Ligue des Nations : Fernando Santos, l'ingénieur discuté du Portugal

Par Josué Cassé
6 min.
Fernando Santos, le sélectionneur du Portugal. @Maxppp

À l'Estádio Municipal de Braga, le Portugal, en tête de son groupe, reçoit l'Espagne de Luis Enrique, ce mardi à 20h45, pour le compte de la sixième et dernière journée de la Ligue des Nations. Un choc alléchant et décisif pour les Portugais qui tenteront de valider définitivement leur ticket pour le prochain Final Four. Sur le banc de la Seleção depuis 2014, Fernando Santos aura, lui, une nouvelle occasion de faire taire les critiques.

Un titre lors de l'Euro 2016, le premier dans l'histoire de la sélection portugaise. Un nouveau sacre, en 2019, à l'occasion de la première édition de la Ligue des Nations. Oui, le parcours de Fernando Santos à la tête du Portugal est, jusqu'alors, plus que convaincant. Tout du moins sur le plan comptable. Arrivé à la surprise générale sur le banc de la Seleção en septembre 2014, pour succéder à Paulo Bento, celui qui avait emmené la Grèce en quarts de finale de l'Euro 2012 avant de sortir avec l’équipe hellénique en huitièmes de finale de la Coupe du Monde 2014 fait, en effet, l'objet de nombreuses critiques. Une frilosité exprimée par de nombreux observateurs, et ce malgré un bilan largement à l'avantage du technicien de 67 ans.

La suite après cette publicité

Fort de 102 matches à la tête de la formation portugaise - un petit exploit puisqu'il n'existe que 23 autres sélectionneurs dans l’histoire du football à avoir atteint ce palier des cent matches avec une même équipe nationale - Fernando Santos peut, aujourd'hui, se targuer d'une belle ligne statistique avec 64 victoires, 21 matches nuls et 17 défaites. Pourtant, au-delà de l'aspect purement chiffré et du palmarès qui lui accorde d'ores et déjà une place de choix dans le cœur des supporters portugais et dans l'Histoire de cette sélection, le gamin de Lisbonne continue de faire parler. En gagnant sa première compétition internationale avec le Portugal, à savoir l’Euro 2016, puis la toute première édition de la Ligue des Nations, Fernando Santos s'est, sûrement, offert une place indélébile dans l’histoire du football portugais mais n'a pas chassé toutes les réserves exprimées à son encontre. Et pour cause.

À lire D’un camp de réfugiés en Tanzanie, à future pépite du Bayern Munich, la très belle histoire de Nestory Irankunda

Un jeu discuté, des résultats moins probants !

Malgré des débuts tonitruants avec Cristiano Ronaldo et consorts, et ce malgré des prestations collectives parfois plus que discutables, l'ancien joueur d'Estoril entre 1973 et 1987 a, ensuite, malheureusement confirmé ce visage souvent amorphe affiché par la Seleção. Les performances réalisées par le Portugal lors de la dernière Coupe du Monde en Russie (éliminés en huitièmes de finale face à l’Uruguay, malgré un effectif solide sur le papier) mais également à l'occasion du dernier Euro (éliminé en huitièmes de finale par la Belgique après être sorti du « groupe de la mort » en compagnie de la France, l’Allemagne et la Hongrie) confirmaient d'ailleurs cette fâcheuse tendance : un niveau de jeu décevant, des résultats en bernes, et ce malgré un effectif plus que talentueux.

La suite après cette publicité

Porté par un incroyable vivier (Bruno Fernandes, William Carvalho, João Cancelo, João Felix, Ruben Dias, Ruben Neves, Vitinha, Diogo Jota, Florentino Luis, Diogo Leite, Fábio Silva) entourant le quintuple Ballon d'or, Cristiano Ronaldo, Fernando Santos peine, en effet, à imposer son style sur la scène mondiale. Symbole de ces difficultés dans le jeu ? Cette qualification décrochée, au forceps, face à la Turquie (3-1) puis contre la Macédoine du Nord (2-0) pour le prochain Mondial, qui se déroulera au Qatar du 20 novembre au 18 décembre prochain. Placée dans le groupe du Ghana, de l'Uruguay et de la Corée du Sud, la Seleção aura, toutefois, une belle carte à jouer. Pragmatique, fervent défenseur de l'équilibre collectif et prêt à tout pour empocher les trois points, quitte à oublier le spectacle que peut aussi véhiculer le football, Santos a, par ailleurs, su fédérer un groupe.

«Nous avons un objectif et pour l’atteindre, s’il faut oublier de bien jouer, nous le ferons», confiait d'ailleurs Nani (112 sélections, 23 buts) comme pour rappeler que tout le vestiaire portugais avait toujours été acquis à la cause de son entraîneur. Soutenu par ses troupes, l'ancien manager du FC Porto, de Benfica ou encore du Sporting a, cependant, été bien plus chahuté ces dernières années. Tout proche d'être évincé par la Fédération Portugaise à la suite de l’échec de la qualification directe pour la Coupe du Monde 2022, Fernando Santos était surtout ciblé pour ce manque d'allant offensif dans le jeu. Misant d'abord sur une ossature défensive très solide, il s'est, par ailleurs, souvent retrouvé au cœur des critiques pour ses choix. Comment se passer de Ricardo Pereira ou ne pas titulariser, à plusieurs reprises, João Cancelo ? Pourquoi privilégier Danilo Pereira et conforter William Carvalho malgré de nombreuses prestations en dents de scie ?

La suite après cette publicité

Fernando Santos sait se réinventer !

Oui, pendant longtemps, Fernando Santos a fait confiance aux mêmes joueurs en dépit des performances de certains plus jeunes. Une époque qui semble légèrement révolue avec notamment l’intronisation récente de Diogo Costa dans les buts à la place de l’iconique Rui Patricio, mais aussi avec la convocation de Ricardo Horta, de retour après 8 ans sans sélection, et des nouveaux arrivants comme Vitinha ou David Carmo. Capable de se réinventer, Fernando Santos a, ainsi, évité la sortie de route définitive. Plus encore, il a redonné ce peps au jeu portugais. Laissant son 4-1-4-1 pour un 4-3-3 depuis la défaite face à la Serbie (1-2), le tacticien portugais semble avoir trouvé une formule intéressante. Plus compacte au milieu de terrain, la Seleção trouve ainsi de meilleures transitions entre sa défense et ses trois hommes d'attaque.

Résultat, le Portugal peut se féliciter d'avoir trouvé le chemin des filets à 16 reprises lors des 7 derniers matches. Le tout en ne concédant que trois buts. Dernière performance en date, cette superbe victoire acquise, samedi soir, au Sinobo Stadium face à la République Tchèque (4-0). Porté par le doublé de Diogo Dalot, un but de Bruno Fernandes et une réalisation de Diogo Jota, entré en jeu, le Portugal, grâce à la verticalité de son équipe et une très bonne utilisation de la largeur du terrain, se retrouve, ainsi, idéalement placé avant de défier la Roja de Pedri et Gavi. Leaders du groupe 2 de la Ligue A avec deux longueurs d'avance sur leur futur adversaire, les coéquipiers de Vitinha n'auront besoin que d'un match nul pour atteindre le Final Four.

La suite après cette publicité

Présent, lundi après-midi en conférence de presse, Fernando Santos a d'ailleurs montré toute sa détermination avant de croiser le fer avec l'Espagne (une rencontre à suivre en live commenté sur FM). «Je vais dire à mes joueurs que nous allons jouer comme nous le faisons toujours, que nous n'allons pas jouer d'une autre manière juste parce que deux résultats sont possibles». Un discours ambitieux repris, quelques instants plus tard, par la star du PSG, Danilo Pereira : «même si plusieurs résultats sont possibles, cela ne va pas nous empêcher de lutter pour la victoire». Bien décidé à tout mettre en œuvre pour atteindre le dernier carré de cette Ligue des Nations 2022, Fernando Santos a une nouvelle occasion de prouver, à ses détracteurs, sa force de caractère. S'il a, certes, montré avoir assez de fraîcheur pour se réinventer et se remettre en question au cours des dernières semaines, méfiance tout de même car une nouvelle performance décevante au Qatar, cet hiver, pourrait bien sonner la fin de Fernando Santos à la tête de cette Seleção.

La suite après cette publicité

Fil info

La suite après cette publicité