Chris Gadi : « à l’époque à l’OM, j’étais jeune, je me disais que ça allait aller tout seul »

Par Sébastien DENIS
8 min.
Olympique Marseille Chris Gadi N'Kiasala @Maxppp

Ancien grand espoir de l’OM, Chris Gadi a quitté le club phocéen en 2013. Après six années de voyages à travers l'Europe, le milieu offensif de 26 ans a posé ses valises du côté des Petrojet, club de première division égyptienne. Ses regrets sur son passage à l’OM, son expérience en Bulgarie, ses moments de galère au Portugal et sa nouvelle vie sur les bords du Canal de Suez, l’ancien Minot nous raconte son parcours, en toute sincérité.

Quand on est un supporter de l'OM et que l'on a un jour la chance de revêtir les couleurs olympiennes, l'émotion est forcément immense. Ce fut le destin de Chris Gadi. Cet ancien grand espoir du club phocéen, qui a fait ses débuts en pro à 19 ans à l'OM, a longtemps caressé le rêve d'évoluer sur la durée avec le maillot ciel-et-blanc. Mais la jeunesse, un manque d'expérience et les circonstances de la vie l'ont rapidement conduit très loin de la Canebière. En Bulgarie principalement, puis lors d'un court mais douloureux épisode au Portugal. Aujourd'hui, à 26 ans, ce globe-trotter du football coule des jours heureux en Égypte, où il découvre l'Egyptian Premier League depuis la fin du mois de janvier. Et ce supporter invétéré de l'OM, qui a déjà disputé 5 matches de championnat et marqué un but, n'échangerait pour rien au monde cette vie loin de la France.

La suite après cette publicité

FM : il y a 7 ans, tu faisais tes grands débuts en Ligue 1 avec l'OM. Quelle est la différence entre le Chris Gadi de 2011 et celui de 2019 ?

À lire Une légende de l’OM craint le pire pour Paulo Fonseca

CG : je suis plus vieux déjà (rires). Le Chris d’aujourd’hui est beaucoup plus réfléchi, plus posé dans la vie. En enchaînant les matches et en multipliant les expériences, on mûrit forcément plus vite. Quand tu es jeune, tu joues sans y penser, sans réfléchir, avec de l‘instinct. Avec l’âge, tu calcules, tu essaies de réfléchir avant d’agir.

La suite après cette publicité

FM : avec le recul, est-ce qu'il y a des choses que tu regrettes de ton passage à l'OM ?

CG : Oui, je regrette peut-être mon manque de travail avant les entraînements et même après. J’aurais dû plus travailler là-dessus à ce moment-là. À l’époque à l'OM, j’étais jeune, je me disais que ça allait aller tout seul. Mais le football ce n’est pas comme ça. Il faut se battre pour avancer. C’est ça que je dirais aux plus jeunes s’ils me demandent. Il ne faut jamais rien lâcher et travailler, parce qu’il n’y a rien d’autre qui paye que le travail.

La suite après cette publicité

« Aujourd’hui, c’est beaucoup plus facile de jouer dans les clubs de L1 quand on est jeune qu’à mon époque »

FM : depuis ton départ, il n'y a guère que Maxime Lopez et Boubacar Kamara qui ont réussi à percer en venant du centre de formation de l'OM. D'où vient le problème selon toi ?

CG : à l’époque, ce n’était pas la même génération que maintenant. Aujourd’hui, c’est beaucoup plus facile de jouer dans les clubs de L1 quand on est jeune. Les clubs de L1 donnent beaucoup plus leur chance aux jeunes pour mieux les revendre ensuite. Rien que pour nous, à l’époque, pour jouer il y avait devant nous André-Pierre Gignac, Loïc Rémy, André Ayew, Mathieu Valbuena, Morgan Amalfitano. Il y avait beaucoup de monde, de concurrence, c’était compliqué. Juste le fait de s’entraîner avec les pros pour nous c’était déjà un exploit.

La suite après cette publicité

FM : est-ce que tu sentais cette pression autour de toi à cette époque ?

CG : en fait, la pression tu la sens déjà quand tu joues au centre de formation parce qu’à l’OM on doit gagner tous les matches. L’OM c’est lourd. Moi, cette pression, comme j’étais dedans, je ne la ressentais pas vraiment. Quand on me disait de jouer, je jouais. Mais c’est quand je suis parti en prêt à Boulogne-sur-Mer que je me suis rendu compte de la chance que j’avais d’être à l’Olympique de Marseille. Qu’être à l’OM c’était un truc de fou. C’est après que je me suis rendu compte… mais malheureusement, quand j’ai pris conscience de ça, c’était déjà trop tard.

FM : tu as pas mal voyagé depuis ton départ de France en 2013. Était-ce une volonté de ta part ou est-ce que ce sont les circonstances qui ont provoqué ce départ vers l'étranger ?

CG : moi, je voulais partir à l’étranger. À la base, je devais signer à Doncaster en Championship. Mais finalement ça ne s’est pas fait. Et en fin de mercato, je suis parti à Valence à l’essai. À l’époque, le club espagnol me proposait de rejoindre la réserve. Moi j’étais déjà pro, donc ils ne voulaient pas me donner un contrat pro. L’idée, c’était d’intégrer la réserve et si je faisais mes matches, j’allais m’entraîner avec les pros. Mais j’ai refusé. Et comme début septembre je n’avais rien, j’ai eu l’opportunité d’aller en Bulgarie, alors j’y suis allé.

FM : en Bulgarie, au début ça c’est plutôt bien passé d’ailleurs ?

CG : Oui, la première année ça s’est plutôt bien passé. J’ai d’ailleurs eu des opportunités de quitter la Bulgarie. J’ai eu des touches en France, au Portugal, en Suisse, mais je suis resté un an de plus en Bulgarie. Ensuite, j’ai décidé de rejoindre un club de D2 portugaise (ndlr  : l'Atletico Clube de Portugal, un club de Lisbonne).

« Ce que j’ai vécu au Portugal m’a tellement dégoûté du football »

FM : et là, rien ne se passe comme prévu et vous vivez un véritable cauchemar...

CG : Oui, là bas, ça s’est vraiment mal passé. J’ai passé six mois au Portugal sans jouer et sans être payé. Et j’ai décidé de rentrer chez moi, à Paris. Je suis resté toute la deuxième partie de saison sans jouer au football.

FM : c’était une décision radicale quand même ?

CG : Je ne voulais même plus jouer, je ne voulais plus en entendre parler, le foot ne m’intéressait plus, ça m’a dégoûté. Même mes parents n’étaient même pas au courant que je ne voulais plus jouer. Mon père me disait « tu cherches un club quand même ? », je lui disais « oui je cherche », alors que ce n’était même pas le cas. Ce que j’ai vu et ce que j’ai vécu au Portugal m’avait tellement dégoûté. Et finalement, l’agent qui m’avait mis initialement en Bulgarie m’a permis de retrouver un club là-bas et ça m’a permis de rebondir après une année de galère. Cette expérience m’a changé.

FM : après la Bulgarie, te voilà en Égypte. C'est une destination peu commune pour un footballeur français. Comment es-tu arrivé là ?

CG : moi j’étais bien dans mon club en Bulgarie et je n’avais pas prévu de partir, d’autant qu’ils n’étaient pas vendeurs. Mais comme il me restait que six mois de contrat et qu’ils ont reçu une offre d’Égypte, ils sont venus me voir. Je leur ai dit « OK, vous avez reçu une offre, mais moi je n’ai rien reçu », il fallait que je voie si c’était intéressant pour moi. Après, quand j’ai vu ce que les Petrojet me proposaient et que leur objectif était de jouer le maintien en D1 égyptienne, j’ai accepté le challenge. En plus, on ne va pas se mentir, c’était intéressant financièrement. Alors j’ai signé avec les Petrojet pour deux ans et demi.

FM : que penses-tu du niveau du championnat d’Égypte ?

CG : le championnat est d’un très bon niveau, plus élevé qu’en Bulgarie. C’est vraiment intense, très serré. C’est le meilleur championnat d’Afrique. Pour moi, c’était un super challenge, c’est pour ça que j’étais curieux et intéressé à la fois de venir ici. Je voulais voir ce que ça allait donner et pour l’instant je suis satisfait.

FM : que penses-tu de l’ambiance ? La CAN qui est organisée en Égypte approche, les installations doivent être pas mal ?

CG : les infrastructures sont très bien. Quasiment tous les stades ont été refaits à neuf vu que la CAN est organisée ici en juin prochain. Après concernant les stades pleins, ça dépend contre qui tu joues. Si tu joues contre les grosses équipes comme Zamalek ou Al Ahly, c’est toujours plein. Ce sont des équipes qui ont tout le peuple égyptien avec eux.

« Rentrer en France aujourd’hui ? Ce n’est pas du tout d’actualité »

FM : au niveau du temps, ça doit te changer de la Bulgarie ?

CG : ah ça oui, il fait grave beau. Ça se rapproche plus de Marseille, au niveau du climat. J’étais dans le froid en Bulgarie, je prends le soleil maintenant.

FM : à 26 ans, envisages-tu de revenir en France ?

CG : franchement, rentrer en France aujourd’hui, ce n’est pas du tout d’actualité. J’aime bien l’étranger, je me suis habitué à vivre comme ça. Je ne sais pas combien de temps je vais rester à l’étranger, mais rentrer en France, ça ne me paraît pas opportun pour le moment.

FM : et loin de la France, tu continues à suivre l’actualité de l’OM ?

CG : c’est sûr ! Marseille c’est mon club de cœur depuis que je suis tout petit. Je n’ai pas le choix. T’es obligé de suivre. Je suis toute l'actualité du club, souvent sur Foot Mercato d'ailleurs, et quoi qu'il arrivera à ce club, je resterais un supporter !

FM : revenir à l'OM un jour, ça serait possible ?

CG : Revenir à l’OM ? J’ai fait le deuil de tout ça depuis longtemps, maintenant je regarde Marseille de loin. Comme je l’ai dit, je suis redevenu un simple supporter.

La suite après cette publicité

Fil info

La suite après cette publicité