Dunkerque : les coulisses lunaires du départ de Gonçalo Feio après seulement trois semaines
Resté seulement trois semaines à la tête de Dunkerque, le coach portugais Gonçalo Feio (35 ans) est parti après un passage rocambolesque. Habitué aux frasques en Pologne, il a encore étoffé son CV dans le Nord de la France.

«L’USL Dunkerque et son entraîneur principal, Gonçalo Feio, ont décidé d’un commun accord de mettre fin au contrat qui les liait. L’ensemble du club leur souhaite plein succès dans la suite de leur parcours professionnel», annonçait ainsi le pensionnaire de Ligue 2 le 13 juillet dernier pour prévenir du départ de son coach Gonçalo Feio. Nommé précédemment le 20 juin afin de prendre la suite de Luis Castro à la tête du quatrième du dernier championnat, le coach portugais de 35 ans arrivait avec une belle cote lui qui avait été assistant de Marek Papszun au Rakow Częstochowa, avant des passages probants comme numéro un avec le Motor Lublin et le Legia Varsovie. Une réputation solide en Pologne qui est tout aussi controversée sur le plan de son comportement.
Ancien joueur de Benfica qui a pris sa retraite à 17 ans suite à un accident de voiture, Gonçalo Feio a grandi en Pologne où il a su se forger une vraie expérience du ballon rond et ses résultats comme adjoint ou numéro un ont été probants. Il reste d’ailleurs sur un titre en Coupe de Pologne avec le Legia Varsovie. Cependant, ses frasques ont été nombreuses au sein de son pays d’adoption pour le coach portugais. Adjoint de Marek Papszun au Rakow Częstochowa, il a été viré après s’être battu avec ce dernier. Lorsqu’il est devenu numéro un au Motor Lublin, il a réussi la belle performance de promouvoir le club en première division. Néanmoins, son comportement a vite posé question comme l’avait révélé Przeglad Sportowy. Il avait mis de côté son ailier titulaire Leszek Jagodziński (20 ans) après l’avoir réprimandé devant toute l’équipe. Juste derrière, il a perdu un ballon à l’entraînement et l’entraîneur l’a envoyé en réserve. En larmes, il avait été soutenu par ses coéquipiers devant le coach qui était resté de marbre.
Gonçalo Feio n’est pas à son coup d’essai
Juste derrière, le joueur a résilié son contrat et il est semi-amateur en 4e division tout en travaillant comme pompier à côté. Disposant pendant un moment de bonnes relations avec Paweł Tomczyk son président, il a eu une première brouille quand ce dernier lui avait demandé des informations sur la rééducation d’un joueur. Le coach portugais avait pris cela comme une remise en cause de ses compétences. Derrière, la relation s’est dégradée et le coach avait publiquement attaqué son président : «nous sommes probablement le seul club en Pologne où le président est triste après les victoires de l’équipe et heureux après les défaites.» Puis quatre jours plus tard, Gonçalo Feio a envoyé un porte-document dans le visage de Paweł Tomczyk alors qu’il était en pleine dispute avec Paulina Maciążek, la porte-parole du club. Le président l’avait défendu et il avait dû recevoir en pleine tête la colère de Gonçalo Feio. Paweł Tomczyk et Paulina Maciążek ont alors quitté le club alors que Gonçalo Feio était soutenu pour ses bons résultats.
Puis ce fut au tour de son assistant Martin Bielec d’en subir le courroux : «j’ai été humilié devant les autres membres du staff et les joueurs. La façon dont il a exprimé son mécontentement ne pouvait être qualifiée de remarque ou d’instruction. C’était de l’humiliation. Quand notre conflit a dégénéré, j’ai dû quitter l’appartement que le club me louait. Je ne m’y sentais pas en sécurité. Feio, à court d’arguments, a évoqué ses liens avec les supporters du Motor Club, affirmant qu’un seul coup de fil suffirait…» Harcèlement, violence et menaces, les dérives du management de Gonçalo Feio ont installé un climat de terreur au Motor Lublin. La Fédération Polonaise avait dû intervenir avec une enquête, mais elle a finalement été classée sans suite. Au Legia Varsovie aussi, Gonçalo Feio a aussi fait parler de lui pour un scandale de paternité.
L’enfant illégitime de Gonçalo Feio
En effet, le coach portugais a été accusé de s’être soustrait de ses devoirs paternels en ne reconnaissant pas un enfant qu’il aurait conçu. Ainsi la femme avec qui il a eu des relations sexuelles provoquant la naissance de l’enfant l’a attaqué en justice pour ne pas avoir respecté ses devoirs de père. «Ma cliente a attendu des mois que M. Feio se comporte en père et en homme responsable dans cette situation. Elle n’a pas rendu l’affaire publique. Jusqu’à présent, nous avions adressé toute la correspondance à Łazienkowska 3, car c’était son ordre. Cependant, il a cessé de coopérer volontairement et de recevoir du courrier. Nous n’avons pas eu d’autre choix que de rendre l’affaire publique. La dernière fois qu’il l’a reçue, c’était aux alentours des vacances d’été 2024. Nous disposons de preuves privées, mais cette paternité est irréfutable. Sinon, je n’aurais pas osé révéler une telle information et demander à l’employeur du père de l’enfant d’intervenir pour qu’il puisse simplement récupérer la lettre. Si M. Feio remet en question sa paternité, nous pouvons effectuer un test génétique», a notamment déclaré l’avocate Aleksandra Kossakowska dans l’émission de télévision Weszło.
Cette dernière a pointé du doigt le manque d’investissement de Gonçalo Feio dans les procédures de détermination de paternité et d’établissement de pension alimentaire : «il rend difficile pour son enfant de subvenir à ses besoins. Si la paternité et l’obligation de verser une pension alimentaire étaient établies, la mère pourrait se consacrer à l’éducation de l’enfant, car il s’agit d’un enfant qui nécessite des soins particuliers. Dans un contexte où un enfant souffre et se trouve dans une situation précaire, et où sa mère tente depuis plusieurs mois de résoudre les problèmes à l’amiable, sans intervention médiatique, nous ne voulons pas stigmatiser M. Feio. Nous voulons simplement qu’il assume la responsabilité de ses actes.» Une nouvelle affaire judiciaire pour Gonçalo Feio, déjà mis en examen précédemment pour son attaque sur son ancien président Paweł Tomczyk au Motor Lublin qui le fait encourir jusqu’à trois ans de prison.
Dunkerque a découvert le phénomène Gonçalo Feio
Si on rajoute un crachat sur un agent de sécurité lors d’un match contre le Wisla Cracovie, un doigt d’honneur adressé aux supporters de Brondby avec le Legia Varsovie en Conference League, un ballon lancé sur un joueur de Radomiak et une bagarre dans le tunnel juste derrière, le CV de Gonçalo Feio en Pologne est plutôt rempli et il vient de se rajouter quelques lignes en France. Nommé le 20 juin dernier, il n’aura finalement disputé que deux matches amicaux contre Versailles (1-1) et Boulogne-sur-Mer (défaite 5-1), la veille de son départ. Trois semaines où le show Gonçalo Feio s’est mis en place. Exigeant et professionnel puisqu’il arrivait entre 5 et 6 heures du matin, le technicien portugais plaisait pour ses idées offensives avec un dispositif très offensif en 3-2-5. En revanche ses méthodes n’ont pas séduit. «Les joueurs avaient l’habitude d’un Luis Castro dans un management bienveillant, très précis dans ses consignes, mais dans une approche presque familiale. Là, c’était l’opposé», a d’ailleurs confié un représentant de joueur pour L’Équipe.
Multipliant les reproches et proche des insultes envers les joueurs, Gonçalo Freio était sec avec le personnel du club. «J’ai battu Chelsea il y a trois mois (2-1 en Ligue Europa Conference)», a-t-il notamment lancé à un salarié du club. «Rapidement, il y a eu une forme de chape de plomb autour des séances. Un climat hyper négatif. Les joueurs s’entraînaient avec la peur au ventre», a d’ailleurs confié un témoin des événements au quotidien français. Lors de la lourde défaite contre Boulogne, Gonçalo Feio aurait même hurlé ceci en plein match : «on dirait une équipe d’amateurs ! Vous m’avez menti !» Finalement, il a quitté le club et l’adjoint Benjamin Rytlewski a depuis pris le relais, provoquant un soulagement dans le groupe. Le coprésident Demba Ba est d’ailleurs aussi revenu sur cet épisode Gonçalo Feio à Dunkerque.
Deux versions qui s’opposent
«Il n’y a pas de regret à avoir. Nous étions convaincus que Gonçalo avait la capacité de faire encore grandir l’équipe, de structurer encore mieux notre organisation, de développer nos jeunes et de donner, à travers un projet de jeu ambitieux, du plaisir à nos supporters et à nos joueurs, détaille le coprésident. Nous avions étudié avec précision la personnalité de Gonçalo, nous savions que c’était quelqu’un de passionné, de sanguin. Il y avait un risque dont nous étions conscients. Mais, dans nos échanges, nous avions été très clairs sur des notions essentielles d’unité et d’humilité. Avec un pacte moral qu’il avait accepté. J’ai voulu croire en lui. Cela m’a donné tort. Mais je ne veux pas condamner un homme. Chacun a ses traumas. Il venait en connaissance de cause et nous avions agrandi son espace de travail pour qu’il se sente à l’aise», a notamment déclaré Demba Ba à L’Équipe.
De son côté, Gonçalo Feio a aussi décidé de s’exprimer à l’agence de presse portugaise Lusa : «j’ai mes propres critères et ma propre éthique de travail. Ce qu’on m’a dit, ce à quoi je m’attendais et ce que j’ai réellement constaté sont deux choses différentes. C’est pourquoi j’ai demandé la résiliation de mon contrat. J’entretiens de bonnes relations avec le club et le directeur sportif. Nous avons simplement des exigences différentes à différents niveaux, et je préférerais y mettre fin maintenant. Je pense que je vais devoir attendre. Mais je préfère cela. Le projet n’avait pas les mêmes ambitions que moi, et quand cela s’est produit, c’était la meilleure décision, même si c’était très difficile.» Gonçalo Feio un personnage assez singulier qui n’aura finalement pas eu le temps de laisser sa trace dans le football français.
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