Eliminatoires CM - Europe

Russie, Palestine, Israël : la nouvelle sortie scandaleuse d’Aleksander Čeferin

À la télévision slovène, Aleksander Čeferin a déclenché la polémique. En entérinant l’exclusion des athlètes russes avec la guerre en Ukraine et en ménageant Israël en pleine offensive à Gaza, le président de l’UEFA est accusé d’hypocrisie et de double discours.

Par Valentin Feuillette
4 min.
Aleksander Ceferin, le boss de l'UEFA. @Maxppp

Dans un contexte où la première trêve internationale de la saison coïncide avec la reprise des éliminatoires de la Coupe du Monde 2026, l’entretien accordé par Aleksander Čeferin à la télévision slovène soulève une onde de choc dans le monde footballistique. À l’heure où les joueurs s’apprêtent à reprendre la compétition, le président de l’UEFA adopte une position singulière. Malgré les pressions politiques, il reste partisan d’un principe universel, que tous les athlètes, y compris ceux de Russie, devraient pouvoir concourir, même si leur pays est sanctionné depuis trois ans et demi suite à l’invasion de l’Ukraine. Cette position est perçue, par de nombreux observateurs, comme symptomatique d’une géométrie variable : les Russes sont toujours écartés des compétitions alors que Čeferin reste plus prudent quand la question israélienne est mise sur la table «c’est une question légitime. En principe, je ne suis pas favorable à l’interdiction faite aux sportifs de participer aux compétitions. Dans le cas de la Russie, nous voyons que les athlètes ne participent plus aux compétitions depuis trois ans et demi, et la guerre s’est même aggravée. Je sais que beaucoup d’entre eux s’opposent au régime, mais ils ne peuvent toujours pas jouer. Pour l’instant, c’est notre décision (autoriser Israël dans les compétitions, ndlr). Il m’est très difficile de commenter ce qui pourrait arriver à l’avenir. Mais en principe, je pense que tous les sportifs devraient avoir la possibilité de concourir, et les autres questions devraient être traitées différemment».

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Pourquoi un traitement différencié, qui paraît moins sévère envers Israël que vis-à-vis de la Russie ? Pour les critiques et certains observateurs, cette dissymétrie reflète une hypocrisie flagrante. Un compromis sportif dicté par les envies de l’Occident, dans un moment où les tensions géopolitiques sont plus exacerbées que jamais : Pour être honnête, encore une fois, avec la guerre, Russie-Ukraine, nous avons eu une réaction politique presque hystérique. Nous avons été parmi les premiers à agir, croyant vraiment que le sport pouvait aider à mettre fin à cette tragédie. Malheureusement, la vie nous a montré le contraire. Je dois dire qu’avec la situation en Russie et en Ukraine, il y avait une pression politique super forte. Maintenant, c’est plus une pression de la société civile que des politiciens, parce que les politiciens sont évidemment, quand il s’agit de guerres et de victimes, très pragmatiques. Je ne peux pas dire ce qui va se passer. Il y a des discussions sur tout, mais moi personnellement, je suis contre le fait de mettre les athlètes à la porte», a-t-il détaillé. Cette ambivalence illustre à quel point le football, censé rester en marge des affrontements, se retrouve constamment rattrapé par les tensions géopolitiques.

Une analyse jugée « hypocrite »

Au cours de son entretien, Aleksander Čeferin est aussi revenu sur la banderole « Stop killing children, stop killing civilians », déployée et organisée par l’UEFA lors de l’entrée des joueurs du PSG et de Tottenham pour la Supercoupe d’Europe à Udine, en août dernier : « Vous savez ce qui s’est passé à la fin ? J’ai reçu des lettres de l’organisation populiste extrême d’Israël selon lesquelles l’UEFA est antisémite. D’autre part, des groupes d’extrême gauche et de solidarité pro-palestienne m’ont fait comprendre que ce n’était rien comme message, que c’était juste pour nous laver les mains. Donc, vous savez, dans la vie probablement souvent… Il est préférable de ne rien faire. Nous avons une fondation de l’UEFA pour les enfants. Nous ne vivons pas sur une autre planète. Nous vivons dans ce monde. Si c’était un message politique ? Quiconque pense que les termes employés sont utilisés pour un message politique est un idiot pour moi». L’arrière-plan diplomatique aggrave la perception de cette double morale. Du côté de la géopolitique, l’Europe connaît un tournant : plusieurs pays européens – dont l’Espagne, l’Irlande, la Norvège, la Slovénie et bientôt la France et Malte – reconnaissent officiellement l’État de Palestine. Certains dès septembre 2025 à l’ONU, d’autres, comme le Royaume-Uni ou le Canada, conditionnent leur reconnaissance à des avancées concrètes (élections libres, cessez-le-feu, absence d’annexion, exclusion du Hamas).

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Ces gestes diplomatiques interviennent alors que la Maison-Blanche a récemment organisé des réunions de haut niveau – par exemple, un sommet avec Trump, Zelensky et plusieurs dirigeants européens pour coordonner la pression sur la Russie tout en restant silencieux ou divisés sur la question israélo-palestinienne. Dans ce cadre, la déclaration de Čeferin ressemble à un double discours d’un dirigeant sportif qui souhaite concilier neutralité et pragmatisme, mais qui, face à l’émoi des uns (syndicats de supporters, ONG, mouvements pro-palestiniens et critiques de la normalisation sans conditions), et aux pressions opposées (groupes extrémistes populistes d’extrême droite d’Israël l’accusant d’antisémitisme), finit par envenimer les critiques plutôt que les apaiser. Comme la FIFA, l’UEFA continue de s’abstenir de toute prise de position directe sur le conflit israélo-palestinien, se retranchant derrière la neutralité sportive malgré les pressions croissantes de la société civile et du monde politique.

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