders redoutés d’Europe ? Et surtout, réussira-t-il à imprimer sa patte sans faire perdre à la Dea son identité si singulière ?
Un été très mouvementé
L’été 2025/2026 a marqué un tournant important pour l’Atalanta post-Gasperini : le club a agi comme une grande institution européenne en consolidant ses forces plutôt qu’en les affaiblissant. Malgré les tensions entourant Ademola Lookman, finalement retenu après des semaines de spéculations, réintégré au groupe et inscrit sur la liste UEFA avant d’être de nouveau mis de côté depuis plusieurs jours, et la vente record de Mateo Retegui à Al-Qadisiyah (près de 70 millions d’euros), la Dea a investi massivement – plus de 100 millions d’euros – pour renforcer chaque ligne. Avec les arrivées de Kamaldeen Sulemana, Nikola Krstovic, Yunus Musah, Honest Ahanor, Nicola Zalewski et le retour de Marco Sportiello, sans oublier le rachat définitif d’Odilon Kossounou, le club bergamasque a adressé des signaux clairs : la transition post-Gasperini ne rime pas avec recul sportif. L’effectif a été élargi et équilibré, avec des profils jeunes et athlétiques capables de s’inscrire dans la philosophie de pressing et d’intensité chère à Ivan Jurić. L’entraîneur croate dispose désormais d’un éventail d’options offensives et défensives bien supérieur à celui de la saison passée, ce qui change profondément la dynamique interne et l’approche tactique.
Par rapport à l’exercice précédent, l’Atalanta présente aujourd’hui un effectif complet, presque doublé poste par poste, ce qui constitue une rareté dans un club réputé pour maximiser ses ressources. Devant, Krstovic vient épauler Scamacca pour éviter la dépendance à un seul buteur et pallier les blessures qui l’avaient plombé l’an dernier la rotation offensive. Au milieu, Musah s’ajoute à De Roon, Ederson, Pasalic et Brescianini, avec la polyvalence supplémentaire de jouer sur l’aile, tandis que la défense offre dorénavant six options solides pour trois postes : Kolasinac, Kossounou, Scalvini (de retour de blessure, mais toujours fragile en témoigne son absence à la dernière trêve internationale avec l’Italie), Hien, Djimsiti et Ahanor. Cette profondeur d’effectif permet à Jurić d’imprimer sa marque tout en gardant l’ossature et les automatismes hérités de Gasperini. Après les turbulences du mercato passées, le technicien croate dispose d’un groupe prêt pour le sprint et l’Atalanta peut se consacrer à l’essentiel, à savoir prolonger sa trajectoire ascendante en Serie A et se présenter face au PSG avec un statut d’outsider armé et crédible sur la scène européenne.
Un début de saison mitigé
Le début de saison 2025/2026 de l’Atalanta est marqué par une certaine frustration. Après un mercato estival très ambitieux et des attentes élevées, la Dea a mis du temps à trouver la voie du succès, concédant deux matchs nuls consécutifs face à Parme et Pise. Ces résultats ternissent légèrement l’enthousiasme suscité par les arrivées estivales et la promesse d’un effectif plus profond et équilibré. Juric doit encore trouver la bonne formule pour intégrer ses recrues et maintenir l’identité de jeu héritée de Gasperini, tout en imprimant sa propre patte : « je pense que nous avons très bien géré toutes les situations. Nous avons eu un coup franc de très loin, et ils ont bien joué. Sur des coups de pied arrêtés comme celui-ci, les choses peuvent toujours mal tourner. En première mi-temps, quand nous récupérions le ballon, nous aurions dû être plus rapides. C’est dommage, car nous nous sommes créé beaucoup d’occasions de but et avons touché le poteau. Lors de ces deux matchs, les choses se sont mal passées pour nous. On ne peut pas travailler tactiquement pendant la pause. On a créé beaucoup de choses, mais on a manqué de chance avec les résultats. Il y a clairement beaucoup de choses à améliorer. J’ai un groupe de jeunes joueurs à fort potentiel qui doivent bien travailler aux côtés des joueurs plus âgés. C’est clair pour moi. Nous avons raté beaucoup de buts, mais mes joueurs peuvent faire mieux avec le temps». Le manque de rythme collectif et d’automatismes se fait sentir : le pressing haut peine à être coordonné, les transitions offensives manquent de fluidité et certains nouveaux venus doivent encore assimiler les principes tactiques exigeants du Croate. Résultat, l’Atalanta restait en quête de sa première victoire officielle jusqu’à dimanche et le match contre Lecce (4-1), une situation inhabituelle pour un club habitué ces dernières années à démarrer fort.
Les pépins physiques compliquent encore davantage cette entame. Ederson, pièce essentielle de l’entrejeu, est déjà écarté pour un mois, ce qui prive l’équipe de son dynamisme et de sa capacité à relier défense et attaque. Scamacca et Kolasinac, eux aussi touchés, fragilisent respectivement le secteur offensif et la stabilité défensive. Cette accumulation d’absences oblige Jurić à bricoler, à tester de nouvelles associations et à faire appel à des joueurs moins expérimentés plus tôt que prévu. Ce contexte explique les performances irrégulières et la difficulté à imposer un rythme constant sur 90 minutes : «on termine sur un match nul. C’était un match avec beaucoup de longs ballons et de coups francs bien tirés pour créer le danger. Ce sont des problèmes. En première mi-temps, on aurait pu jouer bien mieux, plus offensifs et plus rapides. En seconde période, encore mieux. Je suis déçu compte tenu des occasions qu’on s’est créées et du fait qu’on n’a marqué qu’un seul but. Je suis convaincu d’avoir un excellent groupe, très motivé. Ils semblent avoir une belle marge de progression. Toutes les nouvelles recrues sont des joueuses de ce niveau. Une bonne ambiance se crée. Il aurait été préférable de gagner, mais nous avançons et nous nous fixons de nouvelles ambitions. Je n’y peux rien. C’est comme ça. J’espère qu’on marquera plus de buts à l’avenir. Le bon côté des choses, c’est qu’on arrive et qu’on crée. On va maintenant enchaîner sept matchs et à partir de là, on va commencer à réfléchir davantage». Pourtant, le potentiel est là : l’Atalanta a montré par séquences son intensité et sa capacité à se créer des occasions, laissant entrevoir qu’une fois l’effectif complet et les automatismes rodés, la machine pourrait se remettre en marche et redevenir l’outsider redouté qu’elle aspire à rester sur la scène nationale et européenne. Le large succès contre Lecce ce weekend (4-1) commence à installer certains prémices.
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