Entretien avec… Stéphane Porato : « Cela devait se faire avec Chelsea… »
L'éternel débat entre Steve Mandanda et Hugo Lloris pour le poste de numéro un en équipe de France prouve à quel point la France dispose d'un réservoir de gardiens de haut niveau. Et cela ne date pas d'hier ! Stéphane Porato (36 ans) en est un parfait exemple. Formé au Racing 92, le portier a grandi à Toulon (1992-1993) puis à l'AS Monaco (1993-1998) dans l'ombre de Fabien Barthez avant d'exploser du côté de l'Olympique de Marseille (1998-2000) et de gagner sa première et unique cape en Bleu à ce jour (en 1999 contre la Croatie). S'en suivent des passages plus ou moins réussis à Monaco (2000-2005), Créteil (prêt en 2003), Ajaccio (2004-2006) et Alavès (2006-2007). Pour son dernier challenge, le natif de Colombes a participé à l'extraordinaire épopée de Xerez en Segunda Division, promu surprise cet été en Liga. Sans club depuis, Stéphane Porato espère pouvoir trouver une nouvelle formation avant de raccrocher définitivement. Pour FootMercato, il est revenu sur les principaux épisodes de sa riche carrière et a fait part de ses aspirations futures.
FootMercato : Tout d'abord, comment allez-vous ?
Stéphane Porato : Tout va bien, mis à part le fait que je ne pensais pas terminer comme ça.
FM : Votre actualité, c'est donc la retraite forcée...
SP : Pour l'instant, c'est un peu ça. Mais quand on se sent bien physiquement et que tout le monde vous dit que vous pourriez encore jouer, forcément on espère trouver quelque chose. Mais à mon âge et vu la conjoncture, si je ne trouve pas quelque chose rapidement, c'est-à-dire d'ici le mercato d'hiver, ça va être difficile de continuer. Il faut aussi être réaliste.
FM : Avez-vous eu des offres lors du dernier mercato estival ? Si oui lesquelles ?
SP : Il y a eu des trucs dans l'air. Mais cela ne s'est pas concrétisé. Du coup, on attend et à force d'attendre, on reste en plan ! J'avais des contacts avancés surtout avec Arles Avignon. Au départ, j'étais très intéressé par le projet qui était sympa. Mais cela ne s'est pas fait, car d'autres gardiens se sont présentés sur le marché et l'entraîneur a finalement choisi quelqu'un d'autre.
FM : Êtes-vous déjà en contact avec certains clubs pour cet hiver ?
SP : Moi personnellement, je n'ai aucun contact, mais j'ai mon agent qui bosse et j'espère que cela donnera quelque chose. De mon côté, je continue à m'entraîner au cas où. Je fais l'effort jusqu'à fin décembre. Mais si d'ici là je ne trouve rien, je pense que je raccrocherai les crampons comme on dit dans le milieu.
Un dernier défi ?
FM : Est-ce que vous avez une préférence pour une dernière expérience ?
SP : Je n'ai aucune préférence. Cela fait pas mal d'années que mon unique objectif, c'est de jouer. Je pourrai jouer en France, en Espagne, en Italie, en Inde, n'importe où ! Je prends du plaisir quand je suis sur le terrain. Le seul truc qui me fait kiffer, c'est d'être sur le terrain. Mon objectif premier, c'est de jouer et de prendre du plaisir.
FM : La saison passée, vous avez participé à la montée de Xerez en Liga. Pouvez-vous nous parler de cette expérience en Espagne ?
SP : Sur le plan personnel, ça a été une expérience mitigée parce que la dernière saison je n'ai pas beaucoup joué. Sur le plan collectif, ça a été une année incroyable. On a commencé la saison, on n'était que 13 à l'entraînement. On a fait une préparation incroyable, parce qu'on s'est arrêté 9 jours ! On n'était pas payés et qu'on ne savait pas si le club allait continuer. Donc on a eu des vacances en pleine préparation ! On a repris en ne sachant pas où on allait, ni ce que ça allait donner. On s'est dit que si on se maintenait ça serait déjà super. Et puis, on a commencé à gagner, à enchaîner les victoires et on s'est rapidement retrouvé en tête du championnat. On a plus lâché jusqu'à la fin. Une saison incroyable. Je pense que beaucoup de connaisseurs nous voyaient descendre en Segunda B (ndlr : 3e division espagnole) et contre toute attente on a tenu avec un groupe restreint, mais un bon groupe. On a écrit l'histoire du club parce que c'était la première fois que le club montait en Liga. Cela a été un moment extraordinaire de ma carrière, il fallait être là pour le vivre.
FM : Êtes-vous toujours en contact avec les membres de l'équipe ? Pensez-vous qu'ils peuvent se maintenir ?
SP : J'habite toujours dans la région, donc je suis toujours en contact avec mes anciens coéquipiers. Sincèrement, je ne pense pas qu'ils puissent se maintenir, mais on ne sait jamais. Ils sont sur une dynamique de « miracles », donc pourquoi pas ! Maintenant, de ce que j'ai vu, cela va être compliqué. Mais je sais qu'il y a de bons joueurs, un bon état d'esprit et tout ça peut faire la diff' à un moment donné.
L'Espagne, un moment fort
FM : N'est-ce pas un peu compliqué de jouer en deuxième division espagnole après avoir connu les soirées de Ligue des Champions ?
SP : Pas trop, car la deuxième division ici en Espagne est d'un meilleur niveau qu'en France. Pour une simple raison, c'est que les bons joueurs qui ne jouent pas en Liga n'hésitent pas à venir jouer en Segunda. En plus de cela, il y a un engouement extraordinaire. L'année dernière, on avait entre 18 et 20 000 spectateurs de moyenne. C'est très, très agréable de jouer à ce niveau.
FM : Vous avez fait vos débuts à Toulon, puis vous avez rejoint Monaco, mais c'est à Marseille que vous explosez véritablement. Quel est votre meilleur souvenir à l'OM ?
SP : Ma première saison (1998/99). Celle où l'on termine deuxième en championnat (ndlr : derrière Bordeaux) et on arrive en finale de Coupe de l'UEFA (ndlr : défaite face à Parme). On avait un groupe extraordinaire, une ambiance incroyable et des mecs super. Toute cette saison-là a été un pur plaisir.
FM : Que pensez-vous de l'OM de Didier Deschamps ?
SP : Je ne me tiens pas forcément informé, même si je suis un peu mes anciens clubs. D'après ce que j'ai vu, c'est pas trop mal. De toute façon, avec l'OM, ça n'est jamais assez bien ! Le problème, c'est que l'on attend beaucoup trop de ce club. Apparemment, ils ont fait un gros recrutement. Il leur faut un temps d'adaptation. Un groupe ne se forme pas en quelques mois.
Les Bleus, un goût d'inachevé
FM : Le club phocéen vous a permis de découvrir l'équipe de France. Avez-vous été surpris d'être sélectionné à l'époque ?
SP : C'est arrivé très rapidement. Mais ça allait avec le contexte, l'OM marchait super bien et j'étais sur un nuage.
FM : Pensiez-vous pouvoir vous imposer en Bleu ?
SP : Je pense que j'aurais pu. Il y a deux ou trois moments clés que j'ai ratés en club qui ne m'ont pas permis de rester en sélection. C'est forcément un petit regret quand on a goûté à quelque chose et qu'on vous le retire.
FM : À propos de l'équipe de France, êtes-vous confiant pour les barrages face à l'Irlande ?
SP : J'ai pas mal d'anciens coéquipiers dans l'équipe et j'espère sincèrement qu'ils vont se qualifier. Ils ont réussi à accrocher les barrages, ce n'est pas pour rester à la porte. La France avec son potentiel de joueurs, ça me paraît invraisemblable qu'elle ne soit pas à la Coupe du monde.
FM : Après Marseille, vous revenez à Monaco. Et alors que vous êtes au sommet et que l'on vous annonce comme l'avenir de l'équipe de France, votre carrière bascule et vous jouez moins. Comment expliquez-vous ce creux ?
SP : La première saison où je suis revenu à Monaco, je n'ai pas fait une grande saison. L'équipe non plus, mais moi sur le plan personnel je n'ai pas vraiment été bon. Tout aurait pu changer si Claude Puel était resté au club, car je sais qu'il avait confiance en moi et qu'on avait des rapports particuliers. Mais il a été évincé et Didier Deschamps est arrivé. Il avait avec une certaine idée. Il s'y est tenu et je n'entrais pas dans ses plans. L'orgueil a fait que je ne voulais pas partir de Monaco de cette façon. Mais avec le recul, je me suis rendu compte que les dés étaient pipés dès le début et que tout était joué d'avance.
La belle aventure corse et le rendez-vous londonien manqué
FM : Vous quittez l'ASM pour rejoindre Ajaccio, un club familial où vous semblez vous épanouir puisque vous disputez deux saisons pleines. Malheureusement, votre aventure en Corse se termine sur une relégation. Quel bilan dressez-vous de vos années à l'ACA ?
SP : Cela a été un des grands moments de ma carrière. J'ai beaucoup marché à l'affectif dans ma carrière. J'ai choisi plusieurs clubs pour vivre des moments forts au niveau relationnel. À l'époque, il y avait Michel Moretti comme président et Dominique Bijotat sur le banc. Leur discours était très clair, très simple et carré : jouer, prendre du plaisir et s'éclater en jouant au football dans une équipe qui, contre toute attente, se maintenait en Ligue 1. J'ai passé deux années merveilleuses. J'avais la possibilité de continuer à Ajaccio même en L2, mais j'ai choisi de partir à l'étranger. Je ne voulais pas finir ma carrière sans avoir connu une expérience à l'étranger. Du coup, j'ai refusé l'offre de prolongation, ce qui avait fait beaucoup de peine aux dirigeants à l'époque.
FM : Peu de gens s'en souviennent, mais vous avez effectué une semaine d'essai à Chelsea fin 2006. Comment avez-vous vécu cette expérience ?
SP : Jusqu'à aujourd'hui, je ne sais toujours pas ce qu'il s'est passé ! À ce moment-là, Petr Cech et Carlo Cudicini s'étaient blessés en même temps et étaient indisponibles pour un certain temps. José Mourinho cherchait un deuxième gardien pour épauler Hilario pendant ce laps de temps. Il n'y en avait pas beaucoup sur le marché qui étaient libres. Mon agent de l'époque avait réussi à dégoter un essai. J'ai dû m'entraîner 4 ou 5 jours là-bas. Cela s'est passé divinement bien. Je ne m'entraînais pas depuis deux mois et pourtant ça s'est passé merveilleusement bien passé. Cela devait se faire avec Chelsea, mais au dernier moment ça ne s'est pas fait et je ne sais toujours pas pourquoi. Tout allait bien, cela passait bien avec Mourinho, j'avais plein de potes que je connaissais dans l'équipe... Mais bon, il y a des choses qu'on ne s'explique pas. Ça a été une parenthèse très sympathique dans ma carrière.
FM : Que peut-on vous souhaiter pour la suite ?
SP : Tout simplement de trouver un club ! Ça serait le top !
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