Vente OM : comment se passe un rachat de club

Par Constant Wicherek
6 min.
Frank McCourt pendant un match PSG-OM @Maxppp

L'éventuel rachat de l'OM par le duo Boudjellal-Ajroudi fait couler beaucoup d'encre. Foot Mercato a décidé, pour évoquer une éventuelle cession, d'expliquer les grandes lignes d'un rachat avec l'aide d'un avocat spécialisé.

Ce mardi, après quelque temps de silence radio, nous apprenions via l'AFP que la banque mandatée par le duo Boudjellal-Ajroudi pour négocier le rachat de l'homme avait pour nom Wingate. Wingate est une banque d'affaires françaises spécialisée dans les petites et moyennes entreprises (PME). Mais, toujours selon le média, une autre banque d'affaires de dimension internationale travaille aussi sur le dossier du club phocéen. Le nom de la banque Rotschild avait été mentionné, ce qui avait été démenti quasiment dans la foulée. Mais comment se déroule un rachat ? C'est la question que nous nous sommes posée à Foot Mercato.

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« Ce qui est probablement particulier pour les clubs de sport, c'est surtout l'aspect valorisation qui nécessite notamment une étude approfondie des contrats, leur durée restante, les clauses spécifiques telles que complément de prix, droit à l'image. Il y a un audit approfondi qui doit être réalisé. La valeur se base notamment sur le résultat de cette analyse. C'est un audit particulier. Ce n'est pas comme si vous achetez une usine qui fabrique des boulons et avec des contrats de vente des boulons. Là, vous regarderiez la pérennité des contrats de distribution, si en cas de changement de contrôle votre acheteur de boulons ou si votre fournisseur de matière première peuvent arrêter leur contrat », nous explique Christian Wolfrom, spécialiste dans les opérations de fusions-acquisitions au cabinet Latournerie-Wolfrom.

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La théorie et la pratique

Sauf que cela ne semble pas si évident que cela de fixer un prix. Selon certaines rumeurs, Frank McCourt voulait environ 250 M€ pour son bien. Mais c'est compliqué d'estimer tout cela de façon certaine : « vous pouvez intégrer des clauses, qui peuvent permettre de faire varier la valeur du bien en fonction de différents critères, cela peut-être la valeur de cessions de certains joueurs ou l'atteinte de certains objectifs. C'est la liberté des parties de réussir à déterminer ce qu'ils souhaitent ».

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Là, nous sommes évidemment dans la théorie. Mais dans la pratique, c'est bien plus compliqué et cette histoire de rachat est un peu délirante. On ne sait pas réellement à quoi sert cette communication à outrance. « Je n'en sais que ce qu'en dit la presse. J'avais entendu que c'était pour se mettre "les supporters dans la poche". En se disant que ça fera peut-être un peu pression, en disant : "j'ai déjà l'argent, j'ai une banque d'affaires assez réputée qui agit". Ceci étant dit, vous pouvez avoir un jeu où tout le monde ne dit pas exactement ce qu'il a ou fait en réalité », explique Maître Wolfrom.

La lettre d'intention

Après avoir annoncé déposer une offre, Mourad Boudjellal est revenu sur ses dires et a évoqué une lettre d'intention. « Il y a un moment où vous faites une lettre : "je vous propose une acquisition à telles conditions". En général, vous mettez un certain nombre de conditions. Cela peut-être un audit satisfaisant ou un audit permettant de vérifier qu'il y a telle ou telle chose. Par exemple, le contrat de Dimitri Payet a été renégocié, est-ce que ça a vraiment été signé, parce que cela à un impact sur mon entreprise », explicite Christian Wolfrom.

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Ce qui semblait aussi assez inhabituel, c'est le fait que l'ancien patron du Rugby club toulonnais a annoncé qu'il n'indiquerait pas de chiffres sur cette lettre d'intention. Est-ce habituel finalement ? « Ça dépend des termes de conditions de la lettre. Dans la lettre, vous demandez le temps d'étudier un certain nombre d'éléments, selon que vous avez ou vous n'avez pas votre financement, vous pouvez préciser que c'est sous condition d'obtention d'un financement. Dans ce cas, cela semble être de dire "je n'ai pas de conditions de financement, donc je vous garantis que mon financement est assuré et que j'ai les fonds pour procéder à l'acquisition de l'entreprise". Après, en général, vous avez une exclusivité », lâche l'avocat.

Non-binding et binding offer

Il existe deux possibilités, ou plutôt deux étapes pour les offres. La première est la non-binding. Cette étape est pour faire une offre, sans que cela engage aucune des deux parties et que finalement tout reste assez ouvert. Il semblerait qu'on soit dans ce type de situation à l'instant où ces lignes sont écrites puisque les potentiels acheteurs, dont on ne connaît pas l'origine pour la plupart, semblent tâter le terrain pour voir si Frank McCourt est vendeur et à quel prix.

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Vient ensuite une seconde étape, le binding offer : « le "binding offer", c'est je fais une offre financée et je propose d'acheter pour 330 millions d'euros plus un complément de prix calculé comme ci et comme ça et vous avez une semaine pour accepter. Si vous dîtes oui, il y a un accord sur le prix et sur la chose. Il n'existe aucune durée légale, ça peut aller vite ». Si on passe ce passage, on peut alors passer aux négociations exclusives.

Les négociations exclusives

Tout d'abord, une question taraudait tout le monde. Est-il obligatoire, légalement, de les annoncer ? « L'annonce de négociations exclusives n'est pas obligatoire, elles peuvent être secrètes. Toutefois, il y a un moment où vous avez intérêt à le dire, parce que ça évite à toute personne de venir négocier en douce et dire qu'elle ne savait pas, avance Christian Wolfrom. Pendant les négociations exclusives, vous discutez du contrat. C'est-à-dire que vous faites des audits, vous vérifiez le contrat de Dimitri Payet, par exemple. Vous vérifiez les contrats aussi sur l'audiovisuel et sur un certain nombre d'autres choses. Vous faites un audit fiscal et un audit social pour vérifier que les cotisations ont bien été payées, que l'entreprise est bien tenue. »

À l'issue de tout cela, rien n'est encore terminé, car il reste quelques passages obligatoires avant l'officialisation d'une cession : « ensuite, vous rédigez un contrat de vente avec une garantie, sur certains de nombre de points, qu'il n'y a pas de contentieux cachés ou que les comptes sont bien tenus. Tout cela prend un certain temps. Après, vous avez aussi le temps de la Ligue de foot, je pense que vous leur donnez un dossier, qu'ils ne vous répondent pas oui ou non le lendemain. Le closing correspond au moment où vous faites la vente de la société. Souvent, avant il y a une promesse de vente et/ou d'achat qui donne le temps de lever un certain nombre de conditions ». Il reste maintenant à connaître le degré d'avancement du clan Ajroudi et si l'équipe de Frank McCourt est ouverte à une cession. Pour rappel, il ne s'est déroulé qu'un mois et demi entre l'annonce de négociations exclusives entre Margarita Louis-Dreyfus et Frank McCourt (29 août 2016) et le passage de l'OM sous pavillon américain (17 octobre 2016).

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